vendredi, 27 décembre 2013
Les Noces Rebelles [Cinéma/Critiques]
Avant d'apporter sa remarquable contribution à la franchise James Bond avec Skyfall, Sam Mendes nous offrait les retrouvailles entre Kate Winslet et Leonardo Dicaprio (Inception, Gatsby le Magnifique, Django Unchained), 11 ans après Titanic.
Sam Mendes fait partie de ces réalisateurs de plus en plus rares à changer de sujet et d'univers à chaque film en réussissant à chaque fois à atteindre son but.
S'il avait déjà fait une critique acerbe de l'imagerie du couple américain avec son époustouflant American Beauty, le cinéaste, loin de resservir la même formule, va encore plus loin en collant au plus près de l'intimité d'un ménage et de ses idéaux au point que n'importe quel couple devrait s'y retrouver, dans le meilleur et dans le pire.
Un couple complice qui transpire la passion. Cela commence toujours ainsi, non ?
Nous sommes dans les années 50, époque mythique associée plus que toute autre au mythe américain. Pour Frank et April Wheeler, c'est rapidement le coup de foudre et l'idée de s'installer dans un pavillon pour élever des enfants et mener une vie confortable paraît la chose la plus naturelle du monde.
Pourtant leur guide et amie, incarnée à nouveau par Kathy Bates (réchappée aussi de Titanic) leur confie qu'elle voit en eux des êtres exceptionnels. Ca tombe bien, le jeune couple croit aussi dur comme fer à leur destin extraordinaire.
Mais à peine à-t-on caresser le rêve d'une vie meilleure que déjà il semble à jamais inaccessible pris dans l'engrenage du quotidien.
Aussi quand April, inspirée, pense pouvoir relancer l'espoir d'une vie plus palpitante voire d'une vie tout court, le dilemme est incontournable : doit-on se résigner et profiter au mieux de son confort ou bien tenter le tout pour le tout pour repousser ses limites au risque de sacrifier la stabilité acquise au fil des années ?
Cette question, tous les couples sont fatalement amener à se la poser. En la traitant avec justesse et profondeur du côté masculin et féminin, de l'extérieur comme de l'intérieur, Mendes ausculte les remous, les élans et les soubresauts de la vie à deux avec une précision chirurgicale qui laisse pantois.
Kathy Bates, à nouveau ange-gardien de Kate et Leo ?
Plus qu'un drame, Les Noces Rebelles fait figure de véritable analyse et on serait plus que tenté de le recommander afin de permettre à chacun de se regarder dans ce miroir et d'y voir où il en est avec ses ambitions et son intégrité.
Il est toujours plus facile de se voiler la face, de se convaincre que tout était joué d'avance et que l'on ne maîtrise plus rien plutôt que de se faire violence et de prendre la vie à bras le corps pour lui imposer notre propre pas de danse.
"On oublie pas la vérité. On apprend à vivre dans le mensonge." dira le personnage de Kate Winslet.
Que d'ingrédients pour mettre un couple à rude épreuve : les secrets, les tentations, les doutes et les craintes sans compter l'égo.
Frank ne cesse de parler. On ne peut lui reprocher de communiquer. Mais ne parle-t-il pas pour mieux cacher ce qu'il ne veut pas s'avouer, ses propres faiblesses ?
En le poussant à exploiter son véritable potentiel et à remettre en question leur bien-être, April semble la plus raisonnable des deux, sauf que dans les années 50, entretenir son homme pour lui laisser le temps de trouver sa véritable voie fait figure de folie. Et puis ne pense-t-elle pas un peu trop pour deux en imaginant cette existence idyllique à paris ?
Trouver l'équilibre entre bonheur mutuel et épanouissement individuel est évidemment la plus grande difficulté. Et puis il y a les imprévus qui vont se bousculer au moment où le choix paraît enfin évident. Comment interpréter ces nouvelles opportunités ? Comme des signes bienfaiteurs ? Des mises à l'épreuve ? Des raisons de renoncement ?
On assiste tour à tour réjoui et impuissant aux fortunes et aux infortunes de ce couple, vivante incarnation du rêve américain, du bonheur conjugal. De havre de paix, de petit paradis, le pavillon se change en arène de combat, en ring de boxe et les coups de pleuvoir de chaque côté, chacun retranché dans ses convictions et son désespoir.
Michael Shannon, l'invité mystère qui va jouer au jeu de la vérité pour April et Frank.
Et c'est finalement le personnage de Michael Shannon (Man of Steel) présenté comme le moins sain d'esprit qui sera la voix de la conscience et extériorisera de manière implacable les raisons de ce naufrage (oui encore un !) n'épargnant aucune vérité pour l'un comme pour l'autre.
Et la chute du film d'enfoncer le clou en nous démontrant de manière originale à quel point ces tragédies sont d'une banalité terrifiante.
Sam Mendes prouve donc une fois de plus qu'il est le fervent défenseur d'un cinéma exigeant. Habité par deux grands acteurs investis, qu'on est très heureux de retrouver, qui plus est dans la force de leur maturité, tour à tour lumineux et déchirés, Les Noces Rebelles s'avère indispensable quel que soit son expérience sentimentale personnelle tant il reflète la chronologie du couple et sa mécanique, de sa grandeur à sa déconstruction.
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