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lundi, 20 juin 2016

Le Meilleur de Tous [Nouvelles/Thriller]

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Synopsis : L'agent du FBI Gary Chase doit faire équipe avec Vincent Faulk, un policier démis de ses fonctions suite à une forme aigüe de schizophrénie. Vincent s'avère rapidement être la meilleure arme pour capturer Eric Schultz, un dangereux psychopathe, lui aussi schizophrène et arrêté par Vincent quelques années plus tôt.  

Fraîchement évadé, Eric sème rapidement les cadavres derrière lui. Le temps est compté. Le tandem réussira-t-il à neutraliser cet implacable tueur en série avant qu'il ne se volatilise ?

 

1

 

- Qu’est-ce que tu fous là, salope ? Je t’ai déjà dit de me foutre la paix. Ca te plaît de me harceler, c’est ça ? Tu prends ton pied ! Et bah profites-en parce que ça va pas durer !

- Mais à qui vous parlez ? C’est à moi ?

La jeune métisse était terrorisée, mais sa curiosité était devenue plus importante que sa propre survie. Eric la maintenait fermement par la gorge contre la porte du placard de l’entrée.

Il l’avait suivie jusque chez elle. Elle habitait la campagne. Il savait qu’il ne serait pas dérangé. Il tourna la tête en direction de la porte d’entrée.

- Putain, Jimmy, t’avais raison ! C’est vraiment un coin paumé, ici.

- Pas de problème, dit Jimmy.

Assis en tailleur, la casquette baissée, il jouait avec sa fidèle balle de base-ball. Il cessa brusquement de la lancer et jeta un regard noir vers sa gauche.

- Par contre, t’aurais pas dû dire à Jenny où on allait.

Le visage d’Eric se crispa et il suivit le regard du garçon. Une belle rousse le dévisageait avec un air goguenard en feignant de se limer les ongles.

- Hein ? Mais qu’est-ce que tu racontes ?  Je lui ai rien dit. C’est pas moi qui l’ai amenée ici. Tu sais bien que je veux plus la voir. On est plus ensemble. Hein, t’entends, salope ? C’est plus la peine de t’accrocher à moi ! Tu m’as fait croire que tu m’aimais, ça t’a pas suffit ?

La pin-up minauda.

- Mon pauvre Eric, t’es même pas foutu de reconnaître la vérité.

Eric transpirait comme un bœuf, mais c’est à peine s’il s’en apercevait, au contraire de sa victime que la vue des gouttes de sueur rendait plus nerveuse encore. Elle tentait désespérément de déceler une silhouette, une ombre qui aurait témoigné de la présence d’un autre occupant dans la maison. En vain. Elle commença alors à comprendre à qui elle avait affaire. Son cœur devint alors le baromètre de sa peur.

- La vérité ? Quelle vérité ? s’exclama Eric. Il ne réalisa pas non plus qu’il avait resserré son étreinte sur le frêle cou de la métisse. Ses borborygmes ne l’alertèrent aucunement.

La rousse exhala un nuage de fumée pris à une cigarette avant de l’informer froidement :

- Que t’es un putain d’impuissant qui ne sait jouir que de son propre malheur.

Jenny avait parlé avec un total détachement, comme répétant une rengaine.

Ce qui eut le don d’enflammer Eric.

- Quoi ? Moi…Moi, je suis un impuissant ? C’est moi que tu traites d’impuissant ?

Son expression s’altéra. Il libéra sa proie et serra les poings de colère.

- Je t’aimais, Jenny. Je t’aimais comme un fou, mais tu ne m’as pas laissé le temps de te combler. J’avais tellement à te donner. T’as pas idée. Tellement d’amour.

Il releva la tête et la regarda droit dans les yeux. Saturé par les regrets et la nostalgie, il pleurait silencieusement.

- De plaisir aussi.

Jimmy fit claquer une bulle de chewing-gum.

- La gonzesse se tire.

Eric recouvrit sa nature de prédateur en une fraction de seconde. Il fit volte-face. La jeune métisse venait d’ouvrir la porte d'entrée et s’apprêtait à s’élancer au-dehors. Il la rattrapa en un éclair et la plaqua derechef contre la porte du placard avec une violence inouïe.

- Pitié, faites pas ça ! Je ne vous connais pas, je ne vous ai rien fait !

Eric ne l’entendit pas. Il regarda une dernière fois en direction de Jenny, là où sa victime ne voyait qu’un espace vide, terriblement dénué de tout intérêt. Le regard du tueur devint soudain noir comme la nuit.

- Tu vas voir si je suis un impuissant !

 

 

2

 

 

 Gary Chase était sur la route depuis l’aube. Depuis son départ précipité de New-York, il supportait un grand manque de sommeil, de nombreux cafés aussi mauvais que coûteux, quelques chauffards, mais ce qui l’exaspérait par-dessus tout, c’était de devoir traverser presque la moitié de la Pennsylvanie sans trop savoir pourquoi.

Cas de force majeur, s’était-il répété tout au long du trajet en singeant la voix suave de son patron. L’expression avait bon dos. Le repos aussi était un cas de force majeur. Seulement Ted Meyers du FBI n’était pas du genre à se laisser attendrir avec ce genre d’argument.

Gary avait néanmoins réussi à joindre Phil Tretco, le shérif du comté de Tioga, afin d’obtenir des détails supplémentaires sur l’affaire. Tout en roulant en direction de Knoxville, il questionna son interlocuteur par téléphone :

- Mais pourquoi ne pas avoir embauché de la main d’œuvre locale ?

 

Phil Tretco caressa son crâne glabre avant d’indiquer une chaise vide à Gary.

- Nos effectifs sont considérablement réduits en ce moment. Et puis pour ne rien vous cacher, le dossier que je suis chargé de vous transmettre est loin d’être banal. Sans vouloir vous lancer de fleurs, on est pas de taille, ici.

Gary haussa les sourcils de manière hautement comique :

- Quoi ? C’est pas une simple fugue d’adolescent ?

Le shérif sourit avant de poser une chemise en carton devant l’agent.

- Eric Schultz ? fit Gary en feuilletant le dossier. Ca me dit quelque chose.

- Le contraire serait étonnant. Il est connu pour avoir le meurtre dans le sang et le diable dans la peau. Tuer est totalement compulsif chez lui. Il peut tuer n’importe qui, n’importe quand. Isolé ou en public, rien ne l’arrête. Il s’adapte à toutes les situations. C’est un vrai prédateur humain.

- Ce n’est quand même pas un surhomme.

Tretco poussa un soupir qui n’annonçait rien de bon.

- Pire. Il est schizophrène. Le pire cas qu’on ait jamais vu.

- Comment ça ? Vous voulez dire qu’il entend…des dizaines de voix ?

- Une infinité.

- Sur toute une vie, je veux bien le croire.

Tretco fixa Gary droit dans les yeux.

- Non, je voulais dire par jour.

L’agent grimaça, visiblement perplexe.

- Ca veut dire quoi, exactement ?

- Ca veut dire que dans une situation extrême, quand vous, vous n’avez qu’une seule option, lui, il en a à revendre.

- C’est tout ce que vous avez trouvé pour m’encourager ?

Le shérif ne releva pas et Gary regretta une fois de plus que son sens de l’humour soit un humour à sens unique.

- Personne ne l’a jamais arrêté ? ajouta-t-il pour refaire bonne figure.

- Si, un seul homme. C’est justement pour ça que vous êtes ici. Comme je vous l’ai dit, nos effectifs sont réduits. Je vous demande de nous le ramener.

- Qui est-ce ?

- Un flic. Il travaillait sous mes ordres. Il est à la retraite, maintenant. Mais c’est un type encore brillant qui va pouvoir vous filer un sacré coup de main sur cette affaire.

- Pour avoir réussi à arrêter Schultz, ça doit être un génie.

 

 

3

 

 

Gary descendit de son Landcruiser noir et releva le col de son imperméable. La neige s’était remise à tomber. A travers les flocons, il distingua la bâtisse blanche et élégante perdue au fond des bois.

Sympa la maison de retraite, se dit-il. Faudra pas que j’oublie de demander à finir mes jours par ici.

Lorsqu’il lut le panneau d’accueil, il déchanta. Il empoigna son téléphone portable et quelques secondes plus tard Phil Tretco était en ligne.

- Ecoutez Phil, vous avez dû vous tromper d’adresse. Je suis devant un institut psychiatrique.

- Non, ce n’est pas une erreur, monsieur Chase. Vous êtes à la bonne adresse.

Gary déglutit.

- Ok, je commence à comprendre. Vous aviez peur que je refuse, c’est ça ?

- Il y a de ça. Désolé, je ne fais que suivre les instructions de votre supérieur.

- Je savais qu’il m’appréciait, mais à ce point là…Comment s’appelle mon client ? ironisa Gary pour se détendre l’esprit.

- Il s’appelle Vincent Faulk.

- Ce n’est pas un génie, alors.

- D’un certain point de vue, si. Il a le même génie que Schultz. Sauf qu’il est de notre côté.

Gary poussa un soupir.

- Je vois.

 

Quelques instants après, le temps pour Gary d’encaisser ce nouveau choc, il se retrouva en présence de la responsable du Dickinson Mental Health Center, une femme d’une quarantaine d’années, très accorte, mais surtout très réfractaire à l’idée de se séparer de l’un de ses pensionnaires.

- Je suis désolée, monsieur Chase, mais il est hors de question que ce patient quitte notre établissement. Encore moins pour se replonger dans une enquête propre à détruire tout ce que nous avons mis en place depuis des années pour le traiter.

Gary produisit un document avec un geste et un sourire qui témoignaient fidèlement de son expérience de cas similaires.

- Le gouvernement des Etats-Unis n’est pas d’accord avec vous, madame. Vous avez d’autres arguments à lui opposer aussi vains que celui-ci ou je peux emmener votre précieux patient ?

 

Lorsque Gary pénétra dans la chambre de Vincent Faulk, un médecin s’apprêtait à lui administrer sa dose de médicaments quotidienne.

Gary observa le patient, un type plutôt banal hormis un embonpoint manifeste et des traits juvéniles, avant de remarquer l’alignement de flacons et de comprimés sur la table. Conscient que la prise du traitement nécessitait plus de temps qu’il n’en disposait, il tendit au thérapeute un sac en papier en souriant jusqu’aux oreilles :

- C’est pour emporter !

 

 

4

 

 

- Vous vous êtes cru dans un fast-food ?

Vincent Faulk regardait le paysage défiler tandis que la voiture filait à nouveau en direction de Knoxville.

- Désolé, dit Gary. Le temps nous est compté.

- J’apprécie beaucoup d’être à nouveau dehors, je ne vous le cache pas, mais ce serait trop vous demander de me dire pourquoi vous m’avez fait sortir ?

- Ca tient en deux mots : Eric Schultz.

Le visage de Vincent se décomposa.

- Il a refait parler de lui ?

- Tout juste. Il s’est évadé il y a deux jours. Hier, le corps d’une jeune métisse a été retrouvé chez elle, près de Philadelphie. Elle a été violée, puis étranglée. On a retrouvé ses empreintes. Il n’a fait aucun effort pour les cacher. Vu son profil, on peut craindre que ce ne soit que le début d’une longue série.

Vincent poussa un soupir à fendre l’âme.

- Et moi qui croyais qu’aujourd’hui était peut-être la promesse d’un bonheur insoupçonné.

- Navré, Vincent. Je suis agent du FBI, pas animateur télé. La bonne nouvelle, ça va être à nous de la fabriquer.

- Je dois vous aider à le remettre en cellule, c’est ça ?

Gary opina.

- Vous l’avez déjà fait, non ? Ce sera un jeu d’enfant. J’ai pas l’habitude d’avoir un partenaire, mais je suis sûr que ça se passera bien.

- Loin de moi l’idée de vous décevoir, mais à l’époque où j’ai arrêté Eric, je n’étais pas malade.

- Justement, maintenant que vous êtes, disons plus proche de lui, vous êtes l’homme idéal pour me seconder sur cette affaire. Encore plus qu’avant.

Vincent n’ajouta rien, mais son expression trahit ses doutes à ce sujet.

- Ok, fit Gary avec un soudain entrain. Alors, comment ça se passe ce phénomène d'illusions ? Par exemple, là, pendant que nous discutons, vous voyez d’autres personnes…je sais pas moi…disons…à l’arrière de la voiture ?

Il fit un signe de la main et adressa un sourire débile au rétroviseur intérieur.

Evidemment, Vincent fut loin de partager la légèreté de son point de vue. Son ton fut assez éloquent.

- Je vois des gens qui ont tous leur place là où je les vois. C’est la perversité de cette maladie.

- Je savais que résumer la schizophrénie à entendre des voix était simpliste. Mais j’avoue que je ne m’attendais pas à ça. Les illusions dont vous êtes victime ne sont pas seulement auditives, alors ?

Vincent opina à son tour.

- Il m’est extrêmement difficile voire impossible de différencier les gens réels de ceux que j’invente. Si nous traversions un carnaval, je verrai des musiciens, des danseurs, des chanteurs, des gens en train de s’amuser, tout comme vous. Mais je verrai aussi des musiciens, des danseurs, des chanteurs et des gens qui s’amusent, mais qui n’existent pas.

- Pourquoi vous les matérialisez ? Je veux dire, qu’est-ce qu’ils vous apportent ces gens imaginaires ?

- C’est évident, un équilibre. Je vois des personnes que j’ai besoin ou envie de voir.

- Je crois que je comprends. Votre esprit fonctionne un peu comme si vous rêviez.

- Oui, il y a de ça. C’est une sorte de rêve éveillé. Sauf que le rêve et la réalité sont étroitement imbriqués au point de ne faire qu’un.

Gary réalisa qu’il était en train de se passionner pour leur conversation. Il avait toujours été curieux, c’est ce qui faisait de lui un agent de terrain efficace. Ce qui constituait l’ombre et la lumière des êtres humains l’avait toujours fasciné au plus haut point.

- Mais si nous partons de ce principe, il vous arrive peut-être de voir des choses que vous ne voudriez pas voir, comme lorsque l’on fait un cauchemar.

- Oui, l’inconscient est loin d’être une science exacte. Il peut m’arriver de rencontrer des personnes qui me fragilisent sur un plan émotionnel.

Le visage de Gary s’illumina comme un sapin de Noël.

- Qui vous fragilisent ? Mais c’est bon, ça !

- Je ne vois pas en quoi.

- Là, vous me décevez, alors. Si certaines de vos visions vous rendent vulnérables, alors il en est certainement de même pour Schultz. J’ai tout son dossier. En l’épluchant, nous trouverons sans doute les éléments propres à susciter cette fragilité chez lui.

- Vous voulez les exploiter ?

Gary arbora son plus large sourire.

- Mieux que ça. Je veux pouvoir les lui faire créer à son insu.

 

5

 

 

Gary avait arrêté la voiture à une station-service, histoire de faire le plein et de se remplir l’estomac. Lui et Vincent s’étaient installés à la table d’une cafétéria. Gary était absorbé dans la lecture du dossier de Schultz, tandis que Vincent observait les autres clients. Il plissa les yeux en dévisageant un routier qu’il lui semblait reconnaître. Puis il se rappela qu’il n’avait pas pris tout son traitement. Il ouvrit le sac en papier et commença à sortir les médicaments. Gary s’en saisit et jeta le contenu par la fenêtre.

Vincent le fusilla du regard :

- Mais qu’est-ce que vous faites ? Vous êtes malade ?

- Moi, non, mais vous, oui. Et je tiens à ce que vous le restiez. On m’a fourni l’arme fatale pour stopper un tueur en série, je n’ai pas l’intention de l’échanger contre un flingue en plastique.

Sous le coup de la colère, Vincent se leva :

- Je ne suis pas une arme ! Je suis peut-être malade, mais je suis encore un être humain. Et je tiens à le rester !

Les clients alentours ainsi que les serveuses furent pour le moins embarrassés. Gary resta imperturbable.

- C’est tout à votre honneur. Il n’empêche que vous allez faire ce que je vous dis. Il n’y a que comme ça que tout se passera pour le mieux. Je vous respecte, Vincent, soyez certain de cela. Vous étiez flic et vous faisiez du bon boulot. Même malade, vous avez encore du potentiel. J’en suis le premier convaincu.

Vincent comprit qu’il était sincère. Il se rassit et calma ses nerfs sur son sandwich. Gary lui ficha la paix et se plongea dans le dossier de leur cible. Après quelques minutes de silence, il acquiesça de contentement, comme s'il avait trouvé le début d'un filon à creuser :

- Vous saviez que Schultz était sorti pendant plusieurs mois avec une prostituée ?

Vincent fit mine de ne pas avoir entendu avant de réaliser que c’était une réaction stupide.

- Oui. Elle s’appelait Jenny Carver. Ca s’est mal terminé.

- Il y a eu rupture visiblement.

- Dans tous les sens du terme. Il a rompu avec elle et lui a brisé le cou. Elle a été sa première victime. A partir de là, ça été l’engrenage.

Gary se désintéressa un instant du dossier et reporta son attention sur son équipier.

- Mais comment l’avez-vous arrêté au juste ?

- Très simplement. Il était encore inexpérimenté et moi je commençais à prendre mes marques en tant que flic. Et j’avais un excellent partenaire.

A ce moment, le visage de Vincent s’assombrit et il se réfugia dans le silence. Gary comprit qu’il n’obtiendrait rien de plus à ce sujet pour le moment. Il reprit sa lecture et son visage s’illumina subitement :

- Voilà, j’ai trouvé une piste ! Ses parents sont morts dans un accident de bateau. Il a été élevé par son grand-père. A la dure, à ce qu’il semble, si son témoignage est vrai.

- Battu ? s’enquit Vincent.

- Oui et pas qu’un peu. On aurait presque pitié.

- Pas de fumée sans feu.

- Donc imaginons que nous soyons en sa présence, est-ce que vous pensez qu’en évoquant son grand-père, en lui rappelant les tortures qu’il a subi, il puisse le matérialiser et se trouver dans un état de fragilité tel que ceux que vous avez pu connaître ?

- Il est raisonnable de le penser. Mais cela ne se fera pas en cinq minutes. Et il faut qu’il soit réceptif, à l’écoute.

- Bah, entre deux meurtres, j’imagine qu’il fait une pause !

Gary réalisa combien sa plaisanterie était d’un goût douteux. Une fois de plus.

- Désolé, ce n’était pas drôle.

- Je ne vous le fais pas dire, approuva Vincent avec un air de reproche. Vous savez, Agent Chase, vous et moi ne sommes pas si différents, finalement.

Gary but son café avant de grimacer de manière équivoque.

- Permettez-moi d’en douter.

Vincent ignora sa remarque :

- Nous avons tous les deux trouvé un subterfuge pour conserver un semblant d’équilibre mental dans un monde où la folie prédomine. Moi, j’invente des gens et vous, vous faites des blagues tordues.

L’agent Chase se contenta de sourire, trop effrayé à l’idée qu’il ait raison.

 

 

6

 

 

Le Landcruiser noir était bloqué par la circulation. La sortie de la station-service était bouchée par les véhicules des routiers, des touristes et des gens de passage, comme eux.

Loin de s’impatienter, Vincent en profitait pour contempler les alentours et surtout les passants. Des gens normaux, pensa-t-il. Enfin, qui lui apparaissaient comme tels.

- Vous voyez cette femme élégante devant nous ?

Voyant que Gary peinait à la repérer, il précisa :

- Celle avec un chignon et un manteau gris.

Gary pinça les lèvres.

- Qu’est-ce qui vous plairait ? Que je vous réponde que je la vois ou que je vous dise que vous l’avez inventée ?

Vincent arbora une mine renfrognée.

- Je préfère que vous ne répondiez pas. Elle est jolie et elle me sourit. Cela me suffit.

- Vous savez, il y a un moyen très simple de savoir si elle est réelle ou pas. Il suffit que vous essayiez de la toucher.

- Vous ignorez que je suis capable de croire que j’ai un contact physique avec mes créations. C’est pourtant précisé dans mon dossier et celui de Schultz. Vous auriez pu bosser un peu plus.

Gary s’amusa de sa réflexion.

- Intéressante perspective. Vous dites que vous pouvez les toucher ou du moins croire que vous le faites ? Alors qu’est-ce qui vous empêche de penser que je ne suis pas l’une de vos créations ?

Vincent lui adressa un sourire narquois.

- C’est vous qui conduisez, non ?

Gary lui rendit son sourire.

- Oui, à moins que vous ne soyez en réalité assis dans votre chambre et que vous imaginiez que nous sommes dans cette voiture en train d’avoir cette passionnante conversation.

- Vous me surestimez.

- J’ai entendu dire que l’esprit humain n’avait pas de limite, pérora Gary.

- Le mien, si.

- Alors espérons que celui de Schultz en ait aussi.

 

7

 

 

 Il était 11h00. La cafétéria était déserte. Eric commanda un petit-déjeuner tardif à une serveuse aguichante. Son poing droit se ferma lorsque ses yeux glissèrent sur la gorge de la jeune femme.

- Oublie-là !

Eric tourna la tête. Jimmy était assis à la table, en face de lui. Il jouait avec sa balle de baseball, la casquette baissée, faisant claquer une bulle de chewing-gum par intermittence.

- Tu m’as suivi ?

Jimmy ne répondit pas. Il se contenta d’indiquer de la tête la voiture de police garée à l’extérieur.

Eric émit une sorte de grognement.

- Jenny et maintenant les flics ! Tu serais pas en train de me porter la poisse, par hasard ?

Jimmy répondit par un claquement de bulle, preuve que du haut de ses quinze ans, il se fichait royalement de l’accusation.

Eric inspecta son environnement. Il fut interrompu dans son travail par une serveuse dont le badge indiquait qu’elle s’appelait Suzanne.

- Bonjour, Monsieur. Je peux prendre votre commande ?

Eric la regarda à peine. Elle accusait un certain âge et la fatigue qui allait avec.

- C’est déjà fait.

- Vous êtes sûr ? On ne s’est pourtant pas parlé.

Eric daigna lever les yeux.

- Votre collè…

Il réalisa simultanément que la serveuse aguichante qui l’avait accueilli avait disparu et que celle qui se tenait devant lui avait une masse de cheveux roux.

Son poing droit se ferma lorsque ses yeux glissèrent sur sa gorge.

Il jeta un regard à Jimmy. Ce dernier releva sa visière. Ses yeux n’étaient pas ceux d’un adolescent. C’était ceux d’un homme pris de folie furieuse. C’était ceux d’Eric.

Eric se jeta sur la serveuse et resserra ses mains autour de son cou. Elle poussa un croassement et commença à gesticuler comme un automate déréglé. Eric la maintint contre le comptoir.

- Tu vas voir si je suis un impuissant !

Une balle siffla à un centimètre de son visage, une autre fracassa une bouteille sur le comptoir.

- Police ! Lâche-là immédiatement et recule, Schultz !

Eric obtempéra lentement. La serveuse s’enfuit sans demander son reste. Eric entendit un policier venir dans son dos.

- Mets les mains sur la tête. Au moindre geste suspect, mon partenaire et moi n’hésiteront pas à t’abattre, compris ?

Schultz opina du chef avant de placer ses mains sur sa tête. A ce moment, la serveuse qui l’avait accueilli apparut derrière le comptoir, face à lui. Elle était baissée et le fixait avec intensité.

- Je ne sais pas ce qu’ils vous reprochent, chuchota-t-elle, mais je suis sûre que c’est une erreur. Du menton, elle indiqua un gros tesson de verre posé sur le comptoir.

Eric la remercia d’un discret hochement de tête.

- Ok, j’ai compris.

Le policier empoigna le bras droit d’Eric pour lui passer les menottes. Eric se déporta sur le côté avec une incroyable rapidité. Il saisit le bras de l’officier et faisant pivot, le jeta contre le comptoir. Le tesson lui perfora le visage dans un bruit atroce et une effusion de sang tout aussi écœurante. Eric se saisit de son pistolet et plaça le corps sans vie devant lui juste au moment où l’autre policier faisait feu.

Jimmy était resté à la table. Il attira l’attention d’Eric.

- Ne tire pas sur lui, tu vas tâcher son uniforme.

Comme d’habitude son ton était monocorde, dénué de toute émotion.

Eric fronça les sourcils. Il jeta un rapide coup d’œil au flic qui le menaçait à l’autre bout de la salle avant de noter qu’ils avaient sensiblement la même corpulence.

- Merci, Jimmy.

Jimmy baissa les yeux et suivant son regard, Eric avisa un couteau à steak abandonné sur la table. Il tira quelques balles avant de s’en saisir. Le policier avait visiblement des scrupules à tirer sur le cadavre de son partenaire. Il se rapprochait, tentant de repérer un défaut dans la cuirasse du tueur. Eric abaissa son bouclier sans crier gare…

- Vise la tête ! encouragea Jimmy.

Le visage d’Eric pâlit.

- Jenny ! Mais qu’est-ce que tu fous là ?

Perplexe, le policier tourna la tête en direction de la belle rousse, évidemment sans parvenir à la voir.

Alors Eric profita de sa distraction pour balancer le couteau avec une mortelle précision.

 

 

8

 

 

Vincent tentait de penser le moins possible à sa future confrontation avec Schultz. Et le fait qu’il ait contracté la même maladie que lui à un degré presque semblable ne pouvait qu’ajouter à son mal-être. Nul doute que s’il venait à l’apprendre, Schultz se ferait une joie de le railler sur l’ironie de son sort.

Gary leva un index pour faire une annonce importante.

- Un tiers des schizophrènes ne passent pas par les phases préliminaires et s’installent rapidement dans leur délire. Le facteur déclenchant est principalement le stress, mais l’origine du trouble est multifactorielle : génétique, environnementale, virale, biologique. La maladie demeure méconnue et le tabou sur les maladies mentales ne facilite pas les choses.

Vincent poussa un soupir long comme le bras.

- Wikipédia ?

Gary était tout sourire.

- Pas exactement. Mais j’ai effectivement vu ça sur le net. Vous savez ce que je crois, Vincent ?

L’intéressé s’abîma dans la contemplation de la route.

- J’ai peur de deviner.

- Je crois que de tous ces personnages que vous êtes capable d’imaginer, aucun ne vous arrivera jamais à la cheville. Vous êtes le meilleur de tous. Vous n’avez pas besoin d’eux. Vous le pensez seulement. Quand vous aurez compris cela, quand vous vous en serez convaincu, je pense que vous serez sur la bonne voie. Celle de la guérison.

Peut-être parce qu’il ne s’attendait pas à de tels mots de la part de l’agent Chase ou que personne d’autre avant lui n’avait su s’exprimer de la sorte à son sujet, Vincent se sentit brutalement ramené à une réalité, à une vérité auxquelles il ne s’était pas confronté depuis longtemps. Il sentit une douleur immense en même temps qu’une enivrante sensation de libération, hélas trop fugitive. Il se rendit compte qu’il pleurait.

Gary lui-même ne put rester de marbre face à la réaction qu’il venait de susciter. Il éprouva de la gêne, de la culpabilité, puis il sut qu’il n’avait fait que venir en aide de la manière la plus simple et la plus naturelle à quelqu’un qui en avait cruellement besoin. Il ressentit alors de la compassion et voulut exprimer sa sollicitude.

Il approcha une main, hésita, puis se ravisa.

De son côté, Vincent s’essuyait rageusement le visage dans l’espoir de balayer d’un seul coup toutes ces psychoses qui lui avaient gâché la vie.

Comme pour les distraire de leur malaise commun, le shérif Tretco choisit ce moment pour contacter Gary.

- Oui, shérif, nous serons là dans une dizaine de minutes. Merde ! Ca s’est passé quand ? Ok, nous allons sur place. A plus tard.

- Accrochez-vous, Vincent !

Gary fit demi-tour et écrasa l’accélérateur sous le regard terrorisé de Vincent.

- Schultz a abattu deux officiers de police dans une cafétéria. Et il a pris leur voiture.

Vincent secoua doucement la tête comme s’il était en train de comprendre quelque chose.

- Alors le prédateur vient de trouver son déguisement.

 

9

 

 

- Ok, merci Phil. Je vous tiens au courant.

Gary se tourna vers son partenaire.

- La voiture de police qu’a volé Schultz était équipée d’un émetteur. Elle a été localisée. Il se dirige vers Winnefield Heights par la 76.

Vincent pinça les lèvres.

- Il est beaucoup trop intelligent pour ne pas le faire délibérément. Il a une idée derrière la tête. Et je le connais suffisamment pour savoir que ce sera pas une bonne idée.

- Moi je crois que comme tous les psychopathes, il est amené fatalement à négliger la prudence au profit de ses pulsions les plus pressantes. Il se fout d’être repéré. C’est même ce qu’il veut, probablement.

- Pourquoi le voudrait-il ? Il est de nouveau libre, non ?

- Sans risques, pas de gloire, non ? Ce qu’il veut c’est être connu pour être reconnu. Il a été étouffé étant enfant, dans tous les sens du terme. Pour lui, tuer c’est sa façon de respirer, d’exister. Mais pour se sentir vraiment vivant, il a besoin que tout le monde le sache en vie. Il veut qu’on sache qu’il tue et qui il a tué. D’où cette apparente négligence lors des meurtres alors que c’est un cerveau brillant, c’est évident. Il n’aurait pas survécu aussi longtemps, sinon.

Vincent émit un sifflement exagéré.

- Jolie analyse. On voit qu’il y a du bagage.

- Mon psy aime beaucoup ce que je fais.

- Votre psy ?

- J’ai vu et entendu des choses, tout comme vous. Des choses que je préfèrerais oublier. J’imagine que je ne suis pas à l’abri, moi, non plus. Je prends des précautions. Je ne veux pas devenir dangereux.

- Ce n’est pas moi qui vais vous décourager.

Gary compris ce qu’il sous-entendait par là.

- Vous n’êtes pas dangereux, Vincent.

- Comment pouvez-vous en être certain ?

- Si l’une de vos visions vous ordonnait de me tuer, vous le feriez ?

- Non.

- Pourquoi ?

- Parce que ma conscience et ma morale me l’interdiraient. Contrairement à ce que beaucoup de monde pense, tous les schizos ne sont pas des fous sanguinaires.

- Je sais. Mais pourquoi Schultz n’est pas comme vous, ou plutôt, pourquoi vous n’êtes pas comme lui ? Vous avez sans doute vous aussi des raisons de passer à l’acte, par colère, par frustration, par rancune. Ce n’est jamais les raisons qui manquent.

- Justement, pas besoin d’être schizo pour en arriver là. Vous êtes bien placé pour le savoir. Des tueurs sans pitié vous avez dû en voir défiler et je suis certain que la plupart d’entre eux étaient considérés comme sains d’esprit. En ce qui me concerne, j’ai trouvé une astuce, un subterfuge. J’ai crée un vide en moi, insondable, une sorte de puits sans fond que je matérialise et dans lequel je déverse toute ma colère, toute ma haine, tout ce que j’ai de plus noir et de plus pesant. Jusqu’à maintenant cela a très bien fonctionné et je pense que c’est ce qui manque à Eric.

- Vous savez, même si je fais tout pour arrêter des types comme lui, je ressens toujours, à un moment ou à un autre, une sorte de compassion et même d’admiration pour eux. Parce que même si leur maladie leur sert d’excuse pour commettre leur crime, il y a beaucoup de souffrance personnelle à la base de leurs actes et ils doivent vivre avec tous les jours.

- Oui, il n’y a pas pire bourreau pour un être humain que lui-même.

- Je vous envie, Vincent.

Ce dernier soupira.

- Ne recommencez pas à être sarcastique. Je commençais juste à vous apprécier.

- Je le pense sincèrement.

- Alors pourquoi ?

- Parce que vous pouvez voir tous les gens que vous aimez quand vous en avez envie.

Vincent pencha la tête et émit un clappement de langue désapprobateur.

- Ils ne sont pas réels, vous le savez bien.

- Peut-être…
Gary reporta son regard sur la route, sans doute pour éviter de montrer ses yeux.
- …Mais ils sont plus supportables que la solitude.

 

10

 

Gary composa un numéro sur sa radio de bord.
- Qu’est-ce que vous faites ? Vous appelez des renforts ?
- Pas vraiment. J’appelle Schultz.
Vincent se figea.
- Quoi ?
- Tretco m’a filé le code de sa voiture. Schultz veut un rapport privilégié avec les autorités ? Il va l’avoir.
Après avoir composé le numéro, Gary tendit le micro à Vincent.
- Quoi, moi ?
Gray sourit.
- Vous pensiez vraiment y échapper ?
Vincent n’avait rien d’un gaulois, mais il eut soudain la sensation que le ciel lui tombait sur la tête.
- Non, pas vraiment.
Gary alluma le haut-parleur.
- Officier Jonathan Taylor, j’écoute.
Lorsque Vincent entendit la voix d’Eric résonner dans l’habitacle, son corps entier trembla. Il dut se faire violence pour parler sans que sa voix ne tremble elle aussi.
- Eric ? C’est Vincent Faulk.
Le visage d’Eric s’éclaira comme un arbre de Noël.
- Vincent ! C’est un plaisir ! A ton tour tu refais surface. Mais attention, cette fois, je suis le pêcheur et tu es le poisson.
Vincent jeta un regard significatif à Gary.
- Je me doutais bien que tu avais une sale idée en tête.
- La vengeance est un plat qui se mange froid. Moi j’ai toujours préféré manger chaud. En prison, j’avais trop le temps de remuer le couteau dans la plaie. Et puis, les médias ont fait leur travail. Il n’y a pas beaucoup d’endroits qui leur échappent, maintenant. L’intimité est devenue une denrée rare en ce monde. On paiera bientôt pour la conserver. C’est ce qu’on fait déjà.
Vincent sentit sa gorge se nouer. Il savait ce que sous-entendait Eric.
- J’ai beaucoup pensé à toi, Vincent. Quand j’ai appris ce qu’il t’était arrivé, plus encore. Rassure-toi, je t’épargnerai le couplet sur l’ironie du destin. Trop facile. En revanche, je frémis d’impatience à l’idée de tout ce que nous allons pouvoir partager bientôt. Surtout ne me réponds pas que nous n’avons rien à partager. Ce serait te voiler la face et tu le sais.
Vincent était comme paralysé. De se sentir tout à coup aussi proche malgré lui du tueur le faisait se sentir à nouveau coupable et peut-être même complice.
Gary dut l’encourager par de grands gestes pour qu’il reprenne la conversation.
- Qu’est-ce que tu veux, Eric ? Me tuer ?
- Non ! Enfin, pas dans l’immédiat. Disons que tes futures réactions seront déterminantes quant à ton avenir. Je savais qu’en m’évadant les autorités viendraient te chercher pour te remettre le pied à l’étrier, avec ta maladie comme porte-étendard. Tu m’as arrêté alors que je faisais mes armes. Depuis, je suis devenu un guerrier complet et accompli. C’est merveilleux tu ne trouves pas. La boucle est bouclée.
Gary s’empara vivement de la radio.
- Et si tu la bouclais justement !
Vincent lui reprit rageusement l’émetteur en le masquant de la main.
- Qu’est-ce que vous foutez ?
- Je joue le rôle du mauvais flic. Vous, il faut qu’il vous aime. C’est primordial. Vous vous souvenez de notre plan ? Son grand-père et tout le reste ? C’est vous qui allez vous en charger. Vous êtes le plus qualifié. Quand il sera en état de faiblesse, alors j’interviendrai.
Vincent opina sans pouvoir se départir d’un sourire sans joie.
- Désolé, Eric, je ne suis pas seul. On m’a imposé un chaperon.
Eric afficha un large sourire.
- FBI ?
- Tout juste.
- Alors toutes mes condoléances. En plus, je parie que c’est un vrai connard.
Eric s’esclaffa.
Vincent fixa Gary avec ironie.
- Encore dans le mille.
Gary secoua la tête, navré de sa réponse.
Vincent lui donna un petit coup de coude.
- Vous voulez passer pour le mauvais flic, oui ou non ?
- Bon, dit Eric, passons aux choses sérieuses. Il faut qu’on se voie.
- Où et quand ?
Eric jeta un coup d’œil à la carte posé sur le siège du passager. Un pistolet était posé dessus en guise de presse-papiers.
- Vous êtes où ?
Vincent interrogea Gary de la pointe du menton.
- Dites-lui qu’on est à Tioga.
- Tioga, ça te dit quelque chose ? C’est pas loin de Knoxville, là où j’exerçais.
Eric rit à nouveau.
- Je me rappelle bien de Knoxville. Comment va ce cher Phil Tretco ?
- Il va bien, souffla Gary.
- Il va bien, répéta Vincent. Toujours aussi chauve.
Vincent regretta sa plaisanterie. Le rire d’Eric avait quelque chose d’inquiétant.
- Ok, alors retrouvons-nous à mi-chemin.
- Et c’est où à mi-chemin ? Je m’appelle pas Google Map.
- Très drôle.
Eric prit quelques instants pour consulter sa carte.
- Rendez-vous à Wilkes-Barre. Plus précisément à l’aéroport.
- Un lieu publique ? s’épouvanta Vincent.
- Tout juste.
D’un geste, Gary signifia à Vincent qu’il ne servait à rien de négocier.
- Ok. Dans combien de temps ?
- Dans une heure.
- On n’y sera jamais dans une heure, annonça Gary.
- C’est trop juste pour nous, informa Vincent. On est en pleine campagne, comme je te l’ai dit. Tu connais le coin. La route est merdique, tout en lacets.
- Je vous donne une heure et demie. Si vous êtes pas à l’heure…
- Eric ! C’est pas un jeu !
- Tu te trompes, Vincent. La vie entière est un jeu. Elle nous le prouve tous les jours. Regarde-nous. Regarde ce qu’elle a fait de nous. Tu veux encore la prendre au sérieux, après tout ce que tu as vécu ? La vie se fout de nous. On est ses jouets. Je ne fais que lui renvoyer l’ascenseur.
- Peut-être, mais tu te trompes de cible.
Le ton d’Eric trancha avec le reste de la conversation.
- Ma cible c’est toi pour l’instant et si tu veux pas que j’en change en cours de route, je te conseille de te pointer à l’heure avec ta baby-sitter.
Vincent reposa la radio. Son visage était livide.
- Il a coupé.
- Bien joué, dit Gary.
- Mais pour le délai, ça va être coton !
Gary tapota le volant avec fierté.
- Je vais vous montrer ce qu’elle a dans le ventre. C’est un vrai tout-terrain. Comme moi.
Son regard s’enfiévra. Il sortit de la route et fonça à travers champs.

 

11

 

Vincent vomit son sandwich.
- Ca va mieux ? lui lança Gary depuis l’intérieur du Landcruiser.
L’intéressé secoua la tête.
- Vous m’aviez pas dit que vous étiez malade en bagnole !
Vincent s’essuya la bouche.
- Je ne le suis pas. C’est votre conduite ! Vous vous croyez au Paris-Dakkar ?
Gary s’esclaffa.
- Ok. On va reprendre la route. Mais je vous préviens, ce n’est que partie remise. Il faudra faire autorité sur votre estomac.
Gary sortit de la voiture pour mieux se faire entendre.
- J'ai profité de cette pause impovisée pour mettre Tretco au courant de la situation. J'ai également donner des directives très strictes pour qu'aucun flic de cet état ne se mette en travers de la route de Schultz. Mon patron, Ted Mayers, a appuyé ma demande et autant vous dire que personne ne bronche quand Ted donne un ordre.
Vincent leva le doigt comme s'il allait dire quelque chose, mais trois secondes après, il se penchait de nouveau vers le sol.


Peu après, Le Landcruiser regagna le confort et la monotonie de l’asphalte, pour le plus grand soulagement de Vincent.
- Ca va mieux ? s'enquit Gary.
- Oui. Désolé. C’est pas comme ça qu’on tiendra notre engagement.
- Essayer de dormir un peu. Il doit rester des cachets dans la boite à gants. Vous allez bientôt avoir du pain sur la planche, il faut que vous soyez en pleine forme. De mon côté, je vais tâcher de trouver un « terrain » d’entente.
Gary s’esclaffa, mais son rire s’étrangla.
Il pila brutalement, évitant de peu une collision avec une camionnette qui venait de s’immobiliser sans crier gare.
- Merde, je déteste ce genre d’abrutis !
Vincent était impassible, comme détaché des évènements. Mais ce n’était qu’une illusion.
- Il y a eu un accident.
- Comment le savez-vous ?
- J’ai été flic, n’oubliez pas. J’ai gardé un peu d’instinct.
A son tour, Gary émit un sifflement.
Vincent pouffa de rire.
- Non, je déconne. De mon côté, on voit de la fumée devant.
Pendant que Vincent sortait de la voiture et remontait la file de véhicules, Gary lança un appel pour prévenir les secours si ce n’était pas déjà fait. Lorsqu’il rejoignit Vincent, celui-ci était occupé à convaincre un officier débordé qu’il était en droit d’être là.
Gary brandit son insigne avec l’autorité dont il savait faire montre.
- FBI ! Cet homme travaille avec moi. Nous sommes sur une affaire importante et notre temps est compté.
L’officier grimaça.
- Le leur aussi si les pompiers ne rappliquent pas dans la minute.
Il indiqua du menton plusieurs personnes gisant à terre.
- Alors on va vous aider, déclara Vincent.
L’officier le remercia d’un signe de tête avant de revenir maintenir le périmètre de sécurité menacé par une foule de badauds trop curieux et de véhicules tout aussi encombrants.
Gary en profita pour fusiller Vincent du regard comme s’il avait dit une grossièreté.
- Bon dieu, Vincent ! Si on arrive en retard, Schultz en fera une affaire personnelle. C’est écrit noir sur blanc dans son dossier. Vous le connaissez mieux que moi. Ce type est tout sauf épris d’indulgence. Il nous le fera payer. Et vous savez comment !
A son tour, Vincent extériorisa son écoeurement :
- Ces gens sont en danger et vous ne pensez qu’à Schultz ?!!
- Il y a quatre personnes en danger ici, j’ai bien noté. Mais si nous n’arrivons pas à l’heure au rendez-vous, il y a aura des dizaines de victimes supplémentaires.
- C’est du délire ! On va quand même pas les laisser crever !
- Il y a des services médicaux pour ça. Ils sont déjà en route.
- Vous savez très bien qu’ils arriveront trop tard.
- Vous avez une idée ?
- Je vais en chercher une, moi, au moins.
Il s’approcha d’une des voitures avant d’ajouter sans se retourner :
- FBI ça voudrait pas dire Foutrement Bien Incapable, par hasard ?
- Ne soyez pas grossier. J’ai appris à analyser une situation et à prendre les meilleures décisions quelles qu’en soient les conséquences. Les sacrifices sont toujours à envisager, du moment qu’ils permettent la sauvegarde d’un plus grand nombre.
Vincent s’agenouilla sur la route près d’une des victimes.
- C’est pathétique. On dirait un discours militaire.
- La guerre est ce qu’elle est, mais elle a certainement apporté pas mal d’enseignements à ceux qui l’ont faite.
- Ouais, comme celle de pouvoir crever au nom d’une cause débile qu’ils ne cautionnaient même pas.
- Je vous trouve plutôt étroit d’esprit pour quelqu’un qui a autant d’imagination.
- C’est que vous jugez beaucoup trop vite. Et surtout très mal.
- Merci du sermon. Je tâcherai de m’en souvenir lorsqu’on ramassera les cadavres à Wilkes-Barre.
Sur ces mots, Gary improvisa un pansement pour interrompre l’hémorragie d’un accidenté.
- Connard, mumura Vincent.
La jeune femme dont il jaugeait les blessures revenait de reprendre connaissance.
- Quoi ?
- Madame, tout va bien, je suis de la police. Dites-moi si vous pouvez plier vos jambes et vos bras.
Elle vérifia avant d’opiner.
Lorsque tout sembla en ordre pour l’arrivée des secours, Gary fit un signe de la main à l’officier et se dirigea vers son Landcruiser d’un pas résolu.
Vincent le retint par un bras.
- C’est tout l’intérêt que vous portez à la vie des autres.
- Je me sens impuissant si vous voulez tout savoir. Je ne sais pas gérer ce genre de situations. Je ne sais plus. Demandez-moi n’importe quoi, mais pas ça.
Vincent ne perdit pas de sa hargne :
- Je peux savoir comment vous êtes arrivé au FBI ?
Gary se retourna. Il avait les yeux embués.
- J’ai perdu ma femme dans un accident de voiture. Ca fait presque trois ans. Ca vous paraît assez…significatif.
Viincent allait dire quelque chose lorsque l’officier arriva en courant. Il ne cachait pas sa panique :
- Une autre voiture vient d’être découverte. Elle a été projetée dans le fossé c’est pour ça qu’on ne l’a pas vue tout de suite. Les parents sont saints et saufs, mais leur fille est encore coincée à l’arrière.
- Et je parie que ça va exploser, lança Gary avec une étonnante légèreté.
Vincent le connaissait assez bien maintenant pour savoir que ce n’était qu’une illusion.
L’officier secoua la tête.
- Exactement. Et ce n’est pas tout. Les pompiers sont retardés. Y a eu un autre accident encore plus grave à quelques kilomètres au sud. C’est la merde !
Le trio courut jusqu’à la voiture en question. Gary et l’officier ne furent pas trop de deux pour rassurer les parents éplorés.
Gary revint ensuite aux côtés de Vincent qui avait ramassé une barre de fer et s’en servait comme levier pour ouvrir la portière. Les flammes envahissaient déjà l’habitacle. La situation semblait réellement désespérée. Il n’avait pas le matériel qu’il fallait.
Vincent regarda droit devant lui sur le bas-côté, à un endroit où tous les badauds y compris Gary ne voyait rien qu’un espace dénué de tout intérêt.
- Les secours sont là, ils vont nous dire quoi faire.
Les trois pompiers descendirent du camion. Ils fixèrent Vincent et personne d’autre.
D’un signe de tête, Vincent leur indiqua qu’il était prêt.
- Montrez-moi.
Tour à tour, Les trois sauveteurs montrèrent à Vincent les gestes à faire pour permettre le secours de l’enfant. Comme dans un état second, il donna des directives à Gary, à l’officier, aux parents et même aux badauds. Il avait l’air tellement sûr de lui qu’il ne vint à l’idée de personne de contester ses décisions. Avec discipline et patience, les paires de bras sollicités vinrent à bout du métal, mais le plus dur restait à faire. Vincent enleva la fillette dans ses bras. Elle ne devait pas avoir plus de dix ans. C’était une métisse. Il la posa au sol avec la plus extrême délicatesse comme si elle menaçait de se briser. Il s’agenouilla à côté d’elle. Elle respirait encore, mais son pouls était très faible. Gary s’approcha et murmura :
- Cette gamine va mourir et les secours ne sont toujours pas là. Je sais que ça peut paraître dément, mais je n’ai jamais fait de réanimation. Et vous ?
Vincent regarda en direction du bas-côté. Les trois pompiers et leur camion avaient disparu. Il fouilla alors le cercle de badauds du regard comme dans l’espoir de trouver une aide providentielle. Soudain, il remarqua une femme. Elle portait un manteau gris et un chignon. Elle lui sourit.
Vincent lui adressa un signe de tête. Son visage était méconnaissable. Gary l’observait, médusé.
- Montrez-moi.
La jeune femme s’exécuta aussitôt. Elle simula les gestes précis à faire avec le timing idéal, rapidement relayé par un vieil homme, puis un adolescent. Position de sécurité, bouche à bouche, massage cardiaque.
Vincent les observa avec une application exemplaire, reproduisant les gestes qui sauvent à la perfection, comme si sa propre vie en dépendait. Sa concentration était incroyable et les parents de l’enfant en étaient profondément émus. Mais leur émotion n’avait rien à envier à celle de Gary. A mesure qu’il comprenait d’où venait la formidable inspiration de Vincent, l’agent se sentit soudain tout petit et réellement insignifiant face au génie qui se manifestait face à lui.
Un hélicoptère arriva sur ces entrefaites. Il avait intercepté l’appel de détresse et repéré la fumée. La chance tournait. La fillette fut emportée dans les airs, rejoignant le ciel  en laissant bon espoir sur son état. Vincent avait fait ce qu’il fallait, parce qu’il avait su trouver des alliés à la hauteur. Il commença à regagner doucement la réalité. Son esprit lui paraissait confus. Il ne sut plus très bien ce qui venait de se passer. Gary le comprit rapidement.
- Je n’en reviens pas de ce que vous venez de faire. Vous l’avez sauvée. Sans vous, elle était condamnée. Vous l’avez sauvée. Vous seul l’avez fait. Vous aviez déjà fait des réanimations ?
Vincent regardait autour de lui, tentant de se réapproprier les évènements et surtout son mental. Il ne vit même pas les badauds lui adresser des louanges et des félicitations à qui mieux mieux. Il essaya de repérer une jeune femme avec un manteau gris dans la foule. Mais sans succès.
- Je… Je croyais ne pas m’en souvenir.

 

12

 

Les deux hommes reprirent la route. Ce qui s’était passé avait changé encore davantage la manière dont chacun percevait l’autre.
- Je suis vraiment navré pour votre femme. Je regrette de l’avoir appris dans ces circonstances.
- Il ne faut pas. Je ne vous en aurais sans doute jamais parlé, sinon. Et ça m’a fait le plus grand bien de le faire.
- Alors le psy ce n’est pas que pour le boulot.
Gary opina.
Vincent l’observa avec plus d’intérêt.
- Vous faites souvent des cauchemars, j’imagine.
- Oui.
Puis le regard de Gary changea et il retrouva sa véhémence :
- Vous êtes le parfait opposé de Schultz, déclara-t-il avec un engouement extraordinaire. Il est la mort et vous êtes la vie. Ne laissez jamais personne vous comparer à lui. Vous venez de sauver une enfant d’une mort certaine parce que vous avez vu des gens que personne d’autre n’était capable de voir. Dans votre cas, ce n’est pas une malédiction, ce n’est même pas une maladie. C’est un pouvoir, un don du ciel.
- Merci, ça me touche beaucoup, Gary. Seulement, j’ai des raisons d’être plus objectif que vous. Vous avez vu le côté lumineux, mais je possède aussi le côté obscur, pour vous donner une image qui vous parle.
- Comment ça ? Vous n’avez jamais tué personne que je sache.
Le visage de Vincent s’assombrit. Il se fermait à nouveau comme la fois où il avait évoqué son partenaire dans la cafétéria de la station-service.
Mais cette fois, la curiosité de Gary fut la plus forte :
- Dans quelles circonstances vous avez quitté la police, Vincent ?
- Je crois que c’est facile à deviner. Un schizo dans les forces de l’ordre, cherchez l’erreur.
Tout en disant cela, Vincent haussa les sourcils de manière comique.
Gary faillit s’étrangler de rire.
- En tout cas, vous n’avez pas été viré parce que vous étiez un tueur psychopathe.
- Vous l’avez lu dans mon dossier ?
- Non, je l’ai lu en vous.
- Et vous faites souvent ça ?
- Autant que possible. Ca aide à affiner l’instinct. Les dossiers c’est bien beau, mais c’est souvent incomplet et ça manque…
- D’humanité ?
- Quelque chose comme ça.
- Je ne savais pas que le FBI faisait dans la charité.
- Bien sûr que si. C’est même la raison de son existence.
- Peut-être, mais j’ai toujours pensé qu’il y avait anguille sous roche. Ne le prenez surtout pas mal.
- Je n’ai aucune raison. Moi, je sais pourquoi je fais ce métier.
- Pour les bonnes raisons ?
Gary opina.
Alors Vincent d’ajouter :
- Protéger et Servir et tout le tremblement ?
Nouveau hochement de tête.
- Et bien pour en revenir à mon cas, figurez-vous que je n’étais plus capable de tout ça et c’est pour ça qu’ils m’ont gentiment mis au rebut. Pas besoin de commettre un meurtre à la hache. Il a suffi que mes visions commencent à me distraire un peu trop et j’ai commis une grave erreur avec laquelle je dois vivre.
Voyant qu’il avait toute l’attention de Gary, Vincent, très confiant,  poursuivit :
- Pour vous la faire courte, j’étais avec un collègue, très sympa au demeurant. On aimait bien créer une sorte de compétition entre nous. Un jour, on devait appréhender un suspect dangereux et supposé armé. Au moment critique de l’arrestation, j’ai vu un gros chien noir débouler de nulle part dans l’appartement. C’était un vrai molosse. Sauf qu’il n’existait que dans mon imagination. En fait, j’ai compris plus tard que le stress de l’intervention m’avait fait matérialisé un de mes pires souvenirs d’enfance, Raoul, le chien de garde de mes voisins. J’ai cru qu’il allait nous attaquer. J’ai sorti mon arme et j’ai tiré pour l’effrayer. Ca a tout foutu en l’air. Le suspect nous a repéré et a fait feu. Mon partenaire a été touché à la poitrine. Je suis parvenu à neutraliser le gars, mais le mal était déjà fait. Mon collègue, il s’appelait Fernando, s’en est tiré de justesse. La suite vous la connaissez dans les grandes lignes.
Gary acquiesça.
-Témoignages, rapports d’enquête, entretien psychologique et diagnostic psychiatrique.
- Oui, ça n’a pas traîné. Je crois que mon cas a été bouclé en moins d’une semaine. Du jour au lendemain, je suis passé de jeune recrue prometteuse à l’ennemi public n°1.
- Mais pourquoi vous n’avez pas menti ?
- Mentir ? Pour quoi faire ?
- Pour vous protéger !
- J’étais peut-être schizo, mais j’étais encore lucide et je savais très bien que la seule façon intelligente de me protéger c’était de me faire soigner et dans les plus brefs délais. J’adorais mon métier, Agent Chase, et s’il m’est possible de le reprendre un jour, je serais le plus heureux des hommes.
- Je comprends. Mais personne ne vous a donc soutenu dans cette épreuve ? Vous aviez acquis une réputation quand même.
- On m’a regardé comme un pestiféré, comme si j’allais contaminer tout le central.
- Cela aurait dû rester confidentiel.
- Oui. Mais ça faisait sans doute trop plaisir à certains de me voir exclus du service. Le succès provoque toujours la jalousie de certains, surtout de ceux qui stagnent faute de prendre de réelles initiatives. J’en ai fait les frais.
- Et Phil Tretco ? Il a l’air d’un type honnête et sérieux.
- Il l’est. C’est effectivement le seul qui m’a vraiment témoigné du soutien. Mais ça n’a pas changé grand-chose. Personne ne m’a tendu la main dans ma famille. Je crois d’ailleurs qu’elle n’attendait que ça pour couper définitivement les ponts avec moi. De me sentir aussi seul au monde, ça a probablement aggravé la maladie. Il n’a pas fallu longtemps pour que je commence à voir des gens qui n’étaient pas vraiment là.

 

13

 

Eric roulait à toute vitesse. Il se mit à siffloter. Il se sentait joyeux. Il savait qu’on lui laisserait le champ libre jusqu’à Wilkes-Barre. Il connaissait les rouages de la police et la police le connaissait suffisamment pour savoir de quoi il était capable.
- Il suffirait qu’ils envoient un sniper pour te liquider. Tu y as pensé, mon chou ?
Eric jeta un coup d’œil dans le rétro intérieur. Jenny l’aguichait sur la banquette arrière. Elle était vêtue d’un corsage moulant sa généreuse poitrine et d’une mini-jupe qui laissait entrevoir le galbe de ses cuisses blanches. Eric se souvint de bons moments passés avec elle. Mais cela lui fit plus de mal que de bien.
- Quand est-ce que t’es montée ?
- Elle est là depuis le début, renseigna Jimmy, assis à côté d’elle.
Eric préféra les ignorer tous les deux. Il voulait profiter au maximum de son sentiment de liberté.
Sur la droite, il repéra une jolie fille faisant du stop. Elle était aussi sexy et provocante que Jenny. Ses poings se resserrèrent sur le volant. Il ralentit pour la détailler à sa convenance. Pensant qu’il allait s’arrêter, la fille se fit plus aguichante encore.
- Depuis quand tu t’es pas fait une pute ? Je veux dire, depuis moi ?
Jenny avait délibérément employé un ton détaché, comme si elle parlait de la pluie et du beau temps. C’était sa marque de fabrique, sa signature.
Les mains d’Eric se crispèrent un peu plus sur le volant. Il s’arrêta à la hauteur de l’auto-stoppeuse.
- Ne la prends pas, dit Jimmy avec une autorité toujours surprenante pour son âge.
- Vous commencez vraiment à me faire chier, tous les deux !
Eric redémarra en faisant crisser ses pneus. La fille avait disparu, comme consumé par sa colère.
- On t’a jamais dit que tu l’ouvrais un peu trop pour ton âge ?
Eric jetait des regards courroucés dans le rétro intérieur à l’attention de ses deux passagers.
- T’es pas ma mère, fit Jimmy avec dédain.
- S’il te plait, me parle pas de ta mère. En parlant de pute, en voilà bien une, tiens !
- Tu parles de ta sœur, je te signale.
C’était Jenny. Jenny la chieuse. Eric la détestait quand elle le méprisait et cherchait à le rabaisser à tout prix.
- A mon grand regret, rétorqua Eric. Mais comment t’appelles une fille qui passe son temps dans des palaces à se faire allumer par le premier gigolo venu ? Et pendant ce temps, qui s’occupe de son fils, hein ? Qui s’occupe du petit Jimmy ?
Eric soupira.
- Ca fait peut-être mal d’entendre ça, mais ça vaut mieux que de se voiler la face.
- Je sais très bien m’occuper de moi, dit Jimmy avant de faire claquer une bulle de chewing-gum.
- Ah ouais ? Si c’était le cas, tu serais pas assis à l’arrière de cette caisse avec un tonton en fuite déguisé en flic ! Tu crois pas ?
Le silence de ses deux passagers finit par lui donner raison.
Eric jeta un coup d’œil à sa montre.
- Je commence à doucement me faire chier, moi.
Il plissa les yeux. Quelque chose à environ cent mètres semblait obstruer la route. Il ralentit et son visage se tordit sous le coup d’une vive émotion lorsqu’il comprit ce qu’il se passait.
- Les fils de pute !
Il arrêta la voiture et se passa la langue sur les lèvres. Il y avait six voitures de patrouille et deux fois plus d’hommes. Des policiers en uniforme, armés de 9 mm et de fusils à pompe. Il avait tué deux des leurs. C’était plus qu’une arrestation. C’était une vendetta. Un mégaphone cracha son ultimatum :
- Eric Schultz ! Sors de ton véhicule les mains sur la tête. Tu as dix secondes. Au moindre geste suspect ou si tu n’obtempères pas, nous ouvrons le feu. Il n’y aura pas d’autre avertissement.
Eric sourit. Il redémarra et s’empara de la radio.
- Vincent ?
- Je t’écoute, Eric.
Vincent se tourna vers Gary.
- Pourquoi il nous rappelle ?
Gary se concentrait sur la route, mais cela ne l’empêcha pas pour autant d’ironiser :
- Peut-être que le doux son de votre voix lui manque.
Vincent grimaça.
- Ecoutez-moi bien, toi et ton connard de chaperon. Vous voulez jouer au con avec, moi, alors on va jouer. Mais je peux vous assurer qu’à ce jeu-là, j’ai toujours une longueur d’avance. Vous auriez jamais dû me coller ce barrage. Vous le savez bien. Je sais pas pourquoi vous avez fait ça. Vous croyez vraiment que ça va m’arrêter ? Maintenant c’est œil pour œil. Je vais passer en mode méchant. Surveillez bien la radio, car on va pas tarder à annoncer un massacre en règle. Vous l’aurez cherché !
Eric coupa la communication. Il avait parlé rapidement, sans donner le temps de répliquer à ses interlocuteurs.
Vincent et Gary se dévisagèrent, éberlués, puis Gary se mit à assener de grands coups sur le volant.
- Merde ! Merde ! Merde ! Putain, mais quels cons ! Je leur avais dit de ne rien faire. Ils en ont fait qu’à leur tête ! Maintenant on va payer les pots cassés !
- Il va tous les tuer, dit Vincent en imaginant très bien la scène. Et le pire, c’est que ce ne sera qu’un avant-goût. Ensuite, il nous fera payer notre trahison envers lui.
- Putain ! rugit Gary. On l’avait. Tout était réglé, il a fallu que ces enfoirés jouent les cow-boys !
- On peut rien faire, hein ?
Gary faisait fonctionner son cerveau à plein régime. Il n’avait pas le droit d’échouer si près du but. Il repensa subitement à Rachel, sa femme et à ce qu’elle lui aurait dit en cette occasion. Son regard s’illumina.
- Rappelle Eric. Tu vas lui demander de nous donner les plaques d’immatriculation des voitures du barrage. On va identifier ces enfoirés et les remettre vite fait derrière leur bureau. Il faut qu’il comprenne qu’on rien à voir avec ça.
Vincent s’exécuta fébrilement. Il composa plusieurs fois le numéro. En vain. Ses traits se décomposèrent lorsqu’il comprit qu’Eric ne répondrait pas. Gary accéléra de plus belle. Mais ils savaient tous deux qu’en dépit de leurs efforts la situation était en train de leur échapper.
Eric se frotta les mains.
- On dirait que j’ai un peu de boulot. Fermez les yeux, les copains, ça va pas être joli à voir. Il jeta un coup d’œil à l’arrière, mais ses deux passagers avaient visiblement préféré prendre congé.
Eric s’en félicita. Ces deux pots de colle l’auraient gêné de toute façon. Il arrêta la voiture à trente mètres du barrage et défia les policiers du regard à travers le pare-brise.
- Venez m’arrêter. Je sais que vous allez venir. Vous préférez me faire la peau les yeux dans les yeux, au corps à corps, hein ? Je sais ce que c’est. C’est viscéral. Et puis, loin des yeux…
Eric s’esclaffa.
Quatre flics s’avancèrent, l’arme haute, le regard mauvais. Le premier voulut ouvrir la portière du passager, mais elle l’était déjà. D’un coup de pied, Eric l’ouvrit à la volée. Le flic fut violemment jeté au sol et son arme vola loin de lui. Une balle éclata la vitre. Eric reçut quelques éclats. Il secoua la tête avant de se jeter sur la banquette arrière. Les trois flics ouvrirent le feu à plusieurs reprises. Le pare-brise explosa et les sièges de l’habitacle furent criblés d’impacts. Le silence s’installa, seulement troublé par les craquements du moteur encore chaud et par la respiration haletante des policiers aux aguets. La main armée d’Eric apparut au-dessus de la vitre arrière droite. L’un des flics ouvrit la bouche pour alerter ses partenaires, mais la balle lui perfora la pomme d’Adam. Il s’écroula face contre terre. Les deux autres répliquèrent. Ils arrosèrent l’arrière de la voiture avant de s’apercevoir qu’il n’y avait plus personne à l’intérieur. L’un des flics reçut une balle dans chaque cheville. L’autre comprit alors que le tueur était allongé sous le véhicule. Il se coucha sur le sol et brandit son arme. Eric fut plus rapide. Il visa entre les yeux et le toucha mortellement.
Celui qui avait été assommé par la portière reprit connaissance. Sa main chercha son arme à tâtons sur le bitume. Une menotte se referma sur son poignet et il se retrouva attaché à la portière en un éclair. Impuissant, il regarda Eric ramasser son fusil à pompe.
- C’est sûrement ça que tu veux ?
Le tueur le dominait de toute sa hauteur. Du sang avait éclaboussé son uniforme. Maintenant cela n’avait plus aucune importance. Il contempla l’arme entre ses mains. Il l’embrassa avant de se fendre d’un sourire carnassier.
- J’adore ce jouet !
Le flic tendit ses mains devant lui en un rempart illusoire.
- Faites pas ça. J’ai une femme et elle est enceinte. Je vous en supplie. J’obéis juste aux ordres.
Eric opina.
- Je comprends, petit. Moi aussi. Mais question hiérarchie, je suis légèrement au-dessus de toi.
Il lui colla le canon sous l’œil droit et appuya sur la détente.

 

14


Gary roulait à une vitesse indécente même pour un agent du FBI comme lui. Trop occupé à éviter un accident, il demanda à Vincent de contacter la police de Philadelphie.
- L'idée c'est de leur passer un savon, c'est ça ?
Gary acquiesça.
- Ils vont aussi devoir ramasser les morceaux avec nous.
Lorsque Vincent parvint à s'entretenir avec un responsable, les deux hommes furent ébranlés par son explication :
- J'ai envoyé personne sur cette route, vous pouvez me croire. On a bien reçu les consignes et on connaît suffisamment Schultz pour ne pas le provoquer sur son propre terrain.
- Vous êtes certain ?
- Je vous le répète : je n'ai mis aucun barrage en place. Il a libre accès jusqu'à Wilkes-Barre.
- Merci, dit Vincent  lorqu'il eut repris ses esprits. Vous pouvez pas savoir combien ça nous soulage.
Gary ralentit un peu et s'affaissa sur son siège en soupirant.
- Merci, mon Dieu.
- Vous êtes croyant ? s'enquit Vincent.
Gary sourit nerveusement.
- Non, mais parfois la tentation est grande.

Gary se passa une main sur le front comme pour se faire à une terrifiante idée.
Comme s'il avait lu dans ses pensées, Vincent opina du chef avant de déclarer :
- Oui, Eric est capable de ça. Imaginez de quoi il pourrait être capable si nous le poussions dans ses derniers retranchements.
La perspecive d'affronter Schultz n'apparaissait plus aussi séduisante à Gary, il devait bien l'admettre.
- Il ne va sûrement pas nous donner le choix.
Il s'accorda un délai de réflexion avant d'ajouter avec espoir :
- Je peux donner l'ordre de faire évacuer l'aéroport.
Vincent se râcla bruyamment la gorge.
- Mauvaise idée. Ca reviendrait au même pour lui que d'installer un barrage.
- Evidemment. Il veut qu'on le voit chasser sur le terrain de son choix, mais interdiction de modifier les règles de son jeu.
Vincent acquiesca :
- Vous commencez à bien le cerner. Ce ne sera pas du luxe.
Gary se cramponna à son volant comme pour transmettre plus d'énergie à son véhicule :
- Je compte faire plus que le cerner.

 

15

 

Eric venait de reprendre la route. Il se recoiffa d'une main et examina son uniforme. Il constata avec étonnement qu'il n'était plus taché de sang.
Il oublia vite ce détail insolite en pensant à la foule qui l'attendait à l'aéroport. La fête allait bientôt avoir lieu et c'est lui qui aurait l'honneur de donner le coup d'envoi.

En arrivant sur les lieux, peu de temps après, il fut déçu de trouver aussi peu de monde. Des gens allaient et venaient bien dans le hall, mais l'impression générale ne le satisfaisait pas vraiment.
- Qu'est-ce que tu aurais voulu ? Des strip-teaseuses ?
Une bulle rose sortit des lèvres de Jimmy.
Eric ne lui adressa pas même un regard.
- Tiens, te revoilà, toi ! Me dis pas que l'autre cinglée est avec toi !
L'intéressé ne répondit pas.
- Très bien, fit Eric. Tu commences à devenir un gentil garçon. Si tu continues à être sage, je t'emmènerais peut-être faire un tour en avion.
- Tu sais piloter ?
- Non, mais je trouverai bien quelqu'un pour nous emmener. Je sais être très convaincant, tu sais. Surtout quand je veux faire plaisir à un ami.
- Je te demande juste de ne pas tuer d'hôtesses de l'air.
- Pourquoi je ferai ça ? s'indigna Eric. J'adore les hôtesses de l'air. C'est grâce à elles que la plupart des gens oublient qu'ils peuvent mourir en avion. Ce sont des anges. Et moi, les anges, je les respecte.
- Ca veut dire que tu vas juste les faire souffrir.
Eric regarda enfin le jeune garçon. Il haussa les épaules en soupirant.
- Tu me connais, Jimmy. J'ai besoin d'un contact physique privilégié avec les gens. Je suis comme ça. Faut que je les touche pour me sentir réel.
- Tu pourrais juste...je sais pas moi...leur serrer la main ou leur faire la bise.
- Dis, si c'est pour me sortir des conneries de ce genre, tu peux aller voir ailleurs si j'y suis. Tu le veux ce tour en avion, oui ou non ?
Jimmy secoua rapidement la tête.
- Bon, alors tu la boucles et tu me laisses faire connaissance à ma manière. C'est dingue, ça ! C'est quand on me rend nerveux comme ça que je mets à faire n'importe quoi. Et après, on me reproche d'avoir dépassé les limites. Je suis un type raisonnable. Mais si on m'emmerde, si on critique mes habitudes, forcément je deviens irritable. C'est normal. Faut se mettre un peu à ma place. J'ai pas une vie facile. Je dirais même plus, personne n'aurait envie d'avoir la vie que j'ai. Non, Personne.
Une fillette l'observait parler tout seul avec amusement. Elle lui sourit.
- Dis, monsieur, tu parles à qui ? A des fantômes ?
Eric se baissa et lui sourit à son tour.
- Non, Jimmy, aucune hôtesse.

 

16

 

Gary gara le Landcruiser sur le parking de l'aéroport. Vincent sortit de la voiture et regarda autour delui d'un air ahuri :
- Mais...le parking est vide. On est au bon endroit, vous êtes sûr ?
Gary le rejoignit. Il sourit.
- J'ai fait évacuer les lieux.
Vincent faillit avaler sa langue.
- Quoi ? Mais vous êtes complètement malade !
- Vous avez le droit de le penser, mais je sais très bien ce que je fais.
- Mais tout à l'heure...
- De la pure stratégie. Quand on a appris que le barrage était seulement l'oeuvre de Schultz, j'ai su que j'avais fait le bon choix. Il espérait rencontrer un obstacle sur la route, donc il l'a imaginé. Il ne s'attend pas à trouver l'aéroport vide, donc il va s'employer à le remplir. Tretco a été très clair avec moi à ce sujet. Le pouvoir d'Eric n'a que les limites de son imagination.
- Mais vous êtes complètement inconscient. La maladie de Schultz n'est pas une science exacte.
- Vous ne jouez jamais au poker ?
- Jamais avec la vie des gens !
- Moi non, plus. C'est pour ça que j'adore le poker.
Vincent fusilla l'agent du regard et pointa un index menaçant dans sa direction :
- Si jamais on s'en sort vivant, je vous jure que je...
- Suivez-moi au lieu d'essayer de dire des âneries.
Vincent ne supportait pas de s'être fait avoir de la sorte. Son visage s'empourpra :
- Et puis d'abord, quand est-ce que vous avez appelé pour évacuer l'aéroport ? On a passé la journée collés l'un à l'autre.
Tout en se dirigeant vers les portes du hall, Gary lui lança un regard amusé :
- Vous oubliez le moment où vous avez vomi votre sandwich.
Lorsqu'ils entrèrent dans le hall, ils purent mesurer combien les autorités avaient bien fait leur boulot.
- Pas un chat, observa Vincent avec inquiétude.
- Oui, mais où est Schultz ? s'enquit Gary.
Vincent marcha soudain dans une direction précise.
- Il est aux toilettes.
- Qu'en savez-vous ?
- Mon petit doigt qui me l'a dit.
- Ce ne serait pas plutôt une jolie femme avec un chignon et un manteau gris ?
- Dois-je en conclure que celle que j'ai vu à la station-service n'existait pas ?
Vincent n'était pas dupe de sa propre pathologie ce qui le rendait encore plus attachant. Gary en fut peiné. Il n'avait pas toujours été très tendre avec lui. Il allait s'en excuser lorsqu'ils arrivèrent devant les toilettes.
Gary saisit aussitôt son arme et posa un doigt sur sa bouche pour intimer le silence à son partenaire. Il avait à peine posé sa main sur la poignée que la porte que celle-ci s'ouvrit à la volée. Schultz se rua sur l'agent et le mit à terre. Un coup de feu éclata. Les deux hommes luttèrent pour la possession de l'arme. Eric jubilait.
- La sécurité va rappliquer et vous foutre des bâtons dans les roues. Vous êtes deux beaux minables.
Après un instant d'hésitation, Vincent frappa le tueur dans le dos à plusieurs reprises pour lui faire lâcher prise. Eric semblait totalement insensible à la douleur. Il fronça les sourcils en apercevant Jimmy du coin de l'oeil.
- Tire-toi de là ! C'est pas un spectacle pour les gosses !
Vincent se figea :
- Quoi ?
Eric en profita pour lui envoyer son talon gauche dans les parties. Vincent se plia en deux sous le choc. Une nouvelle détonation se fit entendre.
Schultz se redressa et s'enfuit en courant. Une main plaquée sur l'entrejambe, Vincent vint s'enquérir de l'état de son partenaire.
- Ca va, Gary ?
Il s'épouvanta en voyant ses vêtements tachés de sang.
- Ca va, fit Gary en serrant les dents. Il va juste me ruiner en pressing. Rattrapez-le. Il ne faut pas qu'il s'échappe d'ici.
Vincent lui serra l'épaule.
- Comptez sur moi, il n'ira pas loin.
A ces mots, il ramassa le pistolet et s'élança à la poursuite du tueur.
Eric se frayait un chemin dans la foule devenue soudain plus dense, comme un fait exprès.
- Poussez-vous ! rugit-il.
Il tomba sur trois agents de sécurité.
- Un problème, monsieur ?
Eric tourna la tête. Vincent arrivait droit sur lui. Il avait l'air très déterminé.
- Un type un peu collant. Ca doit être pour ça qu'il se prend pour un super héros.
Les hommes furent insensibles à son humour.
- Vous voulez qu'on vous en débarrasse ?
Eric réfléchit un instant.
- Ouais. Mais faites-ça discrètement. Je vais en profiter pour le baratiner.
Il se retourna et se planta devant Vincent, armé d'un sourire inquiétant qui se voulait amical.
- Ca va tes couilles ?
Vincent secoua la tête en grimaçant.
- Désolé pour l'accueil, reprit Eric, mais si je t'avais simplement dit bonjour, tu aurais pris ça pour une embuscade. Je suis pas hypocrite.
Vincent se redressa comme pour se montrer à la hauteur du défi qui s'annonçait.
- Non, juste Schizophrène. J'imagine que c'est moins grave.
- J'aime pas ton humour, Faulk.
- Désolé, mais le service psychiatrique du Dickinson Mental Health Center ne m'a pas aidé à le bonifier.
Cette allusion détendit quelque peu Schultz.
- Ils t'ont bourré de médocs, hein ? C'est tout ce qu'ils savent faire. Pour eux, on est des animaux d'une espèce inconnue. Ils savent pas où nous ranger, alors ils font comme si ils savaient. Mais on est à part, tu sais. C'est normal qu'on fasse des conneries. Faut le temps d'apprendre à se connaitre.
- Tu pouvais apprendre autrement qu'en tuant des innocents. Moi j'ai fait un autre choix.
- Non, t'as juste obéi à ta conscience. Le choix de l'évidence, c'est pas un choix. Moi je choisis pas non plus. Je fais selon mon coeur. Tu devrais jeter ton flingue. La sécurité est derrière toi.
Vincent sentit qu'il perdait son assurance. Ce n'était pourtant guère le moment. Heureusement, c'est ce moment que choisit Gary pour venir à la rescousse.
Sa blessure était moins grave qu'il n'y paraissait. Vincent en fut soulagé. L'agent s'appuya contre une colonne et murmura avec gravité :
- Vous allez répéter mot pour mot tout ce que je vais vous dire.
- Tu sais aussi bien que moi qu'il n'y a personne à part nous, déclara soudain Vincent avec autorité.
Schultz le toisa avec dédain.
- Ne te prétends pas supérieur à moi. J'ai plus d'expérience que toi, mon vieux.
- Si par expérience, tu entends victimes au compteur, alors oui, tu es plus expérimenté que moi.
Schultz le braqua avec son pistolet de flic.
- Tu me sous-estimes, ça se voit. Tu me prends pour le méchant de l'histoire et tu te dis que ça suffit à faire de toi un héros.
- Oui, dans les grandes lignes, c'est comme ça que je vois les choses. Mais ça veut pas dire que j'ai pas envie que tu t'en sortes.
- Arrête, tu vas me faire pleurer. Je suis très sensible.
- Je sais. Sinon, tu aurais oublié depuis longtemps ce que ton grand-père t'a fait.
- Ah ! J'imagine que ça c'est ta botte secrète. C'est le moment où je vais m'apitoyer sur moi-même en m...
Le regard de Schultz se troubla.
- Putain, vous l'avez amené ici avec vous ! Mais vous êtes des sales fils de put...
Ses yeux étaient visiblement fixés sur son ancien tortionnaire.
- Qu'est-ce que tu fous là, salopard ! Tu veux finir le boulot, hein ? Tu veux ma peau ?
Le pistolet tremblait dans la main d'Eric.
- C'est moi qui vais te la prendre, vieil enfoiré ! Et je vais faire ça lentement, en souvenir du bon vieux temps.  
Vincent s'approcha lentement d'Eric. L'illusion pouvait disparaître à tout instant. Le temps était compté.
Eric pleurait malgré lui. Il soufflait comme pour mieux résister à la vague d'émotions qui le submergeait.
- T'es venu me demander pardon, c'est ça ? Tu crois que je suis assez cinglé pour accepter ? Jamais je te pardonnerai. La torture, c'est pas défendable. Tu aurais dû me tuer. Au lieu de m'élever, tu m'as rabaissé. Je suis devenu un reptile à cause de toi. J'ai passé ma vie à ramper comme un serpent et à me camoufler comme un putain de caméléon !
Eric ne faisait plus du tout attention à Gary et à Vincent qui en avait profité pour se rapprocher de lui. Encore quelques secondes et il pourrait le neutraliser. Mais c'est alors qu'Eric pointa son arme vers lui avec un visage impassible. Toute trace de souffrance avait disparu.
- J'ai pas oublié ce que m'a fait ce vieux salaud. Mais c'est pas pour autant que j'ai envie de revoir sa gueule.
Vincent comprit à cet instant qu'il avait effectivement sous-estimé Eric. Et il allait sûrement le payer au prix fort.
- Tu pointes ton flingue comme si c'était ta queue, mon chou. T'es chargé, tu crois ?
Eric ouvrit de grands yeux en reconnaissant la voix.
- Jenny, mais qu'est-ce que tu f...
La belle rousse l'observait. Elle se tenait contre une colonne dans une pose très glamour.
- C'est la fin pour toi, tu le sais. Tu as fait ce qu'il fallait pour.
Eric voulait l'ignorer, mais il en fut incapable. Peut-être parce qu'il sentait qu'elle était dans le vrai.
- Tu m'as bien aidé à en arriver là. On aurait pu être tellement heureux ensemble.
- Alors pourquoi tu m'as tuée ?
Sous le coup de la surprise, Eric baissa son arme.
- Quoi ?
- Je suis morte et tu le sais.
Jenny tira une bouffée de sa cigarette. On aurait dit une actrice des années cinquante.
- Tu n'as qu'un seul moyen de trouver le salut, mon chou. Un seul.
Elle mima une arme avec sa main libre et se toucha la tempe du bout des doigts.
Eric prit une grande inspiration.
- Si je le fais, ce sera pour me libérer de toi.
Vincent se jeta sur lui pour le désarmer, mais Eric n'eut qu'un geste à faire. Il retourna l'arme contre lui et pressa la détente. Le tueur s'écroula, touché à la poitrine. Jimmy s'agenouilla aussitôt près de lui, les larmes aux yeux :
- Je te jure que j'y suis pour rien ! Je te le jure !
Eric posa une main sur la casquette du garçon avant de lui adresser un dernier regard empli de tendresse :
- Je sais, Jimmy. Je sais.
Il lui serra la main.
- Accroche-toi, fiston. On va décoller.
Puis sa tête bascula en arrière et ses yeux se fermèrent.
Après avoir constaté sa mort, Vincent alla rejoindre Gary pour s'enquérir de son état et le remercier d'avoir joué les entremetteurs. Il ne le trouva pas. Il avait dû en profiter pour appeler des renforts car plusieurs voitures de police arrivèrent sur les lieux et une vingtaine d'hommes bouclèrent rapidement la zone.
Vincent s'adressa directement au chef :
- Je cherche Gary Chase, l'agent du FBI qui était avec moi.
Son interlocuteur posa une main sur son épaule avant d'indiquer du menton un brancard.
- Désolé, il s'en est pas sorti.
Vincent sentit le monde chavirer autour de lui. Il ne comprenait pas. La blessure était insignifiante. Il l'avait vu de ses yeux !
- Où l'avez-vous trouvé ?
- Devant la porte des toilettes. La balle a atteint directement le coeur. Il n'a pas souffert.

 

17



Vincent dévisagea son visiteur. Il aurait voulu dire tellement de choses sur Gary, mais le fait qu'il n'y parvenait pas n'était lié d'aucune manière au peu de temps qu'ils avaient passé ensemble.
- Je suis content de l'avoir connu, dit-il simplement.
Ted Meyers le gratifia d'un sourire amène. Il sentit que cela ne servait à rien de s'éterniser. Il se leva et se dirigea vers la porte.
Une question s'échappa alors des lèvres de Vincent :
- Il vous a parlé de l'accident de voiture de sa femme ?
L'ancien supérieur de Gary soupira longuement.
- Non. Jamais.
Puis il quitta la chambre du Dickinson Mental Health Center.
Vincent se retrouva à nouveau seul, assis sur son lit. Seul avec ses démons.
Il commença à sangloter. Il s'arrêta subitement en sentant quelque chose toucher doucement sa main droite. Il ouvrit les yeux. Sa douleur s'estompa aussitôt. Il releva la tête. Face à lui se tenait Gary Chase. Et il lui souriait.
- Vous êtes le meilleur de tous.

 

 

 

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vendredi, 01 novembre 2013

Mr. Nobody [Cinéma/Critiques]

Mr Nobody.jpg
 
L'accroche de l'affiche résume assez bien le concept du film.
Il est question de choix évidemment et de tout ce qu'ils peuvent impliquer dans notre existence et celle des autres. Car nous avons tous fait des choix cruciaux qui nous hantent pour des années. Des bons comme des mauvais, des choix raisonnables comme des choix plus audacieux, mais qui peuvent nous apparaître différemment avec le temps. Le thème du temps est d'ailleurs en toute logique également au coeur du film. La manière de l'appréhender, de le ressentir, de le ralentir pour prolonger le bonheur ou de l'écourter quand la vie nous blesse.
On navigue ainsi dans les multiples vies du héros.
 
Le caméléon Jared Leto (Requiem for a Dream, Lord of War, Dallas Buyers Club et futur Joker de Suicide Squad :-) est passionnant et nous passionne par les différences et les changements que chacune de ses décisions apportent à son quotidien.
Ses différents personnages finissent par se combiner, se connecter, puisant chacun dans l'expérience de l'autre.
On nage dans les méandres d'un esprit confus qui se plaît à fantasmer avant de pouvoir regagner la réalité pour affronter la vérité de sa nature.
La mise en scène très stylisée de Jaco Van Dormael séduit très rapidement et la musique fait de même (même si la plupart des chansons nous rappellent immanquablement d'autres films). Le récit, sous ses airs de best-of métaphysique, recèle des trésors de réflexion et de poésie pour qui veut bien prendre le temps d'y plonger corps et âme. Moi, je m'y suis littéralement noyé.
Ce MR. NOBODY c'est vraiment quelqu'un !
 
En Lien
Cloud Atlas
 

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jeudi, 12 septembre 2013

Hommage à Patrick Swayze

DEATH IS DIRTY. BODHI'S GONE WITH THE GREAT WAVE

HIS BODY'S GONE, BUT HIS GHOST IS DANCING !!!

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En quelques films il a marqué les esprits par son charisme et son interprétation sensible. Acteur physique aussi à l'aise dans les scènes de danse (Dirty Dancing) de comédie et de drame (Ghost, Donnie Darko) ou d'action (Point Break, Road House), il a peu peu déserté le grand écran au profit de séries, de téléfilms et de films de série B où il apparaît souvent sous-employé.

Au plus profond de moi, j'ai toujours espéré assister à son come-back dans des projets de grande envergure. D'autres acteurs y avaient eu droit, pourquoi pas lui ? Il l'aurait amplement mérité. Il avait encore tellement à offrir.

Le sort en a décidé autrement. Et c'est doublement regrettable.

Son jeu passionné m'inspirait beaucoup. Je l'avais idéalement imaginé dans le rôle du barbare Rex Warrior, héros de mon roman de fantasy du même nom, en tant qu'incarnation du personnage de Monarque de mon histoire Le Combat du Papillon ou encore celle de Wulfen dans Tribal. Mais sa mort ne change rien à cela, son image continue de paraître dans mes oeuvres.

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"Aimer, ce n'est pas se regarder l'un l'autre, c'est regarder ensemble dans la même direction." Antoine de Saint-Exupéry

Fan de l'acteur dont je regrettais depuis longtemps l'absence au cinéma dans des rôles d'envergure, à la mesure de son talent, son décès m'a profondément ému et moi qui ne lis plus et encore moins des biographies, je n'ai pu m'empêcher de plonger dans la sienne.

Autant vous dire que je ne l'ai absolument pas regretté.

On en apprend beaucoup, sur son parcours, son tempérament de battant, ses forces et ses faiblesses, les coulisses de ses films, ses passions, la relation fusionnelle avec sa femme (co-auteur de la bio) avec laquelle il a pu partager tant de choses. Patrick se raconte et il le fait bien. Comme lorsqu'il explique comment il a dû batailler constamment pour se délivrer de son image de danseur sexy.

Je suis d'autant plus touché par son parcours que j'ai connu un évènement douloureux qu'il a lui aussi expérimenté : la perte d'une soeur aînée avec laquelle il était proche et dans des conditions identiques. Troublant ! Je publie moi-même le journal de ma soeur Lado sur ce blog.

Toute vie est riche d'enseignements et lorsqu'elle est posée à plat, si elle ne révèle pas tous ses mystères, elle permet néanmoins de mesurer sa grandeur, sa symbolique.

Le cinéma américain s'est privé très injustement d'un comédien hors pair. J'espère qu'il mesure sa douleur. Moi, oui, plus que jamais.

Une phrase de Patrick à retenir et qui a guidé toute sa vie :

 

" Quand un rêve disparaît, il faut en chercher un nouveau."

 

 

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dimanche, 11 août 2013

Mon Bilan du Cinéma - Août 2013 [Cinéma]

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Etes-vous de ceux qui s'extasient devant un film quel qu'il soit ou êtes-vous plutôt du genre à ne pas avaler n'importe quelle couleuvre ?

Le secteur du 7ème art a changé de visage ces dernières années. Le piratage n'est sûrement pas innocent à cela, mais comme souvent, les comportements sociaux sont pour les industries prétextes à exploiter d'autres filons plus juteux, quitte à franchir la limite.

Alors au final, est-ce que le spectateur a gagné quelque chose au change et si oui, quoi donc ? C'est à cette grande question existentielle que ce dossier conséquent tentera de répondre.

Ma culture cinématographique étant majoritairement américaine (mais je me soigne), je me concentrerais donc sur Hollywood tout en abordant inévitablement le cinéma français puisque les vices du premier ont eu le mérite de m'ouvrir davantage aux vertus du second.

Profitez-en pour re(découvrir) mes critiques complètes des films cités au travers des différents liens dont sera parsemé cet article.

 Trop d'Effets Spéciaux...

Je ne peux m'empêcher de commencer cet article par un gros morceau et un morceau qui personnellement m'a énormément fâché avec le cinéma américain. On le sait, Hollywood et les effets spéciaux c'est une longue et grande histoire d'amour. Belle ? De moins en moins à dire vrai, et ce, malgré les progrès indéniables en la matière. Car mon titre partiel est assez éloquent : trop d'effets spéciaux... tuent l'effet spécial. A trop vouloir épater la galerie pour remplir les salles, les producteurs misent quasiment tout sur le visuel, sabotant régulièrement des sujets prometteurs (Abraham Lincoln - Chasseur de Vampires) ou bien pénalisant un scénario accrocheur (Man of Steel) à grands coups de ralentis et de scènes de destruction. On pourrait se résigner en se disant que c'est ainsi et que finalement c'est pas si mal. Mais heureusement, il reste encore d'irréductibles réalisateurs qui se dressent face à l'envahisseur et démontrent qu'il est possible et nécessaire de faire des films autrement. Car oui, on peut bénéficier d'un gros budget, d'une brochette de stars et d'effets spéciaux dernier cri et les mettre au service d'une très bonne histoire. Cloud Atlas l'a prouvé de manière admirable et actuellement, à une autre échelle, Insaisissables le prouve également.

Cherche Magie désespérément !

Car que je me fasse bien comprendre en évitant tout quiproquo, je n'ai absolument rien contre les effets spéciaux, j'en ai même littéralement bouffé pendant des années, c'était devenu une passsion dévorante au point d'acheter tous les mois avec dévotion le magazine français SFX spécialiste en la matière. C'est parce que j'ai justement eu un tel engouement dans le passé, un engouement devenu aveugle, qu'aujourd'hui je peux parler du sujet avec un maximum de recul. J'aime toujours les effets spéciaux, seulement je ne veux plus en bouffer à toutes les sauces. Je suis devenu gourmet en effets spéciaux et non plus gourmand, je suis devenu exigeant et j'en tire une grande fierté. Je privilégie des saveurs subtiles et sincères à des tonnes d'exhausteurs de goûts pour me donner l'illusion que c'est bon. Et surtout j'ai compris que les effets spéciaux avait un meilleur rôle à jouer que de nous en mettre seulement plein la vue (combien de films ont d'ailleurs très mal vieilli à cause de cela). Je ne vais pas ici faire l'apologie de l'animatronique ou des effets mécaniques en général, il faut vivre avec son temps et bien des films ont prouvé qu'employés intelligemment, avec parcimonie, les effets spéciaux numériques peuvent conserver leur magie sur le long terme. Mais quand les studios auront compris que la qualité prime sur la quantité, alors le cinéma aura fait un grand pas en avant. Moins d'effets spéciaux donc ou alors avec la ferme volonté de contribuer au message du film, à la portée émotionnelle de l'histoire comme dans l'éblouissant L'Odyssée de Pi de Ang Lee. Encore faut-il me direz-vous qu'il y ait un scénario. C'est précisément le talon d'Achille de bien des blockbusters tournés dans le seul but de faire du profit. A titre d'exemple, un certain nombre de spectateurs ont fait les frais du très (trop) spectaculaire Pacific Rim, un sacré paradoxe puisque Guillermo Del Toro se dressait encore il y a quelques années comme l'un des derniers défenseurs de l'animatronique (Hellboy 1 & 2).

Cette problématique du spectaculaire est générale puisqu'elle est également devenue omniprésente dans le Jeu Vidéo. Il n'y a qu'à jouer au reboot de Tomb Raider, pour s'en rendre compte. L'adrénaline bon marché a remplacé l'émotion sincère et l'immersion n'est plus que l'ombre de ce qu'elle pourrait être. On nous vend de l'émotion au rabais, ni plus ni moins.

Le problème est que ceux qui tentent de monter des projets à contresens de ce courant connaissent de trop nombreux obstacles (Trop intellectuel ! Trop long ! Trop diversifié ! Trop peu cher ! Trop peu de stars !) et quand ils y parviennent la promotion de leur oeuvre est bien trop souvent handicapée par celle des blockbusters pop-corn. Il faudrait commencer par un meilleur équilibre, en favorisant l'accès du public à d'autres alternatives. Car sinon qu'arrivera-t-il ? Et bien on peut craindre le syndrome télé-réalité, à savoir que les médias ne mettent principalement en avant que la médiocrité qui de ce fait devient la référence qui de ce fait remporte plus de succès qui de ce fait est principalement mise en avant par les médias, etc... vous avez compris la logique. Quand on voit à quoi ressemble la télé d'aujourd'hui, cette crainte est d'autant plus légitime que le saccage s'est fait très rapidement, une chaîne contaminant toutes les autres. Et ce n'est pas la multitude de canaux qui fait la différence puisque la médiocrité on la retrouve sur une multitide de canaux.

Le Cinéma Bio

Maintenant que cette médiocrité s'est généralisée, faire de la qualité est devenue une  énorme prise de risque. Et quand je dis qualité je ne parle pas d'une histoire de goût, je parle de qualité objective d'ordre artistique et technique, je parle du soin et du temps apporté à un film, de la première idée à la touche finale. Je parle d'ins-pi-ra-tion. Car j'y reviendrai dans un sujet ci-dessous plus adapté, mais la course aux dollars a entraîné un véritable marathon orchestré par les studios qui planifient à outrance d'énormes projets, teasant sur une simple image, une vague rumeur (internet aidant bien en cela faut dire ce qui est) tout en refusant, annulant, reportant et modifiant à l'excès dans un même temps autant de films qui finissent sur nos écrans charcutés, aseptisés, liftés au maximum pour répondre à la demande générale. Finalement ce qu'on trouve dans nos assiettes on le bouffe également au cinéma. Et c'est là qu'on comprend que les acteurs et surtout les stars - puisque c'est sur leur nom que les projets se montent - ont un pouvoir et une reponsabilité immenses puisqu'ils peuvent influencer l'existence d'un film qui sinon aurait toutes les peines du monde à voir le jour en dépit de son potentiel.  Quand une star décide de soutenir une telle oeuvre, que ce soit en y participant, en la produisant, en baissant son cachet et/ou en en vendant les mérites aux médias, elle fait acte de foi, car elle  contribue à la richesse du 7ème art et donc à sa perpétuation. Comme dit Néo dans Matrix, le problème c'est le choix. Et le cinéma doit au spectateur de continuer à le lui donner justement et pas de manière symbolique ou illusoire. Pour ce faire, il doit rendre visible son catalogue dans son entier. Car combien de cinéphiles sont passés à côté de perles rares, de films audacieux tant dans le fond que dans la forme, simplement à cause d'une mauvaise promotion ou d'une durée d'exploitation réduite au minimum. Le bouche à oreille a un rôle à jouer, mais pour le cultiver et même l'initier rien ne vaut une com' digne de ce nom faite par des gens qui sont payés pour cela. Et en matière de marketing, les américains sont doués, on le vérifie tous les jours, pour le meilleur et pour le pire.

Des urnes aux guichets, il n'y a qu'un pas

J'ai parlé du pouvoir de la star, mais il y en a un autre qui a un pouvoir énorme et une reponsabilité aussi importante, c'est le spectateur lui-même. Car à l'instar de la télé et d'internet, c'est lui la cible, c'est lui l'acheteur (le pigeon ?). Alors quand le spectateur achète son ticket pour un film, c'est littéralement comme s'il votait pour un parti. Quand des gens vont voir un film qu'ils savent d'avance médiocre voire mauvais à seule fin de se vider la tête, de se fendre la gueule, c'est, contrairement à ce qu'ils peuvent penser, loin d'être sans conséquences, pour le cinéma, comme pour eux. Aller voir un film ce n'est plus innocent, il faut en être conscient, c'est devenu un acte engagé, c'est devenu politique. Là, c'est nous qui avons le choix et nous devons le prendre très au sérieux. Sinon comment s'étonner de n'avoir plus que des ersatz de Die Hard 5 ou de Expendables à se mettre sous la dent alors que des films autrement plus consistants sortent, eux, directement en DVD. C'est encore une fois le chien qui se mord la queue. En érigeant la médiocrité en culte, on ferme la porte à un cinéma plus exigeant et ô combien plus estimable. Le boycott fait partie des options que nous avons tous à notre disposition et ne pas aller voir un film surtout quand il manque ouvertement de respect au spectateur est un devoir pur et simple autant qu'une question de dignité. Comme pour la télé et les jeux vidéos, la demande c'est nous qui la créons, c'est à nous d'influencer ceux qui font l'offre, alors faisons qu'elle soit la plus intelligente possible. Il n'y a que comme cela que nous pourrons construire un paysage cinématographique viable, que nous serons fier de contempler en sachant que nous avons contribué à son développement. Le monde est ce qu'on en fait, il en est de même du cinéma. Car si le cinéma vaut souvent mieux que ce qu'il nous montre, en tant que spectateur, nous valons, nous aussi, souvent mieux que ce que nous regardons.

La 3D...gueulasse !

Autre attraction majeure des salles obscures et autre source de contrariété pour un certain nombre de spectateurs dont je fais partie. Cette véritable botte secrète, pratiquement imparable maintenant, est née de la volonté de contrecarrer le téléchargement massif. Il fallait redonner envie aux gens d'aller au cinéma en leur offrant quelque chose qu'ils ne pourraient pas avoir sur internet. Une intention tout à fait louable et justifiée à la base qui, une fois n'est pas coutume, est devenue une carotte pour le moins indigeste. Impossible de parler de 3D sans évoquer le cas Avatar, le véritable pionnier en la matière, véritable porte-étendard de cette technologie de pointe. Sauf que concrètement, l'univers visuel du film à lui seul demeure toujours plus attractif que sa 3D qui, même si elle reste l'une des plus réussies, ne mérite pas pour autant toutes les éloges dont on veut bien l'affubler. Et puis d'autres problématiques ont surgi au fil des ans comme des diables de leur boite. Des conversions 3D faites plus ou moins sérieusement afin de donner un semblant de prestige à des films qui n'en avaient pas ou qui n'en avaient plus besoin. Même la ressortie de Jurassic Park a souffert de cet effet de mode, d'un point de vue purement technique j'entends. Car on aura beau dire tout ce qu'on veut sur les bienfaits de cette technologie, il est un fait qu'elle a une fâcheuse tendance à flouter l'image et à faire baver les arrières-plans d'une manière abominable, massacrant au passage quelques beaux plans d'effets spéciaux. J'en ai eu encore la preuve avec Wolverine-Le Combat de l'Immortel sur certains plans larges, quand elle ne tombe pas tout simplement en panne (en ce qui me concerne sur Man of Steel) chose qui arrive plus souvent qu'on ne l'imagine. Si nous avions le choix d'aller voir un film en 3D ou non, ce serait évidemment plus défendable. Mais là encore, le spectateur se retrouve un peu trop souvent pieds et poings liés. Et comme la 3D n'est pas une option gratuite, que l'on ait déjà ou non les lunettes, on rage d'autant plus de se faire ainsi manipuler. De même que lorsqu'il n'y a rien de valable à la télé (Coluche l'a très bien dit je crois) vous êtes plus qu'encouragé à l'éteindre, le boycott est à votre disposition pour exprimer votre refus de vous faire tirer les pies (syndrome de la vache à lait). D'autant qu'à une époque en tout cas, tous les spectateurs n'étaient pas logés à la même enseigne. Si dans les grandes villes, les lunettes servaient indéfiniment, dans des cinémas de villes plus modestes elles n'étaient que louées, nous obligeant à payer un supplément conséquent (lunettes + 3D) à chaque séance. Cher payé et excessivement punitif, surtout pour un spectateur qui ne pratique pas le téléchargement sauvage.

Last-action-hero-2.jpg

Last Action Hero, film culte au demeurant, racontait comment un jeune fan de Schwarzenegger se retrouvait projeté de la réalité dans l'un des films de la star. Et inversement. Un bon résumé de ce que les studios devraient avoir comme cahier des charges au sujet de la 3D, car en l'état, c'est la plus grosse arnaque de l'histoire du cinéma.

Les années ont passé, on espérait tous voir ce qui n'est au final qu'une simple profondeur dans l'image se transformer en relief digne de ce nom comme le film "Guillaumet, Les Ailes du Courage" de Jean-Jacques Annaud avait pu nous le démontrer brillamment au Futuroscope. Car des films en 3D j'en ai vu quelques-uns et aucun d'eux ne m'a donné l'émotion de cette inoubliable scène de restaurant dans laquelle j'ai connu cette proximité unique, cette sensation incroyable d'être assis à la même table que les personnages. A l'instar des effets spéciaux, la 3D a un potentiel émotionnel énorme, totalement sous-estimé. Je ne parle pas du simple fait de voir une balle ou des dizaines de ballons sortir de l'écran, je parle d'une véritable mise en scène qui permettrait au spectateur d'être invité dans le film, de pouvoir le percevoir, le comprendre et même s'y perdre sous un angle inédit, d'y participer en quelque sorte. Je pense que la 3D devrait avoir pour vocation de créer une nouvelle forme de lien avec le spectateur, une interactivité spécifique qui pour le coup transformerait la carotte indigeste, la malheureuse citrouille en carosse resplendissant tout prêt à nous emporter dans un tourbillon d'émotions, des étoiles plein les yeux. Le cinéma n'est-il pas né pour nous vendre du rêve ? Alors qu'il le fasse réellement avec les outils dont il dispose ou qu'il cesse de se faire aussi gros que le boeuf qu'il n'est pas. En complément : 3D ciné/3D télé : Le Jour et la Nuit.

Moteur ! Action ?

Ah, Hollywood et les scènes d'action, voilà bien une addition qui a donné d'excellents résultats. Fusillades, Combats et cascades en tous genres, question sensations fortes, on a été servi. Si la recette perdure toujours, la forme a elle aussi bien évolué. Enfin évolué, hélas pas vraiment dans le bon sens. Si l'usage de cascadeurs virtuels s'est répandu rapidement dès l'explosion des effets numériques et a permis par exemple de crédibiliser Spiderman et autres super héros, d'autres techniques beaucoup moins appréciables sont devenues des modèles pour la majorité des studios. Les scènes de combat des années 80-90 n'ont plus grand-chose à voir avec celles d'aujourd'hui. Que ce soit des affrontements d'arts martiaux ou des duels à l'épée, la tendance est aux plans très serrés, au montage nerveux et aux bruitages démesurés, de sorte que tout ce qui fait le sel de ce genre de séquences passe complètement à la trappe. En gros ce sont les effets sonores qui font l'action car visuellement il n'y a plus rien à voir. Adieu les plans larges et durables où l'on pouvait admirer et croire à la performance des acteurs, estimer le soin et l'originalité des chorégraphies (cf Les Meilleurs Combats du 7ème Art) Heureusement il y a des exceptions car il reste des gens audacieux, qui ont les moyens de leur audace. C'est ainsi que sous la houlette du très éclectique Steven Soderbergh a pu voir le jour le percutant Piégée (Haywire) grâce auquel on a pu revivre l'intensité de vrais combats rapprochés filmés purement et simplement. Le fait que l'héroïne soit une femme n'a fait que rendre l'initiative plus importante. On pense aussi évidemment aux films de Tony Jaa (sponsorisés par l'Europacorp de Besson) qui ont redonné un coup de fouet à un genre tombé en désuétude et a depuis fait de nombreux émules (surtout en Direct to DVD).

En fait, cet aspect de la réalisation est assez emblématique du cinéma américain de ces dernière années. Jeter de la poudre aux yeux, faire croire. L''ambition du cinéma est bel et bien de faire croire me direz-vous, mais elle n'est certainement pas de faire croire qu'il fait croire. Une forme de mensonge qui traduit la paresse et les nouvelles priorités d'un art qui s'est définitivement logé à l'enseigne de l'industrie. Hollywood est devenue une usine. Mais l'usine à rêves, elle, s'est mise en grêve depuis un moment.

Et la musique alors ?

Plus qu'une simple illustration sonore, la musique de films est devenue au fil du temps un élémént majeur du septième art, un vecteur d'émotions et une oeuvre à part entière, dissociable des images qu'elle accompagne et appréciable en l'état. Je ne ferais pas ici la liste des BO mémorables qui ont même eu parfois plus d'impact que le film en lui-même (au hasard Tron Legacy). Certains films ont largement contribué à faire naître la passion autour de grands compositeurs qui jusqu'alors ne suscitaient que l'intérêt d'une niche d'amateurs (au hasard James Horner sur Titanic). Car je parle de musiques de films au sens le plus large, au-delà des répertoires de chansons populaires, je parle aussi et surtout d'orchestrations, de symphonies, d'instruments et de musiciens, de choeurs et de vocalises (oui, y en avait aussi de très belles dans Titanic). John Williams a évidemment été un des piliers en la matière et le tandem qu'il forme depuis toujours avec Spielberg le désigne encore et toujours comme une valeur sûre dans ce domaine. Mais il n'est pas le seul (au hasard : James Newton Howard, John Powell, Michael Giacchino) et rapidement de nombreuses écuries se sont ouvertes. La plus connue étant celle de Hans Zimmer, compositeur très populaire et apprécié des cinéphiles, lequel a fait des petits et parfois pas des moindres : Mark Mancina (Bad Boys), Klaus Badelt (Pirates des Caraïbes), Trevor Rabin (Armageddon), Steve Jablonsky (Transformers). Mais il apparait de plus en plus que ce secteur s'essouffle lui aussi, la faute encore une fois au rythme de production imposé par les majors hollywoodiennes. L'inspiration n'est plus autant au rendez-vous qu'avant et il ressort que la musique redevient progressivment une simple illustration alors qu'elle est l'âme du film dans l'absolu. N'en déplaise aux fans de Hans Zimmer, son travail sur Man of Steel est loin des attentes qu'il pouvait susciter. Le bonhomme a tout mon respect tout comme il a une liste longue comme le bras de succès amplement mérités, mais pour autant il commence à avoir le syndrome de la photocopieuse (si cher à James Horner que j'adore malgré tout) et sa dernière production ressemble plus à de l'auto-plagiat et parfois même à du bruit qu'à une vraie composition personnelle. Mais il est loin d'être le seul à tourner en rond. Si bien que lorsqu'un compositeur parvient à retrouver la bonne recette, on lui pardonne les emprunts ici et là (Tiens, ça ressemble vachement à du John Powell !) et on le remercie de nous redonner le plaisir de conserver la magie d'une ambiance, d'une histoire même des jours après la projection. Pour exemple je citerais le travail de Brian Tyler (pourtant lui aussi très productif ces dernières années) sur le film Insaisissables. Brian Tyler que l'on retrouvera au générique du prochain Assassin's Creed.

Parce qu’il n’y a pas si longtemps, la musique de films c’était épique, lyrique, grandiose, virevoltant, bouleversant, magique, à l’image de ce que peut produire des groupes de renom sur le net tels que Immediate Music (spécialisé dans l’illustration de bandes-annonces), Two Steps From Hell ou encore Future World Music.


Ecoutez le fruit de leur travail et/ou re-visionnez d’anciens films tels que Krull, les productions Spielberg des années 80 et vous mesurerez douloureusement ce que nous avons perdu.

 

 

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jeudi, 28 février 2013

Mon Affiche du Film Incassable [Dessins/FanArt]

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Un projet que je voulais concrétiser depuis très longtemps. Les visages ont été réalisés uniquement au Tipp-Ex. Samuel a été beaucoup plus facile à reproduire que Bruce et il est clairement plus réussi. Ma modeste contribution à ce chef-d'oeuvre (n'ayons pas peur des mots) et à mon film préféré depuis quelques années déjà !

Ma critique ICI

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Un suite est évoquée depuis plusieurs années. Si jamais elle voit le jour, on espère qu'elle sera à la hauteur de l'original, ce qui constitue évidemment un vrai défi pour le cinéaste.


 

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lundi, 24 décembre 2012

Inception [Cinéma/Critiques]

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Après le très réussi et acclamé The Dark Knight, Christopher Nolan (Memento, The Prestige) signe un nouveau film complexe et passionnant mélangeant habilement thriller, espionnage, drame et fantastique.

Ceux qui s'intéressent de près aux rêves devraient être comblés, le scénario exploitant brillamment les possibilités en la matière et les mécanismes du subconscient. 

Inception n'est pas un film à effets spéciaux - bien qu'il réserve plusieurs scènes inédites et spectaculaires - la construction de son intrigue est sa principale force car d'une rare densité. Elle nécessitera certainement plusieurs visions pour être comprise et appréciée dans sa totalité. A l'heure des blockbusters sans âme, on ne peut que se réjouir de cela !

Une opération délicate, une équipe de spécialistes et un plan génial, tout cela et plus encore dans un monde où les règles se plient à la volonté de l'esprit...

INCEPTION ou quand Mission Impossible rencontre Matrix et Au-delà de nos Rêves !!!

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LE POURQUOI DU COMMENT - SPOIL
 
En ce qui concerne la finalité, le fait de l'avoir vu plusieurs fois en VO m'a carrément livré un indice de taille sur le sens qu'a pu vouloir donné Nolan. Vers le début, au moment où Saito propose le boulot à Cobb dans l'hélico et qu'il hésite, pour le convaincre, il emploie une expression bien précise "So do you want to take a leap of faith ?" (traduit par "Alors vous êtes prêt à me faire confiance ?") que sa femme Mall réutilise (chapitre 8) quand elle veut sauter dans le vide en disant : "I'm asking you to take a leap of faith." (traduit par : " je te demande de me faire confiance.") ce qui nourrit l'explication suivante : Cobb subit une énorme Inception (toute l'opération) à seule fin d'être délivré de ses traumas.
D'ailleurs on peut se dire que pour qu'il accepte le contrat (et donc implicitement la guérison) Saito utilise cette phrase à dessein sachant qu'elle va lui rappeler Mall et le faire fléchir.
A noter que l'expression "take a leap of faith" peut se traduire par "faire un saut de la foi", tout un symbole ! (Non, je ne parle pas d'Assassin's Creed quoique question rêve lucide, Desmond en connait sûrement un rayon, lui aussi )
 
On peut aussi être surpris de la présence de Saïto en Afrique au moment même où Cobb a réellement besoin d'aide. La scène de la ruelle qui se resserre étant une métaphore assez parlante sur la situation du héros. Les hommes à sa poursuite pourraient donc être aussi bien des projections de l'inconscient de Cobb pour exprimer son sentiment de persécution, l'interdiction de rentrer chez lui étant, elle, on ne peut plus réelle. L'omniprésence de Michael Caine (dans le rôle du beau-père de Cobb) est elle aussi très intrigante. On le voit à Paris, lui présentant Ariane, puis on le retrouve à l'aéroport aux USA à la fin du film, renforçant la conviction que c'est sans doute lui (le père de Mall) qui est à l'origine de l'inception de Cobb, de sa thérapie par le rêve.

Je précise que l'interprétation que je donne est la seule que Nolan n'approuve ni ne réfute catégoriquement se contentant de dire que ce serait une explication intéressante...
 
 
 

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samedi, 27 octobre 2012

Skyfall [Cinéma/Critiques]

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Après un reboot qui a marqué les esprits (Casino Royale) et un épisode très pêchu à défaut d'être indispensable (Quantum of Solace), Daniel Craig revient pour la troisième fois dans le smoking du plus célèbre agent secret.

James Bond 007 fêtant cette année son 50ème anniversaire, on pouvait se demander si cela affecterait le contenu de ce nouvel opus. La réponse est un grand OUI, mais bien plus encore qu'on était en droit de l'imaginer.

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Nouvelle venue dans l'univers Bond, Eve (Naomie Harris) fait une entrée remarquée, au-delà de ce qu'elle aurait souhaité !

Si le prologue qui ouvre le film amène déjà un rebondissement appréciable, le fait est que Skyfall est truffé de surprises de tailles et de formes variées, allant de clins d'oeil jouissifs aux anciens épisodes (parfois gentiment moqueurs) jusqu'à un épilogue qui annonce clairement un gros revirement dans la forme et le fond de la saga.

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Bérénice Marlohe interprète l'énigmatique Séverine, l'autre James Bond Girl du film. L'actrice avait réussi à décrocher ce rôle très convoité grâce à une candidature aussi spontanée que motivée. On regrette d'autant plus son court temps de présence à l'écran.

Difficile d'ailleurs de parler de ce qui fait le sel de cette oeuvre sans trop en dévoiler. Et comme c'est pas le genre de la maison de balancer, je me contenterais de vous inciter vivement à payer votre ticket, vous ne regretterez ni votre votre investissement, ni votre déplacement. Sachez seulement que les héros que nous connaissons vont être malmenés comme jamais par un méchant des plus mémorables.

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On l'a souvent dit : on juge la qualité d'un héros à son ennemi, une règle d'or pour les producteurs de James Bond. Javier Bardem incarne Silva, l'un des plus inquiétants méchants de toute la saga. Son face à face avec Daniel Craig (Cowboys et Envahisseurs) fait son effet ! D'une seule réplique, Bond en profite d'ailleurs pour moderniser sa sexualité.

Que vous soyez donc fans de la première heure ou cinéphile en quête d'un solide thriller, vous serez contentés par l'action et l'émotion offertes par ce 23ème chapitre, d'une audace revigorante puisqu'il réussit le pari de casser les codes de la franchise tout en les brassant allègrement. Un retour aux sources bienvenu, alliant nostalgie et modernité.

Certains pourront regretter le scénario bulldozer qui, à l'image de son héros, bouscule violemment son environnement. Mais c'est un parti pris qu'il vaut mieux accepter pour profiter pleinement du généreux fan-service et de la nouvelle orientation choisie. Notons quand même quelques choix maladroits privilégiant l'effet de style à la crédibilité (l'intervention tardif des renforts sur l'île principalement).

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Nouveau également dans l'univers, Ben Wishaw (Le Parfum, Bright Star, Cloud Atlas) apporte une fraîcheur bienvenue et permet d'ironiser à loisir sur le fossé des générations.

Il faut aussi ajouter que le réalisateur n'est autre que Sam Mendes, un homme habitué à varier les genres avec une efficacité égale (American Beauty, Les Sentiers de la Perdition, Les Noces Rebelles, excusez du peu !) à l'instar de Marc Foster (Neverland, Stay, L'Incroyable Destin de Harold Crick) son prédécesseur. Comme prochain metteur en scène, je verrais d'ailleurs assez le tout aussi talentueux et éclectique James Mangold (Copland, Identity, Night and Day). Et vous ?

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Les évènements vont inévitablement rapprocher M et 007 et déterrer brutalement leur passé respectif.

En tous les cas, je te souhaite un Joyeux Anniversaire James Bond et merci pour ce somptueux cadeau grâce auquel on comprend facilement pourquoi tu as si bien vieilli !

Je me réjouissais beaucoup de la présence d'Adele au générique de Skyfall, mais j'avoue être très déçu du résultat. Une composition plutôt fade qui manque cruellement de personnalité malgré la voix de la diva. 

 

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samedi, 04 août 2012

Hommage à Marc Alfos

Comédien, il fut l'un des doubleurs les plus actifs que ce soit dans le domaine du cinéma ou du jeu vidéo. Marc Alfos s'éteint à seulement 56 ans et avec lui une voix unique qui vous est forcément familière.

 

 

 

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vendredi, 16 décembre 2011

Mission Impossible : Protocole Fantôme [Cinéma/Critiques]

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Après un troisième opus qui nous avait littéralement laissé sur les rotules par son rythme effréné et ses rebondissements multiples, on se demandait bien comment Tom Cruise (Jack Reacher, Oblivion, Edge of Tomorrow) - puisque c'est sa série - allait bien pouvoir mettre la barre plus haut.

Pour se donner toutes les chances, la star a embauché une nouvelle fois un réalisateur de génie, mais cette fois issu tout droit de l'animation. Cela fait sourire dit comme ça jusqu'à ce que l'on sache que le bonhomme en question s'appelle Brad Bird et qu'il a à son actif des perles comme Les Indestructibles, Le Géant de Fer ou encore Ratatouille. Oui, après ça, on est quand même plus rassuré.

Le cinéaste s'en tire d'ailleurs avec les honneurs et le film remplit parfaitement son contrat : action percutante, retournements de situation, suspens, humour, spectacle, cascades de haut vol, quelques violons pour adoucir et surtout une panoplie de gadgets à rendre James Bond vert de jalousie. Mais c'est là que le bât blesse. A trop vouloir épater la galerie et innover, le film frôle parfois le ridicule et on assiste régulièrement à des scènes qui cassent le réalisme minimum qu'on est en droit d'exiger même pour un film de cet acabit.

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Jeremy Renner (Avengers) et Paula Patton (Déjà-Vu, Mirrors) : deux nouvelles recrues pour cet épisode et pas des moindres qui auront chacune des raisons personnelles de s'impliquer dans cette mission impossible !

Tout est fait pour rendre la tâche ardue à notre équipe, mais tant et si bien que cela en devient risible. Et puis, suite à une pirouette du scénario, les quatre agents sont censés se retrouver avec des ressources très limitées et aucun renfort possible. Seulement, concrètement on ne voit guère de différence par rapport aux conditions habituelles. Pire : les moyens dont ils bénéficient sont justement démesurés, le film s'invitant même au rayon SF l'espace de quelques scènes. Cherchez l'erreur !

Il aurait sûrement été beaucoup plus intéressant d'exploiter cette situation de crise à fond en ne donnant accès à aucune technologie et en réservant la prouesse de la réussite aux seules capacités humaines (physiques et mentales) des agents. De cette manière ce 4ème opus se serait clairement forgé une identité et une identité forte de surcroît.

L'on ne peut s'empêcher aussi de trouver le méchant de l'histoire bien fade et inexistant comparé à la prestation mémorable de Philip Seymour Hoffman dont le face à face avec Cruise dès les premières minutes de Mission Impossible III demeurera dans les annales question tension maximum.

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Que ce soit dans la séduction ou dans l'action, Paula Patton éblouit et constitue l'un des gros attraits de cet épisode ! On aurait tellement aimé que Léa Seydoux (La Belle et la Bête) soit aussi convaincante qu'elle afin de lui offrir une rivale digne de ce nom !

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Tout cela plus quelques autres maladresses (la tueuse française est plus impressionnée qu'impressionnante) font que ce dernier opus reste inférieur au troisième, beaucoup plus maîtrisé et équilibré, mais n'en demeure pas moins un solide divertissement et une occasion de plus pour Tom Cruise de prouver qu'il a toujours la forme et le chic pour embrasser la belle du film, en l'occurrence la magnifique Paula Patton (déjà vue dans le film Déjà-Vu !) espionne de charme et de choc qui réussit l'exploit de lui voler la vedette le temps de quelques scènes musclées et drôles à la fois !

Par contre on attend toujours un épilogue bien pêchu parce que si ça continue, ça va s'appeler Mission Impossible : Les Feux de l'Amour !

 

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jeudi, 10 novembre 2011

Tintin et le Secret de la Licorne [Cinéma/Critiques]

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Encore une adapatation qu'on attendait au tournant, mais celle-là on peut dire qu'elle avait un slogan de poids : Le héros de BD le plus célèbre au monde porté à l'écran par le réalisateur le plus adulé !

Avec la saga des Indiana Jones, Spielberg (E.T., Indiana Jones et le Temple Maudit, Jurassic Park) avait déjà clairement démontré son goût des histoires d'aventures rocambolesques et son talent à les mettre en scène.

Mais pour Tintin, il demeurait un autre type de challenge, transposer des images fixes et des personnages typés inscrits depuis longtemps dans l'inconscient collectif sans les trahir, mais sans non plus tomber dans le ridicule.

James Cameron ayant déblayé le terrain grâce à Avatar, la performance capture (voir aussi l'incroyable travail sur King Kong ou plus récemment La Planète des Singes : Les Origines) devenait alors le remède idéal pour donner vie à l'univers d'Hergé.

Epaulé par Peter Jackson - devenu lui aussi un expert en technologie dernier cri - le projet est lancé, réunissant un casting alléchant : Jaimie Bell (Billy Elliott, King Kong) Andy serkis (Le maître incontesté de la Performance Capture) Daniel Craig (Casino Royale, Skyfall, Spectre, Cowboys et Envahisseurs) ou bien encore notre bien-aimé Gad Elmaleh (malheureusement beaucoup trop sous-exploité).

Résultat de cette recette : une bonne claque ! Spielberg n'a non seulement pas perdu la main, mais on  sent bien qu'il a profité de cette récente technologie pour repousser encore plus loin sa vision du cinéma de divertissement.

Passé l'étonnement de voir des visages photo-réalistes et d'autres très bien rendus, mais indéniablement plus cartoonesques - on se laisse totalement embarquer dans l'aventure trépidante du reporter affublé du Capitaine au juron facile et à la soif insatiable.

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Visuellement, c'est beau à pleurer, les paysages et décors sont de toute beauté, ça bouge du tonnerre ( de Brest !), c'est drôle, les angles de vue et les mouvements de caméra nous immergent complètement dans l'action comme rarement, sans parler des magnifiques transitions.

On ressort essoufflé de certaines courses-poursuites où la crédibilité se perd en cours de route, mais on s'y fait et on s'y fait d'autant plus que c'est au service des personnages et de l'humour. Et puis quel bonheur de retrouver des visages emblématiques comme les Dupont et Dupond, une certaine Castafiore et même des personnages secondaires qui sont restés dans nos mémoires. On comprend pourquoi c'est cet album qui a été choisi plutôt qu'un autre. Des rencontres déterminantes, Tintin va en faire quelques-unes au cours de son périple !

On peut tiquer sur le design de Milou, moins réaliste que les autres animaux présents à l'image et sur le fait que les monologues réguliers du reporter sont plus séduisants sur papier.

Mais Hergé peut reposer en paix, c'est certain. L'avenir de son héros fétiche est assuré. On a hâte de le retrouver pour une suite très prometteuse sous la houpette...euh...la houlette de Peter Jackson cette fois dans Le Trésor de Rackham le Rouge !

A vos agendas, Moussaillons !!!

 

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mercredi, 03 août 2011

Super 8 [Cinéma/Critiques]

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J.J. Abrams le dit clairement : malgré les (nombreuses) apparences, Super 8 n'est pas un hommage au cinéma de Spielberg (producteur du film), mais bel et bien à sa propre enfance. Au vu de la sensibilité de l'histoire et de ses héros (les enfants en tête), il apparaît que les deux cinéates ont eu la même. Ils étaient donc faits pour se rencontrer et ce, pour notre plus grand plaisir de spectateur.

Le résultat est ce qu'on pouvait attendre de ce duo fantasmé : on rit, on pleure, on frémit et on en prend plein les yeux, un peu comme si les deux hommes avaient fusionné le meilleur de leur filmo respective. De E.T. on passe à Cloverfield sans oublier Rencontres du 3ème Type ou encore Les Goonies. Il y a pire comme ingrédients !

Les cinéphiles avertis se feront d'ailleurs une joie de repérer toutes les références, similitudes et autres analogies avec le cinéma de Spielberg des années 70-80. Si vous êtes nostalgique de cette époque, allez voir Super 8 les yeux fermés. Si vous avez en plus gardé votre âme d'enfant, l'émotion - déjà très présente - n'en sera que plus grande pour vous.

Le film brasse avec bonheur Drame, SF, Thriller, Fantastique, avec parfois quelques incohérences, mais sans jamais perdre de vue ce qui fait et fera toujours le coeur d'une bonne histoire : les personnages !

[Re] Bienvenue dans un cinéma qu'on croyait disparu et qui revient, plus puissant que jamais !

 

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mercredi, 27 juillet 2011

Green Lantern [Cinéma/Critiques]

 

Forte de plusieurs triomphes au box-office, l'écurie Marvel (Iron Man 1, Iron Man 2, Thor) sortira bientôt en grandes pompes son Captain America : First Avenger (le 17 aôut). En attendant, DC Comics (Superman, Batman) nous offre l'adaptation de Green Lantern sur grand écran.

Outsider de poids ou challenger insipide ?

Les critiques (assassines) le présentent en majorité comme le second, moi je le définis très volontiers comme le premier. Voyons pourquoi en quelques lignes :

Le nom Green Lantern n'évoque certainement pas grand-chose au grand public hormis aux afficionados purs et durs nourris aux comics. Et pourtant, il a de sérieux arguments pour élargir son lectorat et l'intérêt limité qu'il a suscité jusqu'à présent.

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Blake Lively (The Town) est pilote comme Hal. Ils se connaissent tous deux depuis l'enfance et ont même eu une liaison. Ce passé va être exploité de manière étonnante et cocasse, ironisant sur la capacité (parfois surréaliste) des super héros à garder leur anonymat.

 Hal Jordan (alias Green Lantern alias Ryan Reynolds) est un pilote d'avion qui n'a pas froid aux yeux, pour le meilleur et pour le pire. La peur, il la redoute peut-être plus que les autres et c'est sûrement pour cela qu'il brave le danger à outrance ou qu'il passe d'une fille à une autre : une manière de se protéger et de penser qu'il maîtrise sa vie. Mais il va se remettre (enfin) en question lorsqu'il va entrer en contact avec un être agonisant venu d'ailleurs et surtout une bague verte aux propriétés extraordinaires.

Green Lantern fait donc partie de ces super-héros vierges de pouvoirs (et de responsabilités) qui vont accéder - via une expérience hors du commun -  au statut de protecteur, à l'instar de Iron Man. Mais ce qui fait de Green Lantern un justicier novateur et réellement passionnant c'est aussi bien sa capacité à matérialiser tout ce qu'il veut (ce qui réserve au spectateur des joutes inventives) que la nature ouverte et inédite de son univers baignant allègrement dans le space-opéra et lui conférant une identité vraiment unique et attachante.

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Mark Strong (Sherlock Holmes, Kick-Ass)  incarne Sinestro, leader des Green Lantern, prêt à tout pour préserver la paix dans l'univers.

De la séquence d'introduction (sublime avant-goût) à la découverte de la planète Oa (siège des Green Lanterns) en passant par l'entraînement savoureux et le final démesuré, le film expose sa richesse et sa générosité du début à la fin sans jamais faiblir, que ce soit dans sa narration ou dans son imagerie. La faiblesse du film provient essentiellement du personnage de Hal Jordan qui manque de nuances et de profondeur.

Mais l'intérêt est préservé grâce au  fait que le héros ne soit pas solitaire et fasse partie intégrante d'une élite universelle, redéfinissant intelligemment le concept même de super héros.

L'univers que le film met en place augure du meilleur pour une suite (restez après la fin pour en savoir plus à ce sujet) en espérant que les amateurs de grand spectacle VERTigineux ne se laissent pas décourager par des critiques pour le moins séVERT !!!

 

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mercredi, 28 juillet 2010

The Dream is Collapsing par Hans Zimmer


Inception - 03. Dream is Collapsing par bullesdesavon51

 

Après avoir accompagné Christopher Nolan sur les Batman, Hans Zimmer offre cette fois une composition réellement originale et marquante. Avec quelques thèmes simples, mais accrocheurs et des motifs répétitifs montant crescendo, le compositeur installe une atmosphère fantastique à la fois pesante et mystérieuse qui complète à merveille les images du film volontairement chiches en effets spéciaux et c'est ce qui en fait la richesse.

L'une des meilleures démonstrations de cet aspect se trouve dans Dream is Collapsing, formidable morceau qui distille l'émotion du spectaculaire et de la démesure comme rarement en assenant des sonorités puissantes.

Mombasa - qui illustre la course-poursuite en Afrique - est également très réussi avec son rythme hypnotique.

Cela n'empêche pas
Hans Zimmer d'introduire des thèmes plus délicats comme dans Dream within a Dream, Wainting For a Train ou encore Time.

A noter quelques extraits de "Je ne regrette rien", la célèbre chanson d'Edith Piaf, qui contrairement aux apparences n'est en rien un clin d'oeil à Marion Cotillard et son rôle dans la Môme.

 

Pour découvrir toutes mes critiques de musiques de film : http://www.musiquedefilm.be/members.cgi?go=memberreviews&...

 

 

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mercredi, 14 juillet 2010

Angelina Jolie et moi [Nouvelles/Humouroïd]

 

Qui n’a jamais rêvé de plonger dans ses grands yeux clairs, si limpides, comme pour s’y purifier ?

Ou de s’échouer sur ses lèvres généreuses comme sur la plage la plus aphrodisiaque du monde ?

 

Ce jour-là, elle était à Paris.

Moi qui n’ai jamais l’occasion de m’y rendre, j’y étais aussi pour des raisons pour le moins étranges.

Quelques jours plus tôt, j’avais fait l’acquisition d’un médaillon en argent frappé d’étranges symboles évoquant une civilisation antique prolifique, maintenant disparue et réduite sans doute aujourd’hui à quelques ruines éparpillées.

Moi qui avais de gros soucis d’argent, je me voyais déjà troquer l’objet contre une belle quantité d’euros et renflouer ainsi un compte en banque aussi insubmersible que le Titanic.

Un ami m’avait recommandé un expert situé dans le 14ème arrondissement.

Seulement, l’adresse qui correspondait à son enseigne abritait en réalité un magasin de farces et attrapes.

Pour une farce, c’était une belle farce et je faisais un beau dindon. J’avais été bien attrapé en tout cas.

Je me rappelais alors le sourire espiègle de mon cousin en m’offrant le médaillon qui selon lui n’avait aucune valeur et celui de mon ami, s’extasiant à outrance sur les détails du pendentif en me donnant bien trop expressément les coordonnées d’un antiquaire soi-disant réputé.

Comment s’appelait-il déjà ce commerçant ? Monsieur Jérémie Largent de Paris.

En analysant ce pitoyable jeu de mots, tout devint clair. J’avais fait l’objet d’un stupide pari entre mon cousin et mon ami. Qui des deux avait gagné ? C’était bien là le dernier de mes soucis.

Poussant un juron qui choqua un teckel promenant une vieille dame, je décidai de rentrer chez moi sur le champ en élaborant sur mon siège de seconde classe, la plus froide des vengeances.

Et puis, je ne sais pour quelle raison, au moment de tourner les talons pour revenir à la gare, j’ai aperçu dans la vitrine de la boutique quelque chose qui m’a fait oublier mon infortune. Quelque chose qui m’a chuchoté à l’oreille que tout ceci avait réellement un sens et que j’étais sur le point de vivre l’aventure la plus mémorable de toute ma vie.

Car dans la vitrine de ce magasin de farces et attrapes, je ne vis rien de moins que le reflet d’Angelina Jolie.

Je la reconnus immédiatement, au premier coup d’œil. Malgré ses lunettes de star des sixties, son énorme chapeau à ruban, c’était bien elle. J’avais vu trop de ses films et de ses prestations à la télé américaine pour me laisser abuser par quelques accessoires.

J’avais un pouvoir capable de déjouer les stratagèmes les plus élaborés, capable de décrypter les codes les plus hermétiques : j’étais un fan !

Elle portait aussi une robe blanche, éclaboussée par un soleil estival, des chaussures à talon nacrées avec une pointe de bleu et un petit sac à main assorti.

J’avais rêvé cette scène des milliers de fois.

Je ne pouvais donc pas rester les bras croisés à la regarder bêtement s’éloigner. C’était une occasion en or, de celles qui n’ont aucune intention de se reproduire.

Incapable d’élaborer la moindre phrase de circonstance face à mon idole, je décidai de la suivre en espérant trouver en chemin la réplique idéale qui me rendrait instantanément irrésistible à ses yeux. En espérant surtout que la barrière de la langue n’en soit pas une. Mon anglais n’était pas mauvais, mais le sien ne devait pas l’être non plus.

J’étais donc là, en train de filer l’actrice la plus courtisée de la Voie Lactée, à aligner péniblement trois mots dignes de ce nom dans la langue de Shakespeare lorsque je la vis heurter au coin d’une rue deux touristes européens à en juger par leurs vêtements décontractés et leur charmant accent. Un long paquet contenant un bouquet de roses leur était tombé des mains. J’entendis Angie s’excuser et cette initiative ne fit que gonfler l’estime que j’avais déjà pour elle. La scène aurait pu se passer d’être commentée si au moment de ramasser ledit paquet, Angelina n’avait remarqué son contenu pour le moins insolite.

Et c’est alors que tout se passa extrêmement vite.

L’homme en chemise rayée et bermuda écossais beugla une sorte d’avertissement. Angie arracha le fusil à pompe de son enveloppe au milieu d’un magnifique envol de roses.

L’homme en profita pour pointer sur elle un pistolet-mitrailleur. Angie secoua doucement la tête. Son chapeau s’envola, permettant à ses longs et magnifiques cheveux châtains de se déverser et de fouetter au passage le visage bovin de son adversaire. Il tira avec une telle maladresse que sa rafale trouva le moyen de se loger dans le poteau du panneau sens interdit derrière lequel je m’étais réfugié et ce dans une flopée d’étincelles du plus bel effet.

De mon abri, je vis la touriste en combishort  kaki et casquette gavroche marmonner dans un micro lilliputien et dégainer un couteau de chasse.

- Angie, attention !

Sur le moment, j’ignore si elle m’entendit. Toujours est-il qu’elle prit le temps de sourire avant de soigner les caries du criminel au calibre 12. Elle prit sa paire de lunettes par une branche et l’envoya - d’un geste élégant, mais d’une précision redoutable – chausser le nez de la touriste qui s’en trouva toute penaude. Angie s’engagea avec elle dans un furieux corps à corps, parant la lame aiguisée avec le canon de son arme et frappant rageusement de la crosse.

Derrière mon poteau, je l’encourageai du mieux que je pouvais.

La touriste encaissa deux coups qui auraient décroché la mâchoire d’un boxeur poids lourd avant d’être aculée contre un réverbère. Angie récupéra ses lunettes et lui colla son fusil entre les seins. Avant de se raviser. Elle esquiva une dernière fois la lame vivace avant de tordre le bras de sa rivale avec son fusil, de récupérer son arme et de lui ouvrir une seconde bouche en travers du visage.

Comme toutes les roses n’avaient pas encore eu le temps de retomber, Angie en pêcha une au passage, qu’elle coupa avec les dents avant de la glisser dans ses cheveux. La seconde d’après, elle était de nouveau prête à en découdre, le fusil à pompe dans une main, le pistolet-mitrailleur dans l’autre et le couteau de chasse entre les dents.

Là, j’ai cru que ma mâchoire inférieure allait se faire la malle sur le trottoir.

Je l’entendis siffler ce qui eut le don de me ramener un peu à la réalité.

Je pensais qu’elle appelait un taxi, mais comme elle regardait avec insistance dans ma direction, je compris qu’elle s’adressait à moi. Je quittai ma cachette, complètement ankylosé. Je me mis à avancer vers elle, dans un état second, m’attendant à tout instant à entendre le réalisateur du film criez : « Coupez ! » ou plus encore la sonnerie de mon réveil pour m’annoncer que tout ceci n’était qu’un rêve.

Mais rien de tout cela ne se produisit. Je continuai à avancer vers Angelina Jolie si bien que je finis par me trouver face à elle, face à la légende vivante qu’elle incarnait pour moi depuis tant d’années.

Je ne vais pas me lancer une nouvelle fois dans un concert de louanges vantant sa plastique et plus particulièrement sa beauté féline.

Mais disons qu’à ce stade de l’aventure, ma mâchoire inférieure prit définitivement le large.

Angelina avait toujours le couteau entre les dents et pourtant je compris parfaitement ce qu’elle me dit. A l’école, j’avais dû prendre anglais avec option.

- Mets les vêtements du type !

Dans toute autre circonstance, j’aurais un peu fait la sourde oreille à ce genre d’invitation, mais là, on peut dire que c’était un cas de force majeure.

Chacun de notre côté, on a déplacé un cadavre jusqu’à un endroit plus discret et on a échangé nos vêtements avec celui du mort.

Non, je n’ai pas trop pris le temps de mâter la belle Angelina en sous-vêtements. Je voulais tellement pas la décevoir que j’ai enfilé consciencieusement la chemise à rayures et le bermuda écossais en serrant ma ceinture au maximum pour ne pas qu’il me tombe sur les chevilles. J’ai retrouvé Angie en combishort kaki, la tête enjolivée d’une casquette gavroche.

Elle était ravissante évidemment. Tout lui allait. Comme si les habits eux-mêmes savaient à qui ils avaient affaire et qu’ils se mettaient en devoir de s’adapter à ses courbes personnelles.

J’ai mieux compris pourquoi elle avait évité de mettre du sang sur les fringues des pseudos touristes au moment de les achever. Manifestement, elle avait prévu depuis un certain temps qu’on allait prendre leur place.

Comme pour confirmer son plan, une Mercedes noire s’est arrêtée à notre hauteur. Une vitre teintée s’est baissée. Angie m’a balancé le pistolet-mitrailleur - que j’ai rattrapé de justesse – avant de dire quelque chose dans la langue des touristes. De l’espagnol ou de l’italien peut-être, j’ai toujours confondu les deux. Elle a dû dire un truc gentil au chauffeur ou mentionné un code ultra secret car la portière s’est ouverte et moins d’une minute après, on était sur la banquette arrière en route vers une destination totalement inconnue.

Je n’avais guère le temps de me remettre de mes émotions. Je transpirais, mais j’espérais qu’Angelina ne le remarquerait pas. Ca ferait tache, c’était le moins qu’on puisse dire. Et puis on devait passer pour des terroristes professionnels quand même !

Une seconde, là ! Qu’est-ce que je viens de dire ? Des terroristes professionnels ???

Bon après tout, j’étais avec la femme de ma vie. Cela méritait bien quelques désagréments.

- Au fait, me dit-elle du ton le plus badin qui soit, je ne t’ai pas remercié quand tu m’as prévenue tout à l’heure.

Et là, je peux vous dire que j’étais prêt à jouer mon rôle de terroriste professionnel à la perfection car en guise de remerciement Angie m’a carrément embrassé sur la bouche.

Oui avec sa bouche ! Un vrai goût de paradis...

Je commençais à peine à planer lorsque la voiture s’est arrêtée. J’ai laissé ma compagne faire la discussion et régler la course et l’instant d’après on se retrouvait devant les portes d’un restaurant quatre étoiles. Là-dessus, Angelina m’a regardé droit dans les yeux :

- T’as faim ? Moi, je mangerai une vache !

Sa réplique n’avait rien d’extraordinaire, j’en conviens, mais parce que c’était elle et parce que c’était moi, j’ai cru qu’elle m’avait récité un poème. J’ai bien failli m’évanouir. Je n’étais guère habitué à vivre autant d’émotions en si peu de temps. Je me sentais comme vidé.

Manger un peu allait sûrement me faire le plus grand bien, pensai-je naïvement.

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Angelina aimait le bon vin français. Je ne buvais pas une goutte d’alcool.

On était fait pour s’entendre.

- Trinquons, dit-elle, en levant son verre dans un grand déballage d’émail.

En un éclair, j’avais rempli le mien et je faisais tinter le cristal en m’émerveillant de son éclat dans les yeux de ma compagne.

- A Paris, la Capitale de l’Amour et des amoureux !

J’avais parlé sans m’en rendre compte et de la même manière je vidai mon verre d’un trait.

J’ignore si cela vint de ma formule ou du fait que je faillis m’étrangler, mais Angie s’esclaffa. Et maintenant que j’ai eu la chance de l’entendre, je peux vous assurer que le rire d’Angelina Jolie est certainement le remède à 99% des problèmes dans le monde.

Note : Un peu travaillé, il pourrait même certainement guérir le cancer. Je ne manquerai pas de me pencher sérieusement sur la question si jamais je sors vivant de cette aventure !

- Dire que je suis ici, avec vous, simplement à cause de ça.

Tout en disant cela, j’exhibai le médaillon si généreusement offert par mon cousin. En pensant à lui et à mon ami se moquant de moi, j’eus soudain très envie de les appeler pour leur raconter dans quelle exquise galère j’étais embarqué grâce à leur méchanceté. Mais je craignais trop que dans ce cas ils s’attribuent le mérite – même accidentel – de ma rencontre miraculeuse avec…

Angelina m’arracha littéralement le médaillon des mains. Nos doigts se touchèrent l’espace d’un instant et mon cœur entonna la Marseillaise.

- Mon dieu, mais c’est le médaillon de Tankpur Jilah ! Je reconnais les symboles !

Comme ma mâchoire inférieure était aux abonnées absentes, mes yeux décidèrent de prendre le relais et exprimèrent à leur tour le besoin de s’extirper de mon visage, l’air de rien.

- Quoi ?

Ma compagne étudiait l’objet avec une telle passion que je le jalousais.

- C’est un véritable artefact. Selon la légende, il possèderait des pouvoirs incommensurables. Mais uniquement dans la main de l’élu.

- On joue dans le prochain Tomb Raider, c’est ça ?

Elle me fixa, éberluée. Je compris que j’avais dit une idiotie.

- Ah, non, c’est une nouvelle série !

Nouveau regard appuyé de l’intéressée.

Elle colla alors le médaillon sur mon front et attendit une réaction.

- Il faut que je sache si c’est toi.

Malgré son sérieux à elle et tout ce qui m’était arrivé auparavant, je n’arrivais pas accrocher à cette histoire d’élu et de pouvoirs mystiques. Ca devenait trop ambitieux. J’ai toujours aimé cultiver mon imagination, mais elle-même commençait à y perdre son latin.

- Pourquoi tu me demandes pas plutôt de tirer sur les ailes d’une mouche, comme dans Wanted ?

Sa gifle eut le don de me ramener dans sa réalité à elle.

Je préférais son baiser, mais ça restait quand même un contact privilégié avec mon idole.

- Comment as-tu pu entrer en possession d’un objet aussi précieux si tu n’es pas l’élu ?

- Et bien, en fait, c’est mon cou…

Je m’interrompis à temps. Comment aurais-je pu introduire dans une conversation avec Angelina Jolie mon enfoiré de cousin, collectionneur d’oiseaux morts et de paris débiles ? Non, je pouvais faire mieux que ça. Je me décontractai et produisis un sourire étudié :

- C’est mon courage qui m’a entraîné sur la piste d’un ami archéologue…

Nouvelle gifle. Contact très rapproché. Très privilégié.

Je stoppai un saignement de nez avec un mouchoir brodé à mes initiales.

- T’as la main dure, Angie ! Je ne suis pas de taille pour cette opération, je crois. Pourquoi tu m’as emmené avec toi ?

Oui, je me suis permis de la tutoyer. L’avantage, c’est que comme on parlait en anglais, elle y a vu que du feu.

- Je t’avais repéré devant cette boutique. Mon associé s’est fait liquidé dans l’avion il y a tout juste deux heures. Il me fallait un complice. Tu tombais à pic. D’autres questions, chéri ?

- Chéri ?

Quelque chose détourna son attention. Elle fixa la harpiste qui somnolait sur son instrument.

- Ne bouge pas.

Elle quitta la table et c’est alors seulement que je remarquai la fascination des autres clients et leurs regards envieux. Nous constituions sans aucun doute, Angie et moi, un couple hors norme. Et vous savez quoi ? Ca me plaisait énormément.

Quand je reportai mon attention vers la harpiste, elle semblait avoir changé d’attitude. Ses doigts couraient avec plus de conviction sur les cordes et son corps lui-même dansait souplement au rythme de plus en plus rapide qu’elle imprimait à son instrument.

Et puis, une nouvelle fois, la réalité se plia à d’autres convenances.

La harpe se mit à faire un bruit de guitare électrique et voilà que la harpiste apparut sous les traits de mon Angelina qui avait profité de ma brève distraction pour prendre discrètement la place de la musicienne.

Elle se lança dans un solo dément qui laissa l’assistance sur le cul. Moi-même, je fus subjugué par cette improvisation rocambolesque.

Une première corde finit par casser et vola à travers le restaurant. Avant de sectionner la carotide d’un quinquagénaire qui aromatisa ses spaghettis de son sang. Sa femme hurla évidemment, bientôt imitée par toute l’assemblée.

- Couche-toi sous la table ! cria Angie par-dessus le vacarme naissant.

J’obéis avec une hâte admirable. Seulement au lieu de trouver  un refuge confortable sous la table en question, je trouvai deux  pistolets-mitrailleurs à mon intention.

Et la voix de ma partenaire – parfaitement synchro – m’ordonna :

- Tue-les tous !

Ok, Angie, c’est bien parce que c’est toi !

Je m’emparai des deux armes et soulevai la table. Me dressant alors comme un improbable ange de la mort – en chemise à rayures et bermuda écossais, je le rappelle pour les deux du fond - j’ouvrai le feu sur les clients attablés avec une incroyable absence de scrupules, échangeant entre deux rafales mortelles un clin d’œil complice avec mon adorée qui de son côté décapitait à merveille avec les cordes de sa harpe.

Le restaurant ne tarda pas à prendre des allures de Colisée romain.

Bien sûr il y eut bien quelques clients réfractaires au massacre savamment orchestré et qui nous défièrent avec moult lancers de fourchettes et de couteaux. Mais Angelina et moi on était réglé comme du papier à musique.

A un moment bien précis, je me souviens qu’Angie lâcha une nouvelle corde qui explosa une bouteille de vin. Les fragments de verre ne trouvèrent rien de mieux à faire que s’éparpiller sur le visage d’un malotru avec une précision chirurgicale.

- Mince, fit Angie, mon millésime préféré !

Perturbé par sa déveine, elle ne vit pas la femme aux allures de vieille baronne lui lancer une paire de baguettes chinoises avec une rage débridée. Heureusement, je veillai au grain. D’une seule rafale,  je réduisais les projectiles en miettes et déridais la vilaine.

Et puis comme il n’y avait plus personne à tuer, le silence s’est pointé à la fin du spectacle, l’air de rien. Nous, on l’a laissé s’installer et passer commande. On s’est regardé avec un sourire, ravageur de son côté, un peu béat du mien. Elle m’a lancé un baiser, sans doute pour me remercier de l’avoir sauvée et la table que j’avais soulevée en prenant mes armes a choisi ce moment là pour me retomber dessus. Putain de gravité !

- Tu es peut-être l’élu, finalement !

Fut la dernière chose que j’entendis avant le fondu au noir.

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Plus tard – c’est-à-dire une fois sorti des vaps - on a loué une moto japonaise rouge sang à un type un peu louche qu’elle semblait connaître et qui louchait justement. Elle l’a appelé Tonton. Sûrement un nom de code. On en a aussi profité pour changer de fringues dans des cabines téléphoniques modifiées en cabines d’essayage. Le Tonton en question devait être un sacré bricoleur à ses heures perdues. En me regardant dans le miroir, je me reconnus tout en me trouvant quelque chose de changé. J’aurais bien été incapable de dire quoi sur le moment. Mais rien que l’idée me plaisait assez.

Cette expérience avec une véritable icône du septième art que j’idolâtrais depuis longtemps était en train de me transformer. Cétait pas trop tôt. J’allais peut-être enfin avoir ma revanche sur cette merde empaquetée dans du velours que j’appelais ma vie jusqu’à ce jour.

On ressortit de la cabine, vêtus tous les deux d’un jean et d’un débardeur. Je lui souris machinalement. Elle esquissa une moue de satisfaction en me jaugeant des pieds à la tête.

Si c’était vraiment qu’un putain de rêve de plus, celui qui allait me réveiller aller passer le pire moment de sa vie. J’espérais alors profondément que ce serait mon enfoiré de cousin.

 

Une minute plus tard, j’étais derrière Angie qui pilotait avec une main et se remaquillait un peu de l’autre.

L’adrénaline commençait à retomber et je réalisai dans quelle merde je venais de me mettre rien que pour ses yeux.

- Dis-moi, je peux savoir pourquoi j’ai abattu de sang-froid une trentaine de personnes ?

- C’est top secret ! dit-elle en pensant que j’allais me contenter de ça.

En même temps, je n’avais pas trop le choix. Si ?

- Je travaille avec toi, non ? Tu pourrais quand même me mettre au parfum !

Ouais, vous avez raison, c’est mieux comme ça. Faudrait pas non plus que je passe pour le dernier des guignols.

Je vis son expression amusée dans le rétroviseur.

- T’es mignon quand tu es en colère.

Bah, oui, qu’est-ce que vous voulez ? Quand elle ne disait rien elle était déjà très charismatique, alors imaginez lorsqu’elle me faisait un tel compliment…

Je me sentis rougir jusqu’à la racine des cheveux.

Elle accéléra. Mon visage se noya dans la jungle de ses cheveux. Ils sentaient très bon. Ca ne vous surprend pas, j’imagine.

- C’est quoi le programme, maintenant ? Saut à l’élastique depuis la Tour Eiffel, fouilles archéologiques au Père-Lachaise ?

Le moteur de la moto baissa d’un ton pour que je puisse entendre Angie éclater de rire.

Je vous ai déjà parlé de son rire, je crois, non ? N’hésitez pas à me demander, sinon. Ce serait vraiment trop bête de passer à côté de ce genre de détails.

- C’est tentant, mais non, répondit-elle. Maintenant que nous avons rempli le contrat du restaurant, on doit se rendre à une importante entrevue. Si tout se passe bien, on nous conduira à l’homme que je recherche.

- On fait tout ça pour que tu liquides un grand méchant, c’est ça ?

- C’est ça ! C’est le seul moyen de l’approcher.

- Et qui c’est ce type ?

Oui, j’essayais de me prendre au jeu, qu’est-ce que vous voulez ?

- C’est un chef terroriste. Il est responsable de plusieurs attentats aux Etats-Unis. Depuis quelques temps il a jeté son dévolu sur ton pays.

Je déglutis.

- Il projette quelque chose sur Paris ?

- Précisément.

Comme s’il avait deviné que c’était la fin de la conversation, le moteur de la moto ronronna de plus belle tandis que nous nous élancions à travers un réseau d’étroites ruelles. J’en profitai pour enserrer plus étroitement la taille d’Angie en m’enivrant de son parfum. On aurait dit qu’elle sortait de la douche.

 

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podcast

 

Elle m’avait forcé à la seconder dans un véritable bain de sang et pourtant je la voyais toujours comme une déesse. Pure et rayonnante derrière ses instincts les plus guerriers.

Je crois que ma dévotion pour elle est tout simplement incurable.

Plus tard, nous longeâmes les bords de la Seine. Elle me demanda :

- Tu connais Paris ?

J’aurais voulu lui mentir, mais je sus intuitivement que cela ne servirait à rien. Et puis je l’estimai trop pour la tromper.

- Sûrement moins que toi !

- Dommage.

- Pourquoi ?

- On est suivi.

Je tordis le cou, assez pour voir du coin de l’œil rien moins que quatre Mercedes noires s’approprier la route derrière nous à grands coups de pare-choc.

- C’est peut-être un rallye ? lançai-je sans aucun espoir.

Le fait qu’elle accélérât davantage m’encouragea vivement à me débarrasser de ce genre de réplique à la con.

- Prends ma place !

J’avais à peine saisi l’idée que d’un mouvement souple, mais ferme de son corps athlétique elle m’envoyait sur le siège du pilote et se propulsait sur la plus proche des Mercedes.

Les rétros de la moto étaient d’un type révolutionnaire. J’y voyais aussi bien que sur un écran géant. Tonton était vraiment un pro dans son domaine.

Je la vis atterrir sur le capot de la voiture et y planter la lame d’un sabre pour s’y accrocher, tout en arrosant copieusement l’intérieur de la caisse de son pistolet-mitrailleur. Elle sauta juste à temps avant que la Mercedes privée de pilote ne se lance dans un concours de tonneaux. Je jurai. Cette salope de gravité savait bien se faire oublier quand elle le voulait.

Je ne perdais pas une miette de l’action. Mon héroïne retomba sur la voiture suivante tandis que les deux autres ouvraient le feu sur elle, chacune d’un côté. Là, je sentis un frisson me parcourir à la pensée qu’elle se retrouve sans issue. Mais c’était mal connaître mon Angie.

Elle s’incrusta dans la voiture en se balançant à travers le pare-brise. Là, malgré mon super rétro, je fus bien incapable de voir ce qui se passa. Mais moins d’une minute après, je la vis ressortir par le toit ouvrant telle une panthère en chasse, la lame rougie et le regard fiévreux. Elle était comme habitée. Même sa chevelure semblait animée d’une vie propre.

Le crépitement des balles ennemies lui fit quitter sa brève inertie. Elle bondit à nouveau, laissant le véhicule s’encastrer violemment sous la citerne d’un poids lourd qui avait jugé bon de déraper, histoire de rendre la scène plus spectaculaire.

La citerne explosa et les restes carbonisés de la Mercedes se mirent à pleuvoir sur la route. Tandis que je slalomais pour éviter un décès prématuré, je vis ma partenaire - suspendue en plein vol dans un superbe ralenti - trancher de sa lame effilée une roue enflammée filant droit sur elle tel un météore. Puis elle disparut dans la troisième voiture.

Je poussai un nouveau juron. Elle était en train de se taper tout le boulot. On était associé, non ? Vous serez donc tous d’accord pour dire qu’il était grand temps que je passe à l’action.

Ni une, ni deux, je décélérai pour arriver à la hauteur de l’autre voiture hérissée de canons d’armes de tout acabit. Ou les mecs avaient appris à viser en buvant de la vodka ou j’étais un second rôle plus important que ce que je croyais. Car aucune balle ne vint – même fortuitement – me trouer la peau. Le souci, c’est qu’à ce moment-là je me suis rendu compte que je n’avais aucune arme sur moi. Mais croyez-le ou non j’avais tellement foi en moi que ça m’a pas fait suer une goutte. Y avait un bouton rouge près du compteur de vitesse. J’ai écrasé mon poing dessus comme si j’avais lu le scénario à l’avance. Le résultat ne s’est pas fait attendre. Sauf que ce ne fut pas celui que j’attendais. Un petit con avait dû trouver marrant de réécrire le script au dernier moment.

J’ai filé plein gaz dans un sublime effet de lumière généré par la nitro. C’était bien beau, mais c’était pas ça qui allait aider ma partenaire.

J’ai freiné à mort en jetant un coup d’œil dans mon rétro 16/9 ème. Ce que j’y ai vu m’a littéralement glacé le sang : le buste d’Angie sortait du toit ouvrant de la Mercedes. Elle était aux prises avec un colosse en smoking qui écrasait sa gorge divine malgré le sabre qu’elle lui avait passé au travers du corps.

En même temps que cette vision d’horreur, j’en vis une seconde : l’autre Mercedes se rapprochant dangereusement, avec à bord son lot de tueurs armés jusqu’aux dents qui pointaient leurs flingues sur ma belle sans la moindre once de pitié.

Mon sang ne fit qu’un tour.

Presque sans y réfléchir, je serrai le médaillon dans mon poing et levant les bras au ciel, je hurlai toute ma colère et ma frustration. Quelqu’un de très haut placé dut m’entendre car là aussi le résultat ne traîna pas.

Je m’envolai littéralement au-dessus de la route, abandonnant une moto sans doute faite pour le Guinness des Records, et la rage au cœur, je fonçai comme un kamikaze sur les deux voitures dans un déluge d’éclairs. C’était comme si ma légendaire poisse se transformait et se révélait être tout à coup une arme à double tranchant. Et autant vous dire, qu’il s’agissait cette fois du bon tranchant, de celui qui vous coupe un pépin de pomme en parts égales, à 300 kilomètres de distance, malgré un brouillard épais et un vent à décorner un cocu récidiviste.

J’étais entré dans un état de capacité qui me paraissait infini. Superman m’aurait proposé une marelle que j’aurais accepté sans hésiter, persuadé de lui mettre une toise.

La première Mercedes en fit les frais. A peine l’effleurai-je qu’elle se décomposa autour de moi dans un ballet vertigineux de pièces mécaniques et d’organes humains.

Mon pouvoir était pratique à plus d’un titre. Il m’empêcha aussi d’avoir la gerbe.

Pour la dernière voiture, c’était déjà plus délicat. Angie était à bord, je ne pouvais donc me permettre de la jouer aussi bourrin.

Elle était au bord de l’asphyxie et pourtant, la tête renversée en arrière, elle m’a regardé droit dans les yeux. Je n’oublierai jamais son regard, ni ce qui s’est passé après d’ailleurs.

J’ai concentré mon attention sur le sabre et comme un toutou fidèle, il a répondu illico à mon appel. Il a improvisé une petite chorégraphie qui a réduit le colosse en apéricubes. J’ai pris Angie dans mes bras. Un type qu’elle n’avait pas complètement dessoudé lui a saisi les chevilles. Il aurait été préférable qu’il fasse le mort car deux secondes après, la Mercedes et lui étaient indissociables dans un nuage de cendres.

Je m’envolai loin au-dessus de la route tout en guettant une réaction positive dans les yeux de ma dulcinée. Elle ne tarda pas. L’énergie que je générai autour de moi la réanima en un temps record (Appelez aussi le Guinness pour ça !)

Planant dans les cieux étoilés – oui pour cette scène c’est mieux qu’il fasse nuit - je me sentais enfin son égal, à la fois dieu et ange.

Je me posai sur un monument très bien éclairé qu’on appelle communément Tour Eiffel.

Perché dans sa superstructure métallique, à l’abri des regards indiscrets et des paparazzi, j’ai embrassé Angie avant de perdre mon pouvoir. La pleine lune nous épiait, tentant vainement de me faire de l’ombre. Alors seulement, la bouche mythologique d’Angelina Jolie s’est ouverte rien que pour moi et elle m’a dit dans un murmure ensorceleur :

- Dépose-nous dans un hôtel à l’écart de la ville. Le plus miteux fera l’affaire.

Elle m’aurait dit que j’étais l’homme de sa vie que cela ne m’aurait pas fait plus d’effet.

Tour-Eiffel-nuit-pleine-lune-Paris-2010-1.jpg

Comme j’avais pas un rond et qu’Angie était un peu à l’ouest, j’ai pas perdu le nord et je suis rentré par effraction dans une chambre.

Bon, c’est vrai que le fait qu’il n’y avait qu’un seul lit a dû influencer mon choix. Mais mettez-vous deux secondes à ma place.  

Je l’ai allongée et une fois assuré qu’elle allait bien, j’ai enfin relâchai le médaillon dans ma main. Je l’avais serré si fort que les symboles à sa surface étaient gravés dans ma paume comme dans Les Aventuriers de l’Arche Perdue.

- C’est donc vraiment toi, l’Elu.

Angie m’observait avec un intérêt nouveau. Cette fois, c’est le médaillon qui m’envia.

Je me suis assis à son chevet  et lui ai caressé les cheveux avec une tendresse que je réserve habituellement à mon chat. Son côté félin apprécia sûrement.

- Je ne comprends pas, dis-je plus troublé que je ne voulais le lui montrer. Je croyais qu’ils m’avaient fait une blague, que ce…machin était un bibelot sans valeur.

- Sans valeur pour ceux qui ne le connaissent pas. Cet objet te recherchait. Tu es son porteur. C’est lui qui t’a trouvé. Ceux qui te l’ont refilé ne sont que des instruments du destin.

Je méditai ces paroles en mimant Le Penseur de Rodin à la perfection.

- Il y a autre chose que je ne saisis pas et je pense que tu pourras m’éclairer. Les voitures qui nous ont attaqué étaient des Mercedes tout comme la voiture qui nous a conduit au restaurant. Pourtant ce sont deux camps opposés. Qu’est-ce que ça veut dire ?

Elle soupira d’un air las comme si on lui avait déjà posé cette question des milliers de fois.

- C’est plus facile de reconnaître les méchants comme ça.

Je grimaçai.

- Sérieusement !

Elle haussa les épaules.

- Qu’est-ce que tu veux que je te dise ? Que les Mercedes sont très prisées à Paris ou que l’intrigue est plus complexe que tu ne l’imagines ?

- J’avoue que je préfère la première solution.

- Il y a autre chose que tu veux savoir ?

Elle se mit à caresser le dessus de lit avec ses pieds nus. C’était si sensuel que mes yeux ont dansé la polka autour de ses orteils avant de rentrer chez eux.

- Euh…Je… Non, enfin, si ! Tous ces gens qu’on a tués dans le restaurant. Est-ce qu’ils étaient tous innocents ?

Elle posa sur moi un regard empli de compassion.

- Ca soulagerait un peu ta conscience si je te disais qu’ils valaient pas mieux que ceux qui nous emploient actuellement ?

Je méditai à nouveau, mais pas très longtemps.

- Bah oui, quand même.

- Alors sois rassuré, dit-elle en se levant et en se dirigeant vers la porte. C’était tous des salauds de la pire espèce. Un club de  terroristes ennemis, si tu préfères.

- Où vas-tu ?

Elle continua de marcher.

- Je vais ouvrir la porte.

J’avais dû rater une ligne dans le scénario ou alors c’était encore ce petit con qui…

- Mais personne n’a…

Trois coups résonnèrent.

- Tu disais ?

Elle ouvrit la porte pendant que j’essayais péniblement de mettre de l’ordre dans le bordel qui me tenait lieu de cerveau.

« Un médaillon magique qui ne devait pas l’être. Je suis avec Angelina Jolie. Des terroristes à Paris qui préparent un sale coup. D’autres terroristes qu’on a mis hors d’état de nuire pour leur compte. Je suis avec Angelina Jolie. Une entrevue prévue avec un chef terroriste. Je suis l’Elu, j’ai des putains de pouvoir quand j’ai le médaillon et que j’ai la haine. Je suis avec Angelina Jolie. »

Oui, pour une sacrée journée, c’était une sacrée journée. Je pouvais mourir heureux. La femme de mes rêves m’avait embrassé, je l’avais embrassée. On était comme les deux doigts de la main et les péripéties qui nous attendaient en file indienne à la sortie de l’hôtel me disaient que c’était pas près de changer.

J’en étais à ce stade de mes réflexions lorsque je reconnus Tonton par l’entrebâillement de la porte. Il parlait avec les mains à ma partenaire. Je n’entendis pas ce qu’ils se disaient, mais je le vis lui remettre une valise. Ses yeux qui louchaient me regardèrent de travers et il s’éclipsa dans le couloir sans un mot.

- Quand est-ce que tu l’as appelé ? Je t’ai pas quitté des yeux d’une semelle.

Elle m’adressa un sourire reconnaissant et amusé. Mais surtout amusé.

- Pendant que je me battais dans une des Mercedes. J’ai eu un créneau de quelques secondes. J’en ai profité.

- Sérieux ?

Angie ferma la porte et posa la valise sur le lit. Son visage s’était fermé aussi. Elle était revenue de ses émotions. Elle assimilait plus vite que moi. Le bénéfice de l’expérience.

- Un nouveau gadget ? hasardai-je avec entrain.

Elle composa le code d’ouverture à la vitesse de la lumière. Le couvercle bascula et deux serpents se mirent au garde-à-vous. C’est la première fois que j’en voyais d’aussi près. Je compris pourquoi ils avaient si mauvaise réputation. J’ai serré le médaillon dans ma main pour me redonner du courage, mais j’avais pas le feeling qui allait avec visiblement car je sentais que j’allais pas tarder à me pisser dessus.

- Dis-moi, ton oncle se serait pas gourré de valise, par hasard ?

Au lieu de me répondre, Angie émit un bref sifflement. Non, c’était toujours pas pour appeler un taxi. En un éclair, les deux serpents se lovèrent autour de ses avant-bras. Ils dodelinèrent de la tête, comme dans l’attente d’une foudroyante attaque.

- Le meilleur gadget qui soit, dit-elle finalement en contemplant les deux reptiles avec une fascination que je ne parvenais pas à partager.

- Tu peux les contrôler ?

Mon admiration essayait d’être convaincante, mais ma peur lui faisait les gros yeux.

La seconde d’après, les deux serpents me chopaient les paupières.

Je me mis à gesticuler comme si j’étais passé en mode vibreur.

- Putain, mais qu’est-ce que tu fous, Angie ? Merde, mais ça fait un mal de chien !

Evidemment, elle resta super calme.

- Bien sûr que non. Tu es l’Elu et tu as le médaillon.

Je me rendis compte que c’était vrai.

- Ah, oui.

Les deux serpents pendaient devant ma figure comme des guirlandes de mauvais goût : c’était quand même suffisant pour me contrarier.

- Tu pourrais les enlever, s’il te plaît ?

Nouveau sifflement. Les deux serpents reprirent machinalement leur position tels des bracelets vivants.

Angie se fendit d’un de ces sourires de reine dont elle avait le secret et qui faisait qu’on pouvait tout lui pardonner.

- Avec ça, on va éliminer la garde rapprochée de notre cible en silence et en douceur.

- Je croyais qu’on devait obtenir un rendez-vous avec lui ?

- C’est ce qui est prévu. On a rencard demain matin dans un château à quelques kilomètres d’ici. Mais les choses peuvent mal tourner. Je préfère me préparer à toute éventualité.

Je regardai les deux reptiles en leur cherchant des qualités. J’y parvins.

- Au moins, ces armes passeront sans problème aux détecteurs de métal. Mais, dis-moi, comment tu fais pour les contrôler ? C’est de la télépathie ou…

Au point où j’en étais, je crois que j’étais prêt à tout entendre. La réponse fut plus sensée que ce à quoi je m’attendais.

- Ils sentent mon pouls. C’est comme un langage pour eux. Il me suffit d’augmenter mon rythme cardiaque pour qu’ils comprennent qu’ils doivent passer à l’attaque.

- Fascinant.

J’étais sincère.

Angie approcha l’un des serpents de mon visage.

- Tu veux essayer ?

- Sans façon.

Là aussi, j’étais sincère.

- Dis, t’aurais pas plutôt envie de dormir un peu au lieu de jouer avec tes deux affreux, là ?

C’est là qu’elle prit véritablement conscience de l’ameublement sommaire de la pièce.

- Pourquoi tu as pris une chambre avec un seul lit ?

Je déglutis.

- Les autres étaient occupées.

Evidemment je mentis très mal.

Evidemment elle s’en amusa.

Quand je vous disais qu’on était fait l’un pour l’autre.

Est-ce que c’est utile que je dise que j’ai gerbé à ce moment-là ?

Vous avez raison, ça ferait vraiment tache.

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Comme on avait un peu la dalle et que j’avais toujours rien de valeur dans les poches – à part le médaillon et mon trajet retour pour ma province natale - on commanda des pizzas qu’on paya avec un sourire d’Angie. Le jeune en scooter qui nous livra était tellement hypnotisé qu’il nous rendit même la monnaie.

 
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Enfin un peu d’argent qui rentrait ! En cas de coup dur, ça pourrait toujours servir.

Pendant qu’elle finissait de manger sa quatre fromages, j’ai pris une douche, histoire de me décrasser et surtout de me laver du sang du restaurant. Bah, oui, j’avais beau avoir des circonstances atténuantes et un bon alibi, j’arrivais toujours pas à m’en remettre.

Quand je suis sorti de la salle de bains, Angie regardait les infos à la télé. On devait sans doute parler de nous vu le nombre de cadavres et le bordel qu’on avait laissé derrière nous. Heureusement, les témoins – s’il y en avait eu – avaient dû trouver mieux à faire que de nous balancer car nos tronches n’ont pas été diffusées. Même pas une vague description.

Quand elle a éteint le poste, j’ai regardé Angie avec un air triste qui la surprit.

- Désolé, Angie. Y a plus d’eau chaude. J’ai vraiment pris un hôtel pourri.

Elle sourit.

- C’est pas grave. J’ai tellement chaud qu’un bon bain froid me fera le plus grand bien. Tu as l’air vanné, tu devrais dormir maintenant. On va se lever de bonne heure.

- Excellent conseil, dis-je en évitant, sans succès, d’imaginer son corps nu dans la baignoire.

J’avais remis mes fringues sales. J’ai pas osé me déshabiller devant elle. J’ai attendu qu’elle soit dans la salle de bains et je me suis glissé dans le lit en sous-vêtements.

Dieu sait si j’avais rêvé d’un moment pareil. En arrivant à l’hôtel, quand j’ai compris qu’il pouvait enfin se réaliser, j’ai exploité le filon à mort.

Seulement, maintenant que je le voyais se profiler à l’horizon, bah, comment dire… J’avais les fesses qui faisaient bravo. Le constat était navrant.

Après tout ce que j’avais vécu, j’aurais dû être en mesure de vivre pleinement une situation pareille. J’étais un homme, merde ! Mieux que ça, j’étais l’Elu, putain !

Heureusement, en pensant à ça, une idée géniale m’a traversé l’esprit.

Au moment où je me suis penché pour choper le médaillon dans ma poche de jean, Angelina Jolie est sortie de la salle de bains.

Là, mes yeux m’ont définitivement abandonné. Et comme mon nez n’a jamais été très expressif, un organe qui jusque-là s’était fait plutôt discret s’est mis à sortir le grand jeu.

 

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Je ne vous ferai pas l’affront de préciser lequel.

Angie était sertie dans une serviette blanche qui avait comme rétréci au lavage et qui du coup cachait juste ce qu’il fallait en laissant deviner juste ce qu’il faut.

J’ai laissé tomber mon jean et je me suis raidi sous les draps comme une momie dans son sarcophage. J’ai tout de suite voulu détendre l’atmosphère à la demande générale de moi-même, mais tout ce qui sortit de ma bouche fut un bruit qui ressemblait à ça :  

 


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En moins évident.

Angie traversa mon champ de vision. Elle n’avait pourtant que quelques mètres à faire, mais le temps – qui comme la gravité a lui aussi son petit caractère – décida qu’il n’y avait pas le feu au lac. Au lac peut-être pas, mais du côté de mon bas-ventre, ça donnait à peu près ça :

 


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Comme j’avais pas de canadair à portée de main, j’ai serré les jambes pour étouffer l’incendie. Quand Angie s’est installée à coté de moi, elle a gardé la serviette sur elle. Mais c’était une maigre compensation, car comme ce coup-ci elle sortait vraiment de la douche, elle sentait encore plus bon qu’auparavant. Un mélange de senteurs exotiques avec une pointe de santal dominante qui eut le don de réveiller mon nez en sursaut. Du coup, question expression corporelle, il prit un peu la relève, ce qui atténua le brasier sous mon caleçon.

J’avais bien fait les choses. Le lit était vraiment petit et même en voulant préserver une intimité naturelle, Angelina Jolie me touchait d’un peu trop près, je dois dire.

Quoi, c’est encore moi qui viens de dire un truc pareil ?!!

Fallait que je me ressaisisse. Et vite ! Le problème c’est que je ne savais pas précisément en quoi ça consistait. Dans le doute, j’ai fait le mort. Enfin, la majorité de mon corps l’a fait. Car il y avait toujours un irréductible menhir gaulois qui se dressait contre l’envahissante pudeur qui me caractérisait.

Au bout de quelques minutes, comme il ne se passait rien, la tension est retombée. Et avec elle mon ardente passion pour les courbes féminines d’Angie.

J’ai alors commencé à me dire que c’était plutôt bien. Je passais pas pour un salaud et elle pour une fille facile. Notre première nuit ensemble se devait d’être fidèle à l’image que j’avais d’elle et de moi séparément. Un modèle de…

 

 


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Si vous venez d’entendre le son caractéristique d’un vinyle qui dérape, c’est normal.

 

- Dis-moi, Angie, t’as pensé à enlever tes serpents pour dormir ?

- Pourquoi ?

- Je crois qu’il y en a un qui est en train de ramper sur ma cuisse.

Elle produisit un reniflement ambigu.

- Si je te disais que c’est seulement ma main, ça te rassurerait ?

Bizarrement, j’avais tellement la trouille que j’aurais préféré que ce soit le serpent.

Elle dût lire dans mes pensées car elle ajouta :

- Je peux la retirer si tu préfères ?

Là, elle jouait un peu avec le feu pour employer une métaphore facile.

- Euh, non ça va, c’est juste que…

L’incendie s’est rallumé de plus belle et le menhir s’est redressé comme un super conquérant.

(Non, rien à voir avec le cahier !)

Les mots qui m’avaient tant trahi jusque-là ont fini par venir en renfort. C’était moins une.

- Tu sais pourquoi on s’entend si bien, Angie ? C’est parce que malgré tout ce qui peut nous séparer, je crois que foncièrement on est fait du même bois, toi et moi. J’ai toujours été borderline, je veux dire, intérieurement. Pas d’histoire d’alcool, de drogue, de sexe ou de violence. Simplement, un rapport conflictuel permanent avec l’existence en général. Une sorte de « Je t’aime, moi non plus », si tu vois ce que je veux dire. Tu comprends, Angie, depuis que je t’ai rencontrée, c’est comme si je pouvais enfin faire un pied de nez à la réalité. Et ça, pour moi, ça vaut tout l’or du…

 


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Bah, oui, ça s’est terminé comme ça. Elle s’est endormie et j’ai fini par en faire autant. En même temps, on avait bien le droit de se payer une bonne nuit de sommeil après tout ce qu’on venait de faire pour sauver la France.

Et puis, on est romantique ou on ne l’est pas.

Quoi ? C’est pas ce que vous attendiez ? Ah, ok, je vois ! Vous auriez peut-être préféré entendre ça, bande de coquins :

 



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Remarquez, l’histoire n’est pas encore terminée. Je vous réserve encore bien des surprises. Parole d’Elu !

Ouais, ça vaut ce que ça vaut.

Angelina Jolie Photoshoot.jpg

Je m’attendais à me réveiller dans mon studio meublé fleurant bon l’humidité et le shit de mes voisins de palier, mais cette fois, seul le soleil radieux d’un nouveau jour m’a ouvert les yeux.

J’étais toujours dans la chambre d’hôtel. Tout était resté à sa place. Je n’avais donc pas rêvé. Ou bien mon rêve se plaisait à jouer les prolongations.

Ca m’allait tout à fait.

J’ai tourné la tête vers Angie. Son absence me dévisagea en haussant les épaules. Elle n’avait pas laissé de mot pour expliquer sa sortie. Mais pour me faire comprendre qu’elle allait revenir, elle avait pris soin de laisser sur son oreiller la rose que je l’avais vue glisser dans ses cheveux…J’avais l’impression que ça faisait une éternité de ça.

J’ai humé la rose encore fraîche et j’ai respiré à pleins poumons son oreiller et l’endroit même où son corps – fantasme parmi les fantasmes, joyau du monde terrestre, St Graal de la carnation – avait reposé près du mien.

Il était encore chaud.

Quand elle est rentrée dans la chambre, elle a jeté des sacs plastiques sur le parquet.
Je n’ai pu réprimer des larmes de joie devant son apparition christique, sa silhouette adorée se découpant sur le soleil levant, créant la quintessence de l’ombre chinoise.

J’ai hoqueté tellement c’était beau.

- Tu es magnifique !

Lorsqu’elle s’est avancée vers le lit, j’ai reconnu le livreur de pizzas.

- Vos vêtements, m’sieur-dame.

Là, j'ai eu une réaction complètement naturelle :

 


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Il a dû croire que j’avais picolé. Je vous avoue que j’aurais préféré.

Sur ces entrefaites, Angie est sortie de la salle de bains, toujours en serviette de bain. Elle a lancé une pièce au livreur en guise de pourboire. Du coup, il a piétiné sur place comme un chien fou à qui on aurait filé un os de mammouth à ronger. Elle lui aurait offert un cintre qu’il lui aurait manifesté autant de gratitude.

J’ai écouté le scooter s’éloigner...

 


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...avant de me tourner vers ma partenaire.

Mais comme j’avais déjà servi mes lignes de texte, je me suis contenté de la regarder en souriant bêtement.

- Tu sais, dit-elle en fouillant dans un des sacs, je suis désolé pour cette nuit.

J’ai immédiatement pensé à sa main sur ma cuisse. Voilà qu’elle regrettait son geste. C’était touchant. Je n’allais pas la laisser culpabiliser quand même, elle qui avait été si attentionnée envers moi.

- C’est rien, Angie. Tu es toute pardonnée. Nous sommes deux adultes civilisés, intelligents et dans la force de l’âge. Ce sont des choses qui arrivent, voilà tout. C’est la nature. C’est la vie.

Elle eut l’air physiquement soulagée.

- Content que tu le prennes comme ça. Je me faisais un sang d’encre à l’idée que tu avais pu passer une mauvaise nuit à cause de ça et de voir que ce n’est pas le cas me ravit. Des tacs de mecs m’ont largué à cause de cette manie. Tu ne m’en veux vraiment pas ?

Mon corps entier exprima assez bien ma consternation.

- Mais non, voyons, c’est ridicule ! Enfin, ça peut arriver à tout le monde. C’est humain, ça ne se contrôle pas et puis venant de toi, c’est plutôt un compliment. Comment je pourrais le prendre mal ?

Elle fit glisser la serviette au bas de ses chevilles avec un érotisme inouïe. La sensualité elle-même ne savait même pas que ça existait et elle s’invita dans notre chambre, histoire de prendre des notes pour plus tard.

La porte était restée ouverte, si bien que le soleil – heureux complice de la pudeur – camoufla par un habile jeu d’ombres et de lumière les formes sensuelles de ma partenaire.

Lorsqu’elle se tourna vers moi, elle portait un ensemble noir qui la rendait irrésistible.

Pour changer.

- Un compliment, tu trouves ? Une femme qui ronfle n’a pourtant rien d’un aphrodisiaque, avoue-le !

 


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Ca devait être la journée du quiproquo sur mon calendrier personnel. Mais comme j’ai jamais été doué pour retenir les dates importantes, j’ai décidé de fermer ma gueule jusqu’au moment où ma vie en dépendrait.

Elle me lança un sac.

- Habille-toi ! Notre chauffeur est déjà là. On a une grosse journée devant nous. Et pas question de la foirer.

 

Je l’ai observé à nouveau converser avec le chauffeur de la Mercedes dont je ne devais jamais voir le visage.

Une fois en route vers le mystérieux château évoqué la veille, j’ai ouvert la fermeture éclair que j’avais soudé mentalement sur ma bouche.

Oui, je prenais de très gros risques. Mais on est aventurier ou on ne l’est pas !

- Tu sais, Angie, j’ai repensé au massacre dans le restaurant et à ce que tu m’as dit pour me réconforter. S’il y avait quelques innocents, ce n’est pas si grave, finalement. Tu peux me le dire. Tu sais pourquoi ? J’ai aussi repensé à une scène de Wanted quand tu dis « En en tuant un, peut-être est-il possible d’en sauver des centaines. »

T’imagines combien on a sauvé de vies, dans ce cas ? Toute croisade nécessite des sacrifices. Et nous sommes en croisade, pas vrai ?

Elle a retiré ses écouteurs.

- Tu disais ?

J’allais refermer définitivement ma fermeture éclair lorsqu’elle m’a touché le bras avec ferveur.

- Je te fais marcher. Je sais ce que tu as dit. J’ai appris à lire sur les lèvres.

Mon esprit de cinéphile s’alluma comme un sapin de Noël :

- Comme Tom Cruise dans Mission Impossible 3 ?

Elle eut un regard équivoque.

- C’est marrant que tu me parles de lui.

- Pourquoi ?

- Pour rien.

Puis elle enchaîna rapidement :

- Ca fait deux fois que tu cites Wanted. Tu dois l’aimer ce film !

Je ne pus cacher mon enthousiasme.

- Si je l’aime ? C’est un pur film ! Les balles à trajectoire courbe, les messages codés dans le métier à tisser, la scène d’intro et celle à la fin dans la bibliothèque, quand ton personnage…

- Chut ! Il y en a peut-être qui ne l’ont pas encore vu. Ce serait dommage de leur gâcher la surprise, non ?

- Oui, c’est vrai, désolé ! Je m’emporte si facilement dès qu’il est question de cinéma. Je suis pourtant le premier à détester qu’on me raconte la fin !

Angie prit alors une pose plus recherchée. Elle croisa ses jambes de gazelle et fit battre ses yeux de biche avec un rythme étudié. Sûrement à l’école des biches.

- Tu sais que j’ai fait d’autres films importants, à part celui-là. Tu les as vus ?

Ca y est, elle me mettait à l’épreuve. Et je comptais bien remporter le défi qu’elle venait de me lancer sur mon terrain préféré.

- Bien sûr ! m’exclamai-je. Je suis ton plus grand fan, Angie, ne l’oublie pas !

- Alors tu as certainement vu celui qui m’a fait gagner l’oscar du meilleur second rôle.

Une Vie Volée ! J’en avais entendu parler, bien sûr, mais honte à moi, je n’avais jamais eu la curiosité de le visionner.

Ce qui était sur le point de me coûter très cher.

Elle releva l’une de ses manches, exhibant l’un des serpents tout prêt à me chiquer la paupière. Ou que sais-je d’autre ?

Sans quitter des yeux sa vilaine petite tête triangulaire, j’ai essayé de me rappeler où j’avais mis mon médaillon.

- On dirait que ça veut dire non.

Je vis le serpent se dresser pour mordre. Et puis, Angie s’est mise à rire et elle a rengainer son copain à sang froid.

- Ce n’est pas grave si tu ne l’as pas vu. Et tu sais pourquoi ?

Je secouai la tête comme un forcené.

- Parce que mon job d’actrice n’est qu’une couverture.

J’ai ouvert la bouche, mais le son a tâté le terrain quelques secondes avant d’envisager de sortir :

- Ah ?

J’ai repris une contenance.

- Tu veux dire qu’espionne c’est un travail à temps plein ?

Elle opina.

Cette révélation, si elle était pour le moins étonnante, n’en expliquait pas moins un certain nombre de choses, notamment…

- Tes cascades ! Ca me surprend plus que tu les fasses presque toutes toi-même. Ca doit même être un crève-cœur de te faire doubler !

Elle opina à nouveau.

- Pas de croisade sans sacrifice ! me dit-elle avec une complicité qui transforma mes genoux en guimauve. Heureusement, j’étais assis.

Mais cette révélation impliquait aussi forcément une existence plus complexe que celle laissée en pâture à la presse et au grand public.

- Mais ta vie de famille, c’est du concret quand même ! Ca n’est pas aussi une couverture !

 


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Le regard qu’elle me jeta me fit regretter amèrement d’avoir osé poser la question.

Sa rancune regagna ses pénates et elle se détendit à nouveau.

- Tu sais beaucoup de choses sur moi, mais qu’en est-il de toi ?

J’aurais dû être flatté qu’Angelina Jolie me manifeste autant d’intérêt, seulement vous imaginez bien que question frissons, ma vie était loin d’égaler la sienne, pour employer un doux euphémisme.

Je me raclai brièvement la gorge comme si, moi aussi, j’allais faire une grande révélation.

- Et bien, il n’y a pas grand-chose à dire. Je vis dans un appartement très modeste et je bosse à mi-temps dans un vidéo-club qui ne va pas tarder à fermer à cause du piratage sur internet. J’ai donc un peu de mal à joindre les deux bouts. Pourtant à la base, je suis issu d’une famille aristocratique.

Je la vis hausser les sourcils. Malheureusement, la suite n’allait pas embellir le tableau que j’étais en train de peindre.

- Mon nom a une particule, mais je l’ai définitivement abandonnée lorsque mon père a choisi de me déshériter. Tout ça parce que je ne voulais pas devenir médecin ou avocat ou n’importe quel autre métier qui aurait donné du poids à son nom. Tu vois le genre.

Nouveau hochement de tête.

- A sa mort, c’est donc mon enfoiré de cousin qui a tiré le jackpot à ma place. Au-delà de leur lien évident, mon père et le sien étaient très proches. Et comme mon cousin clamait haut et fort qu’il voulait devenir médecin ou avocat…

Depuis il a beaucoup d’argent, d’arrogance et de temps à perdre. Et son passe-temps préféré est vite devenu de concocter des blagues débiles à mon insu avec un type que je croyais être un ami. Comme tu le vois, j’ai des raisons de me sentir seul.

D’un coup d’œil discret, j’ai vérifié qu’Angie ne dormait pas – prêt à refermer ma fermeture-éclair – mais ce n’était pas le cas. Bien au contraire. Elle était visiblement très attentive. Ca ne pouvait que me toucher.

- Et ta mère ?

- Quand mes parents se sont séparés, elle est partie vivre dans le sud avec sa famille. Depuis, je n’ai plus trop de nouvelles. On s’entendait plutôt bien, pourtant. Mais la même année, j’ai eu le malheur d’oublier son anniversaire et la Fête des Mères. Je crois qu’elle m’aimait tellement qu’elle a pris ça pour une trahison. Et je crois qu’elle ne me l’a jamais pardonné. C’est triste parce que c’est juste un petit problème de mémoire. J’ai toujours eu du mal à retenir les dates importantes. Enfin, comme tu le vois, la famille, c’est pas vraiment ça.

Elle était toujours aussi attentive et même émue je crois. Alors je me suis rappelé un détail de sa vie à elle qui pouvait l’expliquer en partie.

- Je crois que tu as eu aussi quelques soucis avec ton père. J’étais très heureux que vous vous retrouviez dans Tomb Raider. C’est une scène très symbolique.

Elle posa une main sur la mienne.

- Merci, dit-elle dans un souffle.

Je n’ai rien ajouté. J’ai préféré attendre qu’elle parle à nouveau.

- C’est pour ça j’imagine que tu vis seul. Tu n’as eu pas ce qu’on pourrait appeler d’excellents modèles.

- C’est vrai, mais j’ai un chat qui vaut toute une famille pour moi. Quand on aura rempli cette mission, si tu veux, tu pourras rentrer avec moi. Comme ça, je te le présenterai. Ca lui ferait sûrement plaisir. Vous avez les mêmes yeux.

Je voyais déjà la scène d'ici.

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- C’est très séduisant comme programme. Je te promets d’y réfléchir dès que j’en aurais l’occasion.

- Entre deux coups de feu, par exemple.

Elle savait que je me référais à l’appel de Tonton dans la Mercedes.

On éclata de rire.

Sur la même longueur d’onde, je vous dis !

 

Le chauffeur a donné quelques coups contre la vitre teintée qui nous séparait de lui.

On en arrivait en vue du château.

En fait de château, c’était une vieille bâtisse sur cinq étages paumée en pleine campagne.

Mais avouez que si je vous avais dit ça en premier ça aurait eu tout de suite moins de gueule.

On est descendu de la voiture et un type BCBG genre premier de la classe est venu nous accueillir avec un blazer qui devait valoir un billet pour la Lune.

- Bienvenue au Domaine de la Motte Beurrée Saint-Sépulcre.

Oui, j’eus la même réaction que vous :

- Mais qu’est-ce que c’est que ce nom à la con ?

Angie et notre guide m’ont foudroyé du regard à l’unisson.

- Je veux dire…C’est un très joli nom, charmant, très…poétique !

Le type nous a ensuite fait l’historique des lieux.

Le site était classé Monument Historique du fait qu’il avait soi-disant résisté à toutes les guerres. J’en avais pourtant jamais entendu parler.

J’écoutai distraitement en m’imaginant rouler dans le champ de fleurs à côté avec Angie.

Evidemment, même dans ce genre de fantasme libérateur et apparemment sans risque, je réussis quand même à rouler dans une merde de chien. Et autant vous dire que c’était pas celle d’un caniche.

- Le propriétaire a des chiens ? Je veux dire des gros ?

Angie fronça les sourcils. Elle pensait à tort que je me rencardais maladroitement sur le niveau de sécurité du château.

Oui, je sais ce que vous pensez. Ma fermeture éclair !

D’un mouvement de tête, ma partenaire signifia à notre guide qu’il pouvait poursuivre sa présentation. Je ne pus m’empêcher de penser que je commençais à perdre un peu trop de points au moment crucial de l’aventure. Si jamais je foutais tout en l’air à cause d’une connerie de ce genre, je ne me le pardonnerai pas. Et Angie non plus.

Je vis que sous son air absorbé de touriste curieuse de tout, elle était en réalité en mode repérage.

Cette femme ne cessait de m’étonner.

-…et sur la gauche, vous pouvez apercevoir la célèbre Tour Prend Reine en A4, un modèle d’architecture gothique qui a permis de repousser les Barbares en 1515 à Marignane grâce à l’ingénieuse catapulte romaine camouflée dans les fondations et dont nous devons l’existence au célébrissime Leonardo Da Vinci…

C’est moi ou ce type raconte n’importe quoi ?

Mon anglais commençait peut-être à rouiller. En même temps, il marchait à plein régime depuis presque vingt-quatre heures.

Heureusement, Angie s’occupait de réagir convenablement aux informations apportées par notre guide avec force exclamations de surprise et onomatopées d'admiration.

On est actrice ou on ne l’est pas.

C’est alors que j’ai fait un constat pour le moins troublant.

Angelina Jolie était connue dans le monde entier et pourtant, cela ne l’empêchait pas d’effectuer son métier d’agent secret à visage découvert.

Mais rapidement, j’ai compris aussi que c’était le meilleur subterfuge au monde. Elle était tellement naturelle que ceux qui la reconnaissaient devaient se dire que ça ne pouvait pas être elle, la vraie, et du coup, ils se persuadaient tout seul que ce n’était qu’un sosie.

Heureusement, je n’étais pas tombé dans le panneau. Et je crois que rien que ça me rendait digne d’être un partenaire de mission idéal.

Je l’observai à son insu. Une beauté et une intelligence pareilles dans un seul corps de femme et j’avais la chance d’en être si proche…

 


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…quand j’ai atterri, on était dans un salon décoré avec beaucoup de goût, enfin, avec beaucoup de bibelots qui servaient à rien et qui n’allaient pas ensemble, mais qui avaient l’air d’avoir coûté tellement cher que ça faisait passer la pilule.

Notre guide prit congé avec un assortiment impressionnant de révérences et de formules de politesse qui me firent sérieusement douter de me trouver dans le repaire de terroristes.

Les deux colosses en treillis qui lui succédèrent beaucoup moins.

Sans un mot, ils nous escortèrent jusqu’à un grand escalier, tellement haut que même vu d’en bas il donnait le vertige. Tandis que nous montions, Angie me glissa furtivement à l’oreille :

- N’oublie pas ce que je t’ai dit !

Comme je ne voyais pas précisément ce qu’elle voulait dire, j’ai prié très fort pour que nous ne soyons pas séparés. J’ai de la chance que ce ne fut pas le cas et à dire vrai, vous aussi, sinon vous auriez été privé de plusieurs scènes d’un grand intérêt narratif.

Durant le trajet jusqu’à notre destination, j’ai remué dans tous les sens le conseil qu’elle venait de me donner et qui valait certainement son pesant d’or. Le hic c’est qu’elle m’en avait dit des choses depuis notre rencontre.

Bon, bien sûr, j’ai fait un tri sélectif préalable, je ne suis pas complètement con.

Mais après ça, il me restait encore trois possibilités :

- Soit elle avait voulu me rappeler la présence des serpents sous ses manches et sous-entendre qu’en cas de grabuge, elle se chargeait de calmer le jeu à coup de venin.

- Soit elle avait voulu me rappeler que cette mission était primordiale et qu’il était exclus que je commette une nouvelle bourde.

- Soit, enfin, elle avait voulu me rappeler que nous avions affaire à de dangereux énergumènes et qu’à partir de là, la menace pesant sur nous était maximale.

Comme aucune n’était franchement réconfortante, j’ai préféré me dire finalement que j’avais tout faux et que c’était rien de tout ça.

Les trois à la fois ?

C’est pas faux.

Bon évitez d’en rajouter, j’en menais déjà pas large.

Lorsque enfin on est arrivé dans la salle de l’entrevue, on a eu une drôle de surprise.

Les deux gorilles – qui se ressemblaient par ailleurs comme deux gouttes d’eau - nous ont invité à nous asseoir sur des espèces de fauteuils de dentiste placés côte à côte.

 


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Oui, bizarrement, j’ai tout de suite pensé à ça.

- Euh, si c’est pour un détartrage…

Le regard d’Angie ne me laissa pas terminer.

- Allez-y, dit-elle en s’asseyant.

Je l’ai imité.

L’un des types m’a collé une électrode sur un poignet. En voyant son jumeau s’apprêter à faire de même sur Angie, j’ai eu un frisson intégral.

Elle arrêta le type d’un sourire gêné :

- Désolé, j’ai des cicatrices…une erreur de jeunesse.

L’intéressé eut l’air de comprendre car il lui colla finalement l’électrode dans le cou.

Quelle actrice, je vous dis ! Rien que cette réplique improvisée aurait mérité un autre oscar.

Les électrodes étaient reliées à un appareil que j’avais vu dans un certain nombre de films d’espionnage. Celui-là avait l’air particulièrement évolué.

Les types allaient nous passer au détecteur de mensonges. L’entrevue attendue était en fait un interrogatoire. Ca sentait déjà un peu le roussi, surtout connaissant ma légendaire incapacité à sortir un bobard sans rougir jusqu’aux oreilles.

Je regardais une dernière fois en direction d’Angie, un modèle de sérénité, avant de prendre une grande inspiration.

C’était le moment de vérité. Dans tous les sens du terme.

L’un des deux terroristes s’est ensuite ramené avec une seringue longue comme le bras.

J’ai avalé mon inspiration de travers.

- C’est obligé ? Je suis allergique aux piqûres.

L’aiguille me transperça le bras.

- Et nous aux imposteurs.

Angie reçut la seringue dans le cou. Pas un son ne sortit de sa bouche. J’admirai son courage. A sa place j’aurais hurlé tous les noms d’oiseaux que je connaissais. Et à cause de mon cousin qui les collectionnait, j’en connaissais un paquet.

La première question tomba rapidement.

- Quel est le nom de code de l’opération ?

J’ai ouvert les yeux, comme victime d’une illumination. J’avais la réponse ! Pour une fois que je pouvais gagner le gros lot ! J’ai répondu sans même réfléchir :

- Aucune idée, m’sieur, je suis qu’un minable employé dans un vidéoclub qui va bientôt fermer à cause du piratage sur internet.

Oui, comme vous pouvez le constater, leur sérum de vérité était très efficace.

Les deux gorilles ont immédiatement dégainé leur silencieux.

Ce qui m’a un peu vexé.

 


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Angie les a stoppé net d’un sifflement.

- Je n’ai pas encore répondu, moi !

Elle a tendu ses bras dans leur direction et deux secondes après, ils étaient au tapis, battus à plat de couture par deux serpents.

- T’as vu, ai-je fait en me levant, c’était des jumeaux !

Oui, je supportais très mal le sérum.

- Ne sois pas naïf, m’a répondu Angie en prenant leurs armes. C’était seulement des clones.

J’ai pris le pistolet qu’elle me tendait avec l’air d’un parfait abruti.

- Ca te fait rien, toi, la piqûre ?

Angie a repéré un ascenseur. On allait monter dedans lorsque j’ai eu une vision effroyable.

- Et si c’était un ascenseur piégé, comme dans L’Espion qui m’aimait ?

Tu imagines si on tombe nez à nez avec un requin ?

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Ca n'a pas eu l'air de l'inquiéter.

- Je lui donnerai un coup de poing.

J'ai forcément repensé à une scène similaire dans l'un de ses films.

- Alors dans Tomb Raider 2, c'était pas truqué ?!!

Elle m’a poussé dans la cabine et elle a appuyé sur le bouton du dernier étage.

- On va être attendus, maintenant. Y avait sûrement des caméras et des micros dans cette salle.

Mon raisonnement se tenait.

Angie était trop concentrée pour le remarquer.

- Ca n’a plus d’importance. Le chef est ici. Il faut en finir rapidement.

- Comment tu sais qu’il est là ?

- J’ai reconnu sa voiture près de la tour quand on est arrivé. Une Ferrari vert pomme avec un autocollant : « Je suis le roi du monde ! » ça ne s’oublie pas !

- Tiens, ai-je fait, mon père en avait une comme ça, aussi.

- Ton père ?

Les portes se sont ouvertes. On s’est retrouvé assis au bout d’une table longue d’un kilomètre. Le repas était servi et il était encore chaud. Ca avait l’air bon, je me suis mis à manger.

Angie m’a filé son coude dans les côtes !

- Qu’est-ce que tu fais ?

- On a pas pris de petit-déjeuner, je te signale. Et chez moi, le p’tit déj, c’est sacré !

Notre guide de tout à l’heure est arrivé à notre hauteur avec son plus beau sourire. J’ai rien vu de plus flippant. Il a soulevé une cloche. Sur le plateau il y avait un ordinateur portable.

On a pas fait d’histoire. On a posé l'ordinateur sur la table et on l'a allumé.

Il y avait quelqu’un à l’autre bout de la table. Son visage apparut sur l’écran et sa voix se fit entendre.

- Bienvenue au Domaine de La Motte Beurrée Saint Sépulcre.

- Merci, on y a déjà eu droit, fis-je remarquer en engloutissant un croissant croustillant à souhait.

J’en ai bien proposé un à Angie, mais elle n’avait pas l’air d’avoir faim.

Le chef des terroristes avait l’air…d’un chef des terroristes. Il faisait peur et en même temps il était séduisant. Comme sa voix.

- Vous avez passé avec succès les différentes étapes de notre grand jeu et vous avez donc gagné le droit exclusif d’intégrer l’Opération Hollywood Panic !

 


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- Putain, me suis-je exclamé. C’était ça la réponse de tout à l’heure !

Puis ma paranoïa est revenue de vacances.

- Fais gaffe, Angie, il a peut-être un flingue sous la table, comme dans…

Elle prit un air pincé.

- L’Espion qui m’aimait ?

- Comment tu sais ?

Plus je détaillais le méchant sur l’écran, plus son visage me semblait familier.

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- Tu le connais ? s’enquit Angie.

Je pensais que non, mais en fait, je ne cherchais pas où il fallait.

- On dirait Alan Rickman, l’acteur qui incarne le chef des terroristes dans Piège de Cristal, un monument du film d’action, soit dit en passant !

- Alan Rickman ou pas, il va dérouiller dans pas longtemps !

Notre hôte se leva.

- Vous resterez bien pour le plat de résistance !

De chaque côté de la salle, des portes s’ouvrirent et avec une incroyable chorégraphie, des domestiques tirés à quatre épingles apparurent, chacun équipé d’une cloche à repas.

- Je le sens pas ! fit Angie.

Comme il était évident qu’on allait de nouveau passer à l’action pour un pur morceau d’anthologie, j’ai fouillé dans ma poche à la recherche de…

- Mon médaillon ! Merde, je l’ai oublié dans mon jean, dans la chambre d’hôtel ! Quel con !

Est-ce que l’Elu pouvait commettre une bévue pareille ?

- Si jamais quelqu’un le récupère ! ajoutai-je en proie à une panique sans nom.

Angie était d’un calme olympien.

- Ca ne fait rien. C’est toi l’Elu et le médaillon ne sert à rien, ni à personne en dehors de toi.

- Le problème c’est que l’inverse est vrai aussi.

Angie soupira et prit ma main.

- Regarde ! Les symboles sont incrustés dans ta paume. Ce sont eux qui te donnent ton pouvoir. Tu n’as plus besoin du médaillon. Enfin, si je ne me trompe pas.

- Ouais, ça demande quand même à être vérifié.

- Très bien. A trois, on y va. Un…deux…

- Attends, attends ! Un, deux, trois, on y va ou bien un, deux, et trois on y va ?

En guise de réponse, elle a sauté sur la table et a commencé à tirer dans tous les sens.

J’ai rien trouvé de mieux à faire que l’imiter ne sachant absolument pas ou cela allait nous mener.

Les domestiques ont soulevé leur cloche et à tour de rôle ont annoncé :

- Fusil-mitrailleur M16 sur son trépied en acier trempé.

- Lance-roquettes Ultimatum avec guidage thermique et culasse anti-surchauffe.

- Pistolet-mitrailleur MP5 avec silencieux et chargeur double capacité.

- Etc…

De cette manière, pas moins de vingt armes plus destructrices les unes que les autres furent braquées sur nous en un temps record tandis qu’Angie et moi nous courions sur la table, chacun couvrant l’autre en arrosant un côté de la salle.

Entre deux rafales, Angie se baissa et ramassa une bouteille de vin. Elle but une gorgée au goulot avant de déclarer :

- Mon millésime préféré !

Une balle perdue fracassa la bouteille, ce qui, évidemment, fut très loin de lui plaire.

- Monumentale erreur !

Angie refit le portrait du tireur maladroit au 9 mm, façon picasso.

Me prenant les pieds dans un plat, c’est elle qui arriva en premier face à notre hôte. Comme elle n’avait plus de munitions, elle jeta son pistolet et retroussa ses manches. Ses deux fidèles serpents se mirent au garde-à-vous.

Le sosie d’Alan Rickman ricana.

Il retroussa les siennes et deux mangoustes se jetèrent sur les reptiles pour les dévorer vivants.

- Moi aussi, j’aime les animaux.

Profitant de la stupeur d’Angie, je vis le terroriste sortir un pistolet de l’intérieur de sa veste en cachemire.

 

 
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Là, mon cœur a cessé de battre et toute la scène s’est figée comme dans un arrêt sur image.

Sauf que je pouvais quand même bouger.

Je crois que j’ai hurlé son prénom et que je me suis élancé sur la table, glissant dessus sur plusieurs dizaines de mètres avant d’atteindre mon objectif.

Bon, il est vrai que je ne le ferai pas tous les jours.

Angie gisait au sol, ses vêtements poissés de sang. Elle tenait une main appuyée sur son ventre. J’ai regardé la blessure avec horreur. Mon point de vue fit littéralement volte-face. Je priai pour être dans un cauchemar et me réveiller au plus vite. De préférence, dans les bras d’Angie et dans notre minable chambre d’hôtel sans eau chaude.

Mais rien d’équivalent n’arriva.

Je vis qu’Angie voulait dire quelque chose. Je fus victime du plus cruel des dilemmes. Je voulais entendre sa voix, mais je ne voulais pas qu’elle me parle, de peur d’écouter ses derniers mots.

Je lui ai redressé la tête.

- Tiens, me dit-elle en me tendant ses écouteurs. Ca te donnera de la force.

Je les ai posés sur mes oreilles. Je me disais que c’était sa façon de me dire « Je t’aime ».

Comme je n’avais pas d’écouteurs à lui offrir, j’ai posé mes lèvres sur les siennes pour lui donner aussi de la force.

- Tiens le coup, Angie. Je reviendrai !

Je lui ai serré les mains en guise de garantie.

Je me suis relevé. Je me suis senti de nouveau invincible, comme si j’avais absorbé tous les codes secrets du jeu vidéo de ma vie.

J’ai regardé autour de moi. Le Grand Méchant en avait profité pour filé en douce.

J’ai regardé la paume de main. Elle s’illumina d’un éclat bleuté surnaturel. Mes yeux en ont fait de même.

 


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- Maintenant, ça va chier !

La musique a commencé à envahir mon esprit au moment où les tueurs restants se sont précipités sur moi.

 


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Le premier est arrivé sans crier gare, alors j’ai pris le train en marche. Je l’ai décapité du tranchant de ma main droite et l’ai éventré de la gauche.

Le deuxième et le troisième se crurent plus malins en me prenant en traître. Ils en furent pour leurs frais. Je leur ai attrapé les cheveux et d’un double coup de genou sauté, je leur ai enlevé les amygdales sans anesthésie locale.

L’un des deux m’a murmuré qu’il les avait déjà perdues au Vietnam à cause d’une explosion au napalm. Alors je lui ai arraché la langue pour qu’il arrête de dire des conneries.

Le quatrième, le cinquième et le sixième tueur sont venus en renfort et m’ont encerclé pour me truffer de plomb. J’ai filé un aller-retour à la première balle et vu qu’elle n’était pas conne, elle a fait passer les mots à toutes ses copines. Résultat : retour à l’envoyeur et trois méchants de moins sur ma liste.

Le septième me colla son fusil à pompe entre les omoplates. Mais avant qu’il ait pu tirer, je m’étais retourné et j’avais glissé un doigt dans le canon de son flingue. Mon majeur, histoire de le provoquer. Ca a marché. Il a quand même tiré et s’en est tout de suite mordu les doigts. Enfin, il a mordu ce qu’il a pu vu que le fusil a explosé et lui a amputé les deux bras.

Comme les derniers tueurs ont compris que les armes à feu ne me faisaient rien d’autre que des chatouilles, ils ont essayé de me submerger par le nombre.

Ils se sont pointés à onze. Pas de bol, j’ai toujours détesté le foot. D’un coup de pied j’ai arraché la tête du plus proche et j’ai fait un magnifique strike avec ma boule de bowling improvisée. Je préfère ne pas vous raconter l’état des quilles.

Celui qui avait le moins morflé a rampé vers moi. Je l’ai regardé du haut de mon mètre soixante dix-huit.

- J’ai horreur des serpents !

J’ai sauté à pieds joints sur son dos en hurlant comme un coyote façon Bruce Lee.

Comme il n’y avait plus personne pour me tenir tête, je suis retourné auprès d’Angie qui respirait faiblement. Je me disais que mon pouvoir était sûrement assez fort pour me permettre de la sauver une seconde fois. Je me suis concentré à mort. Jusqu’à ce que l’hélicoptère de mon ennemi me canarde à travers les fenêtres. J’ai dit à Angie que je revenais et d’un bond j’ai traversé la salle et la fenêtre en face de moi. J’ai chopé une pâle de l’hélico entre mes dents et d’un coup sec je l’ai arrachée. L’hélico a aussitôt piqué du nez et s’est écrasé sur la pelouse. Le sosie d’Alan Rickman est sorti des décombres juste avant l’explosion. Tant mieux, j’aurais regretté de ne pas pouvoir lui faire sa fête à mains nues.

Son costume était déchiré, mais ce qui était franchement bizarre c’était que son visage l’était aussi. C’est là que j’ai compris qu’il portait un masque. Il l’a retiré complètement et mon coeur a cessé de battre une seconde fois. C’était mon père !

Il a marché vers moi.

- Un terroriste, il n’y a que lorsqu’on le croit mort qu’on cesse de le chercher.

J’étais abasourdi et pourtant je me suis entendu lui répondre :

- Tu cites Piège de Cristal, toi, maintenant ?!!

- C’est de ta faute. Tu m’as obligé à regarder ce film des dizaines de fois. Ca a fini par me donner des idées.

Je comprenais mieux pourquoi il avait pris les traits d’Alan Rickman. Une sorte de mimétisme résultant d’une crise d’identité. Pour plus de détails, voir avec un psychiatre agrégé.

Mon père a poursuivi :

- J’avais déjà suffisamment d’argent donc je ne me voyais guère braquer des banques ou des entreprises pour passer le temps. Alors je me suis dit que faire péter des immeubles de temps en temps, ça pouvait être marrant. Une sorte de jeu vidéo grandeur nature.

Ajoutez mégalomanie, appelée aussi syndrome du « Je suis le Roi du Monde ».

J’ai repensé à ce que m’avait dit Angie. En regardant près de la tour, j’ai moi aussi reconnu sa voiture. Tout était clair, maintenant.

-Tu as fait croire à ta mort pour être au-dessus de tout soupçon et pouvoir agir à ta guise. Ca ne t’a pas suffi de me déshériter au profit de mon enfoiré de cousin, il a fallu que tu tires sur la femme de ma vie.

Il pointa un doigt méprisant en direction du château.

- Elle ? Cette actrice minable ?

Il s’esclaffa.

A mon tour, j’ai marché vers lui.

- C’est ta dernière erreur.

Il m’a regardé me rapprocher.

- Tu es ici parce que je l’ai décidé. Et elle aussi. Rien n’est dû au hasard. J’ai appris la véritable nature du médaillon et de ses pouvoirs après ma mort factice. C’est un objet que j’avais possédé pendant des années sans en soupçonner une seconde le potentiel. Lorsque je l’ai découvert, j’ai réalisé qu’il était désormais en possession de mon cher neveu. Alors pour le récupérer, je lui ai envoyé un pigeon porteur d’un message. Je savais qu’il collectionnait les oiseaux morts et qu’il ne manquerait pas d’ajouter celui-là à son tableau de chasse. Le message lui ordonnait de concocter un pari avec ton ami pour te faire entrer en possession du médaillon et te faire croire qu’il s’agissait d’un objet inestimable. Tu es crédule, mais ton cousin l'est tout autant surtout quand on signe « Le Dieu des Oiseaux te punira si tu ne fais pas ce qui est écrit ». Son penchant naturel pour la facétie a fait le reste.

Ces explications, aussi limpides étaient-elles, ne me suffisaient pas encore.

- Mais pourquoi moi ? Pourquoi n’avoir pas demandé directement à mon cousin de venir de te le donner ? Pourquoi n’avoir pas envoyer tes hommes le voler ?

Il eut un sourire de mauvais augure.

- Toute croisade mérite des sacrifices, non ? J’ai toujours voulu me débarrasser de toi. Et j’avais l’occasion idéale de faire d’une pierre deux coups. Tu représentes le déshonneur de la famille. Quand j’ai du mauvais sang, je me le fais tirer. Philippe Noiret. Le Bossu.

Je ne croyais pas mon père aussi cinéphile. Je l’avais peut-être aidé malgré moi à le devenir. En tous les cas, cela n’allait pas adoucir la mort que je lui réservais.

Il dégaina un objet cylindrique de sa ceinture.

 


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- Je suis ton père.

Oui, décidément, je l’avais bien éduqué.

- Ton plan est stupide ! C’est moi l’Elu. Je suis le seul à pouvoir me servir du médaillon. Et de toutes façons, je l’ai oublié à l’hôtel, alors c’est mort !

Il s’est à nouveau esclaffé.

- C’est toi qui es stupide. Tu as dû oublier de lire les petites lignes du mode d’emploi. Le pouvoir ne vient pas de toi, il vient de la lignée, du sang.

Là il y eut un gros plan sur ses yeux maléfiques.

- De mon sang. Je suis le seul héritier digne de ce nom qui mérite de porter le médaillon de Tankpur Jilah !

A mon tour j’ai fait un zoom sur mon regard à son intention. Me demandez pas comment !

- Le médaillon, c’est moi, maintenant !

J’ai tendu ma paume gravée des symboles dans sa direction.

Cela n’a pas intimidé mon père le moins du monde. Il était entré en mode « C’est moi qui vais gagner ! » Ce que confirma sa dernière réplique :

- Si je dois t’arracher la main et me la greffer, je le ferai !

Quant à moi, je suis entré en mode « Non, c’est moi ! »

Ma paume de main s’est alors illuminée. Mes yeux ont jeté des éclairs.

 


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Il a brandi son arme pour les repousser. En vain. Alors il a lancé son sabre laser vers moi.

La bonne nouvelle c’est que j’ai transformé mon père en grillade et la pelouse du Domaine de la Motte Beurrée Saint-Sépulcre en barbecue.

La mauvaise nouvelle, c’est que pendant ce temps là, son sabre m’a tranché la main. Et de préférence la main gravée des symboles du médaillon de Tankpur Jilah.

J’ai rien senti, mais j’ai quand même eu mal.

 


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Car privé de ma main, j’étais aussi privé de mon pouvoir. Et sans mon pouvoir, j’étais aussi utile pour Angie qu'un pansement sur une jambe de bois.

Je suis retourné dans le château pour aller la chercher. Son pouls était très faible. Il fallait que je fasse vite. Je l’ai prise dans mes bras et je l’ai déposée sur la pelouse. J’ai fouillé le cadavre de mon père. Un homme tel que lui ne pouvait se passer de téléphone. Une chance, il avait un modèle ignifugé. J’ai appelé les urgences. En insistant bien sur le caractère urgent.

J’ai rassuré Angie en lui caressant le front.

- Les secours vont arriver. Tout va bien.

Elle m’a regardé comme un héros, comme un chevalier en armure.

- Tu l’as eu ?

- Je les ai tous eu ! Grâce à toi, Angie !

Je ne suis pas rentré dans les détails. Je ne voulais pas l’embêter avec mes histoires de famille. Je suis donc resté très vague quant aux circonstances de ma victoire. C’était un moment privilégié entre nous. Je ne voulais pas le gâcher en lui parlant de mon père.

Elle a commencé à fermer les yeux. Là mon cœur a retenu sa respiration. Si ça continuait, il allait battre le record d’apnée.

- Angie, reste avec moi, je t’en prie ! On a encore tellement d’aventures à vivre ensemble !

Elle a posé une main sur ma joue ce qui a fait barrage avec le raz-de-marée de mes larmes.

- On les vivra. Dans tes rêves.

 Ses derniers mots furent en français et ils furent pour moi.


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Alors j’ai fait la chose la plus terrible de toute mon existence. J’ai fermé pour toujours les grands yeux clairs et limpides d’Angelina Jolie et j’ai embrassé une dernière fois ses lèvres généreuses aussi aphrodisiaques que la plus belle plage du monde.

J’ai posé ma tête sur sa poitrine aussi légendaire que toute sa personne et j’ai pleuré comme un enfant à qui on aurait confisqué un super jouet de Noël.

Je n’ai pas entendu l’ambulance et les pompiers arriver. Impuissant, j’ai regardé des hommes emporter mon grand amour et placer son corps dans un corbillard.

Moi j’avais pris de l’avance. J’étais déjà six pieds sous terre.

 

On m’a posé des questions. Je ne me souviens plus de ce que j’ai répondu. Ca devait être la vérité car le sérum faisait sûrement encore effet. On m’a félicité, on m’a serré la main. Ca me faisait une belle jambe. Un médecin m’a dit qu’on pouvait s’occuper de ma main gratuitement en compensation. J’étais tellement déboussolé que j’ai juste demandé un billet retour pour ma province natale. J’avais le sentiment de n’avoir plus rien d’autre à faire que rentrer chez moi.

La fête était finie, le rêve terminé. Il était temps de retourner dans cette bonne vieille réalité.

Je me sentais vide, dépossédé. Tel un automate, je reprenais progressivement le cours de mon existence, comme sorti d’une parenthèse. Tout était flou. Je ne savais plus trop qui j’étais ni ce que j’avais fait. Comme si je sortais d’un tour de montagnes russes.

C’est sans doute pour ça que j’ai gerbé.

 

En seconde classe, les passagers ne sont pas si pauvres que ça. Ils ont des ordinateurs portables et des téléphones dernier cri. Ce jour-là, pour mon plus grand malheur. Le trajet s’est effectué au rythme des multiples hommages que rendait le monde entier à Angelina Jolie. Personne ne mentionna son implication dans des actions anti-terroristes de grande envergure telle que celle qui nous avait réuni. Bien sûr, puisque tout le monde était censé l’ignorer. Pour le public, les médias et le septième art, elle était Angelina Jolie, l’actrice. Et c’était déjà beaucoup. Le Président des Etats-Unis lui-même fit une déclaration à la télévision qui devait rester dans les mémoires :

« Le cinéma a perdu un trésor, le monde un diamant, mais le ciel, lui, a gagné un ange. »

J’avoue que je n’aurais pas mieux dit.

J’ai tourné mon regard vers la vitre en réprimant le besoin viscéral de révéler la vérité à tous les passagers du train. J’ai regardé défiler le paysage comme je l’ai toujours fait sauf que dans ma tête défilaient aussi mes meilleurs scènes avec Angie.

Je vous donne la musique. Je vous laisse faire votre propre bande-annonce :

 


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En me souvenant de tout ce qu’on avait vécu, j’ai à nouveau ouvert les vannes.

 

Quelques heures plus tard, je suis descendu du train, le cœur aussi lourd qu’une enclume.

J’ai quitté la gare en effervescence en ignorant les réactions des gens à la nouvelle qui tremblait maintenant sur toutes les lèvres.

Je suis allé rejoindre mon studio meublé qui fleurait bon l’humidité et le shit de mes voisins de palier en me faisant l’effet d’un animal qu’on traînerait à l’abattoir.

 


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J’habitais cette ville depuis des années et pourtant je ne reconnaissais plus rien. Sur les façades des immeubles et sur les vitrines des magasins, je ne voyais plus qu’une seule chose : le visage d’Angelina Jolie qui me souriait.

Dans une boutique, une télé s’est allumée. Je me suis approché. Le visage d’Angie est apparu. Elle était rayonnante :

- C’est toi le meilleur !

Elle m’a dédié une œillade complice et tous les autres visages autour de moi l’ont imitée.

Je crois que j’ai perdu connaissance à ce moment là.

 

Quand je suis revenu à moi, j’étais appuyé sur le garde-fou d’un pont. Le torrent était impétueux et je crois qu’il me faisait de l’œil. Il ne m’en fallait pas plus pour être séduit.

J’ai agrippé la rambarde pour l’enjamber et une voix d’homme m’a dit :

- Elle vaut mieux que ça, tu ne crois pas ?

J’ai cru halluciner en reconnaissant Tonton…Je veux dire Monsieur Bricolage, enfin… le type qui refourguait à Angie tous ses gadgets très utiles. Il louchait toujours autant, mais c’est pas ça qui m’a empêché de me jeter dans ses bras.

- Elle va me manquer à moi aussi.

- Mais qu’est-ce que vous faites ici ? ai-je demandé entre deux sanglots.

- Et si je te disais que tu peux la revoir, tu me suivrais ?

C’était comme de donner du miel à un ours ou une tétine à un bébé.

A l’intérieur de mon corps ce fut le 14 juillet.

 


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- Où ça ?

Tonton s’écarta un peu et retira son masque.

Tom Cruise me sourit et m’adressa un clin d’œil complice :

- Aux States, mon pote, aux States !

 


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 Distribution :

 

Angelina Jolie (Angie)....................Elle-même

 Le Narrateur..............................Le mec qui la suit

Le Père du Narrateur.........Alan rickman/Dark Vador

Tonton.........Tom Cruise

Le Chauffeur de la Mercedes...........Un mec que tu connais pas et moi non plus

 

Illustrations Sonores :

 Chewbacca

La Chèvre de Monsieur Seguin

 

Effets Spéciaux, Montage :

 Clavier AZERTY

 

 Cascades :

montagnes de l'O. des E.-U. et du Canada, parallèles à la chaîne côtière; culminant à 4392 m.

(Définition du dictionnaire encyclopédique Hachette, édition 2002)

 

Crédits musicaux :

 

L'Ode à la Joie de Ludwig Van Beethoven

Dies Irae de Giuseppe Verdi

O Fortuna (extrait de Carmina Burana) de Carl Orff

Thème de Mission Impossible (crée par Lalo Shifrin, réorchestré par Michael Giacchino)

Smoke gets in your eyes interprétée par The Platters

 

L'auteur tient tout particulièrement à remercier les propriétaires du Domaine de la Motte beurrée Saint-Sépulcre pour leur précieux concours

Cette histoire est dédiée à ma mémoire car c'est bien connu :

"j'ai la mémoire qui flanche, je ne me souviens plus très bien..."

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Angelina Jolie reviendra-t-elle ?

Le billet de train retour du narrateur a-t-il été retrouvé dans la chambre d'hôtel ?

Le Colonel Moutarde a-t-il fait le coup ? (à moins que ce soit Tonton Luc !!!)

Vous le saurez en lisant Hollywood Panic

 

 

Attention scène bonus exclusive rien que pour ceux qui sont restés sur leur siège après le générique de fin !!! 

 

Un jeune livreur de pizzas – et de vêtements à l’occasion – se glissa furtivement dans la chambre d’un hôtel miteux qui n’avait même plus d’eau chaude.

Il respira à pleins poumons les draps du lit avant de faire les poches des vêtements sales oubliés par mégarde (mais surtout par moi).

Bien sûr il trouva le médaillon de Tankpur Jilah.

Il le contempla un instant et tandis qu’il détaillait les symboles gravés à sa surface, une étrange lueur bleue éclaira son regard.

Alors il émit un rire diabolique :

 

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FIN

 

 Si vous aimez, découvrez :

dans ma tête, Les Aventuriers de l'Arc Tendu  et Polaroïd

 

 

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lundi, 12 juillet 2010

Le Voyage dans le Temps

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S'il y a bien un sujet qui a nourri l'imagination des écrivains et scénaristes du 7ème art c'est bien le Voyage dans le Temps.

Fantasme dominant chez l'être humain, il est pensé et vécu comme un pouvoir sans équivalent avant d'être perçu comme une menace sans pareille une fois les conséquences mesurées.

A ce titre on peut citer L'Effet Papillon qui voit le héros capable en relisant son journal intime de retourner dans son passé pour en effacer les drames. Evidemment le simple fait de retourner dans le passé est synonyme de catastrophe et Ashton Kutcher l'apprendra à ses dépens et à ceux de ses amis.

Il en va de même pour l'irrésistible duo de la trilogie des Retour vers le Futur dans laquelle Michael J. Fox et Christopher Lloyd traversent les fifty's, le futur et l'époque du far west en semant accidentellement le chaos dans leur existence au risque de détruire le continuum espace-temps  et autant dire que "C'est pas le pied, nom de Zeus !"

Heureusement certains sont là pour veiller à ce que pareille tragédie n'arrive pas. Dans Timecop, Jean-Claude Van Damme incarne un agent chargé d'arrêter les profiteurs de tout poil, ne s'interdisant pas au passge de bénéficier des vertus d'un trajet flashback pour sauver sa moitié d'une mort certaine.

C'est précisément ce que va tenter de faire Guy Pearce dans La Machine à Explorer le Temps (Photo ci-dessus). Sauf que son périple va l'emmener bien plus loin qu'il ne l'imaginait. De quelques années en arrière au plus lointain avenir, il n'y a parfois qu'un seul pas que sa précieuse machine va franchir avec une efficacité inattendue, lui permettant de prendre part à une aventure épique et de réaliser paradoxalement son véritable destin.

Améliorer sa propre vie, sauver ceux qu'on aime, des desseins louables mais sûrement pas autant que celui de sauver la vie de nombreux innocents.

Dans Next et Déja Vu, les forces de l'ordre sont à la pointe du progrès pour faire leur boulot, grâce au pouvoir de Nicolas Cage dans le premier et d'une caméra dernier cri dans le second qui assistera Denzel washington au cours d'une enquête mouvementée où passé, présent et futur finissent par s'entremêler totalement, ne laissant aucune place au hasard.

Même chose pour Ben Affleck dans Paycheck qui le verra victime de ses propres décisions en apparence absurdes avant de comprendre que chacune d'elle est un indice, un morceau de puzzle le conduisant à un secret jalousement gardé ou plutôt qu'il a oublié. Ou comment voyager dans le temps sans s'en apercevoir.

Pour les archéologues de Prisonniers du Temps, le voyage dans le temps sert littéralement à joindre l'utile et l'agréable. Après la théorie, rien ne vaut un peu de pratique, sauf que sur le terrain, la (dure) réalité du Moyen-Age va les rappeler à l'ordre et au passage révéler la véritable raison de leur présence à cette époque. Edifiant !

Terminons pour clore cette plongée dans la quatrième dimension (oui le temps est un espace ! ) par Minority Report dans lequel Tom Cruise sert et défend le système Précrime qui permet à la police - au moyen de trois surdoués - de prévoir les meurtres avant qu'ils ne se soient produits, établissant un modèle d'équilibre social. En apparence, car tout système peut être corrompu et perverti surtout quand il est  d'origine humaine. L'arroseur arrosé, vous connaissez ?

Ah, le Temps, sacré farceur, quand même !!!

A bientôt pour une prochaine thématique. Si vous avez des sujets à proposer, n'hésitez pas !

 

Autres films recommandés sur le même thème : Returner, The Jacket, Entre Deux Rives, la série Code Quantum, Source Code,...

 

 

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samedi, 10 juillet 2010

L'Ours Bleu par José Garcia

Extrait irrésistible du film "Rires & Châtiments".


 

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jeudi, 08 juillet 2010

La Vengeance

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Elle a toujours inspiré les scénaristes quel que soit le genre du film et c’est une valeur sûre dont le public lui-même ne semble pas se lasser.

Je veux bien sûr parler de la vengeance, celle qui se mange froide, tiède ou même chaude selon le cas.

Tout d’abord qu’est-ce que la vengeance, d’où vient-elle ? Sans aller jusqu’à philsopher à outrance on peut tout simplement dire qu’elle naît de l’émotion la plus primitive. Le personnage a été humilié, agressé personnellement (laissé pour mort(e) ?) ou a vu ses proches (collègue, meilleur ami, grand amour, famille) subir eux-mêmes des traumatismes. Il n’a dès lors qu’une seule idée : faire payer aux responsables ce manque total de respect. Et toute autre considération devient vite superflue.

Mais méfiance, la vengeance peut vite devenir une sale manie et l’on peut vite se retrouver dans une spirale infernale au risque de tout perdre à commencer par soi-même. Surtout quand l’ennemi visé se montre aussi vindicatif et inspiré. Comme exemples, je citerais : Dérapages Incontrôlés, The Prestige,

Il y a aussi plusieurs méthodes pour se venger. La plus courante, musclée mais organisée, consiste à enquêter pour dresser une liste de noms afin de remonter toute la filière et atteindre enfin le vrai responsable : Kill Bill 1&2, Rogue, Un Justicier dans la Ville, Le Jeu de la Mort, The Crow, Mad Max, Taxi driver, A Vif, Punisher, Les Nerfs à Vif, Au revoir à Jamais, Max Payne, Ghost, Payback,…

Evidemment le héros pourra compter sur différentes ressources pour parvenir à ses fins : armement, expérience dans la police, l’armée, les services secrets, pouvoirs surnaturels,…

Une autre technique verra le héros intégrer le réseau ennemi afin de le détruire plus efficacement de l’intérieur et gagner la confiance de sa cible. Il peut même avoir recours à des subterfuges comme le déguisement pour mieux l’éliminer : Zorro,, Le Comte de Monte-Cristo,, Le Bossu, Permis de Tuer,...

Mais quand les parents s’en mêlent, la manière est-elle plus douce ? Non. La vengeance reste la vengeance et s’en prendre à la progéniture peut faire naître des pulsions particulièrement insoupçonnables et meurtrières. En témoignent : La Dernière Maison sur la Gauche, Taken, Death Sentence,, Au-delà des Lois, Commando,,Vengeance (le bien nommé),...

Le vengeur, celui qui s’improvise justicier, est souvent solitaire. Il ne veut et ne peut laisser à personne d’autre le fruit de sa quête et se faire accompagner constituerait pour lui un crime supplémentaire autant qu’un frein.

Mais il arrive qu’il trouve des alliés suffisamment compréhensifs et investis pour lui prêter main forte, sans avoir peur de se salir les mains : L’Empreinte de la Mort, Inglorious Basterds,...

 

Oui décidément. Si la vengeance est un plat, le cinéma, lui, aime le manger à toutes les sauces.


 

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mercredi, 07 juillet 2010

Krull [Cinéma/Critiques]

L'un des nombreux décors marquants du film

La Fantasy est un genre particulièrement exploité dans les années 80, tant que certaines oeuvres sont passées inaperçues (parfois à raison) et demeurent aujourd'hui encore méconnues. C'est le cas de Krull.

J'ai découvert ce film à la télé à l'âge de 15 ans et depuis il est resté dans mon coeur. Pourquoi ? Parce que malgré une histoire basique de conte de fée et certains effets spéciaux totalement dépassés, il brasse tous les ingrédients du genre avec bonheur et comble la soif d'imaginaire à travers des trouvailles visuelles inédites (la mort des Tueurs, la destruction de la Forteresse Noire) des séquences mémorables (La Toile Géante, les Chevaux de Feu) et des décors d'une grande originalité (l'aspect organique de la Forteresse Noire).

Le thème principal qui sert d'introduction. Une musique généreuse, épique, variée comme on entend quasiment plus. L'une de mes musiques de film préférées.

Et comme si cela ne suffisait pas, le compositeur James Horner (Titanic, Le Nouveau Monde, Avatar) a su - grâce à des thèmes épiques à souhait - donner le souffle nécessaire aux images pour leur insuffler une véritable force émotionnelle.

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Le Glaive, une arme légendaire que seul l'Elu peut trouver et utiliser. Mais cela suffira-t-il à défaire la Bête, le grand méchant du film ? Si Lyssa joue les princesses en détresse pendant tout le film, elle se montre assez ferme vis à vis des tentations de la Bête et surtout sa présence aux côtés de Colwyn sera indispensable à sa victoire et ce d'une manière plutôt originale.

Il faut ajouter aussi que malgré sa moindre popularité, le film a bénéficié de moyens conséquents et de l'implication de vétérans comme Vic Armstrong (la saga des James Bond) aux cascades. Les chevaux vedettes du film - qui n'avaient pas été montés depuis des siècles - ont d'ailleurs bénéficié d'un entraînement particulier.

Le tournage s'est effectué dans les mythiques studios de Pinewood (la saga des James Bond).

La suprise vient essentiellement du choix du réalisateur, puisque Peter Yates est plus habitué au réalisme avec des films policiers comme Bullitt et Suspect.

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Liam Neeson, alors inconnu, incarne un voleur cupide, mais attachant, comme tous les personnages du film. Et comme tous les alliés de Colwyn, il manifestera son soutien au jeune Roi le moment venu.

Si la plupart des acteurs ne feront plus jamais parler d'eux, deux d'entre eux cependant viendront à connaître une popularité certaine : Robbie Coltrane (Hagrid dans Harry Potter) et Liam Neeson qu'on ne présente plus.

Une pareille somme de talents ne pouvait accoucher d'une oeuvre insipide.

Résultat : on est littéralement transporté dans un autre monde (sorte de moyen-âge futuriste) et on suit avec un plaisir croissant les aventures de ce jeune roi parti à la recherche de sa dulcinée prisonnière et qui croisera sur son chemin de nombreux compagnons dont la personnalité et la valeur rendront cette périlleuse quête riche d'amitié et d'enseignements de toutes sortes.

A chacun son destin !

 

 

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samedi, 24 octobre 2009

Lucky Luke [Cinéma/Critiques]


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Enfin une version officielle ou le cowboy peut exprimer pleinement sa redoutable nonchalence cette fois sous les traits de Jean Dujardin (qui succède dans le rôle-titre à Terence Hill et Till Schweiger (Les Dalton).
 
On pouvait redouter un mauvais mix de Brice de Nice et d'OSS 117 au far west mais c'était sans compter un scénario bien ciselé et une mise en scène de James Hut (Brice de Nice) particulièrement inspirée !
 
Ayant vu Mort ou Vif de Sam Raimi peu de temps auparavant, je me demande s'il n'a dailleurs pas pioché quelques idées de ce côté.
Mais ce serait tout à son honneur ! Les plans des personnages sur fond noir font merveille et les effets visuels n'ont rien à envier aux films américains. Sans parler des décors naturels et d'un final géant ! (dans tous les sens du terme)
 
Au lieu de se contenter de jouer la carte de la comédie à fond, le film oscille très agréablement entre humour et drame, entre justice et vengeance, entre fantaisie légère et délire débridé.
L'équilibre est tout trouvé et ce jusque dans les seconds rôles très présents du début à la fin.
Entre le style décontracté, mais efficace de Lucky Luke, la gouaille et l'injure de Calamity Jane (Sylvie Testud), le fantasque gamin revanchard Billy The Kid (Michael Youn irrésistible) et la classe théatrâle de Jessie James (Melvil poupaud) on en a vraiment pour son argent !
 
Pour peu que vous aimiez les rebondissements et alors vous aurez l'impression d'avoir trouvé santiag à votre pied !
Pour conclure : un film qui m'a donc vraiment botté !!!
 
 

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dimanche, 08 février 2009

Ciném'Art

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