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mercredi, 20 février 2013

Le Mariage de mon Ame [Poésies]

Le Mariage de mon Ame

(souvenir d'un rêve)

 

Une cathédrale baignée de lumière
à la pureté d'ivoire
auréolée d'un choeur liturgique
je m'allonge sur l'herbe
terrassé par la magie
Le prêtre vient me saluer
me rappelant la cérémonie
souvenir teinté d'ironie
Loin de me fustiger
de mon athéisme un peu lourd
il me décrit avec humour
celle posée près de moi
que je vois pour la première fois
Belle inconnue au charme victorien
en robe d'apparat, rehaussée d'un rien
au visage de porcelaine
aux mains de velours
Mes yeux mesurent la beauté du premier
mes doigts gourds
la douceur des deuxièmes
Invitée d'un mariage
dont je ne me souviens pas
celui de mon âme
et de ma véritable foi

rêve,spiritualité,esprit,âme,beauté,paradis,forêt

Digital Art par weiweihua

 

 

Ce blog c'est pas juste un passe-temps
j'y bosse dur tous les jours
Je ne te demande pas d'argent
mais juste en retour
un petit commentaire
Ce sera mon salaire
C'est plus précieux que ça en a l'air

lundi, 24 décembre 2012

Inception [Cinéma/Critiques]

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Après le très réussi et acclamé The Dark Knight, Christopher Nolan (Memento, The Prestige) signe un nouveau film complexe et passionnant mélangeant habilement thriller, espionnage, drame et fantastique.

Ceux qui s'intéressent de près aux rêves devraient être comblés, le scénario exploitant brillamment les possibilités en la matière et les mécanismes du subconscient. 

Inception n'est pas un film à effets spéciaux - bien qu'il réserve plusieurs scènes inédites et spectaculaires - la construction de son intrigue est sa principale force car d'une rare densité. Elle nécessitera certainement plusieurs visions pour être comprise et appréciée dans sa totalité. A l'heure des blockbusters sans âme, on ne peut que se réjouir de cela !

Une opération délicate, une équipe de spécialistes et un plan génial, tout cela et plus encore dans un monde où les règles se plient à la volonté de l'esprit...

INCEPTION ou quand Mission Impossible rencontre Matrix et Au-delà de nos Rêves !!!

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LE POURQUOI DU COMMENT - SPOIL
 
En ce qui concerne la finalité, le fait de l'avoir vu plusieurs fois en VO m'a carrément livré un indice de taille sur le sens qu'a pu vouloir donné Nolan. Vers le début, au moment où Saito propose le boulot à Cobb dans l'hélico et qu'il hésite, pour le convaincre, il emploie une expression bien précise "So do you want to take a leap of faith ?" (traduit par "Alors vous êtes prêt à me faire confiance ?") que sa femme Mall réutilise (chapitre 8) quand elle veut sauter dans le vide en disant : "I'm asking you to take a leap of faith." (traduit par : " je te demande de me faire confiance.") ce qui nourrit l'explication suivante : Cobb subit une énorme Inception (toute l'opération) à seule fin d'être délivré de ses traumas.
D'ailleurs on peut se dire que pour qu'il accepte le contrat (et donc implicitement la guérison) Saito utilise cette phrase à dessein sachant qu'elle va lui rappeler Mall et le faire fléchir.
A noter que l'expression "take a leap of faith" peut se traduire par "faire un saut de la foi", tout un symbole ! (Non, je ne parle pas d'Assassin's Creed quoique question rêve lucide, Desmond en connait sûrement un rayon, lui aussi )
 
On peut aussi être surpris de la présence de Saïto en Afrique au moment même où Cobb a réellement besoin d'aide. La scène de la ruelle qui se resserre étant une métaphore assez parlante sur la situation du héros. Les hommes à sa poursuite pourraient donc être aussi bien des projections de l'inconscient de Cobb pour exprimer son sentiment de persécution, l'interdiction de rentrer chez lui étant, elle, on ne peut plus réelle. L'omniprésence de Michael Caine (dans le rôle du beau-père de Cobb) est elle aussi très intrigante. On le voit à Paris, lui présentant Ariane, puis on le retrouve à l'aéroport aux USA à la fin du film, renforçant la conviction que c'est sans doute lui (le père de Mall) qui est à l'origine de l'inception de Cobb, de sa thérapie par le rêve.

Je précise que l'interprétation que je donne est la seule que Nolan n'approuve ni ne réfute catégoriquement se contentant de dire que ce serait une explication intéressante...
 
 
 

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dimanche, 05 août 2012

Le Combat du Papillon - Version Musicale [Musique]

Etant à ce jour très loin d'être en mesure d'écrire l'histoire en intégralité - encore moins de l'adapter en film d'animation - avec une vraie 3D !!! - je vous propose cette version concise un peu mutante, mais qui vous permettra, je l'espère de tout coeur, de comprendre mes intentions en terme d'émotions. Pour une compréhension plus complète de l'univers et des personnages, je vous invite à visiter les liens et/ou à consulter la catégorie Dessins et Nouvelles.


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Prologue - La Genèse, l'Age d'Or, le Paradis Perdu. C'est la vision qu'a Sylvain au plus profond de son désespoir : des anges dotés d'ailes de papillon tour à tour survolent et se fondent dans un océan doré : l'Océan Divin. Mais l'océan s'assèche et les anges chutent sur la Terre : leur Enfer !

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Par l'intermédiaire de ses rêves, Sylvain accède à la Terre de Beulah, baptisée ainsi par William Blake, un monde peuplé par des anges, les Papillons et qui luttent contre les Démons, des créatures issues des vices et des péchés humains. Il assiste à une bataille lors de laquelle il découvre le charismatique et puissant Monarque, Mentor des Papillons.

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Monarque présente les autres Papillons à Sylvain et le guide à travers les merveilles de la Terre de Beulah (cf William Blake), véritable patrie de la poésie, où le coeur et l'esprit règnent en harmonie.

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Sphinx, Monarque, Vanesse, Morpho et Saturnie-Atlas

Sylvain affronte le terrifiant Python, sa Bestialité, autrement dit la somme de tous ses Démons : la personnification de ses peurs, de sa colère et de son désespoir. Il doit impérativement le vaincre pour pouvoir devenir à son tour un Papillon, une âme pure et libérée. Alors qu'il est en difficulté, Vanesse, la compagne de Monarque, émue par son sort, tente de s'interposer. Python la terrasse et profitant de l'aveuglement de sa victoire, Sylvain parvient à le détruire au cours d'un duel dantesque.

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Monarque porte le corps inanimé de Vanesse sous les yeux des autres Papillons. Il le place dans une colonne de lumière et le regarde s'élever lentement, tandis que ses larmes l'accompagnent et que son coeur crache des roses meurtries.

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 Sylvain devient le Papillon Apollon et découvre toute l'étendue des pouvoirs de la poétisation : la capacité de modeler son environnement selon son inspiration et d'user de la symbolique du romantisme comme d'une arme sans équivalent pour purifier les âmes corrompues par leur séjour terrestre.

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Au cours de l'un de ses voyages, Apollon parvient à retrouver son grand amour perdu, l'une des causes mêmes de son désespoir. La boucle est donc bouclée. Alors qu'elle vient de détruire sa bestialité, il assiste avec émotion à sa transformation en Papillon. Elle répond désormais au nom de Diane.

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Bouleversés par leurs retrouvailles, Apollon et Diane profitent de leurs récents pouvoirs pour poétiser à volonté et démontrer ainsi toute la beauté et la force de leurs sentiments.

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Les Papillons affrontent un important et puissant groupe de Démons. L'occasion pour eux d'unir leurs pouvoirs comme jamais et de renforcer leur espoir en un avenir plus lumineux.

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Au cours d'un combat, Monarque est gravement touché par un Démon. Lui qui n'a jamais eu à vaincre sa Bestialité pour devenir Papillon grâce à la présence de Vanesse, est contraint de mener enfin ce propre combat. Lorsqu'il l'apprend, Apollon tente de l'aider, mais il arrive trop tard et assiste, impuissant, à sa défaite.

Avant de disparaître, Monarque désigne Apollon comme le nouveau Mentor des Papillons. Il lui révèle aussi que Diane et lui sont l'unique clé pouvant ouvrir la Porte d'Ivoire qui sépare l'Humanité d'un nouvel Age d'Or. Et que désormais, plus Rien d'autre ne compte.

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Diane et Apollon fusionnent, donnant naissance à Astralis (Cf Henri d'Ofterdingen de Novalis), seul capable de retransformer l'Humanité en Ame-Unité.

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Epilogue - Astralis se transporte dans la réalité. Il découvre qu'il peut voir l'âme des hommes à travers leur corps et qu'il peut poétiser physiquement le monde.

Générique de Fin

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THE END ?

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mardi, 12 juin 2012

Jusqu'en Enfer de Sam raimi

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Entre deux Spiderman, Sam Raimi revenait aux sources de son cinéma, à savoir l'épouvante débridée !

Après une intro intense et un affrontement mémorable dans un parking, on se dit que le réal a voulu se faire plaisir et nous faire plaisir en nous offrant du frisson haut de gamme. Malheureusement, le film perd petit à petit tous les bons points accumulés, la faute principalement à des effets peu ragoûtants voire carrément grand guignolesques qu'il répète beaucoup trop et qui cassent le sérieux de l'ambiance générale. Ce choix très discutable est d'autant plus regrettable que cette histoire de malédiction est aussi prenante qu'originale et que plusieurs séquences (dont celle de la visite de la Lamia  dans la maison de l'héroïne) sont particulièrement réussies. Pour toutes ces raisons, il est d'ailleurs fortement recommandé d'avoir le coeur et les nerfs bien accrochés.

Alison Lohman est belle comme un coeur et sa fraîcheur est un contraste parfait avec la laideur de sa persécutrice. Dommage que son jeu manque d'intensité dans certaines scènes cruciales.

Autres points noirs à énoncer : une séquence d'exorcisme censée constituer le clou du spectacle et qui prête plus au ridicule qu'à autre chose. Et pour finir et c'est sans doute ce qui gâche le plus le potentiel du film, une chute complètement ratée puisqu'on la voit venir à des kilomètres !

Le constat est donc plus que mitigé. Si Sam Raimi avait conservé un ton dramatique au lieu de lorgner vers sa cultissime saga Evil dead et si son scénario avait été moins prévisible, il aurait pu sans nul doute nous livrer une véritable perle du genre. En l'état, il ne fera le bonheur que des plus inconditionnels et des cinéphiles les moins exigeants et surtout les moins perspicaces.

 


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samedi, 31 juillet 2010

Les Rêves et Vous !

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A l'occasion de la sortie du film-évènement INCEPTION, je vous propose un petit sondage pour savoir un peu où nous en sommes avec les rêves, ce que nous en pensons, l'importance que nous leur accordons et pourquoi pas au final partager nos expériences en la matière.

Pour répondre, un simple commentaire suffira, libre à vous de développer, ce que je vous encourage vivement à faire, évidemment. Pour certaines questions, plusieurs réponses peuvent être cumulées.

1. Vous êtes du genre à oublier presque systématiquement vos rêves :

a - Et vous trouvez cela frustrant car vous avez l'impression de rater quelque chose d'important.

b - Cela vous est égal puisque pour vous ce qui compte c'est la réalité.

2. Vous êtes du genre à vous souvenir de vos rêves :

a - Au point de pouvoir les raconter avec autant de détails que s'il s'agissait d'un souvenir.

b - Vous en gardez quelques images confuses et une impression générale.

3. Vous vous souvenez facilement :

a - Des jolis rêves.

b - Des cauchemars.

c - Des rêves un peu bizarres.

d - Des trois, mon Capitaine !

4. Une fois réveillé, en général :

a - Vous essayez d'oublier votre rêve pour revenir rapidement à la réalité.

b - Vous le racontez par écrit afin d'en conserver une trace.

c - Vous vous empressez de le partager avec vos proches.

5. Votre expérience la plus marquante dans un rêve c'est :

a - D'avoir rencontré votre star préférée.

b - D'avoir retrouver un proche perdu.

c - De vous être réveillé dans votre rêve.

d - D'avoir rêvé un évènement que vous avez vécu plus tard.

6. Pour vous, les rêves :

a - Ca n'a aucun sens !

b - Servent à nous dire qui on est vraiment.

c - C'est un défouloir psychologique.

d - C'est un pouvoir inexploité.

7. Dans le futur, les rêves :

a - On pourra totalement les contrôler.

b - On pourra les enregistrer et les revoir à volonté.

c - Serviront à espionner les gens.

d - N'existeront plus.

 

D'autres films qui ont abordé le sujet du rêve et des pouvoirs de l'inconscient :

D'un Rêve à l'Autre, The Cell, Au-delà de nos Rêves, La Science des Rêves, Vanilla Sky,

Mr.Nobody http://dartetdamour.hautetfort.com/archive/2010/01/25/mr-...


 

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mardi, 13 juillet 2010

La Naissance de Sphinx [Nouvelles/Le Combat du Papillon]

 

 

 

« Mon amour est devenu une flamme qui consume petit à petit

tout ce qui est terrestre en moi. »

 

                                                          Novalis

 

 

 

 

Dès qu’elle franchit la grille d’entrée, il l’aima.

Lorsqu’elle passa près de lui, il crut qu’on lui envoyait un ange.

Ses blonds cheveux.

Ses yeux bleus.

L’ovale pur de son visage.

Sa peau crémeuse.

Sans parler de son regard.

Une véritable flèche d’amour décochée en plein cœur.

Elle arriva à bon port.

Il se sentit submergé par une vague de douceur.

Elle le remarqua à ce moment là. Et à son tour, elle fut la proie d’une émotion nouvelle et implacable.

Elle disparut au bout de l’allée sans omettre de jeter un dernier coup d’œil à son intention.

Il quitta le banc, tout disposé à la suivre jusqu’au bout du monde. Mais ses parents étaient avec elle. Il sut intuitivement qu’il la reverrait en ces lieux et que l’attente jouerait en leur faveur.

Si c’était bel et bien de l’amour, alors ce n’était que le commencement.

 

Il rêva d’elle et elle rêva de lui, si bien que lorsqu’ils se revirent, ils crurent qu’ils ne s’étaient jamais quittés. Et qu’ils rêvaient encore.

Elle était toujours accompagnée de ses parents.

Il est vrai qu’elle avait l’air d’être jeune, innocente aussi.

Elle était beaucoup plus jeune que lui. Dix ans les séparaient, peut-être quinze.

Il la dévisagea intensément. Peu importait.

Les parents notèrent son intérêt singulier pour leur fille. Ce qui ne fut pas de leur goût à en juger par leur expression.

Il n’aurait sans doute pas dû, mais il les défia du regard, eux et la bonne morale qu’ils semblaient vouloir incarner à tout prix, même au détriment du plus précieux des sentiments.

Ils s’éloignèrent rapidement, emportant avec eux la grâce et la beauté qu’ils avaient su mettre au monde.

Il sut dès lors que ce ne serait pas simple.

Mais il se jura que ce serait possible.

 

Le jour suivant, elle ne vint pas dans le parc.

Il comprit rapidement pourquoi.

Sa réaction les avait condamnés tous les deux.

Mais il était confiant.

Il la retrouverait.

Son cœur le lui affirmait.

 

Il ne la revit pendant plusieurs jours.

Ni dans le parc, ni ailleurs.

Le temps passé à espérer une nouvelle rencontre ne fit qu’attiser sa passion.

Son visage d’ange dansait dans son esprit.

Il décida de le graver comme il le pouvait.

Son art du dessin allié à ses sentiments fit des merveilles.

Il avait saisi l’essence de la jeune fille, immortalisant son âme d’une manière purement intuitive propre aux poètes les plus épris.

Ainsi, même dans l’incapacité de la voir, il lui suffisait de contempler son œuvre pour avoir l’impression d’être près d’elle.

 

Par hasard, à compter que le hasard eut sa place, il la revit à proximité de chez elle, de sorte qu’il eut la chance de voir où elle vivait précisément.

Toujours escortée des auteurs de ses jours, elle le vit du coin de l’œil et lui glissa un regard complice à la dérobée.

Il l’attendit sagement, à l’ombre d’un arbre, le cœur battant à tout rompre.

Lorsqu’il la vit sortir de la maison pour venir discrètement à sa rencontre, il crut que son cœur allait exploser dans sa poitrine.

Elle se planta devant lui avec une hardiesse propre à l’adolescence, ce qui l’intimida davantage. Ils commencèrent par se toucher des yeux, pudiquement, puis conscients qu’ils avaient peu de temps devant eux et que cette rencontre tenait du miracle, ils s’effleurèrent du bout des doigts. Lorsque leurs mains s’épousèrent, le courant passa parfaitement, cette électricité, cette foudre capable d’unir deux êtres que tout semble vouloir séparer.

Ils se réfugièrent chacun dans cet état de grâce providentiel, inattendu autant qu’espéré.

Lorsqu’il put parler, il lui demanda :

-Tu as quelqu’un ?

La question pouvait paraître absurde, mais sur l’instant elle lui paraissait des plus légitimes. En tous les cas, il avait besoin de la poser et d’avoir une réponse.

Elle sourit avec une candeur désarmante.

- Non, je suis encore jeune. Et toi ?

Il rougit.

- Oui.

Il la vit tressaillir, alors il ajouta rapidement :

- Toi.

Il lui tendit une feuille de papier roulée en cylindre.

- Ca te fera un souvenir de moi lorsque nous ne pourrons pas nous voir.

Elle prit l’objet qu’elle se contenta de caresser nerveusement.

Il sut qu’elle attendrait de retrouver son intimité pour l’ouvrir.

Il demanda :

- Tu as quelque chose à me laisser.

A son tour, elle rougit. Elle contempla ses mains vides, vierges de tout trésor.

Il les regarda avec adoration avant de les prendre à nouveau dans les siennes.

- Alors je vais devoir te ramener toute entière avec moi.

Elle parut réfléchir, hésiter. Puis finalement, elle lui dit :

- J’ai trouvé quelque chose que tu peux garder.

Elle se dressa sur la pointe des pieds et l’embrassa sur la commissure des lèvres.

Il en resta tout penaud.

Ils entendirent sa mère l’appeler au loin, depuis le jardin.

- Je dois y aller.

Sa voix tremblait suite à son geste.

- Comment tu t’appelles ? s’enquit-elle en faisant quelques pas en arrière.

Il lui répondit.

Elle répéta son prénom à voix basse comme pour mieux en savourer la sonorité.

- Et toi ?

Elle lui souffla son prénom à l’oreille avant de disparaître.

Il regarda sa silhouette s’éloigner en imprimant dans son esprit le moindre de ses gestes.

En rentrant chez lui, il répéta son prénom avec religion jusqu’à s’en imprégner totalement, jusqu’à en oublier le sien.

 

 

Ils furent dans l’incapacité de se voir pendant plusieurs jours.

Tels des cerbères, ses parents la tenaient sous bonne garde.

 

Un soir, il rentra chez lui, particulièrement aigri par la situation et son impuissance.

Il regarda sur la table l’alignement de bouteilles et de seringues comme autant de femmes lubriques prêtes à le faire plonger dans les délices pervers de l’anéantissement.

Il tendit une main tremblante vers elles, comme répondant à leur appel. Une soif qui semblait insatiable lui brûlait les entrailles. Il avala une rasade, puis deux, puis davantage. C’était de l’eau de vie, bien mauvais nom pour une telle boisson.

Alors qu’il portait de nouveau le goulot à ses lèvres, un visage angélique désormais familier revint danser dans son esprit comme une lueur au milieu des ténèbres.

Un visage sur lequel il pouvait désormais mettre un nom.

Il le prononça à voix haute comme un sorcier scanderait une formule magique seule capable de le délivrer d’un mauvais sort. L’incantation fonctionna. Il se sentit libéré.

L’innocence qu’elle représentait à ses yeux anéantit sa faim vicieuse et viscérale.

D’un geste violent il chahuta bouteilles et aiguilles qui se fracassèrent sur le sol et contre les murs de la pièce.

Il se laissa tomber sur un sofa miteux.

- J’ai plus besoin de ça, maintenant.

Et tout en s’abandonnant au sommeil, recroquevillé comme un enfant, le visage humide, il se promit d’aller dès le lendemain se mesurer aux cerbères retenant sa princesse en otage, loin de lui.

En Enfer.

 

Il sonna à la porte d’entrée.

Une femme d’environ quarante ans lui ouvrit.

Pour l’occasion, il s’était relativement bien habillé, sachant que son apparence naturelle jouerait déjà certainement contre lui selon les critères en vigueur chez la famille d’Ornella.

- Bonjour madame. Je connais votre fille.

Il se frottait les mains comme pour faciliter la sortie de chaque mot.

- Je suis tombé amoureux d’elle.

Elle le détailla du regard comme s’il venait de prononcer une grossièreté.

Il ne s’attendait pas à être accueilli à bras ouverts, mais de là à faire l’objet d’un tel mépris…

Elle regarda ses bras nus. Il les dissimula bien vite dans son dos, scandalisé par sa propre négligence.

- Je vous reconnais, dit-elle avec une froideur totalement démaquillée. Vous étiez dans le parc. Je n’ai pas l’honneur de vous connaître et je ne vois pas ce que vous voulez.

Il serra les poings.

- Je voudrais voir votre fille.

Il s’était fait violence pour prononcer le mot voir.

- Elle n’est pas ici.

Il se garda bien de lui dire qu’elle mentait très mal, mais sans doute était-elle déjà au courant. Il comprit alors que c’était un combat et qu’il devait gagner sur son terrain à elle.

- Je suis certain qu’elle souhaiterait me voir aussi. Elle m’aime.

La femme produisit un rictus de mauvais augure.

- Ne dites pas n’importe quoi. Aimer…à son âge ? Et puis, vous, vous vous êtes regardé ? Vous êtes beaucoup trop vieux. Et comment pourrait-elle aimer un…

Elle le toisa avec un dédain décuplé.

- Vous croyez que je n’ai pas vu les marques sur vos bras. Même vos yeux en disent long sur votre mode de vie dépravé.

Il se sentit faiblir sous ses assauts. Mais il ne devait pas craquer, pas ici, pas maintenant. Et surtout pas devant elle.

- J’ai arrêté tout cela, rétorqua-t-il avec plus de véhémence qu’il ne l’eut souhaité. Grâce à votre fille. Elle n’a rien eu à faire. Mon amour pour elle est pur et me guérit de tout.

La femme manifesta clairement son doute à ce sujet.

- Ecoutez, dit-elle avec l’évidente intention d’en finir, rentrez chez vous avant que j’appelle mon mari ou la police. Je ne sais pas ce que vous vous êtes imaginé un soir de beuverie, mais il est hors de question que vous remettiez les pieds ici. Ma fille ne vous connaît pas, ne vous aime pas et ne souhaite pas vous voir. Et il en est de même pour moi. Si vous persistez, je prendrais des dispositions, croyez-moi sur parole.

Elle le défia du regard.

- Je n’ai pas peur de vous, cru-t-elle bon d’ajouter.

Elle commença à fermer la porte.

- Il y a d’autres filles.

La porte se ferma complètement. Il se retrouva seul au monde, comme échoué au milieu de nulle part alors que sa princesse n’était peut-être qu’à quelques mètres de lui.

- Pas pour moi, répondit-il tardivement.

Il rentra chez lui, plus seul qu’il ne l’avait jamais été. Il se sentait anéanti. Rien ne pourrait le consoler. Personne ne serait en mesure de le réconforter, pas même une autre fille.

Rien ? Peut-être pas.

Il prit sa guitare et joua un air pour elle.

La musique n’avait pas de frontières. Cette pensée lui réchauffa le coeur.

Cela ne pouvait finir ainsi. Cela venait juste de commencer.

Ils avaient tant à se donner.

Il y avait forcément un moyen, un chemin. Il devait simplement le trouver.

 

A la tombée de la nuit, il sortit et marcha jusqu’à chez elle, sans espoir précis. Peut-être pourrait-il sentir sa présence derrière les murs qui la retenaient.

Il vit une fenêtre ouverte.

Il s’approcha à pas de loups.

Un réverbère à proximité éclairait la façade. Il reconnut le pâle ovale d’un visage et la cascade de cheveux blonds qui l’encadraient.

Son cœur s’emballa comme un cheval fou.

Il l’appela une fois, deux fois.

Elle baissa la tête et le vit.

La joie illumina sa figure d’un éclat presque surnaturel.

Elle l’appela à son tour comme pour se convaincre qu’il n’était pas un mirage né de son désir le plus assoiffé.

Sa voix était étranglée par l’émotion.

Il commença à grimper en s’appuyant sur la gouttière.

- Tu vas tomber ! s’exclama-t-elle.

- Non, je ne vais pas te faire ce plaisir. Et puis ton amour me donne des ailes.

Lorsqu’il parvint à la fenêtre, ils tombèrent dans les bras l’un de l’autre. Une fois relevé, il jeta un rapide regard autour de lui. Il était dans sa chambre et c’était réel.

- C’est mignon, tu…

Elle posa un doigt sur ses lèvres. Il faillit rougir de plaisir.

- Si mes parents savent que tu es ici…

- Je sais ce qu’ils feraient, dit-il en retrouvant une certaine gravité. Tu leur as parlé ?

Elle inclina la tête.

- Après que tu sois venu. C’est eux qui ont commencé à me parler, alors je leur ai tout expliqué à notre sujet.

- Que leur as-tu dit ?

Elle haussa les épaules.

- La vérité.

Il la prit délicatement par les bras.

- Alors ils n’ont pas du apprécier.

Il soupira.

- On va trouver une solution. On va trouver. C’est trop important.

La porte de la chambre s’ouvrit à la volée.

C’était les parents, le père en tête.

- Lâche ma fille immédiatement et écarte toi d’elle !

L’amoureux obéit à regret.

- Je savais bien que j’avais entendu du bruit. Sale ordure, il a fallu que tu reviennes en douce ! De la graine de camé qui veut rien comprendre !

- Je vous avais prévenu, renchérit la mère par-dessus l’épaule de son époux.

Le père était en robe de chambre, une main glissée dans une poche.

- Tu vas sortir d’ici immédiatement en t’estimant heureux que nous en restions là. Il n’y aura pas de troisième fois, tu m’entends !

L’intéressé serra les poings.

- Pourquoi vous n’essayez pas de comprendre ce qui nous arrive ? Si vous ne voulez pas le faire pour moi, faites-le au moins pour votre fille. Vous avez été jeunes, vous aussi…

La jeune fille répliqua à son tour :

- Il ne fait rien de mal, il n’est pas dangereux !

Le père grimaça comme si elle avait dit une sottise.

- Je me méfie des gens qui ne sont pas dangereux.

- Pourquoi ?

- Parce qu’ils peuvent le devenir.

Sur ces mots, le père se fit plus menaçant.

- Je n’ai pas l’intention de négocier quoi que ce soit. Vous ne vous reverrez pas, un point c’est tout. C’est un ordre et vous allez vous y conformer que ça vous plaise ou non.

Il fixa avec haine celui qu’il considérait comme un criminel :

- Sors d’ici ou je te fais arrêter pour violation de domicile !

- Et pour détournement de mineure, s’empressa d’ajouter la mère.

Comme l’intéressé ne semblait pas vouloir obtempérer, le père ajouta :

- J’ai une arme.

Le visage du jeune homme se crispa.

- Moi aussi.

Il glissa une main sous sa veste.

Le père n’hésita pas. Il sortit son revolver et fit feu.

Avec une précision qu’il devait regretter toute sa vie.

La balle atteignit l’amoureux à la tête. Il tomba violemment au sol, sa chute annonçant sa mort plus que l’impact lui-même.

Ornella se jeta sur son corps inerte en poussant un cri déchirant.

- Il n’avait pas d’arme ! Il voulait parlait de son cœur.

Puis elle pleura sans discontinuer.

La mère prit le revolver des mains de son époux. Ils se dévisagèrent, conscients du drame qui venait de se jouer. Cette balle venait de briser leur destin à tous.

Paralysé par son acte, le père regarda sa fille se jeter sur lui et le frapper de ses poings menus jusqu’à être certaine de lui faire mal.

 

Plusieurs jours passèrent.

Elle resta cloîtrée dans sa chambre, les yeux fixés sur le portrait qu’il avait fait d’elle, tout du moins quand ses larmes le lui permettaient. Des larmes qui n’avaient guère le temps de sécher.

Le monde avait dévoilé sa vraie nature : une abominable supercherie, un monstrueux piège dans lequel elle ne voulait plus mettre un pied.

Elle avait tout perdu, l’impression de mourir avant d’avoir vécu et de sentir son amour périr prématurément comme un infortuné nouveau-né.

Elle en avait mal au ventre.

 

Un soir, sa mère frappa à la porte. Elle entra après avoir attendu vainement une réponse qu’elle savait d’avance ne pas obtenir.

Elle posa le plateau-repas sur la commode et observa la forme recroquevillée dans le lit.

Elle se sentait si impuissante. Mais elle essayait malgré tout de se convaincre que cela ne durerait pas.

Peut-être un sentiment de culpabilité motivait-il cette pensée.

Elle s’éclaircit discrètement la gorge.

- Je sais que tu ne vas pas bien, que tu as mal. Je ne prétends pas savoir à quel point. Je l’ignore. J’aimerais tellement que tu me parles.

Elle marqua une pause. Comme rien ne bougeait dans le lit, elle reprit :

- Si tu savais combien ton père regrette ce qu’il a fait. Il ne voulait pas aller jusque-là. Il voulait vraiment te protéger. C’est ce que nous voulions tous les deux. Il a eu peur. Mon dieu, tout s’est passé si vite !

Elle commença à sangloter.

- Il est vraiment en difficulté. Te voir lui ferait tant de bien.

Seul un silence entêtant lui fit écho.

Un silence étudié.

La jeune fille ne dormait pas et sa mère ne le savait que trop bien.

Elle quitta la chambre sans un bruit.

 

Au milieu de la nuit, elle ne dormait toujours pas. Si bien qu’elle entendit clairement la voix l’appeler par son prénom. Une voix qu’elle reconnut immédiatement.

Elle se dressa dans son lit et alluma sa lampe de chevet.

La fenêtre était fermée, la porte aussi.

Ce n’était pas possible. Elle avait dû rêver.

Mais lorsqu’elle vit un rosier fleurir autour du portrait qu’il avait fait pour elle, elle n’eut plus de doute. Elle bondit du lit.

Une silhouette humaine se tenait debout devant elle, son identité protégée par les ombres.
Le cœur de la jeune fille suffit à percer les ténèbres. Elle sauta dans les bras de son amoureux.

- C’est impossible, c’est un rêve !

Dans son étreinte, elle se sentit ressusciter. Et il devait en être de même pour lui. Il émanait de lui une telle douceur, comme si son cœur l’enveloppait et diffusait directement son amour autour de lui. Plus tard, elle comprendrait que c’était précisément ce qui se passait.

- Je ne comprends pas, dit-elle, des larmes plein les yeux, comment peux-tu être ici ? J’étais à l’enterrement. Que t’est-il arrivé ? Dis-moi que je ne suis pas folle et que tout cela est réel !

Il sourit tendrement et s’écarta légèrement. Il avait bien toujours le même visage, mais il était nu, sans sexe apparent, tel un ange. Son corps projetait une lumière opaline. On aurait dit une statue vivante.

- C’est réel, dit-il en cueillant l’une de ses larmes du bout du doigt. La seconde d’après elle se changea en rose qu’il glissa dans l’or de ses cheveux.

- La poésie est le réel absolu.

Elle le regardait, fascinée et hébétée, comme désireuse de croire à cette magie à tout prix tout en redoutant un nouveau coup du sort.

- Mon corps est mort et l’illusion qu’il représentait est morte avec lui. Tu me vois maintenant dans toute ma vérité. Si seulement tes parents avaient pu me voir ainsi. En voyant l’expression d’Ornella changer, il craignit d’avoir ravivé le drame. Il lui prit la main.

- Tu te souviens, mon amour, tu m’as donné des ailes. Des ailes à mon âme.

A ces mots, il baissa la tête et deux ailes géantes de papillon se déployèrent dans son dos comme deux vivants arcs-en-ciel, déversant dans la pièce un somptueux ballet de couleurs et de lumières. Ornella pleurait, mais cette fois la douleur était exempte. Elle pleurait de joie et d’émerveillement.

Il recula alors encore un peu, estompant volontairement la magie qu’il avait fait naître.

- Je dois partir, Ornella.

La nouvelle estomaqua la jeune fille.

- Non, reste. Ne me laisse pas ici, toute seule.

Elle s’efforçait de ne pas crier de peur d’alerter sa mère, sans doute aussi éveillée qu’elle.

- Je n’ai pas le choix, répondit-il avec gravité. Je suis d’ailleurs. Je ne peux plus vivre ici. Cela m’a énormément coûté de venir te voir. Plus que tu ne peux l’imaginer. Mais je te le devais. A présent que c’est fait, je dois m’en retourner.

- Mais où vas-tu ? Emmène-moi avec toi. Je t’en supplie ! Moi non plus je ne peux plus vivre ici !

Il la dévisagea intensément.

- Tu as déjà rêvé de moi ?

- Bien sûr !

- Alors tu sauras me retrouver. Ton âme saura. Je t’aime.

Il prononça une dernière fois son prénom et l’embrassa à la commissure des lèvres.

Quelque chose qui ressemblait à un œil s’ouvrit au milieu de son front et la seconde d’après il n’était plus là.

Terrifiée à l’idée de ne plus jamais le revoir, Ornella ouvrit instinctivement la fenêtre. Elle ne vit rien, bien sûr, mais soudain, une chaleur réconfortante l’envahit. Elle cueillit la fleur dans ses cheveux et contempla le dessin à demi recouvert par les roses.

Oui, elle trouverait.

 

Elle le retrouva bel et bien.

Rien ne semblait être en mesure de les séparer.

En étant à nouveau si proche de lui, elle ne put retenir un chapelet de larmes qui eurent l’étrange idée de s’envoler.

Elle manifesta sa stupeur et lui son amusement.

- Ici tout est léger et appartient au ciel.

Il la serra dans ses bras et déploya ses ailes pour l’en couvrir comme d’un manteau.

- Bienvenue dans le pays où l’amour est roi. Tu es ici chez toi.

 

Il lui fit visiter les lieux, des lieux qui avaient l’étrange propriété de se métamorphoser pour peu qu’on y regardât à deux fois.

Ils survolèrent des forêts qui se changèrent en montagnes vertigineuses qui à leur tour se changèrent en vallées verdoyantes. Le cycle était infini.

Tout était sans cesse renouvelé, sans cesse en mouvement, comme si un peintre invisible à l’humeur insatiable retouchait indéfiniment le paysage.

- C’est merveilleux ! dit Ornella, au comble de la joie. Mais qui fait tout ça ?

Son amoureux la tenait près de lui. Ses ailes les maintenaient tous deux en l’air. Ornella pouvait voler, elle aussi, mais elle l’ignorait encore. Il sourit.

- C’est nous.

Elle écarquilla les yeux d’étonnement et ce faisant, elle vit plusieurs nuages éclater dans une pluie de flocons de neige.

- Mais comment… ?

- En ces lieux tout est lié et s’influence constamment. Nos émotions, nos états d’âme génèrent des transformations dans notre environnement qui lui-même génère en nous de nouvelles émotions. Et ainsi de suite. C’est un éternel ballet de couleurs, formes et de sensations. Tout participe à l’harmonie générale.

Tout en expliquant, il désigna un volcan en éveil crachant un nuage de fumée affectant la forme d’un cœur.

Ornella serra plus fort la main de son amoureux.

- C’est magnifique ! Comment s’appelle cet endroit ?

- Le poète William Blake l’appelait La Terre de Beulah. Mais j’imagine qu’elle a bien d’autres noms.

- Je ne veux jamais partir d’ici, reprit Ornella, métamorphosée par son expérience. J’ai l’impression d’être au Paradis. C’est le plus beau rêve que j’aie jamais fait.

Son amoureux la dévisagea avec une étrange solennité :

- Ce n’est pas un rêve, Ornella. C’est ce que nous sommes en train de vivre, toi et moi.

Le visage de la jeune fille se rembrunit, assombrissant du même coup l’horizon.

- Mais si je me réveille, tout ce que nous aurons vécu ensemble en ces lieux ne se résumera pour moi qu’à un rêve, même le plus beau.

Il se crispa comme s’il comprenait la dureté de la réalité. Sa réalité à elle.

- Je peux te jurer qu’il aura la valeur d’un souvenir.

 

Il l’invita à un ballet aérien improvisé, l’éloignant et la rapprochant alternativement de lui. Elle se prit vite au jeu et fit preuve d’une grâce et d’une imagination qui le comblèrent.

Après avoir longtemps virevolté dans la plus parfaite osmose, ils se posèrent aux abords d’une cascade vertigineuse, les yeux embués de bonheur.

« Faites que je ne me réveille pas ! » se répétait Ornella.

« Faites qu’elle ne se réveille pas ! » se répétait son amoureux tout en étant convaincu qu’il était de son devoir et en son pouvoir d’exaucer ce vœu.

- On pourrait nager un peu pour changer, proposa-t-elle, toute guillerette.

- Bonne idée !

- L’eau est bonne ?

Il sourit.

- Seulement si tu le désires.

La jeune fille demeura bouche bée avant d’éclater de rire.

- Je veux une eau au goût de fraise !

La seconde d’après elle plongea sans retenue du haut de la falaise. Il ne trouva rien de mieux à faire que l’accompagner en hurlant :

- Je suis allergique aux fraises !

 

Encore une fois, ils jouèrent et s’occupèrent en toute liberté pendant un temps qu’ils furent bien incapables d’évaluer. Et c’était évidemment le moindre de leur souci.

Enfin rassasiés de leurs distractions aquatiques, ils s’enlacèrent et observèrent un couple de dauphins au corps irisé se lancer dans un concours de pirouettes.

Ornella regarda son amoureux. Il avait l’air songeur.

- A quoi penses-tu ?

- Je me disais que tout le monde devrait pouvoir venir ici, au moins de temps en temps. Sur Terre, certaines personnes n’ont aucun refuge. Si l’imagination est un luxe, nous sommes des milliardaires.

- Tu ne devrais pas être triste. Je pense que tout le monde peut venir ici. J’en suis convaincue. Il suffit d’en avoir besoin, non ?

Il secoua la tête et déposa un baiser sur son front.

- Tu ne trouves pas que l’eau a un goût bizarre.

Ornella faisait la grimace.

Il goûta l’eau à son tour et tout son être fut retourné lorsqu’il en reconnut la saveur.

- Non, pas ça !

C’était de l’eau de vie. Et il sut que ça ne pouvait venir d’Ornella. Il avait laissé ses pensées s’égarer vers de lointains souvenirs, l’emporter à nouveau vers ses angoisses existentielles. L’espace d’un instant, il était redevenu le junkie qu’il pensait avoir tué pour toujours. Il comprit que ses démons l’avaient poursuivi jusqu’ici et que rien n’était encore fini. Il avait un dernier combat à mener pour être enfin libre. Il s’alarma.

- Sors de l’eau, Ornella ! Vite !

Elle le regarda, apeurée, avant de lui obéir.

L’eau était devenue sombre. Le ciel aussi. Un orage couvait.

Il regarda la jeune fille s’éloigner et la suivit tout en essayant de contrôler ses pensées. Mais il avait l’impression de ne plus rien contrôler. Ses démons l’envahissaient inexorablement. Il pouvait presque ressentir à nouveau cette faim vicieuse et viscérale qu’il avait dû tant de fois combattre, qui l’avait tant de fois vaincu.

Lorsqu’il entendit Ornella pousser un cri en arrivant sur la berge, il sut que ses démons avaient de nouveau pris corps dans leur Paradis. En un éclair, il fut à ses côtés. Il la souleva dans ses bras en découvrant avec horreur le sol jonché de tessons de verre et de seringues usagées.

- Mais qu’est-ce qui est en train de se passer ? s’enquit la jeune fille. C’est toi qui fais ça ?

Il allait répondre lorsqu’une douleur indicible lui fouetta les entrailles.

Il lâcha brusquement Ornella qui manqua s’empaler sur les bris de verre maintenant aussi hauts que des arbustes. Impuissante, elle regarda son amoureux tomber à genoux en se tenant le ventre.

- Tu as mal ? Qu’est-ce qui t’arrive ?

Il dressa brusquement la tête. Il n’était plus le même. L’iris et la pupille de ses yeux étaient devenues intégralement noires. Ses oreilles se terminaient en pointe, quant à sa voix…Elle ne la reconnut pas quand il s’adressa à elle :

- Va-t-en, cours ! Ne reste pas près de moi ! Je t’en supplie, Ornella, si tu m’aimes, fais ce que je te dis !

La jeune fille se recula, moins pour lui obéir que pour obéir à sa peur.

- Mais dis-moi ce que tu as ! Je peux sûrement t’aider !

Son corps se mit à tressauter comme si quelque chose d’énorme ou de puissant le possédait et manifestait l’envie de sortir.

- Non, il faut que tu partes. Réveille-toi, s’il le faut, mais ne reste pas ici ! Elle m’envahit. Je ne… contrôle… plus rien.

Il poussa un cri déchirant et tandis qu’il ouvrait démesurément la bouche, une masse sombre, poisseuse et informe jaillit et coula sur le sol en un immonde ruisseau.

Tout en se dressant de façon menaçante, l’entité commença à prendre forme.

- Je ne peux pas t’abandonner ! hurla Ornella. Pas avec cette chose !

Bien que très affaibli, il trouva la force de se redresser un peu et alors il hurla à son tour :

- Tu ne comprends donc pas ! Elle va te tuer, elle n’existe que pour cela ! Elle dévore tout ce qui est innocent pour devenir plus forte encore ! Je ne veux pas te perdre Ornella !

Les mots parurent faire leur effet sur la jeune fille. Elle ferma les yeux et se retournant, courut droit devant elle. Mais il était déjà trop tard.

La Bête avait fini de prendre forme, ce qui dans son cas, ne voulait pas dire grand-chose. L’on ne pouvait lui donner de nom, ni même la décrire tant son aspect repoussait les limites connues de la terreur. A elle seule, elle représentait un nouveau canon dans le domaine de l’horreur.

Sphinx remarqua plus particulièrement les aiguillons recouvrant son épiderme, évidente analogie à l’une de ses dépendances terrestres. Et comme pour rajouter à l’infâme tableau qu’elle constituait à elle seule, l’air était empuanti par son odeur, un mélange insoutenable de remugle et de miasmes alcoolisés.

Cette chose qu’il avait crachée hors de lui était sa part de ténèbres, la somme de toutes ses malédictions, l’addition de ses tourments et de ses vices.

Il devait l’affronter et il devait la vaincre. Pour le salut de son âme et celui de son amour.

L’orage éclata comme pour annoncer le début des hostilités et une pluie diluvienne se mit à tomber. La pluie aussi avait un goût : celui de l’amertume.

La Bête faisait bien trois mètres de haut. Elle paraissait aveugle, du moins elle ne possédait pas d’organes apparents. Elle renifla plusieurs fois avant de se mouvoir en direction d’Ornella, en rampant rapidement tel un serpent affamé.

Cette vision menaçante eut le don de revigorer complètement Sphinx. Il déploya ses ailes et disparut pour réapparaître près de la jeune fille que la Bête poursuivait en écumant de joie. Des gueules s’ouvraient et se refermaient sporadiquement dans son poitrail velu. Les langues boursouflées qu’elle dépliait outrageusement semblaient elles-mêmes animées d’une vie propre. Sphinx se plaça devant Ornella dans une attitude protectrice avant de riposter. De ses deux mains il ouvrit sa poitrine, libérant une aveuglante sphère de lumière qui consuma les ignobles appendices s’aventurant un peu trop près.

- Qu’est-ce que c’est ? hurla Ornella en proie à une frayeur sans nom.

Sphinx scrutait l’entité maléfique comme le reflet impie de lui-même.

- Mes démons, l’incarnation de mes démons.

Ornella était terrorisée. Le rêve avait tourné court. Encore une fois, la réalité reprenait ses droits, même ici. Et pas de la plus belle manière.

- Tu peux la vaincre ?

L’intéressé dévisagea brièvement la jeune fille, mais avec une extrême intensité.

- Avec toi à mes côtés, je peux tout vaincre. Et je suis invincible.

La Bête le savait aussi, naturellement, et c’est justement pourquoi elle chercha à tout prix à les séparer.

Une immonde forêt de tentacules et d’autres appendices innommables s’extraya de son corps pour arracher Ornella de ses bras. Il repoussa tant bien que mal les assauts en générant des sphères de lumière et d’autres symboles de sa pureté. Son amour était un moteur puissant, mais la Bête avait plus d’expérience.

Ses tentacules se rétractèrent subitement et les dards hérissant ce qui lui tenait lieu de dos se projetèrent sur le couple. Sphinx improvisa un bouclier de fleurs qu’il espéra assez puissant, puis tout à coup inspiré, il fit résonner, par-dessus les borborygmes incessants de l’entité, la mélodie qu’il avait créée pour Ornella sur sa guitare, un soir plus triste que les autres, dans son ancienne vie. Il sourit en voyant sa Némésis se tordre de manière significative. La symbolique était sa meilleure arme ici et il compter bien en abuser.

- Tu ne m’auras pas et elle non plus ! Je te détruirai, je le jure !

Mais une vois dans sa tête, sa propre voix, lui promit exactement le contraire.

La fureur de la Bête était sa meilleure arme à elle. Elle y puisait toute sa force. A l’idée d’échouer si près du but, elle sembla grossir davantage. Un aiguillon déchira le bouclier et transperça le front de Sphinx. Il lâcha Ornella malgré lui et après avoir extirpé l’arme, il dût lutter sauvagement contre les effets de la blessure. Une blessure qui menaçait de corrompre ce qu’il y avait de plus beau en lui. Un appendice enleva Ornella sous ses yeux. En dépit de sa volonté de la secourir, Sphinx se sentit impuissant, comme si une partie de la Bête s’était insinuée en lui.

- Ornella !

En voyant la jeune fille terrifiée se rapprocher de l’une des gueules voraces, il retrouva un regain d’énergie. Il se concentra. Les motifs de ses ailes flamboyèrent, dardant sur le monstre un chapelet de rayons purificateurs. Des flammes léchèrent le ventre grouillant d’une vie impie et le tentacule retenant la jeune fille se décomposa. Elle retomba sur un tapis de fleurs imaginé par son protecteur qui s’envola pour la mettre hors de portée de la Bête, dans un endroit que lui seul connaîtrait. Mais ce faisant, il oublia qu’il partageait le même esprit que son ennemi.

Sphinx s’acharna à détourner son attention, la frappant de ses projectiles assassins, l’insultant, la mutilant. La Bête devint furieuse, mais ne changea en rien ses intentions. Sans crier gare, elle laissa tomber toute sa répugnante masse sur lui, l’écrasant et l’immobilisant. Il tenta bien de se téléporter, mais au contact rapproché de la Bête, sa blessure se réveilla et anéantit son effort. Alors elle en profita pour se métamorphoser. Son dos se craquela et deux paires d’ailes noires et huileuses se déplièrent, emportant une partie de l’entité dans les airs à la poursuite d’Ornella, tandis que l’autre se chargeait d’assimiler totalement Sphinx, la partie qui lui manquait pour être entière.

La pensée de perdre son âme-sœur fut l’étincelle qui permit à Sphinx de conserver son identité et son énergie propres. Il banda son cœur et en même temps qu’il poussait un cri terrible, il décocha une véritable bombe qui souleva son bourreau et le pulvérisa.

Sphinx se dressa, victorieux, sous une pluie de cendres. Un hurlement strident d’Ornella le paralysa, lui annonçant une horrible tragédie.

Il déploya ses ailes et se transporta aussitôt auprès de sa bien-aimée.

Du moins à l’endroit précis où elle aurait dû se trouver.

Lorsqu’il découvrit des fleurs éparses jonchant le sol ainsi que des ronces noires et huileuses lovées autour d’elles, il comprit qu’il arrivait trop tard. Le mal était déjà fait. La chevelure d’or finissait de disparaître dans les entrailles putrescentes de la Bête lorsqu’il posa son regard sur elle.

- Ornella !

En poussant son cri de guerre, il s’élança sur le démon qui fit de même. Le choc fut terrible. La terre se fissura et le ciel se brisa comme un miroir, déversant à nouveau des trombes d’eau. Une explosion de lumière absorba le paysage entier avant de le régurgiter dans le plus grand chaos. Une ombre retomba au sol. C’était Sphinx.

Il avait réussi, mais à quel prix. Il avait gagné sa liberté, mais il avait perdu Ornella.

Son cœur était orphelin, son âme mutilée. Et il sut dès lors que rien ne pourrait changer cela.

La blessure sur son front s’anima fugitivement. Ses yeux s’assombrirent un bref instant avant de reprendre un aspect innocent.

La plaie cicatrisa en un instant et demeura sur sa peau tel un insolite tatouage, une marque indélébile, la signature de la Bête siégeant toujours en lui, à son insu. Affaiblie, mais dans l’attente fébrile de pouvoir faire à nouveau surface.

Sphinx posa une main sur sa poitrine.

- Tu es avec moi, Ornella. Nous serons toujours ensemble. Où que tu sois, où que j’aille.

La jeune fille avait exaucé leur voeu commun : elle ne se réveillerait plus jamais.

A cette pensée, il se mit à pleuvoir.

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mardi, 22 juin 2010

Dans l'Esprit de Morphée [Roman Graphique]

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Quelques semaines plus tard, quelque part...
 
 
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 (à suivre)
 
 

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dimanche, 07 février 2010

La Naissance de Morpho [Nouvelles/Le Combat du Papillon]

 

 

« Dieu fit la liberté, l'homme fit l'esclavage. »

 

                                                          M.J.Chenier, Fénelon

 

 « Et quand tes fils sont condamnés aux fers et plongés dans l'obscurité du cachot humide,

ils sauvent la patrie par leur martyre et la gloire de la liberté ouvre l'aile à tous les vents. »

 

                                            Lord Byron, Le prisonnier de Chillon

 

 

« Ce que la lumière est aux yeux

        ce que l'air est aux poumons

             ce que l'amour est au cœur

                 la liberté est à l'âme humaine. »

 

                                    R.G. INGERSOLL, Progrès

 

 

 

   J'étais noir.

   J'étais esclave.

   Et à l'époque, c'est tout ce que j'étais.

Du moins aux yeux de ceux qui nous opprimaient, moi et mes compagnons.

Nous travaillions dans les plantations, sur les voies de chemin fer, dans les carrières, partout où la vigueur de nos bras pouvait accomplir son œuvre.

Lorsque nous n'étions pas assez vigoureux ou assez rapides, ils avaient recours aux menaces. Et si cela ne suffisait pas, il y avait toujours le fouet.

Je connais bien sa morsure. Elle m'a longtemps accompagné.

J'étais parmi les plus assidus au travail, mais cela ne les empêchait pas de me flageller régulièrement. C'était un moyen efficace pour encourager les plus lents à redoubler d'efforts.

Je n'en voulais à personne, en aucun cas à mes compagnons. Je ne gardais aucune rancœur.

C'était une condition et je l'acceptais, résigné. J'espérais, toujours en secret, qu'un jour ou l'autre ma docilité serait récompensée.

D'une manière ou d'une autre.

Mais mon obéissance aveugle finit par se retourner contre moi.

 

Mes compagnons finirent par voir d'un mauvais œil ce qu'il prenait à tort pour du zèle. Ils ne me faisaient aucun reproche de vive voix, mais leurs regards parlaient pour eux.

Non seulement, je n'étais pas libre, mais très vite, je me sentis plus seul que jamais.

Seul au monde.

C'est à partir de ce moment que naturellement, comme un réflexe de survie, j'ai tourné mon regard vers l'intérieur. Et là, j'ai eu accès à un monde nouveau qui avait toujours été là, mais dont j'avais ignoré l'existence.

Ou plutôt que j'avais oublié.

J'ai commencé à faire des rêves étranges.

Je découvrais des paysages magnifiques, des forêts, des montagnes, des océans.

Je les survolais.

Mon âme était libre et rien ne lui était impossible.

Je goûtais à toutes les joies de la délivrance, des joies que sur terre je n'aurais même pas pu imaginer.

Le réveil était violent. Comme une déchirure.

Je me retrouvais enchaîné, entouré de gens qui me méprisaient.

La douleur était atroce.

Je maudissais le jour et je bénissais la nuit.

 

Tandis que j'abattais ma part de travail, je songeais aux splendeurs que j'allais pouvoir retrouver dès l'instant où je pourrais fermer les yeux et m'abandonner au sommeil.

Plus d'une fois, j'endurai le mépris de mes frères et le fouet de nos tortionnaires en m'imaginant dans ces contrées, délivré de toute entrave.

La vie me permettait de rêver et le rêve me permettait de vivre.

Mon sort devint dès lors plus supportable. D'autant que je me découvris un don nouveau.

Je pouvais parler aux animaux.

Passant nos journées en pleine nature, il était courant de faire des rencontres avec la faune locale. Je m'aperçus que les petits animaux n'étaient pas effarouchés par ma présence et que la proximité des plus grands ne m'effrayait pas. Bien au contraire.

C'est parmi les bêtes que je me fis mes meilleurs amis. Car contrairement aux hommes, les bêtes, elles, ne vous jugent pas. Elles vous acceptent ou vous rejettent, mais elles ne vous condamnent jamais.

Les liens privilégiés que je nouai avec un certain nombre de rongeurs, de chats et de chiens sauvages et même d'oiseaux commença à attirer l'attention.

Evidemment, je me serais bien passer de me faire remarquer davantage.

On commença à murmurer dans mon dos. Me prenait-on pour une sorte de sorcier ?

Les oppresseurs, nos maîtres, exprimèrent cruellement leur antipathie vis-à-vis de mon empathie.

 

Un jour, ils exécutèrent froidement et sous mes yeux plusieurs animaux auxquels je m'étais attaché. Ils n'admettaient pas que je puisse trouver une distraction, un exutoire.

Ils voulaient que je souffre et ils voulaient me voir souffrir.

Malgré moi, je leur donnai satisfaction.

Cela parut soulager tout le monde.

Tout redevint comme avant.

Les hommes se remirent à chanter.

Et le fouet à siffler.

Et le sommeil venait me délivrer de mon martyre.

 

Un autre jour, alors que nous établissions un campement en pleine forêt, un de nos maîtres surprit une ourse en maraude. Je sus intuitivement que c'était une femelle. Craignant pour la vie de ses petits, elle voyait d'un mauvais œil la présence d'hommes - qui plus est armés - à proximité de sa tanière. J'étais, hélas, fait pour la comprendre.

Bien entendu, le maître en question n'avait aucune chance face à la furie de l'animal. Je me réjouissais presque de voir le malheureux mis en pièces, moi qui n'ai pourtant jamais eu aucun goût pour la violence.

Lorsque je vis les fusils se lever pour abattre l'ourse, je réagis sans même y penser.

Je m'approchai de la bête furieuse et sans un mot, lui communiquai mon désir de la voir calmée. Je parvins à la rassurer et comprenant que sa vie et celle de ses petits n'étaient pas menacées, elle retomba sur ses puissantes pattes et fit demi-tour.

Cet exploit aurait dû faire de moi un héros.

Tout du moins, un homme de valeur.

Las. Je devins la bête noire.

On pensa même que c'était moi qui avais attiré l'ourse dans l'intention de semer la panique et permettre ma fuite. Je ne trouvai aucun avocat parmi mes compagnons.

Me mépriser leur faisait du bien car cela ne leur coûtait rien. Aucun coup de fouet à redouter. Alors c'était une raison suffisante pour eux de se comporter ainsi avec moi.

Je devins un homme maudit, banni de son propre clan.

Il ne me restait plus rien pour soulager ma peine. Sans soutien d'aucune sorte, je faiblissais et ne tardai pas à rejoindre les plus lents.

Le sort s'acharnait contre moi.

 

L'espoir me revint ce fameux jour où l'un de nos plus vieux frères tomba de fatigue.

Les maîtres ne voulurent rien savoir. Nous avions déjà pris du retard sur les travaux à cause de la chaleur.

Le fouet claqua une fois, puis deux.

Il n'y eut pas de troisième fois.

Voyant là l'occasion idéale de reconquérir l'estime de mes compagnons et de sauver la vie de l'un des plus estimés, je méprisai les conséquences d'une telle entreprise et me jetai de tout mon poids sur le tortionnaire.

Il me fit regretter mon geste. Des coups de bâton se mirent à pleuvoir sur moi.

N'eut été l'outil que je représentais à leurs yeux, nul doute qu'ils m'eurent frappé à mort, sans l'once d'un regret.

Je perdis connaissance.

 

Lorsque j'ouvris les yeux, je demeurai curieusement dans le noir.

A l'écoute des sons environnants, nul doute pourtant que le jour se fut levé.

Je reconnaissais la brûlure familière du soleil sur ma peau.

Mais je ne voyais rien.

Manifestement, ma tête n'était pas encore remise des effets de ma récente bastonnade.

L'obscurité se prolongeant tout autour de moi de manière inquiétante, je songeai avec terreur que mon cerveau avait pu être atteint trop fortement.

J'appelai à l'aide, paniqué par cette éventualité.

Un maître vint.

- Je suis aveugle, dis-je. Je ne vois rien.

J'entendis le maître sourire.

- Je sais. C'est moi qui tenais le charbon ardent.

Cette déclaration me coupa la respiration. Je tombai à genoux.

J'avais perdu la vue. Définitivement. Ils me l'avaient volée.

C'était ma punition. Ma bravoure m'avait coûté le dernier bien qui me restait.

Je crus mourir.

 

On peut penser que dans mon état, la besogne qui faisait mon quotidien me serait épargnée.

Aucunement.

La réalité se faisait plus terrible encore.

Alors naturellement, mes rêves se faisaient plus beaux.

Et mes réveils plus douloureux.

Et ainsi de suite.

 

Je ne voyais qu'une solution, qu'une seule issue pour quitter cet enfer.

J'attendis sagement que l'occasion se présente.

Et elle se présenta.

 

On nous chargea de réparer un pont.

Beaucoup de mes compagnons avaient le vertige.

Pour moi, le problème ne se posait même pas.

Je fus conduit sur la construction.

Je n'avais pas besoin de voir pour accomplir ma tâche. Mes mains étaient mes yeux et elles oeuvrèrent avec habileté.

Tous mes autres sens en alerte, je m'efforçai de repérer le bon moment pour agir.

Un incident survint. Il y eut un craquement. Des voix.

Une planche avait cédé sous le poids d'un homme.

Une aubaine inespérée.

On répara la planche. Mais par bonheur, je trouvai sa sœur jumelle.

Je tus ma découverte, priant pour que mon secret demeure intact.

 

Le lendemain, je retrouvai l'endroit précis.

Le maître responsable de ma cécité vint me railler sur mon handicap. C'était devenu son nouveau jeu et il y prenait beaucoup de plaisir.

Je me souviens avoir souri avant de lui dire :

- Vous avez peut-être pris mes yeux, mais vous n'aurez jamais mon âme.

Puis j'ai sauté de tout mon poids sur la planche pourrie.

Nous sommes tombés tous les deux.

Une chute mortelle.

Mais je n'ai rien senti.

A l'instant où mon corps a touché le sol, mon âme s'est envolée.

J'ai déserté mon corps, recouvrant la vue et la liberté.

Mes rêves sont devenus mon quotidien.

Plus besoin d'attendre la nuit et le sommeil pour les rejoindre.

J'ai retrouvé mes amis les animaux. J'ai pu de nouveau parler avec eux.

Je me suis aussi découvert un don nouveau.

Je pouvais devenir l'animal que je voulais être.

Cette capacité à me métamorphoser a décidé de mon nom, j'imagine.

A moins que cela ne vint des magnifiques ailes de papillon dont je devins l'heureux acquéreur.

 

A l'instant où mon corps a touché le sol, mon âme s'est envolée.

Et elle vole toujours.

 

   J'étais noir.

   J'étais esclave.

Mais aujourd'hui, cela ne signifie plus rien pour moi.

Car mon âme est libre.

Et l'âme n'a pas de couleur.


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jeudi, 12 février 2009

La Genèse [Nouvelles/Le Combat du Papillon]

                                                                                        

La Chute de l’Age d’Or

 

 

 

 

 

 

Les sept jours de la création

constituèrent sept phases de l’emprisonnement de  l’homme

enchaîné dans un antre,

dans les limites mêmes d’un monde

uniquement perçu par les cinq sens.

 

                                                                William Blake

 


 

I. L’Harmonie Primitive

 

 

Au commencement était le Paradis

Tout n’était que pensées

Rien n’était dit

Nous étions des anges qui dansaient

 

Le firmament

Etait notre mer

L’amour était omnipotent

Nul ne pouvait être amer

 

Nous étions un

Et étions Dieu

Au sein de chacun

S’ouvrait une paire d’yeux

Un cœur d’enfant innocent

Qui demeurait grand ouvert

Pour répandre et recevoir

L’amour tout en vers

Qui remplissait sans se voir

Toutes les âmes tel un sang

 

Sommet de l’Age d’Or

Où la pureté triomphait

Où l’absence de corps

Donnait vie aux fées

En une sublime geste

Qui sublimait nos gestes

 

Eden de notre origine

Où la musique était oxygène

La vertu religion

La poésie naissait

De la moindre pensée

Elle était le langage

Le plus précieux des partages

L’imagination nous baignait

Nul ne voulait l’ignorer

Nul ne pouvait le nier

En un océan doré

Symbole vivant

De notre liberté

Qui s’étendait à l’infini

Et sa source d’éternité

Etait reliée à nos esprits.

 

 

 

II. La Chute du Paradis

 

 

 

Le chaos vint pourtant

Le chaos et le Temps

La Nature fut envahie

Par la naissance de nouvelles envies

Des lois rigides s’instaurèrent

Et vinrent ce monde appauvrirent

De mécaniques habitudes

Une croissante lassitude

Naquirent un peu partout

Divisant ce qui constituait le Tout

Nous qui n’étions pas faits alors

Pour mener et gagner une lutte

Nous donnâmes

La mort

A ce fabuleux Age d’Or

Et damnâmes nos âmes

En érigeant sa chute.

 

 

  

III. La Séparation de l’Esprit

 

 

 

Et naquit la discorde

La lyre cassa ses sept cordes

Les hommes raisonnèrent

Les hommes s’emprisonnèrent

Ils perdirent leur unité

Coupèrent le fil de leur infinité

Ils cessèrent d’être devins, divins

Pour devenir sombres humains

Avec une tête, avec des mains

Une cosse matérielle

Détruisant leur essence spirituelle

L’esprit dont ils faisaient partie

Se réduisit, partit

Il se morcela pour venir habiter

Chacune de ces nouvelles entités

Leur conférant une nouvelle identité

Une âme aux maigres proportions

De ce corps

Résultat de leur malédiction

Pauvre et illusoire décor

Pour des être ayant connu l’essor

Ridicules et avilissants haillons

Pour d’anciens papillons

Devenus rampantes chenilles

Ils ne méritaient que des guenilles

Là où des ailes d’arc-en-ciel

Faisaient leur rang

Faisaient leur nom

En eux coula un nouveau sang

Qui n’avait plus rien des merveilles

La marque de démons

Tout prêts à l’éveil

Pour répandre et s’abreuver

De cette rivière vermeille

Dès qu’ils pourraient œuvrer.

 

 

  

IV. La Genèse de l’Enfer

 

 

 

L’Homme nouveau

Ayant revêtu sa peau

Ne pouvait plus faire marche arrière

Et se mit en devoir de créer une terre

Digne de l’accueillir

Digne de le soustraire

A son appartenance céleste

Il créa le Nord, le Sud, l’Ouest et l’Est

Aux limites du temps

Lui qui n’en avait jamais eu avant

Il ajouta la chaîne de l’espace

La raison croissant toujours en lui

Le dévorant comme le ver le fruit

Il sépara l’unité de son espèce

En deux sexes distincts

L’un féminin, l’autre masculin

Ruinant les principes de son origine

Scindant les valeurs de sa nature androgyne

En deux êtres complexes

Qu’il dota chacun d’un sexe

Propre à permettre sa perpétuation

Par leur association

 

En sept jours

Il se créa sept fardeaux

Si bien conçus qu’ils seraient toujours

Bien trop lourds à porter

Faisant de lui son plus parfait bourreau

Sans se sentir victime

Ignorant totalement la portée

De ces carcans intimes

 

Toutefois, avant que tout esprit rêveur

En lui ne meurt

L’Homme se forgea un lien avec ferveur

Il noua son âme à l’Océan Divin

Se donnant ainsi le moyen

Par le rêve et par la Mort

Quand il pourrait quitter son corps

De remonter vers les célestes ondes

Pour qu’à nouveau il s’y fonde.

 

 

V. L’Eclosion du Mal

 

 

L’Homme qui n’était que vertu

Lui dont la sagesse était instinct

Sema en lui les graines de la perversité

Condamnant sa vertu à être perdue

Et son bon sens à être éteint

Dans une future adversité

Il jugea le vice

Comme une nouvelle liberté

Lui qui s’ennuyait de tout

Mais en permettant qu’il s’immisce

Il donna un ennemi à la pureté

Et brûla son ultime atout.

 

  

VI. L’Héritage de l’Harmonie

 

 

Avant de rejoindre son nouveau monde

Qui avait débuté son évolution

L’Homme employa une dernière seconde

Pour réaliser une précieuse opération

Dans son désir encore ingénu

De pouvoir converser avec les nues

Il produisit en lui

Sept germes comme autant d’armes

Qui s’opposaient

Aux sept chaînes

Auxquelles il s’était assujetti

L’Amour, le Rêve, la Mort

La Religion, l’Art

La Poésie

Et la Magie

Sept sens

Héritage de l’originelle essence

Sept moyens d’agir

Vestiges de l’Harmonie

De la cassure de la lyre

De son absolue symphonie.

 

 

VII. La Chute aux Enfers

 

 

Dans sa nostalgie de l’Age d’Or

L’homme avait façonné

Un océan comme l’azur

Dans lequel jadis il était né

Fidèle à son idée première

Il décida qu’il renaîtrait en ce monde

En cet Enfer baptisé Terre

Au sein de ses nouvelles ondes.

 


 

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dimanche, 18 janvier 2009

Dans l'Esprit de Morphée

Amour & Imagination copie.jpgLa Feuille et le Vent copie.jpgPartie 4.jpg
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Le Coeur a ses pouvoirs copie.jpgesprit,morphée,rêve,amour,art,coeur,onirique

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