jeudi, 22 novembre 2012
Mon Top 5 Rihanna
Une fois n'est pas coutume, voici une nouvelle petite sélection perso, cette fois de la mondialement célèbre et talentueuse et infatigable chanteuse barbadienne (j'ai pas dit qu'elle était belle, mais c'est évident, non ?)
Une nouvelle coupe qui fait son effet tout comme ce clip très graphique !
Ah ! J'aurais tellement préféré retrouver Rihanna dans ce genre de rôle au cinéma plutôt que dans un blockbuster sans âme en pâle ersatz de la musclée Vasquez d'Aliens !
Bon, c'est vrai, dans ce clip, Rihanna fait de la pub pour un format de lit très en vogue aux Etats-Unis. Mais bon, avant ça, elle a bien fait de la promo pour des parapluies !
Ne vous fiez pas au monologue du début : le rythme est hyper festif !
Bah oui, comme tout le monde ou presque, j'ai craqué sur ce titre et ce clip. Comme quoi, ouvrir un parapluie dans une maison, ça rapporte pas que des pépins, mais aussi des pépettes. Pas vrai, Rihanna ?
Et si vous voulez voir la belle en super héroïne, c'est par ici : http://dartetdamour.hautetfort.com/archive/2012/06/08/rihanna-as-storm.html
C'est le moment ou jamais
de passer à la postérité
Laisse un com qui détend qui détone
Mon blog s'en portera mieux
Et tu feras un heureux
18:06 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : rihanna, diamonds, we found love, umbrella, california king bed, man down
lundi, 19 novembre 2012
Sang et Sable [Nouvelles/Fantastique]
Il ne tiendra plus bien longtemps. Je l’ai lu dans ses yeux. Ils sont de plus en plus rouges, et ce n’est pas à cause de la fatigue. Du moins, j’aurais pu y croire s’il ne s’était pas fait mordre. Il est foutu, je le sais. Ce n’est qu’une question de temps avant qu’il ne se retourne contre moi. Entre lui et la chaleur, j’ignore ce qui me tuera en premier. Cela dit, je préfèrerais si possible choisir. Et ce sera la chaleur. Pas question de me faire avoir moi aussi.
Je rajuste ma chèche, en fait les restes d’un vieux T-shirt délavé mais encore assez blanc pour dévier les rayons du soleil. Sous cette protection précaire, j’inspire sans cesse le même air. Celui qui traverse mes poumons en circuit fermé. J’ai arrêté de regarder devant moi, la réverbération sur le sable risquant peu à peu de me rendre aveugle. Manquerait plus que ça… Je me retourne pour jeter un œil à Sagabe. Lui a perdu son turban. Depuis longtemps déjà. J’aurais pu le ramasser ou le lui rajuster avant ça, mais j’ai pas osé. Sa démarche est de plus en plus maladroite. Hésitante. Bientôt, il faudra que je fasse un choix.
Je lui pose une question mais il ne me répond pas. Je vois sa tête se relever légèrement, et il se met à me fixer de ses yeux à présent recouverts d’un voile opaque. Rouge sang. Il s’est arrêté de marcher : il a l’air de renifler. Il ne ressemble plus à rien. En tout cas, certainement plus à mon grand frère…
Il a fait quelques mètres avant de s’écrouler. A présent, il est là, allongé de tout son long dans le sable, et j’hésite à faire ce qui est nécessaire. M’occuper de lui avant qu’il ne devienne l’un des leurs.
En temps normal, c’est plutôt rapide. Entre cinq et dix minutes. A peine le temps de pleurer le ‘défunt’. En tâtonnant dans mon paquetage, j’attrape le fusil mitrailleur ramassé à la hâte sur la carcasse d’un milicien. Instantanément, je me brûle les doigts sur la chambre en métal, chauffée à blanc par le soleil saharien, jusqu’à trouver enfin la crosse. Pas besoin de vérifier l’état du chargeur, je connais déjà trop bien la vérité. A mes pieds, une sorte de spasme vient de faire tressaillir le cadavre de Sagabe. Il ne me reste plus beaucoup de temps. En soupirant avec force, je soupèse l’arme : elle me paraît bien moins lourde que quant je l’ai soulevée la première fois. Mais ça n’a plus importance. Sagabe vient de relever la tête. Ses yeux morts me dévisagent alors qu’il ouvre la bouche, ses dents enduites d’une salive pâteuse. Je lui fais alors un ultime honneur : celui de gâcher pour lui ma toute dernière cartouche.
J’ignore si c’est le bruit ou l’odeur qui l’a attiré. En tout cas, il a fait vite. A peine dix minutes après que Sagabe ait rendu l’âme une seconde fois, il est arrivé et je l’ai regardé décrire de grands cercles au dessus de ma tête. Le soleil me brûle la rétine alors qu’il descend lentement vers moi, son ombre rétablissant brièvement ma vision entre deux éblouissements. Il finit par se poser, à quelques mètres de moi. Le sable ardent ne semble pas le déranger outre mesure alors qu’il avance le long de la dune, s’approchant peu à peu. Quant ses yeux croisent enfin les miens, je comprends pourquoi. C’en est un lui aussi.
Immédiatement, je me redresse, serrant mon AK-47 comme une batte de base-ball en prévision de l’attaque. Une seule blessure suffirait à me faire partager son sort, probablement pire que la mort. Mais il ne bouge pas. Sa tête disparait un instant dans son épais plumage brun-roux, le temps de se débarrasser de quelques plumes superflues. J’en profite pour tenter de l’atteindre du bout de mon arme mais il bondit sur le côté avec une étonnante vivacité avant de s’envoler à nouveau. Il a eu peur. J’ai alors la preuve qu’il n’était pas l’un d’eux.
Eux non pas peur. Pas mal. Pas sommeil. Juste faim. Une faim dévorante, transcendant toutes les règles, tous les liens. L’amitié, la famille… Plus rien ne compte. Seule la faim compte. La viande. La chair. Le bruit d’un cœur qui bat, pulsant un sang encore frais dans les veines d’un être qui, dès lors qu’il a été repéré, n’est plus rien d’autre qu’une source de nourriture. Simplement, jusque là, c’était resté cantonné aux humains. Tous avaient sombré rapidement. Trop rapidement. Les uns après les autres. Jusqu’à ce qu’il n’en reste plus qu’un.
Mes lèvres sont jointes, collées par un résidu de salive qui fait office de joint parfaitement hermétique. Pas question de les desceller : j’ai déjà assez soif comme ça. Trois jours que nous errions dans le désert… Au moins, je me contentais du ‘nous’… Ma main glisse au fond de l’une de mes poches, furetant à la recherche d’un des objets glanés à la va-vite pendant la fuite. Je sens les contours ébréchés de celui qui m’intéresse et le sort immédiatement, le soulevant pour que les rayons solaires le traversent. Très vite, le verre de lunettes fait son office, remplissant son rôle de loupe improvisée. Les frusques couvrant le corps sans vie de Sagabe prennent feu et je regarde ce qui reste de mon frère se consumer. L’odeur est écœurante et la fumée m’assèche un peu plus encore, mais je me sens obligé de rester jusqu’à ce que ce soit terminé. Afin de m’assurer qu’il ne reste plus rien pour celui qui tourne dans le ciel, trente mètres au dessus de moi. Si je dois crever de faim, alors lui aussi.
Je reprends ma route. J’ai tué mon frère au milieu du désert. Je suis maintenant le dernier humain de la Terre.
J’ignore où je vais. Vers où j’avance. Une chose est sûre, je ne risque pas d’en croiser. Le soleil, la chaleur… Ca ne leur réussit pas. Quant Sagabe et moi avons quitté la route pour les dunes, les cinq qui nous suivaient n’ont pas tenu longtemps. Le premier, un qui avait bien dix jours, est rapidement tombé en morceaux, ses membres desséchés se déchirant suite aux efforts qui l’avaient jusque là maintenu debout. Il a rampé quelques mètres avant de s’arrêter de bouger définitivement. Une seconde fois. Les autres qui l’accompagnaient n’ont également pas fait long feu. Au début, on maintenait une distance de sécurité de cinquante mètres, distance dont le nombre de mètres s’est raccourci pareillement à celui des poursuivants. Le soleil les a cuits sur place, asséchant leur chair et leurs muscles pour les transformer en momies. Quant il n’y en a eu plus qu’un, je l’ai achevé d’une balle dans la tête et enfin nous avons pu dormir.
Une ombre passe à ma droite. Pas celle d’un nuage, juste la sienne. Lui aussi a faim, et il m’a probablement mentalement ajouté au menu. Maintenant que j’y repense, je revois ses yeux, dont on discernait encore les pupilles. Il n’en était pas un, malgré l’irrigation sanguine caractéristique des rétines. Peut-être que cette merde n’agit que sur nous. Un privilège dont on se serait bien passé. En attendant, il me suit et je ne m’en plains pas. Ca me fait toujours un compagnon de voyage.
Je finis par jeter un coup d’œil à ma montre. Elle a rendu l’âme dans l’accident de voiture à la sortie de la ville et pourtant le petit sigle affichant l’année reste allumé. Quelle blague… Me remettant à marcher, je sens mes pieds s’enfoncer dans le sable, sans opposer de résistance. L’espace d’un instant, je me plais à m’imaginer subitement avalé par cette masse mouvante et chaude, qui constituera probablement mon linceul d’ici peu. Sauf si je trouve de l’eau, mais il ne faut pas y compter.
J’attrape l’une de mes deux gourdes. Pas celle pleine d’huile de moteur, l’autre. Celle que j’avais remplie d’eau et dont j’ai vérifié le contenu peut-être vingt fois depuis deux heures. Toujours le même constat. Vide. Pas même une dernière goutte restant collée au culot de métal du thermos. Je ne suis pas surpris. Depuis les trois derniers jours, mon esprit me conditionne. Me prépare à l’inévitable. En attendant, je savoure la lente descente du soleil à l’horizon, alors que le ciel se pare de tons roses orangés. Bientôt la nuit, et la fin de cette chaleur étouffante. Celle qui ne devra attendre quelques heures de plus avant d’avoir ma peau.
Le froid s’installe rapidement. Bien trop. On passe d’un extrême à l’autre en moins d’une trentaine de minutes. On ne savoure la disparition de la morsure ardente du soleil que pour se retrouver accablé par celle, plus tenace, de la froide obscurité. Mon compagnon de route m’a semble-t-il abandonné et c’est tant mieux. Pas question que quelque chose s’approche de moi quant je serais endormi et donc impuissant. Avec la nuit, le désert prend vie. A l’inverse du reste du monde où tout semble être déjà mort…
Je n’ai pas dormi longtemps. Je n’ai pas pu. Depuis les derniers mois, je me réveille tous seul à peu près toutes les heures, adoptant des cycles de demi-sommeil comme les animaux conscients de leur nature de proies. J’ai donc préféré me remettre à marcher, avec toujours en tête l’espoir de trouver un point d’eau ou quelque chose qui me permettrait de me désaltérer d’une manière quelconque. J’ai soif. Trop pour pouvoir penser à autre chose.
Le goût amer de l’huile de vidange m’agace la bouche, s’avérant encore pire que celui de ma propre urine. La sensation d’avoir du liquide dans la bouche est cependant agréable, et m’a permis de me sentir bien l’espace de quelques secondes. J’ai même pu admirer le lever du soleil avec un certain plaisir. C’était beau, presque trop pour ce monde, ou du moins ce qu’il est devenu.
Mon compagnon de voyage est revenu. Il a toujours faim, je pense, et il ne me lâchera pas. Entre lui et moi, c’est à qui mourra le premier. Qu’il ne compte pas sur moi.
Je ne comprends toujours pas pourquoi ce n’en est pas un. Pourquoi ça ne semble pas le toucher. Peut-être que les saloperies qui lui permettent de digérer les charognes ont eu raison de la merde en question… Il a l’air en bonne santé et vole normalement : il ne s’est pas fait mordre. Pourtant, ils chassent aussi les bêtes. C’est d’ailleurs grâce à ça que Sagabe et moi avons réussi à quitter le poste de police abandonné, en leur lâchant un poulet qu’ils poursuivent peut-être encore. Tout ce qui est vivant les attire comme un aimant, nous comme le reste. Et à partir du moment où l’on est mordu, on rejoint la horde. Aucune exception.
Je me suis arrêté de marcher un instant, découvrant un insecte au sol. Un genre de gros scarabée noir, qui se dandinait sur le sable. La bestiole profitait sans doute des dernières secondes de fraîcheur de l’aurore avant de s’enfouir sous les dunes pour passer la journée. C’est alors que j’ai remarqué ce qui pendait de son abdomen. Une goutte d’eau. J’ai attrapé le stenocara et je lui ai léché le ventre. Lui agitait ses pattes griffues contre ma langue mais je m’en fichais : je lui volais sa flotte. En produisait-il souvent ? Dans le doute, je l’ai glissé dans mon thermos vide, avec un peu de sable. Les parois encore fraîches du conteneur le stimuleraient peut-être à nouveau pendant la journée. Je reprends ma route, cette goutte d’eau m’ayant revigoré. En fait, elle m’a apporté plus que ça. A présent, je sens qu’il me reste un espoir.
J’ai tué le vautour. Il m’agaçait. Je me suis décidé à faire le mort en m’allongeant dans le sable encore frais, puis j’ai arrêté de bouger. J’ai pas attendu bien longtemps. Quant il est venu me filer deux-trois coups de bec, je lui ai attrapé une patte et l’ai plaqué au sol. Ensuite, je l’ai matraqué à coups de fusil, jusqu’à ce que ses longues ailes brunes cessent de battre. Puis j’ai du le tuer une seconde fois, son organisme ayant enfin succombé à l’épidémie. Bouffer des charognes ne lui a pas réussi. C’est pour ça que j’y ai pas touché. En attendant, je continue ma route seul. Enfin pas vraiment : au fond de ma gourde, mon nouvel ami me tient compagnie.
La semelle de l’une de mes chaussures a lâché. Le sable entre à présent en contact avec ma voûte plantaire et me brûle atrocement. Ca me ralentit et me force à produire des efforts inutiles. La soif est revenue, la faim aussi. Au loin, derrière une dune, j’aperçois une image floue. Sombre. Je ne me berce pas d’illusions : le désert est déjà assez habile à en produire comme ça.
Je crois que je ne rêve pas. Il y a bel et bien des palmiers, au moins une trentaine, là devant moi. A même pas cinquante mètres. Et à leurs pieds, ce qui ressemble à une vaste mare, entourée de joncs bien verts. Pour autant, je ne me précipite pas. C’est trop beau pour être vrai. Mais à mesure que je m’approche, je me rends à l’évidence. C’est réel. C’est la fin du cauchemar.
L’eau est tiède mais potable. Au milieu du bassin, large d’une vingtaine de mètres, dansent des crevettes et des petits poissons, là où dans les palmiers, des grappes de dattes pendent, n’attendant que d’être cueillies. Une oasis. J’en ai rêvé depuis si longtemps. Après m’être bien giflé une douzaine de fois, je suis enfin assuré que je ne délire pas. Ma bonne étoile m’a enfin souri.
La datte a une chair charnue, sucrée. Délicieuse. Mon estomac rempli, c’est au tour de mes gourdes. Je vide celle contenu l’huile de moteur et l’autre, abandonnant le scarabée dans une touffe de brins d’herbes où il sera probablement à son aise. Ainsi paré, je me dis que je vais peut-être rester un peu plus longtemps dans ce véritable jardin d’Eden. Le temps de retrouver complètement mes forces. Et je compte bien savourer chaque instant de ce rêve éveillé.
Un bonheur n’arrive jamais seul. Alors que je cherchais un endroit à l’ombre pour me reposer, j’ai repéré le dromadaire. Sa bride lui pendait encore le long du cou, et une selle richement décorée ornait encore sa bosse unique. Sans doute s’était-il enfui et son odorat l’avait mené jusqu’ici. En tous cas, il fera un bon moyen de transport, si je parviens à l’attacher sans qu’il ne s’enfuie. Je m’approche lentement, sans gestes brusques. Il n’a pas l’air d’avoir peur : parfait. Quant je suis assez prêt pour le toucher, je caresse la selle en cuir. Il reste calme, il a l’habitude des hommes. Je me décide à l’escalader, grimpant sur son dos pour caler mes fesses sur la selle. Brusquement, celle-ci se dérobe sous mon poids, ainsi que la bosse toute entière. Je roule dans le sable et pousse un gémissement de douleur. Le lourd équipement m’écrase les jambes, m’empêchant de bouger. L’énorme paquet de graisse moisie,lui, se délite sur mon torse, masse gélatineuse et puante. Mais alors que je cherche à me relever, je vois le dromadaire se tourner vers moi. Je remarque alors ses yeux et sa gueule grande ouverte qui approche de mon visage. Les humains ne sont plus les seuls concernés. Et merde…
C'est le moment ou jamais
de passer à la postérité
Laisse un com qui détend qui détone
Mon blog s'en portera mieux
Et tu feras un heureux
17:01 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : sang et sable, nouvelle fantastique, drame, virus, maladie, désert
dimanche, 18 novembre 2012
Assassin's Creed - Le Dernier Vol de L'Aigle
L’Officier Donato Di Milano fit silence autour de lui d’un geste impérieux de la main. Ses douze hommes se turent et éclairée par quelques flambeaux, la cave prit soudain des allures d’église.
- Mes fidèles. L’heure est venue pour nous de rejoindre d’autres sympathisants, d’autres soldats, qui comme nous, ont cessé de croire à la politique de Cesare Borgia. Giuseppe…
L’intéressé – un grand sec au visage balafré – se fendit d’un sourire à l’écoute de son nom.
-… a appris de source sûre qu’un Capitaine Borgia du nom de Francesco Avvoltoio désirait rejoindre nos rangs. Son statut serait un atout majeur dans nos futures opérations. Nous devons le rencontrer cette nuit au Colisée. Il viendra avec plusieurs de ses hommes. Nous mériterons bientôt le nom d’esercito !
Cette annonce reçut un accueil des plus enthousiastes. Mais l’heure n’était pas encore à la célébration. Ils le savaient. La lutte ne faisait que commencer.
La lune était pleine et comme désireuse de suivre les évènements de près, éclairait la petite armée progressant vers l’imposant amphithéâtre.
Parvenue au centre même de l’arène, la troupe se figea.
Donato caressa sa barbe.
- C’est une belle nuit pour conspirer.
Une silhouette se dressa sur le sommet de l’attique.
- Officier Donato Di Milano ?
Le susnommé émit un rire jovial.
- Francesco Avvoltoio ?
Le visiteur attendu se fendit d’une élégante révérence.
- En personne et pour vous servir.
- Vous êtes venu seul ?
- Rassurez-vous. Mes hommes ne sont pas loin.
Donato observa les siens. Leur nervosité était manifeste. Il espérait que la sienne l’était moins.
- Venez nous rejoindre que l’on puisse converser convenablement. Nous avons beaucoup de choses à nous dire.
- Je ne suis pas venu pour converser.
Son ton glacial trancha net l’atmosphère.
- Archibugio ! hurla l’un des hommes de Donato.
Une dizaine d’arquebusiers apparurent comme par magie dans l’ouverture des arcades supérieures, les encerclant complètement.
Donato tira sa lame, le regard aussi noir que sa barbe :
- Qui a trahi ?
Ses yeux tombèrent sur Giuseppe.
- Bastardo ! Cela ne peut être que toi ! Tu nous as vendus aux Borgia ! Pour combien de Florins ?
- Pas du tout, reprit Francesco de son ton empathique. Il n’a fait qu’assurer sa promotion.
Il marchait nonchalamment sur le rempart. Sa silhouette se découpa sur le visage blafard de la lune.
- Car cette nuit, un Officier va mourir. Et un autre va naître.
Donato se rua sur Giuseppe, l’éclair de son épée levée au-dessus de sa tête.
Alors les arquebuses firent entendre leur chant funeste.
Des pigeons s’envolèrent non loin de là et leurs plumes vinrent s’échouer sur un tapis de sang.
1 mois plus tard
Le soldat fixa l’avis de recherche sur la porte en bois au moyen d’une flèche.
On pouvait y lire :
Ezio Auditore 50 000 f
L’inscription était surmontée du portrait d’un homme encapuchonné dont le visage demeurait caché dans l’ombre. Ses actes, eux, l’étaient beaucoup moins.
Depuis plusieurs années il malmenait les projets des Borgia et ce faisant, ridiculisait la garde de Rome. Le peuple le soutenait autant que possible et il avait rallié progressivement à sa cause toute une communauté d’ardents partisans mêlant courtisanes, voleurs et mercenaires. Récemment, sa lutte contre la tyrannie en place avait franchi un nouvel échelon. Désormais, il ne se contentait plus de simples complices. Il formait des assassins parmi les civils et les criminels qui à leur tour initiaient d’autres rebelles à l’art du meurtre furtif, soufflant sur les braises de la révolte.
Défait par Ezio Auditore en personne, Rodrigo Borgia avait cédé les rênes du pouvoir à son fils Cesare. Et ce dernier avait tôt fait de faire d’Ezio Auditore une priorité dans son programme pour le moins chargé.
Nul doute qu’en assiégeant Monterigioni, il n’avait fait qu’accélérer l’ascension des Assassins dans la capitale.
Rome faisait figure d’échiquier aux mains des deux hommes. Si Ezio avait déjà avancé de nombreux pions de manière menaçante, Cesare, loin d’être en reste, avait lui-même déployé des pièces maîtresses afin de contrer la stratégie de son adversaire.
Le secret et la surprise étaient pour eux des armes vitales. Et ils étaient tous deux prêts à tout pour s’assurer de l’un comme de l’autre.
Le garde qui affichait depuis une heure les avis de recherche était loin de se douter de tous les enjeux de la lutte à laquelle il participait tant bien que mal à son niveau.
Il grimpa à une échelle et fixa un nouveau document sur le mur. Du coin de l’œil, il surprit un mouvement suspect dans la rue. Se retournant, il vit que l’avis placardé sur la porte venait de disparaître. Ce n’était donc pas un accident tout à l’heure ! Quelqu’un s’amusait délibérément à les enlever dès qu’il avait le dos tourné.
La rage au ventre, il se laissa tomber au bas de l’échelle et tirant son épée, commença à inspecter les lieux en interrogeant les passants de son ton le plus autoritaire. Voyant qu’il n’obtenait aucun résultat, un jeune garçon s’avança avec hardiesse. Il avait l’air d’un mendiant. Sans doute un orphelin comme il y en avait tant dans les rues.
- Moi je l’ai vu celui qui a fait ça !
Le garde le jaugea avec méfiance avant de s’enquérir :
- Tiens donc ! Et où est-il passé ?
- Je vous le dis pour cinq florins.
Le garde grimaça.
- Dis-le moi et tu conserveras ta langue.
Le garçon opina, une main plaquée sur sa bouche. Il s’élança au milieu de la foule et le garde eut tout le mal du monde à ne pas le perdre de vue. Ils arrivèrent dans une ruelle. Au bout de celle-ci, les eaux bleues du Tibre miroitaient sous le soleil à son zénith.
Le garçon pointa un doigt en direction du fleuve.
- Il a plongé, exactement là !
Tout à sa tâche de repérer le criminel, le garde ne vit pas son jeune informateur passer dans son dos. Un bon coup de pied dans le postérieur suffit et le garde se retrouva dans l’eau à gesticuler comme un forcené.
- Bastardo !
Le garçon riait tant qu’il pouvait. Il brandit ostensiblement un avis de recherche avant de le ranger dans sa besace.
- Je le mets avec les autres, vous en faites pas !
Il rit de plus belle et tout en détaillant le contenu de la bourse de l’infortuné, il s’en retourna vers la rue bondée. Il n’avait pas encore quitté la ruelle qu’un officier le soulevait de terre et le collait violemment contre le mur.
- Alors, c’est toi le détrousseur qui sévit depuis des semaines. Je t’imaginais plus vieux.
- C’est parce que vous n’avez pas beaucoup d’imagination !
L’officier leva la main pour frapper, mais une voix jaillie de nulle part l’interrompit.
- Lâche immédiatement ce gamin !
Le garçon et l’officier tournèrent la tête et aperçurent un homme élégant avancer dans leur direction. Une capuche blanche masquait ses traits. Son identité ne faisait aucun doute. C’était l’homme le plus recherché de Rome, celui qui précisément habillait les avis de recherche.
- Ezio Auditore ! firent-ils en chœur.
- Pour vous servir.
L’officier déglutit, mais ne lâcha pas sa prise pour autant.
- Si tu fais un pas de plus, je…
La lame d’un couteau lui transperça l’épaule. Il se recula et le garçon tomba au sol.
L’officier agrippa la poignée de son épée, mais la main d’Ezio se referma sur le manche du couteau.
- J’ai quelques notions d’anatomie et il me semble que la carotide n’est pas loin. Ce ne serait pas beau à voir.
Le garçon bondit sur ses pieds.
- Vas-y, Ezio, fais-lui une bonne saignée !
Sa joie manifeste fit sourire l’assassin.
- Mais ce ne serait pas un spectacle pour un bambino.
Le garçon perdit soudainement sa gaieté.
- Je suis pas un bambino !
Ezio enfonça un peu plus le couteau dans l’épaule de l’officier qui étouffa un cri.
- La prochaine fois, il n’y aura ni témoin, ni avertissement, ni échappatoire !
Il récupéra sa lame et envoya l’officier disparaître dans la cohue d’un coup d’épaule.
Il s’intéressa alors au garçon.
- C’est donc toi qui t’amuses à noyer les gardes de Cesare.
- J’y peux rien s’ils se noient. Leur armure est tellement lourde qu’ils plongent droit vers le fond.
- Ce n’est pas vraiment un jeu pour un bambino.
- Je suis pas un bambino.
Il redressa fièrement la tête.
- Je suis un assassino ! Et je sais tout de toi !
Ezio s’esclaffa.
- Tiens donc !
Il s’empara de sa besace et l’ouvrit.
- Parce que tu collectionnes mes avis de recherche. Intéressant, mais insuffisant.
Le garçon le défia du regard.
- Je sais que tu as perdu ton père et tes deux frères et aussi ton oncle Mario à Monteriggioni. Je sais que tu formes des assassins à devenir comme toi. Moi aussi je veux devenir un aquila, un assassino !
Ezio ne put cacher sa surprise.
- Et bien ! C’est vrai que tu en sais des choses. Mais de là à devenir un aquila comme tu dis ! D’abord comment t’appelles-tu et où se trouvent tes parents ?
- Je m’appelle Raphaëlo Di Milano. Je suis tout seul. Ma mère est morte en me mettant au monde et mon père a été tué par les hommes de Cesare.
Son visage d’adolescent fut tout à coup déformé par un violent sentiment.
Ezio lui-même ne fut pas insensible.
- Di Milano ? Donato Di Milano était ton père, c’est ça ?
Raphaëlo opina avec tristesse.
Ezio s’adoucit et observa le garçon avec un tout autre regard.
- J’ai entendu parler de ton père et de ses projets. Bien trop tard, il est vrai. Il s’est montré très courageux. Je pense que nous aurions pu travailler ensemble s’il n’avait pas manqué de chance. En tous cas, je comprends mieux tes motivations. Tu as des raisons de te venger, il est vrai.
Ezio posa ses mains sur les frêles épaules de Raphaëlo. Ce dernier ravala ses larmes pour mieux s’exprimer :
- Mon père n’a pas manqué de chance, il a été trahi par l’un de ses hommes qui voulait prendre sa place. Je sais comment il s’appelle et je connais aussi le nom de celui qui a tué mon père !
Il avait le plus grand mal à contenir sa colère. Mais si quelqu’un pouvait se mettre à sa place, c’était bien Ezio. Il devait avoir le même âge que lui quand il avait assisté à la pendaison de son père et de ses frères. Ils avaient eu tous deux un père brave et juste qui avait payé de sa vie son combat contre l’oppression. Pour autant, il avait d’autres préoccupations.
- Ecoute, Raphaëlo. Ce que tu fais est déjà d’une grande aide pour moi et pour le peuple de Rome. Ton père serait fier de toi.
- Mais tu ne comprends pas ! J’ai toujours rêvé de te rencontrer. Je veux faire plus que cela. Je veux devenir un assassin ! C’est toi qui m’as inspiré !
Ezio sentait que s’il restait en présence du garçon, il allait céder. Et dans l’état actuel des choses, il ne pouvait se le permettre.
- Je suis désolé. Tu es trop jeune pour devenir un assassin. Et la vengeance n’est pas une motivation suffisante. Je ne nie pas que cela a été pour moi un point de départ, mais j’ai dépassé ce stade depuis longtemps. J’ai d’autres raisons, maintenant, des raisons plus importantes qui ne concernent pas que moi. Tu dois grandir encore un peu. Tu dois vivre et avoir plus d’expérience.
Les yeux de Raphaëlo brillèrent d’une douleur contenue et son visage s’empourpra.
Il voulut dire quelque chose pour sa défense, mais il s’étrangla. Sa déception était immense. Il préféra s’enfuir plutôt que de perdre toute sa dignité. Ezio poussa un soupir en le regardant partir. Il avait le sentiment d’avoir commis une erreur, d’avoir trahi, pas seulement quelqu’un qui avait confiance en lui, mais aussi une partie de lui-même.
Et c’était sans doute cela le plus dur.
Lorsqu’il pénétra dans son repaire de l’île du Tibre, Machiavelli l’attendait déjà.
- Tu es en retard, fit ce dernier d’un ton sentencieux.
Ezio préféra s’en amuser.
- Je savais bien que tu allais finir par te prendre pour mon père.
Bartolomeo était présent lui aussi. Il alla droit au but.
- Mes hommes ont mis la main sur un document pour le moins précieux. Regarde.
Les trois hommes se penchèrent au-dessus de la table.
- On dirait un plan de Rome.
- C’est ce que nous avons cru aussi, révéla l’ancien condottiere.
Ezio prit la carte et la plaça devant la flamme d’une bougie.
- Il y a un tracé précis, comme un itinéraire. Mais à quoi peut-il correspondre ?
- Nous n’en sommes pas encore sûrs, dit Machiavelli, mais en discutant avec certains officiers j’ai appris qu’un convoi spécial allait traverser la ville dans quelques jours. Ils ignoraient sa nature exacte. Très peu de personnes doivent être au courant des détails de cette opération clandestine.
- Un chargement secret, murmura Ezio. Ca peut être de l’argent, des armes…
- Ou peut-être veut-on nous le faire croire, observa Machiavelli.
Bartolomeo secoua la tête.
- Les mercenaires ont dit que le document était en possession d’un courrier de Borgia ivre. Ils n’ont même pas eu à se battre pour l’obtenir. Plutôt curieux, non ?
- Ambigu, fit Ezio. Soit on nous incite à croire que ce convoi a peu d’importance, soit on essaie de nous tendre un piège. Dans les deux cas, il y a supercherie, ce qui est tout à fait digne de l’esprit tordu de ce cher Cesare.
- Que fait-on ? interrogea Bartolomeo.
- Dis à tes hommes de ramener le courrier. Nous allons l’interroger. Ce n’est qu’un pion, mais il en sait peut-être plus qu’il ne le croit lui-même. Surtout s’il est ivre. Continuez d’examiner cette carte, elle a peut-être d’autres informations d’importance à révéler.
Machiavelli toisa l’assassin :
- Et toi, que vas-tu faire ?
- Je vais trouver La Volpe. Il sait peut-être quelque chose à ce sujet. Il a une fâcheuse tendance à laisser traîner ses mains et ses oreilles là où c’est nécessaire.
En quittant le repaire, Ezio eut la surprise de tomber nez à nez avec Raphaëlo.
- Mais…que fais-tu ici ?
- Je t’ai suivi.
Le garçon avait visiblement retrouvé toute sa gouaille. Il avait sans doute préparé son argumentaire.
- Si tu m’as suivi, alors tu es doué. Je n’ai rien remarqué.
- Tu vois, je ferai un excellent assassino !
Ezio sourit, ému par la ténacité de l’adolescent.
- Têtu comme tu es, tu as tout pour être une mula, pas un aquila !
- Je serai une mule volante, pourquoi pas ? Ca peut servir aussi !
La volonté dont faisait preuve le garçon était désarmante, mais Ezio n’avait pas le temps de se prêter au jeu. Cesare préparait quelque chose et il devait agir au plus vite.
- Tu n’as pas quelques affiches à décrocher ?
Raphaëlo haussa les épaules.
- J’ai brûlé ma besace. Ce n’est plus à moi de faire ça. J’ai de plus grandes ambitions.
- Oui, fit Ezio avec un sourire. Je suis au courant, je crois. Assassino !
Le mot suffisait à faire étinceler les yeux du garçon comme des diamants.
Ezio ignora cette image. Elle lui faisait peur.
- J’ai du travail. Les gens qui ont besoin d’aide, ce n’est pas ça qui manque à Rome. Tu devrais te rendre utile auprès d’eux.
Ezio allait prendre congé, mais le garçon le retint par un bras.
- S’il te plaît, Ezio ! Laisse-moi ma chance ! Je suis sûr que je ferai un excellent assassin ! Laisse-moi faire mes preuves !
Voilà qu’il le suppliait, maintenant.
Raphaëlo était sans nul doute un gamin intelligent. Il finirait par comprendre de lui-même qu’il n’était pas de taille.
Ezio soupira.
- Très bien ! Rendez-vous sur le toit de l’Eglise de Santi Apostoli dans deux heures. Nous verrons si tes jambes sont aussi souples que ta langue !
Le garçon ne put contenir sa joie. Il poussa un grand cri et partit comme une flèche vers le lieu du rendez-vous. Difficile de trouver un élève plus zélé, songea Ezio.
Ezio ne trouva pas La Volpe. Un groupe de voleurs lui apprit qu’il avait quitté Rome pour quelques jours afin d’étudier une alliance avec une guilde siégeant à Milan.
Malgré ce triste constat, Ezio se sentait d’humeur enjouée. L’enthousiasme du jeune Raphaëlo devait être contagieuse. L’assassin se mit en marche vers l’église, le cœur étonnamment léger. Son devoir pouvait attendre un peu. Il avait besoin de se divertir et ce gamin lui offrait une occasion inespérée de le faire. Et surtout, il avait l’occasion de se racheter auprès de lui, ce qui valait son pesant d’or.
Raphaëlo l’attendait sagement depuis des heures sur le toit de l’église. Il bondit sur ses pieds lorsque Ezio atterrit souplement près de lui.
- Tu ne t’es pas fait remarqué au moins !
- Je sais semer les gardes mieux que personne, fit le garçon avec arrogance.
- Très bien, alors voyons si tu sais semer un véritable aquila !
Sur ces mots, Ezio s’élança dans le vide. Il boula sur un toit, bondit à nouveau et se raccrocha à une corniche. Il remonta et jeta un coup d’œil derrière lui pour voir où en était son protégé. Il ne le vit pas. Il eut soudain la terrible pensée qu’il l’avait surestimé et que le jeu était allé trop loin. Il regarda en contrebas en espérant ne pas voir son jeune corps écrasé sur les pavés Un grand bruit le fit se retourner. Raphaëlo se tenait debout devant lui.
- Mais à quoi tu joues, idiota ? Tu cherches à m’impressionner ?
Le garçon afficha un visage guilleret et Ezio comprit qu’il avait vu juste.
Ils passèrent le restant de la journée à escalader les toits de Rome avec un plaisir égal. Malgré son expérience, Ezio n’en finissait pas d’admirer les prouesses de Raphaëlo. Il était bien plus doué que lui au même âge. Et cette évidence lui donnait un pincement au cœur. S’il lui disait la vérité, le garçon ne le lâcherait plus d’une semelle au risque de compromettre sa mission actuelle. Et s’il niait son potentiel, il gâcherait ses espoirs et ses rêves les plus fous.
La nuit tombait déjà lorsque Ezio réalisa qu’il devait retourner au repaire.
- Il faut que je te laisse. J’ai affaire.
- Des trucs d’assassin, c’est ça ?
Ezio opina.
- Alors je suis toujours une mula ou je suis un aquila ?
L’assassin sourit.
- Tu es bien une mule volante !
- Alors quand est-ce que tu m’apprends à me battre ?
Le visage d’Ezio se rembrunit.
- Il n’a jamais été question de cela, Raphaëlo !
- Mais comment veux-tu que je devienne un assassin si je ne sais pas me battre ?
Ezio n’avait pas envie de se lancer dans un nouveau débat avec l’adolescent. Il coupa court en plongeant dans le Tibre. Le garçon ne savait pas nager. Il regarda son mentor disparaître, ombre parmi les ombres, écoeuré de la tournure des évènements.
Ezio trouva Machiavelli faisant les cents pas dans la salle principale.
- Où est Bartolomeo ?
- Il n’a pas eu ma patience. Et il avait surtout autre chose à faire qu’à t’attendre. Alors que t’a dit La Volpe ?
- Rien. Il n’est pas à Rome.
- D’autres contacts ?
- Non, aucun.
Machiavelli arbora un air contrarié.
- Je peux savoir ce que tu as fait de ta journée ?
- Tu te prends vraiment pour mon père.
Ezio s’assit et commença à se restaurer.
Son ami l’observa avec attention.
- Si je te connaissais pas, je dirais que tu as été voir une jolie signora en détresse et que les seules confidences que tu as récoltées ont été celles qu’elle t’a faites sur l’oreiller.
Ezio s’esclaffa.
- Machiavelli, pour une fois, tu fais fausse route. Je me suis bien dépensé, je le reconnais, mais ce n’était pas en compagnie d’une jeune signora. J’étais avec un gamin.
- Mon dieu, serais-tu tombé si bas ?
- Mais non, idiota ! Il veut devenir un assassin. Seulement, il est trop jeune et il ne veut pas l’admettre. J’ai toutes les peines du monde à lui faire entendre raison.
Machiavelli sourit.
- Quel heureux hasard. Cela me rappelle assez notre propre relation. D’ailleurs je crois devoir te rappeler que nous avons une affaire à traiter et que le délai est des plus courts.
- Je sais. Le courrier a-t-il parlé ?
Machiavelli haussa les épaules.
- Tout ce qu’on sait c’est qu’il ne le fera plus. Son corps a été retrouvé dans le Tibre.
Ezio bondit de son siège.
- Quoi ? Il a été assassiné ?
- Si seulement. Non, à en croire les témoins, il s’est contenté de faire un faux pas. Il faut dire qu’il n’avait pas dessaoulé.
Ezio secoua la tête.
- Maledizione !
Puis il vida son verre de vin.
- Et la carte ?
- Rien de nouveau, j’en ai bien peur.
Machiavelli la tendit à l’assassin qui la détailla à nouveau.
- On est dans une impasse. Je me demande si Leonardo ne pourrait pas nous filer un coup de main. S’il y a un code inscrit sur cette carte, il le trouvera.
- Soit, mais sans vouloir être ton père, évite les enfantillages cette fois. Cesare Borgia mérite toute notre attention. Tu le sais mieux que quiconque.
Ezio sourit.
- Machiavelli, la voix de la raison !
L’intéressé minauda.
- A laquelle tu prends plaisir à rester sourd.
Ezio lui tendit un verre de vin.
- Trinque à notre futur succès au lieu de dire des sottises !
Ezio partit de bonne heure le lendemain en direction de l’atelier de son ami Leonardo. Il essayait de ne pas penser à Raphaëlo. En vain. Le gamin lui rappelait trop sa jeunesse. Pour un peu il se serait senti père lui aussi à donner des leçons d’éducation comme il l’avait fait la veille. Il secoua la tête pour chasser ses pensées. Mais elles eurent tôt fait de se matérialiser à quelques mètres de lui. Il ne pouvait visiblement pas leur échapper à Rome.
Raphaëlo se tenait près d’un médecin au masque d’oiseau vantant les mérites d’un nouveau remède contre les furoncles et autres problèmes de peau disgracieux.
Ezio se dit qu’il avait peut-être finalement trouvé d’autres ambitions et un nouveau mentor pour les atteindre. Mais il faisait fausse route. Le garçon fit mine ne pas avoir vu l’assassin. Raphaëlo n’était pas seulement un agile coureur, c’était aussi un bon comédien à en croire son attitude. Ezio feignit aussi de ne pas l’avoir vu et continua à marcher, sa fidèle capuche facilitant son anonymat. Quelque chose le frappa dans le dos. Il se retourna. Le gamin lui faisait face, les larmes aux yeux, le visage haineux :
- Puisque c’est comme ça, je deviendrai un assassin tout seul !
Ezio le regarda s’éclipser derrière l’échoppe d’un forgeron. Il décida que l’histoire était close et qu’il n’avait plus à s’en soucier.
Au prix d’un effort, il parvint à se concentrer sur sa mission.
Arrivé devant la porte de l’atelier, il frappa plusieurs coups de sorte à composer un code établi entre lui et l’artiste.
- Tu es Ezio Auditore ?
Un homme aux allures de prêtre sortit d’une encoignure.
L’assassin le toisa avec méfiance.
- C’est exact.
- Leonardo n’est pas là. Une affaire urgente à traiter.
Ezio soupira.
- Décidément, tout le monde me fuit !
- Il a laissé ce paquet pour toi.
Le prêtre lui tendit un colis et se mêla à la foule sans plus de cérémonie.
Ezio choisit un coin discret et défit l’emballage.
Il trouva deux lames ainsi qu’un mot de l’artiste :
Ezio,
Voici deux nouvelles lames d’assassin conçues spécialement pour toi. En tant que peintre et inventeur, je sais que sans de bons outils, un artiste n’est jamais que la moitié de lui-même. J’espère qu’avec ceux-là, tu deviendras le meilleur de toi. Si ce n’est pas déjà le cas.
Ton ami Leonardo.
Ezio détailla les lames. A leur éclat, il comprit que le métal avait été renforcé et les côtés de chaque lame étaient nantis de petites dents sur toute leur longueur. De quoi faire du petit bois avec les armes des Brutes !
Ezio sourit.
- Tu es un maestro, Leonardo !
Il rangea les lames dentelées dans sa ceinture et c’est alors qu’il remarqua qu’il lui manquait plusieurs couteaux de lancer. Il était pourtant certain d’avoir complété son inventaire avant de partir de l’île du Tibre. En se remémorant ses actions passées pour expliquer cette absence, il se rappela sa rapide altercation avec Raphaëlo et c’est là qu’il comprit. Rempli de rancœur, le garçon lui avait dérobé ses lames.
- Idiota !
Ezio se dit que ça n’était pas bien méchant, un caprice d’adolescent. Il espérait juste qu’il ne ferait pas de bêtises plus grosses que lui avec ses nouveaux jouets.
Tout en cheminant au milieu de la rue déjà bondée à cette heure, il examina de nouveau la carte. Il étudia attentivement le tracé et réalisa que par un heureux hasard, il le suivait précisément. Je n’ai qu’à vérifier si cet itinéraire présente de lui-même des particularités, se dit l’assassin. Avec un peu de chance, la clé du document est peut-être là, tout près.
Il regarda les échoppes et les maisons bordant chaque côté de la rue. Il ne trouva rien qui méritât qu’on s’y attarde. Tant pis, songea-t-il. Peut-être que Machiavelli aura du nouveau de son côté. Le cri d’un aigle dans le ciel lui fit lever les yeux.
- Aquila !
Il était en train de repenser au garçon lorsqu’un détail le frappa brusquement. Le rapace était perché sur le sommet d’une grue. Les yeux d’Ezio s’agrandirent tandis qu’il suivait le tracé de la carte et découvrait à intervalles réguliers d’autres grues se profiler sur les toits.
La vérité le frappa alors d’un seul coup.
Il y aurait bien un convoi, mais convoité par Cesare lui-même. Ces grues constituaient assurément des postes d’observation idéals pour une embuscade. Il en savait quelque chose.
Cesare prévoyait une attaque savamment coordonnée. Le convoi – quelque fut sa nature – devait représenter aux yeux des Borgia une mine d’or ou bien une menace à leur soif de contrôle absolu.
Quelqu’un voulait faire sortir quelque chose de Rome dans le plus grand secret, à la barbe des Borgia. Ezio allait tout faire pour que le plan prévu fonctionne. Mais il aurait donné cher pour savoir ce qui motivait une telle organisation. Nul doute qu’il le découvrirait bien assez tôt. Ragaillardi par cette découverte, il s’élança sur le mur le plus proche et bondit de toit en toit en direction de son repaire.
L’officier Giuseppe Falsario finissait de donner ses instructions à ses hommes dans le quartier sud-est de Centro. Ezio Auditore avait encore fait parler de lui et la surveillance était désormais renforcée dans le quartier du Tibre.
Giuseppe attendait la visite du Capitaine Borgia Francesco Avvoltoio avec qui il entretenait d’excellents rapports depuis sa promotion. Mais il sentait bien que les méfaits perpétrés par le fils de feu Donato Di Milano – puisqu’on l’avait identifié - ternissait un peu l’image qu’il offrait à son supérieur. Il comptait donc bien effacer cette imperfection du tableau.
Il caressa sa cicatrice. Sa main se crispa. Quand on parlait du loup. Le rejeton de Di Milano venait d’apparaître devant lui, bondissant depuis une grue. Il le défia du regard. Son visage n’était qu’un masque de haine. Du haut de ses seize ans, rien ne semblait pouvoir l’intimider.
L’officier sourit, ce qui ne constituait pas un spectacle des plus attrayants.
- Bastardo, te voilà enfin !
Raphaëlo ne lui rendit pas son sourire. Il se contenta de lui balancer l’un des couteaux dérobés à Ezio. Giuseppe dégaina sa lame et dans le même mouvement renvoya le couteau vers son propriétaire. Le garçon l’esquiva de justesse et il trouva le cœur d’un innocent barde qui perdit la voix et la vie, à peu près dans cet ordre.
Les passants s’écartèrent. Des femmes crièrent.
Un brute imposant en armure se fraya un chemin dans la foule d’une seule épaule et arriva sur les lieux du combat. Alarmé par les cris, un traqueur armé d’une lance vint également en renfort.
Giuseppe sourit à nouveau.
- Je crois que tu as mal choisi ton jour pour régler tes affaires de famille, mon petit !
Cette fois Raphaëlo sourit.
- Tu diras ça à mon père, bastardo !
Le traqueur se tourna vers l’officier en écarquillant les yeux de stupeur.
- Vous…vous saignez.
Giuseppe baissa la tête. Une lame de couteau était plantée jusqu’à la garde dans son abdomen.
Le gamin avait été plus malin et plus rapide que lui. Ses jambes se dérobèrent sous lui et il s’affaissa contre une porte.
- Tuez ce sale petit enfant de puttana!
Le traqueur jaugea l’adolescent avec sadisme.
- Avec plaisir.
Il brandit sa lance à l’horizontale. Raphaëlo l’esquiva d’une élégante pirouette avant de disparaître dans un chariot de foin.
- Idiota !
Le traqueur balança son arme dans la cachette. Le garçon bondit dans un grand envol de paille et se réceptionna sur le traqueur en lui piétinant la figure au passage. Au moment d’atterrir, il sentit la pointe d’une botte lui écraser les côtes. Le brute ne méritait pas son nom pour rien. Sa force n’avait d’égale que sa volonté de la prouver. Raphaëlo tenta de s’éloigner pour reprendre son souffle, mais la pique du traqueur lui troua l’épaule droite et le souleva de terre. Embroché comme un vulgaire insecte, il hurla et gesticula en tentant vainement de se libérer. La douleur était atroce. Il entendit les deux soldats s’esclaffer. Le traqueur le cloua contre une façade et commença à appuyer sur son arme sous les contestations de la foule.
- Vous n’avez pas honte, ce n’est qu’un enfant !
- Bourreaux, soyez maudits !
Certains badauds plus hardis jetèrent des pierres aux soldats et le brute se chargea de les rappeler à l’ordre avec force moulinets de sa hache. Raphaëlo profita de cette distraction inespérée pour saisir son dernier couteau. Il positionna la lame au-dessus de la lance et se servant d’elle comme d’un support à sa trajectoire, il balança le couteau. La lame descendit en tournoyant au-dessus de la hampe avant de trouver la gorge du traqueur. Il lâcha son arme et s’écroula sur les pavés en émettant d’affreux râles. La foule émit une salve de hourras avant d’être dispersée par de nouveaux renforts dont un cavalier à la voix impérieuse.
Raphaëlo retomba au sol avec fracas. Il rampa vers un escalier, dans l’espoir fou de trouver un salut. Ce faisant, il eut la satisfaction de voir que Giuseppe n’avait pas survécu assez longtemps pour se réjouir de sa propre déveine. Il tendit une main vers l’épée du mort, mais le sabot d’un cheval lui brisa la main en même temps que sa dernière chance d’échapper à son destin. Le cavalier se pencha vers lui. La vue de Raphaëlo se brouillait, mais il eut le temps de reconnaître Francesco Avvoltoio en personne. Ce dernier arbora un rictus de mauvais augure au-dessus de sa barbiche.
- Qu’on en finisse avec la famille Di Milano !
Le brute s’avança vers le garçon moribond, sa hache à deux mains.
Francesco effectua un geste élégant :
- Ne partez pas, aimables citoyens. Soyez témoins d’une exécution comme seule Rome peut vous en proposer !
Raphaëlo réunit le peu de forces qui lui restaient pour cracher vers le Capitaine Borgia.
- Va en enfer, toi et les Borgia !
Francesco lui dédia son plus infâme sourire.
- Après toi, bambino !
Le brute leva sa hache.
Ezio venait de révéler sa découverte à Machiavelli ainsi qu’aux assassins présents au repaire.
Machiavelli n’avait pas perdu son temps, lui non plus. Grâce à son propre réseau d’informateurs, il avait appris que le convoi passerait finalement dès la tombée de la nuit. Sa nature, en revanche, demeurait toujours aussi mystérieuse.
Les membres de la confrérie étaient tous réunis autour de la table ainsi que de la carte prise au courrier. Ezio était en train d’établir leur plan d’attaque.
- Nous allons nous répartir sur tous ces points stratégiques.
Il avait indiqué sur la carte de Rome la position des différentes grues.
- Nous allons prendre Cesare à son propre jeu. Nous neutraliserons ces hommes et arrêterons le convoi. De sa nature dépendra ensuite notre ligne de conduite.
Malgré leur position de force, Machiavelli semblait toujours soucieux.
- Tu ne penses plus que c’est un piège déguisé ?
- Non. Je crois que Cesa…
La porte d’entrée s’ouvrit et un tumulte de voix se fit entendre derrière eux. Les assassins s’écartèrent et Bartolomeo apparut encadré par plusieurs courtisanes. Le capitaine tenait un jeune garçon dans ses bras. Ezio reconnut immédiatement Raphaëlo.
- Les courtisanes sont arrivées au moment où Francesco Avvoltoio s’apprêtait à l’exécuter en public. Pendant que mes hommes ont distrait les gardes, elles l’ont conduit en lieu sûr et ont essayé de le soigner.
Le visage de l’ancien condottiere se durcit :
- Il a tué Giuseppe falsario.
- Il avait déjà perdu beaucoup de sang, Ezio, ajouta Esmeralda, une courtisane dont l’assassin s’était entichée autrefois. Il répétait ton nom sans arrêt. On s’est dit que tu le connaissais sûrement.
Ezio prit le garçon dans ses bras. Il ne bougeait pas, ses yeux étaient fermés. On aurait dit qu’il dormait. Mais Ezio savait qu’il n’en était rien. Malgré les pansements, il vit bien l’étendue de ses blessures. Les gardes n’y avaient pas été de main morte avec lui.
L’assassin restait sans voix. De voir cet être auparavant si vif, si animé désormais réduit à l’état de statue était insupportable. La colère commença à monter en lui. Une colère qu’il ne connaissait que trop bien. D’une main il balaya les objets encombrant la table et déposa le corps frêle de l’adolescent sur cette couche improvisée. Il dut déglutir plusieurs fois avant de pouvoir parler à nouveau :
- Vous allez appliquer le plan à la lettre, dit-il aux assassins sans même les regarder. Et vous me rendrez compte dès que ce sera fait.
- Que vas-tu faire ? s’enquit Machiavelli tout en connaissant la réponse.
Ezio continuait de fixer le visage de l’adolescent comme d’en l’espoir fou de le voir sortir de son inertie. Mais sa pâleur tuait irrémédiablement cette possibilité.
- Ne songe même pas à m’en empêcher.
Il se rendit dans l’armurerie et remplaça ses lames habituelles par les nouvelles, conçues de main de maître par Leonardo.
- Ce soir, j’ai un concert à donner. Et de nouveaux instruments à tester.
Il ajusta sa capuche sur sa tête et prit le chemin de la sortie. Il entendit la voix de Machiavelli.
- Ce n’est pas ta vengeance, Ezio !
L’assassin continua sa route.
- Maintenant si.
Bartolomeo l’arrêta d’un geste.
- Le petit a ajouté quelque chose avant de…avant de s’envoler.
Ezio leva la tête. Ses yeux trahirent son émotion.
- Qu’est-ce qu’il a dit ?
- Il a dit que tu avais raison. Il a dit qu’il n’était encore qu’un bambino.
Ezio ouvrit la porte menant sur les toits.
- Je peux t’envoyer quelques mercenaires pour te faciliter la tâche, ajouta Bartolomeo.
- Je n’ai pas envie que ce soit facile.
Sur ces mots, l’assassin ferma la porte.
La nuit avait recouvert Rome d’un drap de soie et la pluie venait de s’abattre sur la capitale. Trempés jusqu’aux os, deux arbalétriers juchés sur un toit s’entretenaient des affaires récentes pour mieux supporter leur condition.
- Quelque chose se prépare en ce moment, dit l’un des soldats. J’ai entendu dire que des hommes avaient été réquisitionnés pour une opération spéciale directement orchestrée par Cesare lui-même.
- Quel genre d’opération ? s’enquit son compagnon.
L’autre décocha un carreau sur un pigeon en plein vol avant de répondre :
- Un détournement. Un convoi doit sortir de Rome. Il transporte des rebelles dont la tête est mise à prix. L’un des cochers est un de mes amis. C’est grâce à lui que Cesare a eu cette information. Sûr qu’après ça, il aura droit à une belle promotion.
Un éclair déchira la nuit, révélant la silhouette d’Ezio Auditore debout derrière les deux hommes. Deux secondes plus tard, ils gisaient aux pieds de l’assassin. Ce dernier contempla ses lames avec satisfaction.
- Comme dans du beurre.
Puis il ramassa les armes des deux gardes.
- Merci pour l’information.
Ezio se glissa sous l’arche et tendit ses bras de part et d’autre. Les deux gardes en faction reçurent un carreau en pleine tête. Le bruit du tonnerre masqua celui de leur chute.
Un temps idéal pour agir librement.
L’assassin se coula derrière une caisse. Il repéra Francesco Avvoltoio dans une alcôve, près de la tour Borgia qui lui était assignée. Une tour qui n’avait pas encore été brûlée par ses soins. L’occasion pour lui de faire d’une pierre deux coups. Il repéra également deux soldats, un brute armé d’une hache aux côtés du capitaine ainsi qu’un officier dont le visage lui était familier. Et pour cause, c’était lui qui admonestait Raphaëlo le jour où il l’avait rencontré. Il n’aurait pas de seconde chance.
La colère d’Ezio remonta brusquement. Il se revit en train de courir sur les toits en compagnie du garçon et il sut enfin pourquoi il avait tant aimé partager de choses avec lui. Cela lui avait rappelé la complicité avec son grand frère Frederico.
Quelque chose coula sur sa joue. Il préféra se convaincre que c’était la pluie.
Il sortit de sa cachette et s’avança à découvert. Francesco le vit immédiatement. Les gardes se mirent aussitôt en alerte.
- Tiens, mais c’est décidément un jour faste ! Voilà un autre criminel d’envergure qui vient à nous sans que nous ayons besoin de le traquer.
Ezio continua d’avancer. Les mots n’avaient plus cours. Le sang seul parlerait.
Les deux soldats se ruèrent sur lui, l’épée au poing. Ezio plongea sous la rapière du premier. Il transperça son pied d’une de ses lames. Le garde se plia en deux dans un hurlement avant de sentir la deuxième lame d’assassin lui perforer la mâchoire. Le second commença à faire de grands moulinets avec son cimeterre. Ezio poussa un soupir avant de lui loger une balle en pleine tête. Sur un ordre muet du capitaine, l’officier s’avança. Il pointa une lance en direction d’Ezio.
Ce dernier s’élança et ses deux lames exécutèrent un ballet fantastique devant lui, réduisant la lance en morceaux.
- Pas de témoin !
Avant que son adversaire ait pu réagir il lui transperça le corps une dizaine de fois.
- Pas d’avertissement !
L’officier tomba à genoux et une lame s’enfonça entre ses yeux.
- Pas d’échappatoire !
Le soldat s’écroula face contre terre dans une mare de sang bien vite diluée par la pluie torrentielle.
Le brute émit un grognement avant de balancer sa hache. L’arme tournoya avant de fracasser la caisse derrière laquelle Ezio s’était embusqué un peu plus tôt. L’assassin pointa son pistolet mais le brute souleva le corps sans vie de l’officier et s’en servit comme d’un bouclier. Les balles trouèrent le cadavre que le garde jeta sur Ezio. Celui-ci se plaqua au sol. Le brute avait prévu sa réaction et il se laissa tomber sur lui de tout son poids avant de lui assener une rafale de coups. Ezio chercha une faille, mais les poings de son adversaire le harcelaient sans répit.
La pluie vint finalement à son secours. Le brute glissa sur les pavés détrempés et s’affala. Il n’en fallut pas plus pour l’assassin. Il se jeta sur le garde aussi impotent qu’un poisson hors de l’eau et lui logea ses deux lames sous le menton. Puis ramassant la hache, il décrivit un moulinet avant de la laisser tomber sur le cou de son adversaire.
Francesco en avait profité pour grimper sur sa monture. Il émit un bref sifflement et aussitôt une dizaine d’arquebusiers apparurent sur les toits formant un cercle dont Ezio était le centre.
- La fête est finie, assassino !
Il avait à peine achevé sa phrase que les arquebusiers étaient submergés par une horde d’assassins jaillis de nulle part.
- En effet, dit Ezio.
Le capitaine Borgia masqua sa frustration. Il tira son épée et s’élança au galop. Ezio resserra ses doigts sur le manche de la hache. Il attendit patiemment que son adversaire se rapproche avant de lancer son arme. Le corps décapité du cavalier tomba à bas de la monture et la tête de Francesco Avvoltoio roula sur les pavés avant de s’arrêter aux pieds de l’assassin.
Quelques instants après, les assassins se réunirent autour de leur meneur et lui racontèrent ce qui s’était passé. Mais ils ne firent que confirmer ce qu’Ezio savait déjà, grâce à la conversation surprise un peu plus tôt sur les toits. Les hommes mis en place par Cesare avaient été neutralisés et les rebelles avaient pu quitter la ville sans encombres.
Mais Ezio n’en demeurait pas moins soucieux.
- L’un des cochers est un traître infiltré. Il faudra le retrouver, c’est une priorité.
L’un des assassins posa une main sur l’épaule d’Ezio.
- Il s’est démasqué tout seul. Il a cru que nous venions pour lui et il a tenté de s’échapper. La seule issue qu’il a trouvée l’a conduit en Enfer.
Ezio afficha son plus large sourire.
- Bene. Vous avez tous fait de l’excellent travail. Je suis fier de vous.
- On peut encore faire quelque chose pour toi ? s’enquit un disciple.
Ezio leva les yeux.
- Oui, vous allez m’aider. J’ai encore quelque chose à accomplir.
Les assassins hissèrent le corps de Raphaëlo jusqu’au sommet de la Tour Borgia où Ezio attendait. L’assassin s’agenouilla près du garçon.
- C’est toi qui avais raison. Tu es un vrai assassino. Et tu l’as largement prouvé aujourd’hui.
Il ôta un flambeau de son logement. Il prit une profonde inspiration avant de le jeter à terre.
- Repose en paix, aquila !
Tandis que les flammes commençaient à lécher l’intérieur du bâtiment, Ezio s’élança du haut de la tour et effectua un magistral saut de la foi. Un aigle plana un instant dans le ciel comme pour accompagner l’envolée de l’assassin.
T’as aimé…ou pas
T’as tout lu, tout vu, tout entendu…ou pas
Peu importe, post un com et like la page pour dire que tu existes car ton avis est important pour moi, mais aussi pour le futur de ce blog, un gros merci d’avance !
13:09 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : assassin's creed, fanfic, nouvelle, jeu vidéo, assassin's creed brotherhood
samedi, 17 novembre 2012
L'Auberge des Deux Renards [Site Kaamelott]
J'ai le plaisir de vous informer de l'existence d'un site particulièrement bien fourni sur la série Kaamelott ainsi que sur l'actu de tous les acteurs. Que vous recherchiez un épisode précis ou que vous souhaitiez vous tenir au courant des futurs projets d'Alexandre Astier & Co, vous trouverez votre bonheur en quelques clics.
http://www.auberge-des-deux-renards.com/
Léodagan - Alors eux, ils ont carrément tout bité au tableau !!!
Arthur - Sans déc ???
Perceval - Paraît qu'on a plus aucun secret pour personne.
Karadoc - Ouais. Ca pue du cul !
C'est le moment ou jamais
de passer à la postérité
Laisse un com qui détend qui détone
Mon blog s'en portera mieux
Et tu feras un heureux
11:12 | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : l'auberge des deux renards, kaamelott, alexandre astier
lundi, 12 novembre 2012
Adultes, Enfants et Jeux Vidéo Violents
Quand l'éducation des parents n'est pas en cause, c'est leur naïveté qui est à mettre au banc des accusés. Un enfant, quel qu'il soit, aura toujours la tentation d'atteindre ce qui n'est pas fait pour lui et qu'on a pourtant eu la sagesse de lui refuser.
Ce n'est plus un secret pour personne. Les jeux vidéo sont devenus au fil du temps le divertissement N°1 dans le monde devant la musique et le cinéma. Si on peut louer aujourd'hui la démocratisation de cette activité ludique, on a dans le même temps mis en évidence plusieurs effets secondaires beaucoup moins réjouissants. Parmi eux, l'âge de plus en plus jeune des joueurs ayant accès aux titres les plus violents.
Il existe un organisme officiel, le PEGI, dont le rôle est de classer les jeux selon la sensibilité de leur contenu et par extension de prescrire l'âge des joueurs pour lesquels il sont recommandés. Si cette initiative a son importance, elle est, hélas, loin de suffire pour empêcher les plus jeunes d'être prématurément exposés aux images les plus choquantes.
Dès l'enfance, un être humain ressent le besoin d'expérimenter tout ce qui passe à sa portée, surtout ce qui lui est défendu. Il est tout aussi naturel que nous, adultes, soyons présents, conscients et actifs face à cet éveil qui peut mener à bien des égarements. La vie de nos enfants est un vaste champ de possibilités, mystérieux, séduisant, mais qui peut rapidement se changer en champ de mines si nous ne faisons pas preuve d'assez de vigilance. A nous donc de tracer les repères capables de les orienter convenablement, car personne, surtout pas eux, n'est en capacité de le faire à notre place.
Cette attention que nous devons porter instinctivement est d'autant plus indispensable qu'en dehors du cadre familial, il est difficile voire impossible de s'assurer que nos petits anges ne soient pas abusivement exposés à des contenus agressifs. On le sait, une simple connexion Internet et un cercle d'amis débrouillards et influents suffisent à briser bon nombre de barrières de sécurité mises en place. Il n'en faut pas moins persévérer dans la prévention. Nous ne pouvons pas tout contrôler, certes, alors raison de plus de faire ce qui est en notre pouvoir. En plus du dialogue, il existe des applications et des moyens techniques (contrôle parental, codes d'accès) alors utilisons-les.
Les arguments qui reviennent le plus pour alléger la gravité de ce constat sont la banalisation de la violence dans les médias et que peu importe l'âge du moment qu'on a la maturité. La violence est omniprésente, c'est un fait, mais dans ce cas, ne jetons pas de l'huile sur le feu. Si nous en sommes là aujourd'hui, c'est parce que d'autres avant nous se sont ainsi voilés la face. La maturité, quant à elle, est tout sauf un gadget à la mode dispo au supermarché du coin. En oubliant cela, on oublie que l'éducation a son mot à dire et qu'elle a un rôle primordial à jouer dans cette problématique. La solidité d'un esprit se construit progressivement, en l'ouvrant petit à petit au monde qui l'entoure, certainement pas en le bombardant aveuglément.
Loin de vouloir relancer le débat jeux vidéo = violence, je viens rappeler, par cet article, qu'au même titre que le cinéma, avec lequel il partage nombre d'affinités, le jeu vidéo doit faire l'objet d'une surveillance pour le bien-être de tous. Aucun parent sensé ne laisserait ses chérubins devant un film gore ou pornographique. Il en va de même des jeux à caractère violent. C'est une question de responsabilisation. En tant qu'adultes, nous avons le devoir de préserver autant que faire ce peut l'innocence de nos enfants. Car de l'issue de ce combat quotidien dépendra un enjeu de taille : leur future maturité, celle-là même que les plus jeunes se vantent de posséder faute d'être convenablement encadrés.
Il y a un âge pour chaque chose, de même que chacun doit rester à sa place. Si nous, adultes, ne respectons pas ces principes, nous nous rendons ni plus ni moins coupables d'un crime. A bon entendeur...
Afrika, un jeu de safari photo contemplatif, véritable ode à la nature. Cette oeuvre a été réalisée en étroite collaboration avec le National Geographic, un gage supplémentaire de qualité. Une exclu PS3, malheureusement introuvable chez nous sauf en import et seulement en langue japonaise. Un comble d'autant que le personnage est français. De tels jeux souffrent évidemment de l'assommant marketing des grosses productions qui monopolisent l'attention du public et orientent la demande.
C'est le moment ou jamais
de passer à la postérité
Laisse un com qui détend qui détone
Mon blog s'en portera mieux
Et tu feras un heureux
dimanche, 11 novembre 2012
"On en a Gros"... du très Gros même !
J'ai le plaisir de vous annoncer ma collaboration sur un nouveau projet avec mon meilleur ami Hervé Smagghe. Il s'agit d'une nouvelle série de Fanfics sur l'univers de Kaamelott (pour changer !!!).
Mais quand je dis Fanfic, c'est peut-être un peu réducteur tant le sujet est ambitieux et complémentaire à la série. Vous me direz : "Oui, c'est pas nouveau ! On l'a déjà entendu plein de fois, ça !". Et pourtant, ce coup-ci, la surprise sera de taille, les révélations nombreuses et le plaisir de les découvrir tout aussi conséquent.
Nous avons finalisé le trailer vidéo que nous avons mis en ligne sur le blog : Merlin ou le Mensonge d'un Destin et YouTube : Merlin ou le Mensonge d'un Destin. Nous avons également écrit les synopsis des 18 épisodes qui consitueront la série.
Nous avons terminé l'écriture du premier épisode. Nous prévoyons de publier chaque épisode en plusieurs parties.
En attendant de vous en dire plus, merci de votre fidélité et bon séjour sur d'Art & d'Amour !
Bientôt, Merlin sera lui aussi un héros...
T’as aimé…ou pas
T’as tout lu, tout vu, tout entendu…ou pas
Peu importe, post un com et like la page pour dire que tu existes car ton avis est important pour moi, mais aussi pour le futur de ce blog, un gros merci d’avance !
21:27 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : on en a gros, merlin, kaamelott, arthur, excalibur, fanfic, fanfic merlin, fanfic kaamelott
samedi, 10 novembre 2012
Assassin's Creed III [Jeux Vidéo/Critiques]
Après un premier épisode novateur, mais très perfectible, mettant en scène Althaïr, un épisode II grandiose, suivi de deux opus consacrés toujours au personnage d'Ezio Auditore, Ubisoft nous livre enfin le très attendu IIIème chapitre de sa célèbre saga dans laquelle Assassins et Templiers s'affrontent pour le destin de l'Humanité. Sans oublier l'ombre de Divinités puissantes qui semblent manipuler Desmond afin d'accomplir leurs propres desseins.
C'est l'Histoire d'un Mec...
Une intrigue de plus en plus dense et complexe. Le résumé en début de partie n'est donc pas de trop pour nous remettre l'essentiel de l'histoire dans la tête. Les premières heures de jeu surprennent par la nature du personnage incarné. Une surprise qui prend des allures de cadeau empoisonné quand on pense à tout ce qui nous a été promis. On piaffe alors d'impatience et on ronge son frein à l'idée d'endosser le rôle de Connor Kenway l'amérindien, le nouvel assassin de cet (ultime ?) épisode. Du coup si on est familier de la série, on sera plus que tenté de rusher cette consistante mise en bouche qui offrira tout de même une rencontre déterminante ainsi qu'une chute inattendue.
Mais l'éditeur a clairement décidé de prendre le temps de nous présenter l'univers et son héros, puisque nous verrons et incarnerons Connor à plusieurs stades de sa vie. Libre au joueur de s'éterniser, mais tant qu'il ne sera pas adulte et proclamé assassin, Connor sera évidemment beaucoup plus limité dans ses possibilités.
Malheureusement, les développeurs n'ont pas été très inspirés pour la mise en scène et la narration. Outre des cinématiques fades, dépourvues d'émotions, l'histoire s'attarde sur des détails qui peinent à nous intéresser et quand vient les instants les plus emblématiques, clichés et ellipses viennent supprimer tout le sel de l'aventure. Une totale incompréhension étant donné la qualité passée à ce niveau. Si les origines de Connor en elles-mêmes sont originales, elles sont desservies par des explications pour le moins succinctes et confuses. Et il en va de même pour la structure générale du jeu et de ses mécanismes. A ce niveau, on est loin du II qui parvenait brillamment à intégrer mission principale et activités annexes sans jamais perdre le joueur en cours de route. En voulant voir plus grand, le studio a manifestement ouvert des failles auxquelles on ne s'attendait pas : manque flagrant d'explications, bugs en tous genres et incohérences. Rassurez-vous, elles ne vous empêcheront pas d'apprécier son travail de titan qui flattera progressivement votre rétine et rentabilisera votre investissement. Mais une fois n'est pas coutume, il faudra être patient puisque ce n'est qu'à partir de la séquence 9 (oui, seulement) que l'intrigue gagne enfin en intensité et les dialogues en saveur.
Into The Wild...
Ce n'est donc véritablement qu'au bout d'une dizaine d'heures qu'on commence tout juste à mesurer l'étendue du soft en matière de contenu et d'immersion. Mais à ce moment-là, c'est la claque assurée. Et ce prologue/tutoriel qui nous avait semblé si contraignant et interminable est alors relégué au second plan. Face au gigantisme de la zone de jeu, du nombre de missions et d'activités annexes, on comprend alors qu'Ubisoft gardait en réserve sa botte secrète. Habitué à accoucher de grandioses reconstitutions, le studio signe ici son chef-d'oeuvre. A la manière d'un AC II qui avait mis la barre très haut pour se démarquer de la redondance de son prédécesseur, AC III repousse encore plus loin les limites et pose un nouveau jalon dans l'ère des jeux en monde ouvert. Découpé en plusieurs zones d'un intérêt égal, le monde de Connor est doté d'une autonomie exemplaire. Si l'assassin nous bluffe complètement par sa faculté à se mouvoir quelque soit le terrain et les circonstances, les animations des PNJ ne sont clairement pas en reste. Des tonnes et des tonnes de détails que seuls les joueurs les plus patients, curieux et contemplatifs auront plaisir à dénicher. Mais l'exploration étant plus que jamais au coeur du gameplay, tout est fait pour que vous ne passiez pas à côté de ces innombrables enjolivures qui forcent le respect et l'admiration.
On pourra ainsi allègrement grimper sur les ailes d'un moulin à vent, visiter le monumental chantier d'un navire en construction dans le port d'un Boston, vaste et criant de vérité ou encore escalader un phare, la nuit, sous une pluie battante. A ce propos, on pensait que Red Dead Redemption détenait la palme question rendu météo, mais AC III parvient l'exploit de rivaliser grâce à des effets tout aussi convaincants. C'est bien simple, lorsque les premières gouttent de pluie se mettent à tomber, on sourit d'avance à l'idée de voir l'environnement bénéficier d'une magnifique ambiance orageuse.
...and The Darkness
Les raccourcis ne seront donc pas de trop pour se rendre où l'on veut. La bonne idée, c'est que cette fois les tunnels des villes devront faire eux-même l'objet d'une exploration en temps réel afin de débloquer les différents accès rapides. Une phase fort sympathique puisqu'elle intègre une variété d'actions appréciables (orientation, énigmes, combat).
Qui va à la Chasse...
En ce qui concerne le comportement de la faune, le chef-d'oeuvre de Rockstar conserve la première place. On sent un aspect résolument plus arcade dans le titre d'Ubisoft dû à l'intégration discutable de QTE pour terrasser les plus grands prédateurs qui n'oseront par ailleurs jamais s'attaquer à vous, pourvu que vous soyez à cheval. Du coup on craint de moins en moins les effets d'une attaque surprise même quand elle vient d'un puma embusqué, ce qui ajoute encore au côté invincible de l'assassin que d'aucuns regretteront. On regrette surtout que les animaux rencontrés soient systématiquement mis en surbrillance, annulant l'intérêt de les pister, qui était en soi une bonne idée. On pourra cependant se consoler en les appâtant pour mieux les prendre au piège de nos collets. La déception la plus grande vient finalement de l'arc. Si vous comptiez démontrer toute votre dextérité en exécutant des tirs longue portée avec une précision chirurgicale, vous serez au regret d'apprendre que cette arme n'est utilisable qu'à une certaine distance et qu'en plus de cela, le ciblage automatique rendra la tache désespérément assistée. Une occasion ratée. Les archers dans l'âme se consoleront avec Skyrim et ses finish moves au ralenti du plus bel effet.
Le gibier n'est pas une denrée rare, loin de là, plusieurs espèces sillonnant l'immense et sauvage Frontière. Chacune vous rapportera de quoi alimenter votre empire commercial ou développer votre artisanat. Car si AC III n'est pas à proprement un RPG, c'est l'épisode qui se rapproche le plus du genre tant il regorge d'activités et d'interactions. Un contenu gargantuesque dans lequel on vient facilement à se noyer faute d'explications opportunes dans certains cas. Le fait est que le jeu ne se dévoile vraiment que progressivement au joueur, lui garantissant toujours de nouvelles choses à faire pour alimenter son intérêt. Certaines déjà connues des amateurs, d'autres venant enrichir un gameplay qui n'en finit pas de nous étonner par sa diversité. On peut d'ailleurs constater avec satisfaction que ce troisième opus est clairement la synthèse de toute la série. Un bon point à signaler.
Le Million !
Dans les bémols, on peut aussi pointer du doigt un défaut récurrent de la série : gagner de l'argent est toujours aussi facile. Les sources de richesse ne manquent pas. Que ce soit en commerçant, en déverrouillant des coffres, en attaquant des convois, en lançant ses recrues en mission ou bien encore en exploitant votre domaine, vous ne serez jamais à court de monnaie sonnante et trébuchante. Il aurait été judicieux, par exemple, de devoir réparer, entre deux batailles, les avaries de l'Aquila, notre navire et de recruter de nouveaux membres d'équipage afin de remplacer les matelots morts au combat. Des coûts importants qui auraient mieux équilibrer l'aspect économique du jeu tout en renforçant le background. En compensation, le joueur prendra beaucoup de plaisir à étendre son domaine et gérer ses convois de marchandises. Il verra même naître au fil du temps un véritable village animé par la vie courante de ses habitants, plutôt attachants, dont les tâches quotidiennes seront même exploitées dans le cadre d'un mini-jeu. Cette communauté grandissante donnera d'ailleurs lieu à plusieurs quêtes annexes destinées à enrichir l'artisanat ainsi que le background du jeu plutôt que d'offrir un challenge digne de ce nom.
Touché, Coulé !
Cela dit, puisqu'on aborde les batailles navales, c'est l'occasion ou jamais de saluer cette remarquable innovation. La maîtrise technique de ces séquences est hallucinante d'autant plus que la jouabilité est d'une simplicité enfantine. Connor est au gouvernail et peut virer de bord à tout moment tout en usant d'une batterie de canons de chaque côté. Le résultat à l'écran est spectaculaire. C'est immersif au possible tout en étant d'une fluidité exemplaire. Ce qui paraissait à première vue comme un gadget secondaire se révèle être au final l'une des plus grandes réussites du jeu.
Les superbes animations sont dues à Jonathan Cooper récupéré par la suite par Naughty Dog (la saga Uncharted, The Last of Us)
FIGHT !
On ne peut parler décemment d'un Assassin's Creed sans aborder l'aspect du combat. Les affrontements seront bien évidemment nombreux et violents à souhait puisque vous aurez maintes fois l'occasion de vous dresser face à l'oppression de l'Empire Britannique. Le système a été revu pour s'aligner sur la référence en la matière depuis quelques années : le Batman de Rocksteady. Un bouton pour attaquer et un bouton pour parer, puis enchaîner de fatales contre-attaques. On peut faire difficilement plus simple. Mais là où AC III marque sa différence c'est dans le choix du coup de grâce qui varie selon l'arme équipée et qui donne lieu à de sympathiques animations. On se prend alors facilement pour Scorpion de Mortal Kombat avec la dague à corde ou Legolas lorsqu'on décoche une flèche à bout portant. Dans le même esprit, si Connor est placé entre deux ennemis lors d'une contre-attaque, une brève, mais plaisante cinématique en plan rapproché se déclenchera. On trucide ainsi en un éclair un peloton de fantassins dont certains se montreront parfois plus retors, bien heureusement. En ville, vos crimes vous vaudront régulièrement d'être traqué comme l'ennemi public numéro un et il faudra alors rivaliser d'astuce pour vous débarrasser de vos nombreux poursuivants et de leur feu nourri. Les affiches de prime font leur grand retour de même que les colporteurs, mais s'ajoutent à cela une nouvelle possibilité de recouvrer l'anonymat. En effet, les imprimeries vous permettront de réaliser vos propres affiches et ainsi de détourner la rumeur à votre avantage. Malin !
En tant qu'amérindien et assassin, Connor est naturellement expert avec des armes comme le tomahawk, l'arc et les lames secrètes. Il pourra aussi compter sur de nouveaux instruments de mort comme la dague à corde qui harponne l'ennemi et lui offre une pendaison en bonne et due forme pour peu que vous la lanciez depuis un arbre. Il bénéficiera aussi d'armes à feu d'époque telles que le pistolet et le mousquet qu'il devra recharger obligatoirement entre deux tirs à l'instar de ses adversaires.
IS THE END OF THE WORLD ?
Mais qu'en est-il de Desmond ? me direz-vous. Et bien, il est là et bien là. Et le voir évoluer dans différents environnements modernes au cours de phases d'action/plateforme pêchues fait plaisir à voir. La fin n'en sera sans doute que plus décevante pour beaucoup. A trop vouloir étoffer son scénario pour faire fructifier sa saga, Ubisoft nous laisse très dubitatif sur la finalité de tout cela. La saga est visiblement loin d'être terminée. Il faut pourtant savoir mettre un point final à une oeuvre pour la clore en beauté. Chose, que les studios, trop avides, ne sont, visiblement, plus capables de faire.
En conclusion, malgré des soucis techniques récurrents, Assassin's Creed III est un excellent monde ouvert, doté d'une aire de jeu et d'un gameplay riches et passionnants. On ne dira pas la même chose du scénario et du cadre historique beaucoup trop inégaux en terme d'intérêt pour remporter l'adhésion, d'autant que l'épisode se termine un peu trop en queue de poisson au vu de ce qu'on pouvait en attendre.
C'est le moment ou jamais
de passer à la postérité
Laisse un com qui détend qui détone
Mon blog s'en portera mieux
Et tu feras un heureux
09:10 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : assassin's creed, assassin's creed 3, connor kenway, ubisoft, jeu vidéo, révolution américaine, amérindien
vendredi, 09 novembre 2012
MatriX-Men [Fanfic Crossover]
Jenna courait à perdre haleine, désespérée, terrifiée. En réalité, tout cela n’était qu’en partie vrai étant donné que sa respiration et tout ce qui était lié à son corps n’étaient qu’une projection virtuelle. Comme tout ce qui l’entourait d’ailleurs. Son sentiment de mort imminente, en revanche, était tout sauf illusoire.
« Si on meurt dans la matrice, on meurt aussi pour de vrai » se répétait-elle malgré elle.
Un moyen comme un autre de développer l’instinct de survie surtout lorsqu’on a deux agents hargneux aux trousses. « J’suis qu’une ado ! J’ai même pas 18 ans ! » Une balle siffla et ricocha contre le mur. Prendre cette ruelle n’était peut-être pas une bonne idée. Sauf si elle était complètement déserte. Elle pria pour que ce fut le cas. Elle ne connaissait que trop bien le pouvoir des agents de phagocyter n’importe quelle pilule bleue. C’est comme cela qu’on appelait affectueusement tous ceux qui n’avaient pas atteint le stade d’éveillé. Ce qu’elle était récemment devenue par l’entremise d’un certain Neo. Depuis les choses s’étaient gâtées pour elle. Heureusement il y avait des compensations.
Un clochard jusqu’alors recroquevillé derrière une poubelle se redressa brusquement porteur d’un smoking et d’un brushing impeccables. L’agent contempla la bouteille dans sa main d’un air perplexe avant de la lancer brusquement sur sa cible. Il fit feu juste après. Jenna sentit le danger poindre à vitesse grand V. Pour autant elle se sentit capable de l’affronter. Elle sauta et colla un talon contre chaque paroi dans un admirable grand écart facial. Le projectile improvisé destiné à l’étourdir fila entre ses jambes avant de frôler la tête de son deuxième poursuivant qui l’esquiva d’une simple torsion du cou avant de faire feu lui aussi. Le temps fut alors comme ralenti. Jenna effectua un salto inversé avant de plonger et de bouler au sol, esquivant ainsi les balles. Sans temps mort, elle fonça tête baissée vers un affrontement inévitable avec le pire ennemi de la résistance humaine.
Non, elle était plus qu’une ado. Surtout depuis sa rencontre fatidique avec Neo et son entraînement accéléré. Neo, le maître d’œuvre de la Révolte contre les Machines et leurs émissaires dans la Matrice. Les redoutables et mortels Agents.
Une main sur son oreillette, l’ex-clochard écouta de brèves instructions de l’Agent Smith, le super Agent, leur leader et accessoirement la Némesis de Neo. Elle ne vit pas son adversaire arriver sur elle. Il franchit la distance qui les séparait d’un seul bond la projetant à l’autre bout de la ruelle. Une aubaine pour l’autre agent qui la renvoya d’un coup de pied comme une balle humaine. Jenna percuta violemment le sol.
Dans l’hovercraft « L’Icare », clouée sur un siège, son crâne encore rasé vissé à la Matrice, la vraie Jenna, yeux clos, cracha une giclée de sang, alertant les membres de l’équipage alentours sur sa délicate situation.
Jenna se redressa, le regard embrumé par la violence du choc. « Ce n’est pas réel ! C’est comme un rêve lucide ! Je peux tout contrôler. Je peux tout c… » Une pluie de coups de poing s’abattit sur elle. Elle rebondit contre un mur avant de s’écrouler comme une marionnette privée de fils. « Merci Neo, je te revaudrai ça dans une autre vie ! » Une voix grave jaillie de nulle part fit avorter le coup de grâce :
- Dis-donc, le costard, t’as pas honte de t’en prendre à une gamine ?
Le visiteur sauta du toit et atterrit avec un aplomb exemplaire face à l’Agent.
Il avait le cheveu ébouriffé et le regard enfiévré du type qui a bu, mais qui même sans ça est peu enclin à causer. Mais il avait aussi et surtout les rouflaquettes impeccables de même que l’éternel cigare vissé au coin des lèvres. Logan jeta un regard à Jenna avant de sortir ses griffes dans un froissement métallique de mauvais augure.
- T’as assez de couilles pour…
Logan reçut un bombardement de parpaings – ou d’enclumes au choix – dans la figure et le torse. Il chancela et recula sous l’assaut avant de scruter son adversaire. Non, le costard avait juste utilisé ses poings et ses pieds. Il comprit qu’il avait affaire à une pointure.
- D’accord, fit-il en serrant les dents.
La seconde d’après, ses griffes entraient en action. Il eut beau lui faire un rasage de près sur toute la surface, la logique resta sourde à sa performance.
- Merde, c’est un mutant !
- Non, c’est pire !
Jenna avait retrouvé ses esprits. Elle emprisonna l’Agent d’un ciseau. L’occasion idéale pour Logan :
- Evite celle-là !
Il le décapita sauvagement. Mais à sa grande stupeur, le corps entier disparut dans une étrange série d’éclairs avant de réapparaître sous la forme d’un cadavre de clochard…sans tête.
Logan leva un sourcil :
- D’habitude ça fait pas ça !
Il dressa ses griffes à temps pour repousser une série de 9 mm dans un concert d’étincelles.
Il se tourna pour faire face à l’autre Agent venant à leur rencontre, mais Jenna l’entraîna avec elle vers l’autre bout de la ruelle :
- Laisse tomber. Ces mecs repoussent plus vite que mon acné !
- Si c’est pas des mutants, c’est quoi ?
- Ce serait trop long à t’expliquer ! Mais tes griffes, j’avoue, c’est très pratique. J’y aurais jamais pensé. Avec un pouvoir pareil, tu peux pas être une pilule bleue ! Hein ? T’es sorti depuis quand de la Matrice ? T’as rencontré Neo ?
Logan grogna.
- Dis, c’est normal si je pige rien à ton charabia ?
Jenna sourit comme pour couper court à de trop longues explications :
- Je m'appelle Jenna. Et toi ?
- Logan.
Ils finirent par déboucher en pleine rue. Jenna les orienta vers une zone moins peuplée à cette heure.
- Faut éviter les lieux publiques !
- Pourquoi ? T’es une geek ?
Jenna s’amusa de l’ignorance du baroudeur bourru :
- Disons, pour que tu comprennes, qu’ils peuvent se téléporter.
- Ouais bah c’est un truc de mutant.
Jenna sourit avant de prendre le temps de réfléchir. « Peut-être que tous ces fameux mutants étaient des éveillés qui s’ignoraient ! » Un bon point pour la résistance. La jeune fille se félicita de cette nouvelle rencontre. Neo serait fier d’elle !
Encouragée par cette pensée, une idée lui traversa l'esprit :
- On va aller chez Josepha !
- C'est qui ?
- C'est un bar dans un quartier défavorisé.
- T'avais dit pas de lieux publiques.
- C'est pas un lieu publique, c'est un refuge. Et justement, on a besoin de se poser. Je vais appeler une amie.
- T'as pas de portable ?
- J'ai plus confiance dans ces machins depuis un moment.
Après avoir emprunté une enfilade de rues à l'écart de la foule, le tandem parvint à destination.
Enseigne incomplète, vitres sales et murs bardés d'affiches et de tags : la devanture du bar affichait clairement sa nature de refuge pour marginaux. Logan haussa un sourcil de perplexité avant de renifler bruyamment comme un animal.
- Je suis pas difficile, mais là... J'ai peur de perdre un orteil si j'y mets un pied. Et comme les miens repoussent pas. S'ils servent à boire, j'ose pas imaginer le goût de la bière.
- Entre au lieu de jouer les saintes nitouches.
Logan regarda Jenna pousser la porte et entrer. La gamine avait de l'aplomb pour son âge signe qu'elle avait dû en baver. Il ne pouvait qu'apprécier. Il la suivit.
La salle était déserte. Personne pour les accueillir.
Logan passa un index sur une table aussi crasseuse que le sol.
- Y a quelqu'un ?
- Te fatigue pas. Y a jamais personne à cette heure.
Logan jaugea l'épaisseur de la poussière qui recouvrait le mobilier dans son ensemble.
- A cette heure seulement ?
Jenna ne lui répondit pas. Elle avait disparu derrière un rideau.
Logan chercha quelque chose à boire, sans succès. Ce taudis avait l'air plus factice qu'un décor de cinéma. Il haussa les épaules et s'assit sur une chaise...qui ne résista pas à son poids et l'envoya durement sur le postérieur.
- C'est une blague ou quoi ?
Il se releva en grognant.
- Bon, ça suffit les conneries ! J'en ai plein le cul de cet endroit ! Je vais attendre dev...
Un vrombissement de moteur l'interrompit. D'instinct, il sortit les griffes et se coula contre la porte. Une moto venait de se garer à proximité. Une silhouette tout de noir vêtue s'approcha. Elle portait des lunettes boires. Mauvais signe.
- Eh, gamine, on a de la visite !
Encore une fois, Logan n'eut pas de réponse.
Lorsque la porte s'ouvrit il porta un coup puissant qui aurait transpercé un boeuf. Mais ses griffes ne firent que lacérer le vide. Le visiteur avait boulé au sol. Logan enchaîna avec une autre attaque aussi mortelle, mais ses griffes se fichèrent dans le parquet soulevant un nuage de poussière. La seconde d'après il sentit l'extrémité d'un pistolet contre ses testicules.
- Range tes ongles si tu veux encore chanter comme un ténor sous la douche.
Un genou au sol, la femme toisait son adversaire sans la moindre once d'étonnement. A croire qu'elle en avait déjà vu d'autres. Ce qui était bien évidemment le cas.
Jenna choisit ce moment pour réapparaître.
- Trinity ? Tu as fait super vite !
- J'étais pas loin. Qui c'est celui-là ? Encore un clochard dont tu as eu pitié.
- Eh, la Catwoman du pauvre, si tu me traites encore de clodo, je te fais un joli décolleté.
Trintiy l'ignora superbement. Avec ses lunettes, elle avait des allures d'insecte. Logan aurait penché pour une mante religieuse. Elle ne releva pas sa provocation :
- A en croire ses...aptitudes, c'est pas une pilule bleue, mais rappelle-toi que cela ne veut parfois rien dire. Néo et moi, on en sait quelque chose. Ce taré de Cypher a bien failli avoir notre peau.
- T'inquiète, il est clean. Il m'a filé un coup de main tout à l'heure ou plutôt un coup de griffes. Je serais peut-être pas là en train de te parler s'il était pas intervenu.
Logan s'autorisa à sourire.
- Je veux bien accepter tes excuses.
Trinity se redressa tout en continuant à le menacer.
- Il faut qu'on discute, mais pas devant lui.
Profitant d'une seconde d'inattention de sa part, Logan la désarma d'un coup de griffe, la poussa contre le comptoir d'un coup de pied avant de bondir sur le zinc les lames toutes prêtes à l'égorger :
- J'aime pas tes façons, ma belle !
Ce qui mit Jenna dans tous ses états :
- Arrête, tu fais n'importe quoi ! On est tous dans le même camp !
Une fenêtre explosa, vomissant un Agent sur le sol de la salle qui se releva en un éclair, l'arme au poing, l'autre main sur son inséparable oreillette.
- J'ai retrouvé la jeune fille. Non, elle n'est pas seule. Mlle...
- Je t'interdis de prononcer mon vrai nom !
Au comble de l'exaspération, Trinity logea un genou dans l'entrejambe de Logan avant de le repousser d'un coup de pied. Assez violemment pour qu'il passe à travers l'autre fenêtre du bar qui vu son état ne demandait de toutes façon qu'a être remplacée. Trinity se plaça ensuite de façon protectrice devant Jenna tout en faisant vaillamment face à l'Agent :
- Tu ferais mieux d'appeler des renforts. Je suis vraiment pas d'humeur.
L'Agent sourit :
- Ils sont déjà là.
Logan ne prit même pas la peine d'essuyer le sang de ses blessures. Sa cicatrisation naturelle se chargea de préserver son charme naturel. Mais alors qu'il se relevait en grimaçant plus de rage que de douleur, il eut la vision de deux souliers d'homme juste devant lui, parfaitement noirs et lustrés.
- Monsieur Logan. Ravi de vous rencontrer enfin. J'ai beaucoup entendu parler de vous.
L'Agent Smith esquissa un sourire qui fit passer son exemplaire courtoisie pour une condamnation à mort.
Logan lui fit face.
- T'es qui, toi ?
Le bras de l'Agent se détendit à la vitesse d'un serpent. Il saisit Logan à la gorge et le souleva de terre avant de l'envoyer éclater l'extrémité d'un réverbère. Logan se reçut sur le ventre. Il sentit ses côtes cassées se restructurer instantanément. Habitué au phénomène, il n'y prêta guère plus d'attention.
- Ok, t'es super costard.
Smith l'étudia comme un vulgaire insecte.
- Croyez-vous avoir une chance contre moi, Monsieur Logan ?
L'intéressé fit jaillir ses griffes.
- Pas une, six !
Puis il se rua sur son adversaire en hurlant.
A l'intérieur du bar, le combat faisait rage également. En fâcheuse posture malgré sa hargne et son expérience, Trinity hurla :
- Jenna, sur les toits, je te rejoins !
Elle n'avait pas plus tôt dit ça que l'Agent la projetait à travers la porte. Une seconde plus tard, c'est Logan qui empruntait malgré lui ce passage improvisé.
Il cracha une giclée de sang :
- Eh, j'aime pas jouer les balles de flipper !
L'autre Agent l'ignora et commença à se diriger vers les escaliers, par là même où Jenna venait de s'enfuir.
Smith s'empressa d'accueillir la compagne de Neo.
- Ravi de vous revoir. Cela faisait longtemps, Mlle...
D'un simple coup de pied la jeune femme fit basculer le lampadaire qui s'écrasa contre la façade du bar.
Smith reçut un message de l'Agent dans son oreillette et il comprit ce qu'elle s'apprêtait à faire. Alors qu'un combat mortel semblait inévitable, il disparut sans crier gare.
Trinity en profita pour se ruer sur sa moto et démarrer dans la foulée. Elle fit crisser le pneu arrière dans un nuage de fumée avant de s'élancer. La moto roula sur le lampadaire et ce pont improvisé lui permit de bondir au-dessus des toits.
L'Agent avait presque rejoint Jenna lorsqu'il fut écrasé par une moto lancée à pleine vitesse.
Trinity atterrit superbement juste devant la jeune fille.
- Tout va bien ?
- Oui, tu es arrivée à temps. Sympa, le coup de la moto.
Trinity esquissa un sourire.
- Je pense que je m'en resservirais.
Ne se sentant pas encore hors de danger, Trinity entraîna Jenna dans sa course.
- Mais Logan ?
- Oublie-le. C'est peut-être un éveillé, mais il nous ralentirait.
Jenna n'était évidemment pas de cet avis, mais elle ne protesta pas davantage.
Comme elle voyait que cette décision l'avait peinée, Trinity eut une idée pour la distraire :
- Fais-moi voir ce que tu vaux en saut en longueur !
Les deux amies se lancèrent alors dans un concours hors du commun. Bondissant de toit en toit, elles rivalisèrent d'efforts. Trinity était bien sûr plus à son avantage, mais Jenna ne démérita nullement et elle reçut de vives félicitations quant à ses progrès en la matière.
Le soir commençait à tomber. Les deux femmes pouvaient se laisser convaincre d'avoir échappé à leurs poursuivants. Du moins pour un temps. Jenna connaissait les toits de la ville par coeur et elle se faisait un plaisir de montrer à Trinity des chemins et des planques connues d'elle seule. Elle voulait que Trinity soit fière d'elle et Trinity ne la déçut pas.
Un peu plus loin, devant eux, une vieille dame assise sur un banc donnait à manger aux pigeons.
Sa silhouette était familière à Jenna. Son visage s'éclaira aussitôt lorsqu'elle la reconnut.
- C'est Josepha !
- Une amie à toi ?
- Oui.
Jenna allait s'élancer joyeusement vers la vieille dame qui venait de se lever pour sceller leurs retrouvailles, mais Trinity la retint pas l'épaule.
- Ce n'est pas ton amie.
Le visage débonnaire de Josepha se tordit atrocement et son corps disparut au profit de celui d'un Agent. Le plus dangereux de la Matrice.
Jenna paniqua :
- C'est Smith, il nous a retrouvé !
- A nous deux on peut l'avoir !
Trinity apprécia de voir autant d'assurance et de confiance en Jenna. Mais pour autant elle n'était pas dupe. Une seule personne avait pu vaincre l'agent Smith : Néo. Parce que c'était l'Elu. Et depuis, les Machines avaient procédé à quelques mises à jour afin de rendre son programme de défense encore plus performant.
Smith bondit sur elles sans crier gare.
Trinity se prépara au choc lorsque de puissantes lumières les aveuglèrent. Quelque chose de massif percuta Smith de plein fouet l'envoyant se perdre dans la nuit.
Une sorte d'avion furtif venait d'apparaître. Une ouverture se dessina dans le flanc de l'appareil et Logan les invita à monter à bord :
- Discutez pas !
Jenna fut trop heureuse de retrouver le mutant pour hésiter. Voyant Trinity faire la fine bouche, il ajouta :
- Allez, sans rancune !
Le Professeur Xavier était à bord, lui aussi. Ayant capté de bien étranges signaux alors qu'il usait du Cérébro, il n'eut qu'à ancrer son esprit sur le mutant en maraude pour comprendre la gravité des évènements.
- J'avoue, avec une certaine angoisse, que leurs pouvoirs me dépassent. Ce ne sont pas des mutants.
- Techniquement, vous non plus, leur apprit Jenna, quelque peu ravie de jouer les enseignantes à son âge. En fait les mutants n'existent pas. En fait, rien n'est réel.
- Donc tout est permis, fit Wolverine sceptique à souhait, tout en dardant une lame telle une pointe d'Assassin.
Blasée, Trinity soupira.
- J'aimerais tout vous expliquer, mais nous manquons de temps.
Xavier lui adressa ce sourire apaisant dont il avait le secret.
- En savoir beaucoup en un minimum de temps, ma chère, c'est ma spécialité.
Il apposa ses mains sur les tempes de la guerrière et la vérité fut comme un ouragan dans son esprit. Rompant brutalement le contact, il se recula dans sa chaise roulante.
- Mon dieu, tout ceci n'est donc qu'un rêve et la réalité un tel cauchemar !
Pour Xavier le choc était terrible. Il fit un effort visible pour reprendre la parole :
- Je ne sais pas ce qui est le pire. Savoir que la guerre humains-mutants n'a pour ainsi dire jamais eu lieu et que ce conflit n'a aucune raison d'être, qu'il n'est qu'une chimère comme tout le reste ou savoir que le vrai combat a toujours été ailleurs, hors de notre portée.
Il contempla ses jambes, inertes depuis des années.
- Je devrais me réjouir de savoir que mon infirmité n'est qu'une illusion. Pourtant, je n'y parviens pas.
- C'est possible d'être au parfum ? fit Logan avec sa courtoisie légendaire.
Xavier, encore tout retourné de ce qu'il avait vu, s'approcha de lui et tendit ses mains. Logan les repoussa vivement en émettant un son de gorge.
- Je me contenterais d'un résumé oral.
Xavier possédait l'art de bien choisir bien ses mots et il en fit la démonstration une fois de plus. Pour autant, les révélations qu'il fit furent comme une chape de plomb sur les épaules de son protégé.
Logan passa une main dans sa crinière avec une grimace abominable :
- Merde, alors, on est vraiment tous chauves ?
Xavier parvint à sourire :
- Personnellement, je crois que je m'en remettrai.
à suivre...
C'est le moment ou jamais
de passer à la postérité
Laisse un com qui détend qui détone
Mon blog s'en portera mieux
Et tu feras un heureux
19:52 | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : matrix, x-men, neo, agent smith, trinity, morpheus, wolverine, comics, s-f, futuriste, anticipation, fantastique, fanfic, crossover, super-héros, monde virtuel, cyber
jeudi, 08 novembre 2012
L'Odyssée de Mercedes [Fanfic Dragon's Dogma]
L’issue de son combat contre Julien lui laissait un goût amer dans la bouche. Elle dévisagea l’Insurgé. Sa présence et sa compassion ne faisaient qu’accentuer son sentiment de faiblesse. Elle le laissa quitter les lieux sans rien dire et baissa la tête, la rapière vierge de sang tremblant dans sa main d’habitude si ferme.
Mercedes porta ses grands yeux bleus vers l’océan, donnant l’illusion fugitive qu’ils en étaient le reflet fidèle. Elle avait promis à l’Insurgé de revenir à Gransys. Elle en avait fait le serment. Mais elle devait d’abord retrouver son assurance perdue. L’Insurgé avait eu sa Rédemption, à elle, désormais, d’obtenir la sienne.
- C’est de la folie, Capitaine. Le Kraken va tous nous emporter !
Le regard de la guerrière se durcit.
- Il ne le fera pas. J’ai quelque chose à lui offrir.
- Votre vie ? hasarda le soldat.
Les mâchoires de la femme se crispèrent. Ses sourcils fondirent sur ses paupières comme deux oiseaux de proie :
- Mieux que cela !
Le navire quitta la côte avec à son bord sept hommes aguerris et bien sûr Mercedes, libérée de ses obligations envers le Duc avec plus ou moins son consentement. Quand elle reviendrait, son blason serait redoré comme jamais et l’Insurgé lui-même envierait ses exploits au point de la solliciter dans ses plus dangereuses quêtes. Mais d’ici là, l’Insurgé aurait peut-être changé de visage. Qu’importait. Elle comptait bien forger son propre destin et s’il lui fallait plusieurs années pour cela, elle était prête pour ce sacrifice. Comme elle aimait se le dire « Je ne suis pas un Pion, mais j’ai aussi mes failles ». Des failles qu’elle se faisait fort de corriger rapidement. Se reposer sur ses lauriers ne l’intéressait pas. Alors quand l’humiliation pointait le bout de son nez, le défi et la motivation n’en étaient que plus grands pour elle.
Le gréement grinçait sous le vent et la brise maritime charriait dans l’air des relents d’algues et de poisson frais. L’eau scintillait sous le soleil à son zénith et les cris des mouettes venaient comme saluer le départ triomphal du bâtiment. En d’autres circonstances, le voyage eut été appréciable à plus d’un titre. Les soldats s’improvisaient marins, vaquant de ci de là, mais gardant toujours en tête leur périlleux objectif. Aussi évasive et déterminée qu’avait pu être leur Capitaine, les sept hommes de bord lui avaient juré fidélité jusqu’à la mort. Mercedes était un leader né. Sa beauté ensorcelante n’était pour rien dans cet état de fait. Elle savait inspirer la foi quand elle l’avait elle-même. Et en ce jour où elle partait en croisade, rien ne semblait pouvoir lui résister. Pas même le légendaire et si redouté Kraken, la malédiction s’étendant sur les mers depuis si longtemps. Pouvait-elle y mettre un terme, elle, une simple femme, même pas une Insurgée ? En vérité, elle savait que non. Mais elle pensait avoir les moyens d’apaiser son courroux suffisamment longtemps pour atteindre sa destination. C’était tout ce qui lui fallait. Du temps. Postée à l’avant du navire « La Rédemption », elle faisait figure de déesse, de sculpture vivante, semblant ne faire qu’un avec la proue du bateau.
Le rivage derrière eux était encore en vue lorsque la vigie se manifesta :
- Mouvement droit devant, Capitaine !
- C’est le Kraken ! lâcha un soldat près d’elle.
- Je sais.
Son calme olympien tranchait avec la nervosité de ses hommes qui ne savaient à quoi s’attendre.
- Vous ne voulez toujours pas nous dire ce que vous comptez faire ?
Mercedes fixait l’horizon avec intensité.
- Vous croyez en moi, Sir George ?
L’intéressé dégaina sa lame.
- Bien sûr.
- Alors vous n’avez pas besoin de savoir.
Les mouettes qui avaient accompagné le navire se dispersèrent brusquement. Les eaux rougirent, signe caractéristique de la présence du monstre.
- Bouchez-vous les oreilles ! rugit-elle.
Elle s’empara d’un havresac duquel elle sortit une sorte de happeau dans lequel elle souffla. Une étrange mélodie raisonna, très familière aux aventuriers sillonnant les plaines du nord de Gransys. D’aucun avait succombé suite à l’écoute de cette voix douce et envoûtante, de ce chant maudit.
- Des Harpies ! s’étonna Sir George tout en plaquant ses mains sur ses tympans.
Mercedes portait, quant à elle, une Boucle d’Impatience, lui épargnant de sombrer dans un sommeil nocif pour la santé. Le Kraken étendait son ombre écarlate de toutes parts, menaçant le navire et son équipage. Impassible à l’imminence du péril, Mercedes continuait de souffler dans son instrument dont l’origine et la nature exacte étaient secrètement gardées. Le monstre darda plusieurs tentacules herculéens, menaçant de briser le voilier comme un jouet d’enfant. Mais au moment même où son œil titanesque et maléfique émergeait lui-même des eaux ensanglantées, Mercedes se colla contre la proue, comme pour le défier, et brandit face à lui sa seconde arme : une glande de Cocatrix ! Elle la jeta sur l’œil grand ouvert, qui se referma rapidement, mais pas assez pour éviter le sort de pétrification de faire son œuvre. Le Kraken était omnipotent, à plus d’un titre, on pouvait le considérait comme un dieu. Mais ce pouvoir venait en grande partie de sa vision. Mercedes avait obtenu cette information après un périple mémorable qui pourrait constituer à lui seul un roman. L’entité paralysée, les eaux redevenaient fréquentables. Pour combien de temps, cela, elle l’ignorait. Il était donc plus sage d’estimer que ce serait de courte durée. Il ne fallut pas longtemps à l’équipage pour comprendre la stratégie. Passé l’effet de surprise, les sept soldats reprirent leurs esprits, leur poste et leur cohésion (à peu près dans cet ordre) et « La Rédemption » fendit les flots ténébreux, laissant derrière elle le Kraken prisonnier d’une gangue de pierre à la résistance inconnue.
A bon nombre de kilomètres de là, sur la plage du village de Cassardis, un pêcheur glissa d’un embarcadère. Emporté par une lame et voyant qu’il n’avait plus pied, il crut sa dernière heure arrivée. Quelle ne fut pas sa joie de constater que le Kraken ne se manifestait pas. Quelqu’un avait-il fini par en avoir raison ? L’Insurgé ? Le Dragon, peut-être ? Ou bien avait-il décidé de lui-même d’aller hanter d’autres lieux ? Trop heureux de sa chance, l’homme se mit à crier et à gesticuler, attirant rapidement un groupe de villageois.
- Le Kraken est parti ! Il est parti ! Nous sommes libres !
Les badauds, incrédules, attendirent de voir le bougre finir en charpie avant de se jeter à leur tour dans l’eau avec force clameurs de joie et éclaboussures. Un miracle inespéré pour Cassardis encore sous le choc des méfaits du Dragon.
En regardant ses hommes à leur insu, Mercedes comprit qu’elle avait gagné un peu plus leur confiance. Ce ne serait pas de trop. Car le plus dur restait peut-être à faire. Qui sait ce que l’océan allait leur réserver comme surprises ? Des surprises de taille, à n’en pas douter. L’aventure qui s’annonçait était grisante et le danger tout autant. C’était à cela qu’on reconnaissait un héros et une héroïne, non ? Mercedes en était convaincue. Et c’est avec un grand sourire, presque un rire, qu’elle ordonna :
- Toutes voiles dehors !
C'est le moment ou jamais
de passer à la postérité
Laisse un com qui détend qui détone
Mon blog s'en portera mieux
Et tu feras un heureux
01:10 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : dragon's dogma, mercedes, kraken, arisen, gransys
lundi, 29 octobre 2012
Beyond Humanity 2 : Un Cadeau Empoisonné [Nouvelles/Anticipations]
Lire Beyond Humanity 1 : Des Jambes en Or
- On est bien ensemble, hein ?
Nasa était allongée à côté de Jimmy, sur son lit. Ils fleurtaient depuis des années. Même si l'accident de Nathan les avait rapprochés plus vite que prévu, ils avaient continué à cacher leurs sentiments derrière les apparences d'une solide amitié.
Il s'était enfin décidé à l'inviter dans sa chambre, son sanctuaire de célibataire.
Ils frottaient à présent leurs jambes cyber avec sensualité, le rouge et l'or éclatants se mariant allègrement avec le blanc épuré. Des capteurs intégrés envoyaient des ondes directement dans leur cerveau, le saturant d'adrénaline. Remède idéal pour pallier à la timidité et à l'inhibation adolescente.
Du moins, c'est ce qu'affirmait le fabriquant, qui omettait bien volontiers le fait qu'il fallait surtout compenser l'absence de peau et de stimuli naturels.
- On est bien ensemble, hein ?
Jimmy l'entendit à peine. Il se noyait dans ses yeux. Leurs visages n'avaient jamais été aussi proches l'un de l'autre. Il pouvait sentir son parfum aux essences de fleur, son haleine légèrement épicée ainsi que ses cheveux bruns aux effluves de miel et de lait. Sa peau était ambrée, ses yeux noirs comme le charbon et ses lèvres fines esquissaient un sourire mutin qui le tétanisait. Le désir qu'elle avait pour lui semblait s'échapper par tous les pores de sa peau. Etait-ce le bon moment pour passer un cap dans leur relation ?
Comme pour se libérer du poids de cette question, il se rappela celle qu'elle venait de lui poser.
- Oui, c'est vrai.
Sa main caressa le rebondi de sa joue, puis remonta jusqu'à sa tempe où elle s'attarda comme pour en extraire un secret enfoui.
- Mais...
Elle le dévisagea, alarmée.
- Mais quoi ?
- Mais ce serait mieux si j'avais un implant, moi aussi, n'est-ce pas ?
Son sourire se flétrit.
- Je ne t'ai jamais mis la pression.
- Oui, c'est vrai, mais j'ai toujours senti que ça te gênait que j'en ai pas. Le regard des autres...
Elle fronça les sourcils et ses joues s'empourprèrent.
- Le regard des autres ? Je me fous du regard des autres. C'est juste que ce serait plus pratique. On pourrait se parler quand on veut, et même être connectés 24h/24. Ils viennent de rajouter une antenne réseau dans le quartier. La connexion est super bonne, maintenant.
Jimmy tordit sa bouche.
- Peut-être, mais ça dépend pas que de moi. Un implant, c'est pas gratuit.
- Mais justement, tes parents, ils peuvent pas t'aider ? Tu vas bientôt être majeur. C'est le moment où jamais.
Il caressa à nouveau sa tempe. Ses doigts sentaient la légère protubérance de l'implant fixé sous la peau. Il se sentit tout à coup plus vierge encore qu'il ne l'était réellement. Elle dut le deviner car elle ajouta :
- Moi je l'ai eu plus tôt grâce à mon père. Mais je sais très bien que c'est pas donné à tout le monde.
Il soupira.
- C'est pas donné tout court. Même les premiers prix sont inabordables pour les classes moyennes. Mes parents gagnent pas assez. La voiture commence à déconner. S'ils doivent investir, ce sera sûrement pas dans un gadget à la mode.
Elle se redressa, comme piquée par une guêpe :
- Un gadget à la mode ? C'est vraiment ce que tu penses ?
Il s'éclaircit la gorge, conscient qu'il y avait été peut-être un peu fort. Mais il savait qu'il était dans le vrai et il tenait à le lui faire savoir.
- Avoue qu'ils font tout pour rendre ça indispensable. T'as vu leur dernière pub ? C'est abusé ! Moi, depuis mes jambes, j'ai rien eu, rien demandé. Et ça me va très bien. Si on se donne pas de limite, à quoi on va ressembler à la fin ? A Zéro-One ?
Zero-One était un comics très populaire. Le héros était un cyborg qui flinguait en direct et sans état d'âme les humains qui avaient refusé le port d'extensions synthétiques ou qui n'avaient pas eu les moyens d'en avoir. Parqués comme des animaux dans des ghettos en périphérie des villes, ces bannis de la société survivaient comme ils pouvaient, en attendant le prochain show télévisé qui scellerait leur destin. Ceux qui se considéraient toujours comme les vrais humains les avaient baptisés les Déchets.
Cette histoire fantaisiste donnait lieu évidemment à de nombreuses interprétations et débats. Son auteur, lui, se contentait de répondre qu'il écrivait ni plus, ni moins, l'avenir de l'humanité.
Au lieu d'être sensible à cet argument, Nasa en profita pour changer de sujet :
- Tu sais qu'on dit que Nike Thompson s'est pas suicidé et qu'en réalité le Zéro-One des spots TV, c'est lui !
- Et la vidéo de son soi-disant accident ?
- C'était truqué. Un geek a prouvé qu'elle avait été retouchée.
- Dans quel but ils auraient fait tout ça ?
- Pour justifier sa disparition. Il en avait marre du foot. Il voulait passer à autre chose. Quand tu revois certaines de ses interviews, c'est super explicite.
Jimmy haussa les épaules.
- Ouais, bah, peu importe qui est Zéro-One, j'ai aucune envie de lui ressembler, en tout cas.
- Personne ne te le demande.
Jimmy grimaça.
- Personne à part tout le monde.
Nasa souffla d'exaspération :
- T'es chiant, Jimmy ! C'est le progrès, c'est tout. Et puis, tu veux rester avec moi, oui ou non ?
- Un implant ?
Jimmy observa l'objet argenté dans sa main. Il n'était pas plus long qu'une gomme.
- Tu as dix-huit ans, dit son père. Non ?
Le garçon n'en croyait pas ses yeux. Il pensait que ses parents n'auraient jamais les moyens de lui en offrir un si tôt.
- Mais je pensais que c'était trop cher pour vous.
Sa mère lui offrit son plus beau sourire.
- J'ai mis de côté exprès. Je voulais te faire la surprise.
- Et moi, ajouta son père, j'ai eu une augmentation grâce à mon ancienneté dans la boîte. On s'est dit que c'était l'occasion ou jamais.
Jimmy les embrassa.
- Merci, je sais pas quoi vous dire.
- Et bien, dit son père, dit juste merci.
- Alors merci à vous deux. C'est un super cadeau d'anniversaire. C'est Nasa qui va être contente.
Nasa fut effectivement très heureuse d'apprendre la nouvelle. D'autant que les grandes vacances arrivèrent et que leur programme respectif les empêcha de se voir durant presque deux mois. Heureusement, l'implant de Jimmy leur permit d'être ensemble autant que possible.
A la fin du mois d'août, elle l'appela. La tempe de Jimmy s'enjoliva d'un point bleu lumineux, preuve qu'il était connecté.
- Tu crois qu'on pourrait se voir ? s'enquit-elle avec espoir.
- Aujourd'hui ?
- Oui.
Nasa et Jimmy se croisèrent dans la rue au milieu d'une foule de gens, eux aussi connectés. Ils ne s'en aperçurent même pas.
- Non, aujourd'hui, je peux pas. Mais je t'appelerai dès que je serai disponible. Je t'embrasse.
Puis il répondit à un autre appel, grisé par ce sentiment nouveau d'être relié au monde entier.
Nasa mourut une semaine plus tard à cause d'une mise à jour défectueuse de son implant. Son cerveau implosa.
Jimmy n'en sut jamais rien. Pour lui, son silence se résuma à une simple connexion impossible.
Et qu'est-ce qu'une connexion impossible au milieu de milliers d'autres possibles ?
Bienvenue dans un monde où la Technologie et l'Homme ne font plus qu'un.
Ce monde existe déjà. C'est le nôtre :
T’as tout lu, tout vu, tout entendu…ou pas
Peu importe, post un com et like la page pour dire que tu existes car ton avis est important pour moi, mais aussi pour le futur de ce blog, un gros merci d’avance !
19:30 | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : s-f, anticipation, futur, nouvelle, cybernétique, transhumanité
dimanche, 28 octobre 2012
Mon Top 5 Chansons James Bond
Oui, ça va sans doute devenir une habitude. Je vous proposerai régulièrement une petite sélection perso en rapport avec l'actu du moment.
En ce qui concerne James Bond, il est intéressant de noter que mes chansons préférées proviennent des films qui m'ont le plus marqué. Skyfall étant l'exception qui confirme la règle...
N'hésitez pas à lister vos titres favoris dans les commentaires. Merci Jartagnan, c'est toi qui m'a donné l'idée, alors je compte sur toi !!!
Gladys Knight en smoking sortant du mythique Gun Barrel, la seule interprète à ma connaissance ayant endossé le costume de 007. Rien que pour cette entrée culottée, respect ! Mais Gladys c'est aussi et surtout une formidable voix merveilleusement exploitée. D'autres n'ont pas eu cette chance ! On pense évidemment à Madonna qui a manqué l'occasion de nous rappeler qu'elle a, elle aussi, un organe admirable, quand elle le veut.
Régulièrement, la production fait appel à des artistes très populaires pour enrichir son catalogue. Le choix de Sheryl Crow en a sans doute surpris plus d'un, mais le fait est que le choix de cette artiste se révèle très inspiré. Un titre qui met particulièrement bien en valeur sa voix (et ses formes ?) langoureuse !
Les artistes masculins ayant oeuvré sur les thèmes de la saga sont plus rares, ce qui ne les destine pas pour autant à la postérité. Mais en associant Chris Cornell, inconnu du grand public, à Casino Royale, les producteurs font mouche ! La voix à la fois virile et nuancée du chanteur est en totale adéquation avec le nouveau 007.
L'Espion qui m'aimait est sans doute le James Bond que j'ai le plus visionné, ce qui a forcément contribué à sa position dans ce top. Le "Nobody does it better" (personne ne le fait mieux) qui ouvre la chanson est légendaire tant il résume parfaitement l'efficacité de l'agent secret. Un slogan sur mesure qui ferait d'ailleurs un titre parfait pour un futur opus.
Un thème lent qui aurait pu passer inaperçu n'eut été la sublime partition de John Barry avec une intro remarquable au saxo. Si je n'avais pas été traumatisé par le générique de l'émission politique "L'Heure de Vérité", le Live and Let Die de Paul Mc Cartney l'aurait sans doute détrôné.
J'avoue aussi avoir hésité à placer le Another Way to Die de Alicia Keys et Jack White. Son côté pop/rock expérimental n'est pas en cause, bien au contraire, son mélange de styles étant on ne peut plus savoureux. C'est une chanson que j'apprécie de plus en plus au fil du temps, mais qui me semble trop loin de l'univers de Bond en termes de sonorités et de ressenti pour mériter d'y être aussi intimement associée. Il y aussi A View to a Kill de Duran Duran qui tranche pas mal avec le son habituel et que j'apprécie beaucoup.
BONUS
A l'occasion du 50ème anniversaire de l'éternel James Bond 007, voici l'occasion idéale de réhabiliter une composition inédite rejetée pour le thème du film Quantum of Solace.
T’as aimé…ou pas
T’as tout lu, tout vu, tout entendu…ou pas
Peu importe, post un com et like la page pour dire que tu existes car ton avis est important pour moi, mais aussi pour le futur de ce blog, un gros merci d’avance !
samedi, 27 octobre 2012
Skyfall [Cinéma/Critiques]
Après un reboot qui a marqué les esprits (Casino Royale) et un épisode très pêchu à défaut d'être indispensable (Quantum of Solace), Daniel Craig revient pour la troisième fois dans le smoking du plus célèbre agent secret.
James Bond 007 fêtant cette année son 50ème anniversaire, on pouvait se demander si cela affecterait le contenu de ce nouvel opus. La réponse est un grand OUI, mais bien plus encore qu'on était en droit de l'imaginer.
Nouvelle venue dans l'univers Bond, Eve (Naomie Harris) fait une entrée remarquée, au-delà de ce qu'elle aurait souhaité !
Si le prologue qui ouvre le film amène déjà un rebondissement appréciable, le fait est que Skyfall est truffé de surprises de tailles et de formes variées, allant de clins d'oeil jouissifs aux anciens épisodes (parfois gentiment moqueurs) jusqu'à un épilogue qui annonce clairement un gros revirement dans la forme et le fond de la saga.
Bérénice Marlohe interprète l'énigmatique Séverine, l'autre James Bond Girl du film. L'actrice avait réussi à décrocher ce rôle très convoité grâce à une candidature aussi spontanée que motivée. On regrette d'autant plus son court temps de présence à l'écran.
Difficile d'ailleurs de parler de ce qui fait le sel de cette oeuvre sans trop en dévoiler. Et comme c'est pas le genre de la maison de balancer, je me contenterais de vous inciter vivement à payer votre ticket, vous ne regretterez ni votre votre investissement, ni votre déplacement. Sachez seulement que les héros que nous connaissons vont être malmenés comme jamais par un méchant des plus mémorables.
On l'a souvent dit : on juge la qualité d'un héros à son ennemi, une règle d'or pour les producteurs de James Bond. Javier Bardem incarne Silva, l'un des plus inquiétants méchants de toute la saga. Son face à face avec Daniel Craig (Cowboys et Envahisseurs) fait son effet ! D'une seule réplique, Bond en profite d'ailleurs pour moderniser sa sexualité.
Que vous soyez donc fans de la première heure ou cinéphile en quête d'un solide thriller, vous serez contentés par l'action et l'émotion offertes par ce 23ème chapitre, d'une audace revigorante puisqu'il réussit le pari de casser les codes de la franchise tout en les brassant allègrement. Un retour aux sources bienvenu, alliant nostalgie et modernité.
Certains pourront regretter le scénario bulldozer qui, à l'image de son héros, bouscule violemment son environnement. Mais c'est un parti pris qu'il vaut mieux accepter pour profiter pleinement du généreux fan-service et de la nouvelle orientation choisie. Notons quand même quelques choix maladroits privilégiant l'effet de style à la crédibilité (l'intervention tardif des renforts sur l'île principalement).
Nouveau également dans l'univers, Ben Wishaw (Le Parfum, Bright Star, Cloud Atlas) apporte une fraîcheur bienvenue et permet d'ironiser à loisir sur le fossé des générations.
Il faut aussi ajouter que le réalisateur n'est autre que Sam Mendes, un homme habitué à varier les genres avec une efficacité égale (American Beauty, Les Sentiers de la Perdition, Les Noces Rebelles, excusez du peu !) à l'instar de Marc Foster (Neverland, Stay, L'Incroyable Destin de Harold Crick) son prédécesseur. Comme prochain metteur en scène, je verrais d'ailleurs assez le tout aussi talentueux et éclectique James Mangold (Copland, Identity, Night and Day). Et vous ?
Les évènements vont inévitablement rapprocher M et 007 et déterrer brutalement leur passé respectif.
En tous les cas, je te souhaite un Joyeux Anniversaire James Bond et merci pour ce somptueux cadeau grâce auquel on comprend facilement pourquoi tu as si bien vieilli !
Je me réjouissais beaucoup de la présence d'Adele au générique de Skyfall, mais j'avoue être très déçu du résultat. Une composition plutôt fade qui manque cruellement de personnalité malgré la voix de la diva.
Si vous avez aimé, vous aimerez peut-être aussi :
T’as aimé…ou pas
T’as tout lu, tout vu, tout entendu…ou pas
Peu importe, post un com et like la page pour dire que tu existes car ton avis est important pour moi, mais aussi pour le futur de ce blog, un gros merci d’avance !
20:23 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : james bond, adele, daniel craig, skyfall, oo7, espionnage, film, cinéma, action, thriller
jeudi, 25 octobre 2012
Deux Milliards et Deux Vies [Nouvelles/Uchronie]
J'ai déjà eu l'occasion de vous parler de mon meilleur ami Hervé Smagghe. Il contribue beaucoup à l'amélioration et à l'exposition de mon blog et j'en profite pour le remercier une nouvelle fois au passage.
Il se trouve qu'il est également auteur, pas autant qu'il le voudrait, certes, mais cela ne l'a pas empêché de pondre deux petites perles.
La nouvelle qui suit est classée dans un genre littéraire bien spécifique : l'Uchronie. Cette dernière consiste à revisiter un fait historique sous un angle différent de celui que l'on connait. Un bon exemple : le roman Le Maître du Haut Château de Philip K. Dick qui raconte la victoire du IIIè Reich sur les Alliés durant la seconde guerre mondiale.
Je vous souhaite d'avance une bonne lecture. N'hésitez pas à laisser des commentaires pour donner votre avis et partagez votre ressenti avec Hervé qui se fera un plaisir de vous répondre.
– Leader one, ici Black Eagle. Je viens d’être touché par un tir provenant du sol. Demande assistance pour appontage d’urgence.
– Bien reçu, Black Eagle. La piste sera dégagée à votre arrivée. Quelle est l’étendue de vos dégâts ?
– Les deux tuyères gauches de mon appareil sont endommagées.
– Attention Black Eagle, j’ai deux échos ennemis sur mon radar à environ trois heures !
– Envoyez-moi de l’aide, je n’arriverai jamais jusqu’au porte-avion !
– Bien reçu Black Eagle. Nous faisons le nécessaire.
« Merde, il ne manquait plus que ça ! » pensa le sergent Jonathan Miller.
Les deux chasseurs irakiens seraient bientôt sur lui. Il savait pertinemment que l’aide demandée ne serait jamais sur place à temps. Il lui fallait trouver une solution, seul. A cette altitude, avec de telles avaries, il n’avait aucune chance de sortir victorieux d’un combat aérien. Il enfonça le manche de son appareil vers l’avant et son chasseur plongea aussitôt en piqué.
Jonathan pilotait un McDonnell Douglas, modèle AV-8B, plus connu sous le nom de Harrier. Cet avion fraîchement mis en service avait déjà fait ses preuves depuis le début de l’opération Tempête du Désert. Sa petite taille rendait le Harrier beaucoup plus manœuvrable que la plupart des chasseurs conventionnels. Armé d’un canon rotatif de 25 millimètres et équipé d’une charge offensive de presque 8 tonnes, il pouvait néanmoins atteindre une vitesse de pointe d’environ 1000 km/h. D’imposantes tuyères orientables ornaient chaque côté du Harrier. Elles permettaient au chasseur un décollage et un atterrissage vertical. Une vraie révolution dans le monde de l’avionique !
Jonathan savait qu’avec deux tuyères endommagées un atterrissage vertical lui était interdit. Il connaissait parfaitement les possibilités de son appareil : il était considéré par sa hiérarchie comme l’un des meilleurs pilotes au monde sur ce type de chasseur.
Arrivé à 200 mètres d’altitude, Jonathan tira sur le manche du Harrier qui peina à se redresser. Lorsqu’il y parvint, l’avion n’était plus qu’à une vingtaine de mètres au-dessus du sol. Il ne pourrait jamais espérer prendre de vitesse les deux Mirages F1-E lancés à sa poursuite. Ces chasseurs, sortis tout droit des usines françaises Dassault, étaient parmi les avions les plus rapides au monde. Leur vitesse pouvait atteindre Mach 2 soit deux fois et demi la vitesse de pointe du Harrier.
Jonathan survolait à présent une rivière qu’il décida de longer. Cette manœuvre lui fit gagner du temps. Naviguant sous le plancher radar, les chasseurs ennemis peinèrent à retrouver le Harrier. Un signal sonore retentit dans le cockpit du sergent Miller : l’un des Mirages ennemis venait de tirer une roquette à guidage thermique. Jonathan n’eut d’autre choix que de pousser les réacteurs du Harrier à leur pleine puissance. Cette brusque accélération l’obligea à effectuer des manœuvres que nul autre pilote n’aurait osé tenter. Son avion filait à présent à près de 900 km/h le long des méandres de la rivière, tandis que le missile se rapprochait inexorablement de lui. Jonathan tira d’un coup sec le manche de son appareil. L’avion se redressa et fila à la verticale. Il passa à toute allure entre les deux chasseurs irakiens qu’il avait préalablement repérés sur son radar, suivi de près par la roquette. Les pilotes, bien que surpris par la manœuvre de l’américain, n’eurent aucun mal à se dégager de la trajectoire du Harrier, évitant ainsi d’être pris pour cible par le missile.
Jonathan continua sur sa lancée et constata avec regret que la roquette n’avait percuté aucun des deux Mirages. Il adopta donc une autre tactique. Arrivé à 13 000 mètres d’altitude, il effectua un demi-tour et plongea de nouveau sur les chasseurs irakiens. Il coupa brusquement les gaz à 6000 mètres et tomba en chute libre. Rien ne garantissait que l’avion parviendrait à redémarrer. Le missile, qui réagissait à la chaleur des réacteurs, perdit sa cible et se remit aussitôt en acquisition : deux cibles s’offraient désormais à lui, droit devant. Le Harrier en perdition fila sur la gauche des deux appareils ennemis et la roquette percuta l’un d’eux. L’onde de choc provoquée par la déflagration frappa de plein fouet le second chasseur qui explosa à son tour. Jonathan n’eut pas le temps de se réjouir car son appareil se rapprochait dangereusement du sol. Un sentiment d’inquiétude l’envahit. Les deux tuyères encore opérationnelles refusaient obstinément de se remettre en marche. A la verticale, il lui était impossible de s’éjecter. Miller n’avait plus le choix : il tira de toutes ses forces sur le manche et enfonça le palonnier. L’avion partit aussitôt en vrille. Bien que téméraire, cette manœuvre permit à Jonathan de s’éjecter de son appareil.
La seconde suivante, le Harrier percutait le sol dans une explosion de fumée noire. La violence de l’éjection fit perdre connaissance au sergent Miller qui planait au dessus du sol, suspendu à son parachute tel un pantin inanimé. Lorsqu’il revint à lui, la première image qu’il vit fut le sol à moins de 3 mètres sous ses pieds. Il était déjà trop tard pour tenter quoi que ce soit. Un hurlement de douleur s’échappa de sa gorge lorsque ses deux jambes se brisèrent comme des allumettes en percutant le sol…
***
Jonathan se réveilla en sursaut, le front perlé de sueur. Il lui fallut quelques instants pour se remémorer l’endroit où il se trouvait : sa chambre. Vingt-cinq années s’étaient écoulées et pourtant la douleur aux jambes perdurait. Le médecin de la base d’El Toro, où il était stationné, lui avait expliqué que cette souffrance était psychosomatique. Le choc post-traumatique dû à son accident en territoire ennemi l’avait marqué à vie telle une plaie toujours à vif. Cela faisait pourtant bien cinq ans qu’il ne s’était pas réveillé aussi brusquement.
Jonathan massa péniblement ses jambes jusqu’à ce que la douleur s’estompe quelque peu. Il se leva ensuite et se dirigea vers la salle de bains. La nuit était encore noire. Elle promettait d’être longue, il en était certain. Après s’être rafraîchi, il vit son visage dans le miroir qui lui renvoya l’image d’un homme que la guerre du Golf avait brisé vingt-cinq ans plus tôt. Le crash avait gâché sa vie et sa carrière. Avec un tel talent de pilote, le sergent-major Jonathan Miller aurait eu tôt fait d’être promu capitaine. Au lieu de cela, ses supérieurs lui avaient annoncé sans grand ménagement qu’il ne pourrait sans doute plus jamais voler. Voler, c’est ce qui l’avait poussé à s’engager et à gravir les échelons de l’armée dans un seul but : se tenir derrière le manche d’un chasseur. Les sensations qu’il ressentait en vol étaient uniques, une coulée d’adrénaline qui le faisait se sentir vivant.
Mais tout cela lui avait été enlevé. Il avait dû se battre contre sa hiérarchie afin de pouvoir arpenter de nouveau le bitume des pistes d’envol. Pour ce faire, il passa du statut de pilote de chasse à celui de chef mécanicien en aéronautique. Le sergent-major Miller était le seul soldat de l’U.S. Air Force à posséder un grade de loin supérieur à sa fonction. Il avait en charge la maintenance des avions de chasse de la base d’El Toro en Californie.
Cependant le temps des Harriers était depuis longtemps révolu. L’année 2015 était déjà bien entamée et aujourd’hui les drones équipaient 90% de la flotte américaine. Ces escadrilles de petits chasseurs commandées à distance étaient devenues le fleuron de l’Air Force qui se targuait de ne plus mettre en danger la vie de leurs pilotes. Une nouvelle génération de soldats avait vu le jour. Des pilotes sans expérience du vol réel, des pilotes incapables de voler aux commandes d’un Harrier, des pilotes dont la seule qualité était avant tout le sang-froid.
Chaque fois que Jonathan pénétrait dans la « salle de pilotage », il avait la sensation de voir des adolescents addicts aux jeux vidéo. Seule différence au tableau, cette pièce était sans aucun doute la plus silencieuse de la base. Finies les sensations fortes, les décharges d’adrénaline et autres excitations en tout genre. Il détestait cette salle beaucoup trop terre à terre pour le vol aérien.
Heureusement de temps en temps, son ami et supérieur, le capitaine Nick Turner s’arrangeait pour lui octroyer des missions de convoyage. L’objectif était simple : piloter les vieux avions au rebus à destination des différents musées militaires du territoire américain. A chaque fois, Jonathan était transporté à l’idée de piloter à nouveau. Quelle ne fut pas sa joie lorsqu’il lut l’ordre de mission qui émanait du bureau de Nick. Il était chargé de convoyer un Harrier jusqu’au musée naval de la base de Pearl Harbor dans le pacifique. Jonathan leva les yeux au ciel et remercia le Créateur de le laisser se mettre à nouveau aux commandes d’un Harrier. D’ordinaire les missions de convoyage concernaient surtout des bombardiers. Mais là, il s’agissait d’un chasseur, autant dire du pain béni pour ce doux rêveur de Miller.
Evidemment, Nick ne le laisserait jamais décoller sans une sérieuse remise à niveau, soit cinq bonnes heures de vol sur l’appareil. Jonathan eut toutes les peines du monde à réprimer son excitation. Depuis son accident, il n’avait jamais plus piloté de Harrier. Il lui tardait donc d’accomplir sa mission qui n’aurait lieu que dans trois semaines. Un vol comme celui-là nécessitait une grande préparation de la part du pilote. Il lui fallait s’entraîner au vol : décollage, atterrissage et même appontage. En effet son plan de vol prévoyait une escale pour refaire le plein de kérosène à bord du California, le dernier-né des porte-avions américains, fleuron de la Navy. Cette escale, Jonathan la trouvait inutile. Dans le temps, on lui aurait laissé faire son ravitaillement en vol. Mais ce genre d’opération était aujourd’hui considérée comme dangereuse et par conséquent inutile. Au lieu de cela, il devrait faire le plein et passer une nuit à bord du porte-avions. Encore une idée stupide que de ne pas piloter de nuit afin de ne surtout pas prendre de risques. Il se dit que sans les risques que les pilotes avaient pris, leur liberté si chèrement acquise au cours des guerres, ne serait peut-être qu’une lointaine illusion. Alors penser qu’une guerre puisse se gagner sans prise de risque, telle était la véritable illusion aux yeux de Jonathan.
– Jonathan ? Jonathan, tu es avec moi là ? demanda le capitaine Turner.
– Euh oui, oui, Nick. Excuse-moi, j’étais perdu dans mes pensées. Où en étions-nous déjà ?
– Le California, Jonathan. Tu passeras la nuit à bord et tu repartiras le lendemain matin à 6h30.
– A vos ordres Capitaine, ironisa le pilote.
– C’est ça, fait le mariole. Si j’étais toi, je me demanderais comment remercier mon capitaine pour m’avoir dégoté cette mission de dilettante, lança Nick sur le ton de la plaisanterie.
– Quoi, tu veux que je te ramène une Hawaïenne peut-être ?
– Non, sérieusement. Trêve de plaisanterie, le porte-avions sera en alerte rouge ce jour-là. Alors il faudra que tu te fasses tout petit.
– Alerte rouge, mais pourquoi ?
– Phase de test, c’est tout ce qu’on a bien voulu me répondre en haut lieu.
– Ça sent les tests d’armement à plein nez.
– Quoiqu’il en soit, motus et bouche cousue. Et ça c’est un ordre tout ce qu’il y a de plus officiel.
***
Trois semaines plus tard, Jonathan était paré à accomplir sa dernière mission. Dernière car il savait qu’une occasion comme celle-ci ne se représenterait sans doute plus. Aussi avait-il informé Nick de son souhait de partir à la retraite dès la fin de cette mission. Le capitaine avait bien tenté de retenir son ami mais il savait déjà que c’était peine perdue. Ce fut donc avec regret que Nick accepta de faire les démarches nécessaires au départ précipité de Jonathan.
– Ainsi je boucle la boucle, pensa Miller. Tour de contrôle, ici Black Eagle. Je suis paré au décollage.
– Bien reçu Black Eagle. Vous avez l’autorisation de décoller. Bon vol et soyez prudent.
– Merci tour de contrôle. Je tacherai de revenir en un seul morceau.
Le Harrier roula doucement jusqu’à la piste d’envol. Là, Jonathan lança les réacteurs du chasseur à pleine puissance ce qui ne manqua pas de le plaquer au fond de son siège. Il ne fallut que quelques secondes au Harrier pour prendre son envol. L’adrénaline coulait déjà à flot dans les veines du pilote. Il prit rapidement de l’altitude car il était déjà aux portes de Los Angeles. Les consignes étaient claires : 7000 mètres, tel était le plancher imposé par sa hiérarchie pour survoler la Cité des Anges. Jonathan se sentait à nouveau vivant, sentiment qu’il n’avait plus ressenti depuis vingt-cinq ans maintenant.
Dix minutes plus tard, le Harrier survolait l’océan Pacifique et Jonathan abaissa son plancher à 1500 mètres. Là débuta pour lui une longue série d’acrobaties aériennes. Il commença avec prudence et augmenta la difficulté des figures à mesure que ses sensations en vol lui revenaient. Des larmes de joie coulaient de ses yeux embués. Il ne parvenait plus à contrôler la décharge émotionnelle que lui procurait son corps. Il volait dans une sorte de béatitude complète. Peu de gens savent apprécier ce qu’ils définissent plus tard comme étant le plus beau jour de leur vie. Dans son cas, aucun doute n’était permis : il avait pleinement conscience de vivre les plus beaux instants de sa vie. Seule la radio vint interrompre ce moment de pur plaisir.
– Black Eagle, ici la tour de contrôle de l’USS California. Veuillez ralentir votre vitesse d’approche pour votre appontage.
En jetant un coup d’œil à l’horloge de son cockpit, Jonathan constata avec regret que cela faisait presque trois heures qu’il était en vol. Trois heures qui n’avaient duré qu’un instant, le temps d’un battement de cils, pensa Jonathan. La première partie de son trajet s’achevait déjà. Ce fut avec beaucoup de regrets dans la voix qu’il répondit :
– Bien reçu, tour de contrôle, je réduis les gaz.
– Le pont étant surchargé pour la durée de nos exercices, veuillez procéder à un atterrissage vertical.
– Je procède, répondit-il d’une voix platonique.
L’appontage vertical, bien qu’excitant, ne fut qu’une simple formalité pour Jonathan. Une fois posé, il coupa les réacteurs, mais ne sortit pas tout de suite de son cockpit. Il lui fallait d’abord reprendre ses esprits. Au bout de deux minutes, un opérateur au sol grimpa sur une aile du Harrier afin de voir si tout allait bien pour le pilote. Ce dernier déverrouilla son cockpit au moment même où l’opérateur posait sa main sur la poignée d’ouverture.
– Bonjour Sergent-major. Vous vous sentez bien ? demanda-t-il, inquiet. Vous n’avez pas l’air dans votre assiette.
– Merci pour votre sollicitude, Soldat, mais ça va aller. Je suis juste un peu fatigué par le voyage, mentit Jonathan. Veuillez me conduire auprès de mon officier de liaison, je vous prie.
– A vos ordres Sergent-major. Par ici, si vous voulez bien me suivre.
***
Le porte-avions grouillait d’activité. Tout le monde s’affairait à bord afin de respecter un planning qui échappait complètement à Jonathan. Son officier de liaison lui avait intimé l’ordre de ne pas quitter ses quartiers durant la nuit car « d’importants tests » allaient être réalisés. Il n’avait posé aucune question sachant pertinemment qu’il n’obtiendrait aucune réponse. Il avait bien sûr remarqué que tout le gratin de l’armée américaine se trouvait à bord. Sans doute étaient-ils tous venus pour une démonstration. En bref, tout le monde s’affairait et lui s’ennuyait ferme. Lorsqu’il ferma les yeux, allongé sur sa couchette, les images de son extraordinaire après-midi défilèrent sans discontinuer.
Deux heures plus tard, ne parvenant toujours pas à trouver le sommeil, Jonathan se leva et sortit sur le pont pour prendre l’air. L’interdiction de quitter sa cabine lui importait peu. L’air marin lui fit le plus grand bien et le détendit. Au bout de dix minutes, il surprit une conversation entre deux hommes sur le pont supérieur.
– Général, je me dois d’insister. Nous ne sommes pas prêts pour un test grandeur nature. Comme je vous l’ai déjà signifié dans mon dernier rapport, l’ouverture d’un vortex aussi petit soit-il, nécessite un contrôle absolu du canon TDV. Hors notre appareil n’est pas encore au point. Nous ne savons même pas si nous parviendrons à refermer le trou de ver.
– Professeur Santini, déclara le général d’un ton qui se voulait rassurant. Votre rapport a été lu et vos craintes prises en compte. Les résultats en laboratoire, vous en conviendrez, sont plus que satisfaisants. De plus, les sommes colossales engagées dans un tel projet appellent à des résultats probants. Je vous avoue avoir un peu de mal à comprendre vos réticences.
– Mes réticences général, sont on ne peut plus fondées. Tout d’abord, les tests en laboratoire ont été réalisés en milieu contrôlé, une atmosphère stérile de toute interférence. Je vous rappelle par ailleurs que ce que nous appelons vulgairement un vortex n’est ni plus ni moins qu’un trou noir. On ne travaille plus seulement sur trois dimensions, mais quatre car nous parlons là de courber l’espace et le temps afin de créer un passage instantané d’un point A vers un point B. Si nous ne maîtrisons pas ce trou noir, tout sera absorbé, TOUT : la matière, la lumière, le temps.
– Oh là ! Calmez-vous, professeur. Vous dressez là un portrait bien pessimiste de la situation. Aux dernières nouvelles, tout fonctionnait parfaitement.
– PARFAITEMENT ?!! Et l’incident de Blackwell, vous appelez ça un fonctionnement parfait ?
– Quel incident de Blackwell ? Tout s’est déroulé selon nos plans à part un léger retard. A part ça, nous avons transféré une canette du laboratoire à la salle adjacente à travers le vortex.
– Oui, mais la canette n’est arrivée qu’une minute plus tard et pas à l’endroit de la salle que nous avions choisi.
– Professeur, un tout petit mètre d’écart et une toute petite minute de retard, il ne s’agissait que de détails que vous avez réglés.
– Pas du tout. Ce que vous appelez un retard n’en était pas un. Le canon TDV a parfaitement fonctionné. Lorsque la canette est partie du laboratoire, elle est instantanément arrivée à destination. Nous avons attendu une minute non pas à cause d’une lenteur du transfert ou d’un retard, mais parce que la canette a voyagé une minute dans le futur. En fait le canon TDV fonctionne parfaitement sauf que nous n’en maîtrisons pas les effets secondaires. Voilà les raisons qui me font parler de Blackwell comme d’un incident. Je tiens à ajouter que si nous avions…
– Je vous prie de m’excuser, professeur Santini, lança un troisième homme qui venait d’arriver, mais votre présence ainsi que celle du Général Stanton est requise au poste de commandement. La phase de test va bientôt débuter.
– Nous vous suivons, répondit Stanton.
– Général, s’il vous plaît, insista le scientifique.
– Professeur Santini, je crois avoir été suffisamment patient. L’heure n’est plus à la discussion mais à l’action. Nous reprendrons cette conversation après le test qui, j’en suis intimement convaincu, se déroulera sans incident.
Jonathan, encore sous le choc de la discussion qu’il venait de surprendre, entendit les pas des deux militaires et du scientifique qui s’éloignaient. Quelle folie avait poussé les Hommes à créer une telle machine en sachant les conséquences dramatiques que cela pouvait entraîner ? Il était maintenant hors de question pour lui de retourner sagement se coucher dans sa cabine. Il fallait qu’il voie ça de ses propres yeux.
Subrepticement, Jonathan se faufila jusqu’au pont d’envol où une bonne centaine de personnes s’affairaient aux derniers préparatifs du test. Là, il découvrit alors le fameux canon TDV. Il était composé de trois éléments principaux. Deux canons à électrons étaient disposés de part et d’autre d’un grand canon à base pyramidale dirigé vers le ciel. Jonathan remarqua également qu’à l’autre bout de la piste d’envol, deux drones étaient prêts à décoller. Sans doute les militaires allaient-ils tenter d’envoyer les drones à travers le vortex. Pour la première fois de sa vie, il était content que l’on envoie des drones plutôt que des pilotes. Quelle folie, songea-t-il à nouveau. Risquer l’Armageddon pour perfectionner un nouveau moyen de transport : la démesure des Hommes ne semblait pas avoir de limite.
Soudain, le pont se vida de tous ses occupants en quelques secondes. Poussé par la curiosité, Jonathan resta caché derrière une pile de caisses. Une voix retentit par les hauts parleurs du pont d’envol :
– Attention, lancement du compte à rebours. Début du test dans trente secondes, vingt-neuf, vingt-huit…
Un bourdonnement se fit entendre, sans doute les générateurs avaient-ils été mis en marche.
– Dix-neuf, dix-huit, dix-sept…
Le bourdonnement devint plus intense jusqu’à devenir un sifflement aigu qui arracha un cri de douleur à Jonathan. Il comprit alors pourquoi tout le monde s’était mis à l’abri. Il plaqua ses deux mains contre ses oreilles rendant le sifflement plus supportable. De puissants projecteurs crevèrent la nuit, illuminant le ciel chargé de nuages gris.
– Cinq, quatre, trois, deux, un, mise à feu.
A ce moment-là, le silence se fit et Jonathan vit les deux canons à électrons émettre un rayon lumineux d’un rouge vif. La base pyramidale du canon principal fut percutée simultanément par les deux faisceaux laser. Pendant quelques secondes rien ne sembla se produire. Puis, l’ensemble du porte-avions se mit à trembler, manquant de faire trébucher le pilote. Soudain, une onde de choc partit de la base du canon et se propagea vers le ciel. Le silence retomba sur le pont d’envol et tout redevint calme. Le regard de Jonathan se porta vers le ciel où un trou béant aspirait les nuages alentours. Ainsi, l’Homme venait de créer un trou noir. Miller ne parvenait plus à détacher ses yeux du spectacle grandiose qui se jouait devant lui. Il ne remarqua les deux drones que lorsque ceux-ci franchirent le trou de ver à pleine vitesse. Le vortex se referma brusquement juste après.
– Que s’est-il passé ? demanda le général Stanton dont la voix trahissait une certaine inquiétude.
– Je ne sais pas mon Général, répondit Willis, le chef des opérations. La puissance du vortex était parfaitement stable, mais il semble qu’il se soit effondré sur lui-même.
– Je vous avais pourtant prévenu, Général, lança le professeur Santini d’un ton parfaitement neutre.
– Ça suffit Santini, l’heure n’est pas aux reproches. Stanton se tourna alors vers Willis :
– A-t-on des nouvelles de nos drones ? demanda-t-il avec colère.
– Non, mon Général. Les pilotes nous disent avoir perdu le contrôle de leur appareil au moment même où le trou noir s’est refermé.
– Je veux savoir ce qui s’est passé. Que les équipes de maintenance vérifient l’état du canon TDV.
– Mais Général, il faut attendre que les canons à électrons refroidissent sinon les équipes de maintenance risquent de…
– Ça suffit, Willis ! Je vous ai donné un ordre. Obéissez.
– Tout de suite, mon Général.
Jonathan regarda ses mains maculées de sang et constata qu’il provenait de ses oreilles. En pilote averti, il savait que ce n’était jamais très bon signe. Voyant que des dizaines d’hommes s’affairaient à nouveau, il décida de ne pas s’attarder plus longtemps sur le pont du California. Les deux drones n’étaient toujours pas revenus et au vu de l’agitation ambiante, Jonathan en conclut que le test avait du être un échec.
De retour dans sa cabine, il se passa la tête sous l’eau, ce qui le soulagea quelque peu. Il était maintenant certain de ne pas fermer l’œil de la nuit.
***
Le lendemain matin, Jonathan était partagé entre l’excitation de piloter à nouveau et le désarroi dans lequel l’avait laissé l’impressionnant spectacle dont il avait été témoin la veille. Ses oreilles ne le faisaient plus souffrir et il espérait qu’il en serait de même une fois en vol. Il prit son petit déjeuner dans un réfectoire qui semblait avoir été déserté. A contrario, le pont d’envol était envahi de techniciens, militaires et scientifiques qu’il n’eut aucun mal à différencier. Son officier de liaison l’accompagna jusqu’à l’arrière du porte-avions où l’attendait déjà son Harrier. Le canon TDV avait disparu du pont supérieur, ce qui ne manqua pas de faire sourire Miller.
– Voici votre plan de vol, Sergent-major. Soyez prudent, lança très sérieusement l’officier de liaison.
Ça c’est le comble, pensa Jonathan. On me demande à moi d’être prudent pendant qu’eux mettent la planète en danger.
– Merci, Capitaine, répondit-il ironiquement.
Il monta à bord du Harrier et après les vérifications d’usage et l’accord de la tour de contrôle, il décolla. Quelques minutes plus tard, Jonathan volait au-dessus du Pacifique à pleine vitesse. Deux heures plus tard, il arriverait à Pearl Harbor où le dernier Harrier de l’armée américaine encore en état de marche finirait ses jours dans un musée.
Le vieux Harrier serait à la retraite en même temps que le vieux Miller, pensa Jonathan.
A bord, l’ambiance fut nettement moins joviale que la veille. Il semblait plongé dans une sorte de nostalgie qui dura pendant presque toute la durée du vol. Seule une voix dans son casque le sortit de sa torpeur.
– Black Eagle, ici la tour de contrôle de Pearl Harbor. Veuillez abaisser votre plancher à 1500 mètres afin de procéder à l’atterrissage. Nous vous libérons la piste 24B, veuillez confirmer.
– Bien reçu tour de contrôle. Je procède aux…
Il n’eut pas le temps de finir sa phrase. Déjà, son radar émettait deux échos droit devant lui à quelques centaines de mètres. La visibilité était restreinte par d’épais nuages gris. Pendant un instant, le pilote se remémora la dernière fois où il avait vu deux échos sur son radar, vingt-cinq ans plus tôt. Une vague de sueurs froides parcourut le corps de Jonathan qui luttait pour garder son calme. Le Harrier sortit d’un épais nuage et la panique envahit aussitôt le pilote lorsqu’il vit devant lui deux drones qui émergeaient d’un gigantesque vortex, trou béant déchirant le ciel. Les drones partirent en vrille et Jonathan ne les évita que par miracle. Dans la seconde qui suivit, les deux engins se percutèrent l’un l’autre. Le Harrier, prit dans le champ de l’explosion, fut projeté à travers le trou noir.
Jonathan ferma les yeux, croyant sa dernière heure venue.
***
Lorsqu’une alarme retentit dans le cockpit, il ouvrit à nouveau les yeux. Il était toujours là, bel et bien vivant, mais son appareil était devenu hors de contrôle et plongeait inexorablement vers l’océan. Le pilote dut jouer de toute son habileté afin de stabiliser le Harrier qui ne volait plus qu’à quelques dizaines de mètres au-dessus de l’eau.
La première chose qui frappa Jonathan quand le calme revint, fut la météo. En effet, le ciel n’était plus gris et menaçant, mais d’un bleu azur. Au loin, le soleil se levait derrière l’île d’Oahu abritant le port de Pearl Harbor. Le changement était saisissant. Il décida de reprendre de l’altitude afin d’envoyer un message radio. Pas de réponse. Une inquiétude naissante poussa le pilote à scanner toutes les fréquences radios. Il ne tarda pas à en trouver une, mais la voix qu’il entendit n’avait rien d’américaine. Il s’agissait plutôt d’une langue asiatique à laquelle Jonathan ne comprenait strictement rien. Soudain, il y eut un silence radio de quelques secondes suivi de trois mots que le pilote ne pourrait jamais plus oublier. Trois mots qu’il savait être japonais. Trois mots historiquement célèbres et qui répondaient à toutes ses interrogations : tora ! tora ! tora ! Il comprit aussitôt que le vortex l’avait projeté dans le passé, le 7 décembre 1941 à 7h53. L’attaque de Pearl Harbor par l’armée japonaise venait d’être lancée. L’histoire de cette bataille, tous les pilotes de l’US Air Force la connaissait par cœur. Le président Roosevelt l’avait tristement baptisée le Jour d’infamie. Jonathan avait étudié cette bataille lors de ses classes alors qu’il n’était pas encore pilote : la plus grande défaite militaire américaine. Il ne semblait pas croire à la réalité de sa situation, encore sous le choc de l’annonce radio. Comment pouvait-il se retrouver plongé au cœur d’un des jours les plus sombres de l’Histoire de son pays ?
Seule la première explosion d’un cuirassé parvint à sortir Jonathan de sa torpeur. Il savait que le Nevada venait d’être touché par une torpille. Ce navire avait été la première cible des bombardiers japonais. Quelques secondes plus tard, toute l’île Ford où était stationnée la majeure partie de la flotte américaine, sembla s’embraser sous les feux nippons. Jonathan devait intervenir, c’était son devoir de patriote et il en avait les moyens. Il fit un premier passage au-dessus du port, scannant les fréquences radios afin d’en trouver une américaine. Plus loin au nord, le pilote distingua nettement une nuée d’appareils japonais qui se scindait en plusieurs groupes d’attaque.
– Maintenant les choses vont changer, déclara-t-il solennellement à voix haute.
Jonathan lança ses réacteurs à pleine puissance en direction d’un groupe de onze bombardiers Kate qui arrivait au-dessus des montagnes. Les bombardiers japonais se distinguaient aisément des chasseurs Zéros de par leur couleur verte. La tâche du pilote américain n’en fut que simplifiée. En l’espace de quelques secondes, il fit un carnage avec sa mitrailleuse. Pas un pilote japonais ne réchappa vivant de l’attaque éclair. La surprise avait été totale.
J’ai bien arrosé l’arroseur, pensa Jonathan un sourire narquois aux lèvres.
Le Harrier avait déjà repris de l’altitude lorsque la radio, qui avait capté une nouvelle fréquence, lança un message que le pilote reconnut.
- Raid aérien, Pearl Harbor. Ce n’est pas un exercice.
Il s’agissait du message de détresse qu’avait lancé le commandant Logan de Ford Island. Jonathan vira de bord et ne tarda pas à rattraper un groupe de Zéros qui s’apprêtait à détruire une piste de décollage américaine. Les mitrailleuses du Harrier entrèrent en action et pulvérisèrent littéralement les avions japonais. Les explosions successives obligèrent le pilote à effectuer de spectaculaires manœuvres d’évitement.
Au sol, les militaires assistaient à une scène de science-fiction en voyant le Harrier évoluer dans les airs, venant à leur aide tel un ange tombé du ciel. Aucun pays n’avait jamais développé un tel engin, alors en voir voler un relevait de l’impossible.
De son cockpit, Jonathan aperçut deux Kates qui se dirigeaient vers l’Arizona, le plus célèbre des cuirassés coulé durant la bataille de Pearl Harbor. Le pilote américain orienta son appareil en direction des bombardiers nippons, en verrouilla un et lança une roquette. La déflagration qui s’ensuivit projeta des débris sur les navires alentours. Jonathan n’eut pas le temps de verrouiller le second Kate qui largua sa torpille. Vu du ciel, on pouvait très nettement distinguer le long sillage blanc sous-marin caractéristique, filer à pleine vitesse sur l’Arizona.
Les quartier-maitres Sims et Templeton avaient reçu l’ordre le matin même de passer une couche de peinture sur la coque de l’Arizona. Lorsqu’ils devinèrent une torpille à quelques dizaines de mètres d’eux, ils furent persuadés que leur mort était inéluctable. Perchés dans leur nacelle de travail, que pouvaient-ils faire ? C’est donc comme spectateurs qu’ils assistèrent au plus incroyable des miracles. Un chasseur inconnu passa en rase-mottes à une vitesse folle et largua une bombe qui fit exploser la torpille dans une impressionnante gerbe d’eau. Les deux quartier-maitres, bien que complètement trempés, se jetèrent dans les bras l’un de l’autre de joie. Ils se hâtèrent ensuite de remonter leur nacelle de travail.
A bord de son bombardier, le pilote japonais constata avec stupeur que sa torpille n’avait pas atteint sa cible. Pire, l’OVNI qui en était responsable fonçait à plein régime sur lui. Jonathan fondit sur sa proie qui tenta une manœuvre désespérée pour l’éviter et perdit le contrôle de son appareil. Le Kate termina sa course dans les eaux peu profondes de la baie. A bord du Harrier, Miller poussa un long cri de victoire. Cependant, une nouvelle explosion toute proche l’obligea à se reconcentrer. La bataille était loin d’être gagnée.
Dans la panique, les militaires américains à bord des cuirassés, prenaient tous les avions en vol pour cible. Jonathan dut rapidement se dégager d’un tir d’artillerie et reprendre de l’altitude. Une fois hors d’atteinte, il aperçut en contrebas un petit submersible nippon qui se frayait un passage dans les eaux de la baie. Il prit tout son temps pour viser et largua une seconde bombe. Sans surprise, l’obus atteignit son objectif et le sous-marin de poche japonais implosa.
Avec le recul que lui offrait l’altitude, Jonathan constata les dégâts de la bataille. Trois navires étaient en flamme, dont un donnait déjà de la gîte. Deux pistes de décollage et une bonne trentaine de Curtiss P40 américains étaient hors d’usage. Des volutes de fumées noires réduisaient considérablement la visibilité à basse altitude et au loin de nouvelles vagues d’avions japonais déferlaient sur Pearl Harbor. Les ennemis étaient trop nombreux et Jonathan ne pouvait espérer changer seul le cours de la bataille. Il lui fallait des renforts aériens et rapidement. Il décida de ne s’atteler pour le moment qu’à une seule tâche : la protection d’une piste d’envol afin de permettre aux P40 américains de prendre les airs.
La piste d’Ewa n’avait pas encore été atteinte par les raids aériens ennemis. Les mécaniciens et pilotes américains s’affairaient en tout sens afin de préparer leurs avions au décollage. Mais lorsqu’ils virent une nuée de Zéros surgir à contre-jour, ils coururent se mettre à l’abri dans les hangars voisins. Déjà les premiers chasseurs lançaient leur vague d’assaut lorsque, surgissant de nulle part, le Harrier leur coupa l’herbe sous le pied. A son premier passage, Jonathan descendit trois avions japonais, provoquant un mouvement de panique dans la formation ennemie. Quel était cet étrange et terrifiant appareil qui les décimait comme autant de moustiques ? Une roquette percuta un nouveau Zéro qui, en explosant, détruisit un appareil voisin. Ne croyant pas à leur bonne fortune, les militaires s’activèrent de façon plus intensive à la mise en route de leurs P40.
Des tirs provenant de l’arrière firent prendre conscience à Jonathan qu’il était pris pour cible par deux chasseurs nippons. Il ne tenta aucune manœuvre d’évitement, mais au contraire sortit ses aérofreins et orienta ses quatre tuyères en sens inverse. En deux secondes, les Zéros se retrouvèrent devant lui. Jonathan remit alors les gaz et joua de sa mitrailleuse, réduisant à néant les deux téméraires qui avaient osé relever le défi de le détruire.
Un premier P40 décolla, mais fut presque aussitôt détruit par une nouvelle formation de Zéros. Six autres chasseurs américains tentèrent leur chance et parvinrent à prendre les airs. Aussitôt ils engagèrent le combat et se focalisèrent sur la défense de la piste d’Ewa, ce qui permit à une bonne trentaine d’appareils supplémentaires de décoller. Il s’agissait pour Jonathan d’un tour de force car au cours de la bataille originelle, seuls six Curtiss P40 avaient réussi à prendre leur envol. Côté américain, la bataille était maintenant devenue aérienne et prenait une tournure qui permettait d’envisager une autre issue qu’un immense massacre.
***
– Taylor, fais gaffe à trois heures, tu en as un aux fesses, lança une voix dans la radio.
– J’arrive pas à le semer. Il s’accroche le fumier, répondit l’intéressé.
Jonathan repéra rapidement le P40 en difficulté. Taylor tentait désespérément d’échapper à son poursuivant sans succès. Le Harrier faisait maintenant face au chasseur américain toujours poursuivi de près par un Zéro.
– Merde, c’est quoi ça ? s’affola Taylor.
– A mon commandement, virez de bord à gauche Taylor, ordonna Jonathan.
– Mais vous êtes qui ?
– Obéissez, Taylor, ou vous allez finir par vous faire descendre !
Les deux secondes suivantes parurent durer une éternité pour le lieutenant Kenneth Taylor qui voyait l’avion inconnu grossir dangereusement.
– Maintenant ! lança précipitamment Jonathan.
Taylor réagit et vira de bord aussitôt. Le P40 ne passa qu’à quelques centimètres du Harrier qui ouvrait déjà le feu sur le Zéro. L’aile droite du chasseur nippon fut arrachée par les projectiles du canon rotatif américain. Dans une gerbe de flamme, le Zéro tourbillonna à grande vitesse avant de percuter le sol.
– Qui que vous soyez, merci l’ami, déclara Taylor.
– Peu importe qui je suis, répondit Jonathan. Ce serait trop long à expliquer. Ce qui compte, c’est que je suis de votre côté. Sachez juste que vous et le lieutenant Welch êtes destinés à de grandes choses.
En effet, Jonathan connaissait les deux pilotes de légende qu’étaient devenus les lieutenants George Welch et Kenneth Taylor. Au cours de la bataille de Pearl Harbor, telle qu’il la connaissait, ces deux jeunes pilotes faisaient partie des six P40 qui avaient réussi à prendre les airs. A eux seuls, ils étaient parvenus à descendre pas moins de sept Zéros. Taylor avait même été blessé pendant la défense de la piste d’Ewa. Jonathan avait empêché cela et il en éprouva une grande fierté.
– Tu entends ça, George ?
– Ouais. Je n’y comprends rien, mais peu importe. Comme notre mystérieux inconnu l’a dit, ce qui compte c’est qu’il soit de notre côté. Allons botter le cul de ces salauds !
La défense s’organisa peu à peu et les forces japonaises commencèrent à faiblir. Jonathan s’occupait à présent de protéger les navires bloqués dans le port, son appareil lui conférant un avantage technologique considérable sur l’ennemi.
***
Jonathan jeta un coup d’œil à son horloge de bord qui indiquait 8h40. Il marmonna un juron car il savait que dans dix minutes une seconde vague d’assaut déferlerait sur Pearl Harbor. Il fallait à tout prix empêcher que cela ne se produise.
– Ceci est un message à l’ensemble des pilotes américains déjà dans les airs. Décrochez, je répète, décrochez. Une seconde vague d’assaut arrive par le nord. Il faut les empêcher d’atteindre le port.
– Libérez la fréquence, lança un pilote.
– Ici le lieutenant Welch. Obéissez tout de suite et regroupez-vous derrière le chasseur inconnu. Faites-moi confiance les gars, ce type sait de quoi il parle.
Une minute plus tard, une formation de soixante trois Curtiss P40 mené par un Harrier survolait les montagnes et bientôt l’océan.
– Prenez de l’altitude, ordonna Miller. Nous allons leur tomber dessus par surprise !
D’une seule voix, les pilotes américains confirmèrent l’ordre. Jonathan suivait la progression ennemie sur son radar. Elle comptait plus d’une centaine d’appareils. Mais peu importait le nombre de japonais, il avait une stratégie qui, si elle fonctionnait, réduirait à néant la seconde vague d’assaut nipponne. Il lança ses réacteurs à plein régime. Welch et Taylor, qui étaient à la tête de la formation américaine, virent soudain le chasseur inconnu disparaître de leur champ de vision en quelques secondes.
Jonathan survola la nuée de chasseurs ennemis sans que ceux-ci ne se rendent compte de sa présence. Il attendit quelques secondes et fit faire demi-tour à son appareil. Il abaissa progressivement son plancher jusqu’à atteindre l’altitude des appareils japonais, se plaçant ainsi juste derrière eux.
L’ironie du sort voulut que le lieutenant Welch déclencha l’attaque par trois mots « GO, GO, GO » ce qui ne manqua pas de faire sourire Jonathan. Les P40 plongèrent vers leurs cibles et Miller lança ses réacteurs à pleine puissance. Il verrouilla deux Kates en milieu de formation et tira ses missiles. La déflagration fut si puissante que quatre avions japonais explosèrent et deux autres en perdition finirent leur course dans l’océan. Au même instant la vague de P40 fondit sur les japonais, provoquant des dégâts considérables dans leur formation. Les « japs » ne s’attendaient certainement pas à une contre-attaque au-dessus de l’océan. Pas moins de la moitié de leurs chasseurs et bombardiers furent détruits avant qu’ils ne se décident à changer de cap. Mais c’était sans compter sur la présence du Harrier qui leur barra le passage. Jonathan coupa les gaz et le canon rotatif de son chasseur entra en action. Le carnage qui s’ensuivit resterait à tout jamais dans les mémoires des pilotes présents lors de la bataille. Zéros et Kates se faisaient littéralement perforer par les projectiles 25 millimètres du Harrier. Les avions japonais explosaient de toute part et quand l’un d’eux parvenait à s’en sortir, deux ou trois P40 se chargeait de l’achever. Pas un seul américain ne périt au cours de l’attaque qui ne dura que cinq minutes. Il était 8h55 et la seconde vague d’assaut nipponne venait d’être réduite à néant.
Jonathan savait que la victoire était presque acquise. Il ne lui restait plus qu’un seul objectif : les six porte-avions japonais qui croisaient à quelques milles au nord.
– Bien joué les gars ! lança-t-il. La victoire est à nous, retournez à Pearl Harbor pour terminer le travail.
– Nous direz-vous enfin qui vous êtes ? demanda Taylor.
– Un ami venu de bien plus loin que vous ne sauriez l’imaginer, répondit simplement Miller. Bien plus loin. Adieu mes amis, un jour… nous nous reverrons.
– Merci pour tout, mais pourquoi…
Mais la voix de George Welch se perdit dans un grésillement. Jonathan venait de libérer la fréquence radio. Il ne voulait pas être distrait de son dernier objectif. Il savait qu’une troisième vague d’avions japonais était prête à décoller si on lui en intimait l’ordre. Il voulait à tout prix empêcher cela. Il tira sur le manche du Harrier qui prit aussitôt de l’altitude. Il ne lui restait que trois bombes et deux missiles pour endommager les pistes d’envol des porte-avions ennemis. Il n’avait par conséquent pas droit à l’erreur. Il fallut un quart d’heure au Harrier pour parcourir la distance qui le séparait de la flotte de l’Empire du Japon. Le chasseur, bien trop moderne, échappa aux radars encore rudimentaires des navires japonais. Jonathan visa stratégiquement les pistes de décollage des porte-avions. Lorsqu’il porta son attaque, seule une bombe manqua son objectif. Les ponts de quatre des six navires visés furent endommagés, interdisant tout décollage ennemi. Deux pistes demeuraient opérationnelles, résultat que le pilote trouva insuffisant. Il avisa un bombardier Kate qui s’apprêtait à prendre son envol. Jonathan enfonça le manche du Harrier qui plongea aussitôt. Le Kate roulait déjà sur la piste d’envol lorsqu’il fut perforé de toute part par les mitrailleuses du chasseur américain. Quelques instants plus tard, une explosion de grande envergure, amplifiée par la torpille du Kate, ravagea le pont du porte-avions. « Plus qu’un, pensa instinctivement Jonathan ». Mais les batteries antiaériennes des cuirassés alentours commençaient à cracher leur feu. Il jugea que le risque d’un nouveau passage était trop grand maintenant que l’effet de surprise ne jouait plus en sa faveur. Après quelques périlleuses acrobaties, le Harrier reprit de l’altitude jusqu’à être hors de portée des feux nippons. Là, il comprit que la bataille touchait à sa fin lorsqu’il vit l’ensemble de la flotte japonaise amorcer progressivement un demi-tour.
La bataille de Pearl Harbor était terminée et les Etats-Unis avaient vaincu l’Empire du Japon. Et lui, le sergent-major Jonathan Miller, avait à tout jamais changé le cours de l’Histoire. A aucun moment de sa vie, le pilote américain n’avait ressenti une telle fierté, un tel sentiment d’accomplissement de soi. Grâce à lui, plus de deux mille vies venaient d’être épargnées. Mais le temps était venu pour Jonathan de rentrer chez lui. Du moins l’espérait-il. Il n’appartenait pas à cette époque et devait rétablir un équilibre dans l’espace temps. Craignant que le vortex se soit refermé, il mit le cap sur l’endroit d’où son appareil avait émergé. Une demi-heure plus tard, il arriva sur zone et fut soulagé de constater que le trou noir crevait toujours les cieux. Cette fois-ci, il ne ferma pas les yeux lorsqu’il franchit le seuil du vortex.
***
Le ciel était à nouveau gris au dessus du Pacifique et Jonathan comprit qu’il était revenu à son époque, le 15 avril 2015. Allait-on l’accueillir en héros lorsqu’il raconterait son histoire au Général Stanton ? Allait-on seulement croire à son histoire ? Il n’avait aucune preuve tangible de son intervention à Pearl Harbor. Finalement, cela importait peu, seuls ses actes comptaient. Grâce à lui, un grand drame avait été évité.
C’est dans cet état d’esprit que le pilote mit à nouveau le cap sur Pearl Harbor. Sa jauge de kérosène indiquait un niveau de carburant assez bas. Rien d’alarmant en soi, mais il fallait refaire le plein rapidement. Il se cala sur la fréquence radio de la base aéronavale et lança un appel. L’inquiétude remplaça bientôt la joie car son appel demeurait sans réponse. Avait-il bien réintégré son espace-temps ? En y réfléchissant, il se dit que le ciel nuageux ne constituait en rien une preuve du lieu et de l’époque à laquelle il se trouvait. Pourtant il se trouvait au dessus de l’océan. Mais quel océan ? Etait-ce bien le Pacifique ? Le doute était permis. Jonathan ne disposait plus d’aucun repère temporel et géographique. Bientôt la silhouette d’une côte se dessina à l’horizon. Le pilote plissa les yeux et souffla de soulagement en reconnaissant la topographie caractéristique de l’île d’Oahu. Mais toujours pas de réponse à ses appels radios répétés.
Soudain, l’horreur prit le pas sur le soulagement lorsqu’il découvrit un port de Pearl Harbor qui avait été complètement ravagé par les flammes. C’était l’enfer sur Terre. Tout était détruit, brûlé et broyé. Le port, la ville d’Honolulu, les villages un peu plus loin dans les terres : rien n’avait été épargné. Tout sur l’île n’était que le terrible témoignage d’un lointain drame. Lointain car la nature avait repris ses droits. Une luxuriante végétation avait envahi les rues du port. Le paysage de désolation qui se dessinait au sol laissa Jonathan sans voix. L’île semblait désertée de toute vie. Cependant, le faible niveau de carburant poussa le pilote à aviser une zone suffisamment large pour lui permettre d’atterrir. Toutes les pistes de la base étaient hors d’usage, aussi dut-il procéder à un atterrissage vertical.
Lorsqu’il coupa les réacteurs du Harrier, un silence de mort régna sur l’île. Jonathan fut parcouru d’un frisson en descendant du chasseur. Sans bien savoir ce qu’il cherchait, le pilote erra dans les rues désertes de la ville plusieurs heures durant. Que s’était-il produit ? C’était à n’y rien comprendre. Les américains avaient gagné la bataille et pourtant la ville n’était maintenant qu’un vaste champ de ruines. Il envisagea subitement une hypothèse qui pouvait expliquer sa situation. Le trou de ver l’avait sans doute projeté dans un avenir où une catastrophe s’était produite sur l’île. C’était la seule explication plausible à ses yeux. Sa théorie ne répondait cependant pas à la question qui lui torturait l’esprit : qu’est-ce qui avait provoqué une catastrophe de cette ampleur ? L’heure n’était pas aux questions. Il devait maintenant se préoccuper de son propre sort.
Il se mit en quête de carburant pour son appareil. Ses réserves lui interdisaient tout retour sur le continent trop distant. Mais le sort semblait s’acharner contre Miller qui, après plusieurs heures de recherche, ne parvint pas à trouver la moindre goutte de kérosène. Le soir venu, le sergent-major alluma un feu non loin de son appareil et se contenta d’une ration de survie pour seule nourriture. Peu à peu ses craintes devinrent des angoisses. Etait-il condamné à survivre seul sur cette immense île déserte ? La fatigue l’emporta sur le stress et le pilote finit par s’endormir.
***
La fraîcheur matinale réveilla Jonathan qui tremblait quelque peu. Lorsqu’il ouvrit les yeux, encore embués par le sommeil, il eut un vif mouvement de recul en découvrant un vieillard qui se tenait debout devant lui. Une longue barbe blanche dissimulait un visage buriné, celui d’un homme marqué par la dureté de son existence. Il était vêtu de haillons, lambeaux vétustes de ce qui avait été des vêtements en d’autres temps. L’homme n’esquissa pas le moindre geste. En l’observant plus attentivement, Jonathan vit que des larmes coulaient le long de ses joues ridées. Le pilote était sur le point de lui adresser la parole, mais l’homme le prit de court.
– La prophétie était donc vraie, déclara-t-il d’une voix chargée d’émotion.
– La prophétie ? demanda Jonathan. De quoi parlez-vous ? Et puis qui êtes-vous ?
– Mon nom est Dean Thomas et je suis ici pour vous.
– Ecoutez, monsieur Thomas. Je ne comprends absolument rien à ce que vous dites.
– Vous êtes notre sauveur. Cela fait plus de trente ans que j’attends votre venue. J’avais fini par croire que mes prières resteraient sans réponses. Mais vous êtes là !
Dean Thomas fondit en sanglots et tomba à genoux. Jonathan, qui ne comprenait toujours rien à la situation, aida le vieillard à se relever. Il fallut à ce dernier un certain temps pour parvenir à réprimer ses larmes.
– Suivez-moi, balbutia-t-il. Nous serons mieux au chaud pour discuter.
Les deux hommes se mirent en route.
– Vous êtes nombreux à vivre sur l’île ? demanda Jonathan.
– Nous étions deux, mais mon ami est mort il y a trois ans déjà. Je vis seul désormais.
– Mais pourquoi restez-vous sur cette île si vous êtes seul ?
– J’attendais votre retour.
– Mon retour, s’enthousiasma Miller. Vous savez donc qui je suis ?
– Vous êtes l’ange descendu des cieux en 1941 et une prophétie annonçait votre retour.
– Incroyable, répondit le pilote. On se souvient encore de moi. Mais en quelle année sommes-nous ?
– En 2015, le 15 avril.
Je suis revenu dans le présent, mais tout est différent, pensa Jonathan.
Une évidence s’imposa alors au pilote. Il n’avait pas seulement changé le cours de la bataille de Pearl Harbor, mais le cours de l’Histoire. Sans réfléchir, il avait combattu les Japonais et avait provoqué un effet papillon. La question était maintenant de savoir quel impact avait eu son intervention sur le cours du temps. A quel point les choses étaient-elles différentes ?
Il n’osa plus poser de question à Dean Thomas jusqu’à ce qu’ils arrivent, une demi-heure plus tard, à ce qui avait été la bibliothèque municipale. Vu de l’extérieur, le bâtiment semblait être en ruine. Mais ce n’était là qu’une illusion. A l’intérieur, Jonathan découvrit une immense salle que le vieil homme avait aménagée avec soin. On aurait dit un gigantesque loft dont les pièces étaient délimitées par d’immenses rayonnages chargés de livres. Le pilote resta bouche bée devant ce lieu de vie hors du commun. Le vieillard le guida jusqu’à une petite pièce qui ressemblait plus à un temple qu’à un bureau. A l’intérieur, un petit autel orné de bougies avait été dressé. Il fut frappé de stupeur en découvrant une photographie de son Harrier disposée au dessus de l’autel. Cette prise de vue noir et blanc montrait le port de Pearl Harbor ravagé par les flammes. On distinguait parfaitement son chasseur qui faisait face à l’objectif au premier plan. Trop occupé par la bataille aérienne qui faisait rage, le pilote n’avait pas remarqué le photographe au sol. Le cliché, bien que froissé et usé, semblait être l’objet du culte de Dean Thomas. Voilà pourquoi le vieillard l’appelait « l’ange descendu des cieux ». Jonathan était apparu comme par miracle, sauvant les militaires américains d’un sort funeste. Il avait tout aussi mystérieusement disparu dès la fin de la bataille, ne laissant pour toute trace de son passage qu’une simple photographie prise à son insu.
– Racontez-moi tout, Dean, supplia-t-il d’une voix tremblante. Je dois tout savoir de ce qui s’est passé depuis le 7 décembre 1941.
Le vieil homme se lança alors dans un long monologue. Il expliqua à Jonathan comment les américains, forts de leur victoire à Pearl Harbor, avaient écrasé le Japon sous le poids des bombes avant de retourner dans leur mutisme. La rage ne s’était pas emparée du cœur des américains qui, attentistes, avaient observé ce que le président Roosevelt avait qualifié de « guerre européenne tout au plus ». Le débarquement de Normandie n’avait par conséquent pas eu lieu et Hitler, fort de ses positions européennes avait rapidement vaincu la France. L’Angleterre avait capitulé peu de temps après. Les Etats-Unis s’étaient rendus compte de leur erreur trop tard et n’étaient entrés en guerre contre l’Allemagne nazie qu’en 1947. Pendant près de quarante ans, les deux camps s’étaient affrontés, faisant plus d’un milliard de victimes et le 23 septembre 1986, les Etats-Unis avaient capitulé sans condition. L’année suivante avait marqué un tournant dans l’Histoire lorsque Adolph Hitler s’était éteint, rongé par le cancer. Un tournant car son fils adoptif, un sadique sans nom, avait pris sa succession. Un milliard d’êtres humains périrent dans les camps de la mort qui s’étaient multipliés partout à travers le monde. En sauvant deux mille vies, Jonathan avait condamné l’Humanité à la nuit. Lui, le sergent-major Miller était responsable de plus de deux milliards de morts. Seul, il avait changé le cours de l’Histoire et seul, il était responsable du plus atroce des crimes contre l’Humanité : le monde était aujourd’hui dirigé d’une main de fer par les nazis.
***
Comme si les larmes ne suffisaient pas à exprimer le poids de sa culpabilité, Jonathan eut un haut-le-cœur et se retourna pour vomir à plusieurs reprises. C’était plus que son corps et son esprit ne pouvaient en supporter. Il se leva brusquement et quitta la bibliothèque en courant.
Bien que hors d’haleine, il continua de courir longtemps. Son corps cherchait à expier son terrible pêché. Quand de fatigue il tomba à genoux, il hurla sa douleur plusieurs heures durant. Il erra ainsi, l’âme en peine, pendant deux jours avant de s’écrouler inconscient sur une plage d’Honolulu.
Lorsqu’il s’éveilla, le soleil était déjà bas à l’horizon. La nuit n’allait pas tarder à recouvrir l’île en ruine d’Oahu. Sur sa droite, Jonathan vit Dean Thomas qui longeait la plage avant de venir s’asseoir à côté de lui.
– Et vous Dean, commença le pilote, quelle est votre histoire ?
– Je suis un privilégié d’avoir vécu si longtemps sur cette île. Voyez-vous, en 1978 j’ai obtenu mon diplôme de journaliste et me suis embarqué dans le premier navire qui partait pour le front Atlantique en tant que reporter de guerre. Cela me semble si loin aujourd’hui. Mais le cuirassé est tombé dans une embuscade et les nazis m’ont capturé et déporté dans le camp de Lorient sur la côte française. Les années qui suivirent, furent les pires de toute ma vie. Famine, insalubrité, tortures et expériences humaines en tout genre étaient notre lot quotidien. Sans mes amis pour me soutenir, je crois que j’aurais fini par mourir là-bas. Mais par chance, j’ai fait la connaissance de Sam et Richard. Sam était anglais et son seul crime était d’être peintre. C’est lui qui vivait avec moi sur l’île jusqu’à ce triste jour, il y a trois ans, où il est décédé après une longue période de fièvre. Quant à Richard, et bien Richard est l’homme qui a changé nos deux vies à Sam et moi. C’est lui qui nous a parlé de la prophétie annonçant votre retour. Au début nous ne l’avons pas pris au sérieux jusqu’à ce qu’il nous montre cette photo de votre étrange avion prise au cours de la bataille. Ce cliché qu’il chérissait comme un trésor, il le tenait de son père, Kenneth Taylor, qui le lui avait transmis avant de mourir.
– Vous voulez dire que votre ami s’appelait Richard Taylor ?
– Oui, son père était pilote pendant la bataille de Pearl Harbor.
– Je l’ai connu, déclara Jonathan abasourdi par cette révélation.
– Toujours est-il qu’au fil des années passées au sein du camp, nous avons élaboré un plan d’évasion. Nous devions nous enfuir et retourner ensuite sur l’île d’Oahu pour attendre votre retour. Mais le plan ne se déroula pas comme nous l’avions prévu et Richard donna sa vie pour nous permettre, à Sam et moi, de nous échapper. Je n’ai jamais oublié le sacrifice de Richard, paix à son âme. Après un long périple, nous sommes finalement parvenus jusqu’à cette île que nous savions déserte depuis les années soixante. La suite vous la connaissez, trente et un an à attendre votre venue. Mais cela en valait la peine puisque vous êtes là. Vous êtes revenu pour nous sauver de la tyrannie des nazis.
Jonathan fondit à nouveau en larmes, mais se reprit très vite.
– Dean, c’est maintenant à mon tour de vous compter une triste histoire car croyez-moi mon ami, je ne suis pas un ange descendu des cieux pour vous sauver.
Et il raconta au vieil homme qui il était, d’où il venait et comment par sa faute, le cours du destin avait pris cette dramatique tournure. Le choc dut être violent pour Dean, mais jamais celui-ci ne fit le moindre reproche à Jonathan car il savait que dans une telle situation, il aurait agi de la même manière. C’est donc le cœur lourd que les deux hommes s’en retournèrent à la demeure de Dean.
La nuit était déjà bien avancée lorsqu’ils parvinrent à l’ancienne bibliothèque. Aucun des deux hommes n’avait prononcé la moindre parole. Les mots semblaient futiles et chacun combattait ses propres démons intérieurs. Dean montra au pilote les nombreuses toiles qu’avait peintes son ami Sam au cours de ses vingt-huit années passées sur l’île. Jonathan prit le temps de toutes les regarder dans un silence presque religieux. Le vieillard le laissa dans sa contemplation et alla s’agenouiller devant l’autel de son petit sanctuaire.
Lorsque Jonathan revint, Dean priait devant la fameuse photographie qui était à l’origine du terrible quiproquo. Mais en la regardant attentivement, le pilote eut une révélation.
– Dean, je dois m’en aller, lança-t-il soudain d’une voix excitée. Je sais maintenant, je sais.
Le vieil homme ne sembla pas surpris outre mesure par l’étrange phrase du pilote. Il se retourna et déclara simplement :
– Alors va, mon ami. Va.
– Adieu, répondit avec émotion Jonathan.
Il quitta la demeure de Dean Thomas et se précipita vers son Harrier.
***
La nuit se changea en jour lorsque le chasseur franchit à nouveau le vortex. Par chance le trou noir était resté ouvert, offrant ainsi au pilote la possibilité de franchir à nouveau le seuil d’un lointain passé.
Le 7 décembre 1941, le ciel était d’un bleu azur et en contrebas, Jonathan vit un autre Harrier, hors de contrôle, qui perdait rapidement de l’altitude. Le pilote à bord de l’autre appareil, c’était lui lorsqu’il avait franchi le trou noir la première fois. Il eut une étrange impression en voyant son double manœuvrer tant bien que mal afin de stabiliser son appareil. Pendant quelques secondes, il fut tenté de contacter son double afin de le convaincre de ne pas prendre part à la bataille, mais le temps ne jouait pas en sa faveur. Son double écoutait déjà le message d’attaque japonais et était sur le point de se lancer corps et âme dans la bataille. Il ne lui restait plus qu’une seule solution.
– Le temps de la rédemption est venu, déclara solennellement Jonathan.
Il enfonça le manche du Harrier et s’élança à pleine puissance comme un missile sur son double. Il ferma les yeux alors que des larmes coulaient doucement sur son visage. Les images de son existence défilèrent devant ses yeux tel un film accéléré. Un sentiment d’éternité l’envahit soudain.
Personne ne fut témoin de la gigantesque explosion au dessus du Pacifique. Jonathan aurait sans doute dit que c’était mieux ainsi. Il avait réussi, il avait à nouveau infléchi la courbure du temps. Son double ne prendrait pas part à la bataille et les américains subiraient le Jour d’infamie. Le cœur emplit de haine pour cet acte barbare, les Etats-Unis s’engageraient dans la seconde guerre mondiale pour finalement triompher des forces de l’Axe.
Ce jour là, près de deux mille vies furent perdues.
Ce jour là, près de deux milliards de vies furent épargnées.
FIN
T’as aimé…ou pas
T’as tout lu, tout vu, tout entendu…ou pas
Peu importe, post un com et like la page pour dire que tu existes car ton avis est important pour moi, mais aussi pour le futur de ce blog, un gros merci d’avance !
20:19 | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : uchronie, s-f, anticipation, nouvelle, voyage dans le temps
mercredi, 24 octobre 2012
Beyond Humanity 1 : Des Jambes en Or [Nouvelles/Anticipations]
Le jeune Nathan alluma la télé. La conférence de presse venait tout juste de commencer.
Nike Thompson, la star du ballon rond, rayonnait sous le feu des projecteurs. Mais ses jambes dorées fraîchement acquises n'avait rien à lui envier.
La première question ne tarda pas à fuser :
- Est-il vrai que vous n'avez payé que le quart de la somme exigée par Nike pour convertir votre prénom ?
C'était la grande mode. Les grandes marques autorisaient ceux qui en avaient le désir, et surtout les moyens, à s'octroyer leur nom. En échange, ils bénéficiaient de réductions conséquentes sur une large gamme de produits et de services. Le sponsoring dernier cri. Cela faisait évidemment fureur dans le milieu sportif, mais certains particuliers étaient parvenus récemment à obtenir ce privilège.
L'intéressé secoua la tête, faisant voltiger ses dreadlocks argentées et arma un sourire éclatant de blancheur :
- C'est tout à fait juste. Il faut savoir que les contrats stipulent que vous ne devez payer que les lettres que votre prénom d'origine ne possèdent pas.
Or, ce n'est un secret pour personne, je m'appelais encore Mike il y a une semaine. J'ai donc profité de cette chance pour obtenir une bonne ristourne.
Il faut toujours lire les petites lignes, surtout quand elles sont en votre faveur.
Il se mit à rire, rapidement imité par l'assemblée de journalistes.
En quelques années, Nike avait obtenu un capital sympathie énorme que beaucoup lui jalousaient. Et pour ne rien gâcher, c'était un athlète performant.
Seulement, tout cela ne suffisait plus à être compétitif à une époque où la technologie était omniprésente.
Son accident de voiture, un mois plus tôt, avait eu raison de ses doutes à ce sujet. Entre un fauteuil roulant synonyme de retraite anticipée et des prothèses sur mesure synonymes de tremplin de carrière, le choix avait été simple. Les sponsors avaient débloqué sans hésiter des fonds substanciels afin qu'il bénéficie du must en la matière.
Des jambes cybernétiques pour un sportif de sa trempe, ce n'était pas un luxe, juste la garantie de ne jamais rester sur la touche.
- Monsieur Thomson...
- Je vous en prie, appelez-moi Nike. Autant rentabiliser mon investissement !
Nouveaux rires dans l'assistance.
- Euh...Nike, une rumeur tenace circule actuellement en ce qui concerne la vraie nature de votre accident. Il aurait été mis en scène afin que vous obteniez plus facilement vos jambes artificielles.
- L'enquête n'a rien prouvé de ce côté. Je n'ai aucun souci à me faire.
- Vous reconnaissez donc qu'il y a eu enquête.
- Ceux qui me connaissent savent que le mensonge est une gymnastique que je ne maîtrise pas. Et puis, que serait le monde sans rumeur ? Ennuyeux, c'est certain. Demain, une autre verra le jour. Ma main à couper. Car en ce qui concerne les jambes, c'est déjà fait.
Nathan éclata de rire. Nike Thompson était son héros, son modèle. Il était célèbre, beau, fort, rapide, drôle, honnête. Et maintenant, il avait des jambes cyber.
La perfection incarnée.
Le garçon rêvait d'en avoir, lui aussi. Ca tournait à l'obsession. Il faut dire qu'il avait de bonnes raisons d'y penser jour et nuit.
Sa mère rentra du travail à ce moment là. Elle l'embrassa.
- Tu n'aurais pas des devoirs à finir, par hasard ?
- Si, mais j'attendais que l'émission se termine.
- Nike Thompson, c'est d'un ridicule !
- Moi, je trouve ça trop cool. Un jour tu crois que je pourrais avoir un nom comme ça, moi aussi ?
- Certainement pas tant que tu habites sous mon toit. Si tu veux couvrir ta mère de honte, ce sera loin d'elle et avec ton propre argent.
- Et des jambes cyber, tu crois que je pourrais en avoir quand ?
- On en a déjà parlé, Nathan. Je n'ai pas changé d'avis et je n'en changerai pas.
- Maman, c'est pas juste. Dans ma classe, il n'y a que moi qui en ai pas. Je peux plus suivre les cours d'athlétisme à cause de ça. Le prof dit que j'ai plus le niveau.
- Tu n'as pas besoin de l'école pour faire du sport. Il y a un excellent centre dans le quartier. Je vais t'y inscrire et tu pourras faire l'activité que tu voudras. Ne te laisse pas embobiner par les autres. Tu n'as pas besoin de prothèse. Tu as tout ce qu'il te faut pour être heureux.
Mais Nathan était très loin d'en être convaincu.
Le lendemain matin, sur le chemin de l'école, Nathan détaillait les jambes mécaniques de son copain Jimmy avec encore plus d'envie. Elles ressemblaient à s'y méprendre à celle de son super héros préféré, Iron Man.
- Pourquoi tu les montres comme ça ? C'est pour me faire chier ?
Jimmy était un gentil garçon. Comme Nathan. Ses parents étaient seulement plus fortunés. Et fatalement, plus tentés de le montrer.
- Mais, non. C'est juste que maintenant j'ai un sponsor.
Il indiqua du doigt le logo Coca-Cola sur son tibia en titane.
Ils ont accès aux caméras de la ville et ils vérifient que je montre bien la marque. Je peux gagner beaucoup d'argent juste pour une journée. Enfin ma mère. Moi, j'ai pas encore l'âge.
- T'as pas l'impression de te faire exploiter ?
- Salut les loosers !
C'était Nasa. Ce jour-là, elle avait mis un short en jean pour faire ressortir ses jambes métalliques d'un blanc laiteux superbement ouvragées. Son père était un industriel réputé. Elle en avait très tôt profité. Dès la naissance en fait, puiqu'elle fut l'un des premiers bébés dont l'accouchement s'effectua intégralement par un androïde.
- On fait la course, Jimmy ? Nathan, tu donnes le top.
Nathan était secrètement amoureux d'elle. Mais Nasa n'avait d'yeux que pour Jimmy. Normal, ils étaient faits du même bois. Ou plutôt, du même métal.
- Ok, fit Nathan, blasé.
Il attendit qu'ils se mettent en position.
- 3...2...1...
Il y eut une détonation.
Nasa gloussa en voyant les deux garçons paralysés.
- Mon père m'a installé un mod vocal ce week-end. Je peux faire 150 sons différents. Cool, non ?
Jimmy décida de ne pas être impressionné.
- On court ou on cause ?
Il partit comme une flèche, rapidement rejoint par la demoiselle.
Nathan les observa disparaitre à l'horizon. Un horizon qui lui paraissait bien distant sans les bons outils pour l'atteindre.
Quand vint l'activité sportive, il fut comme d'habitude gentiment invité à se rendre en salle d'étude sous le regard gêné des autres élèves.
Mais cette fois, Nathan n'était pas d'humeur à se laisser dicter sa conduite. Il se rendit à l'arrière du bâtiment secondaire, où il savait la surveillance moindre, et se jucha sur l'un des balcons. La hauteur n'était pas suffisante pour le tuer, mais avec un peu de chances, en retombant bien sur ses pieds... Sa mère mentait. La vraie raison pour laquelle elle ne voulait pas lui acheter des jambes cyber c'était parce qu'elle trouvait ça ridicule. L'argent, elle l'avait sûrement.
Elle travaillait tous les jours, même le dimanche. S'il ne lui donnait pas le choix, elle serait obligée de les lui offrir. Il avait assez attendu son tour. Convaincu de cela, il ferma les yeux et sauta dans le vide. En pensant très fort à Nike Thompson.
La mère de Nathan se précipita dans la chambre. Cloué au lit, le garçon ne put accepter son étreinte, mais elle lui caressa le visage de façon éloquente tout en versant un cortège de larmes. Elle s'assit à son chevet et lui prit la main.
- Dis-moi que c'est un accident ! Dis-moi que tu n'a pas sauté !
Nathan était ému par la réaction de sa mère. Il n'avait pas pensé que cela la mettrait dans un état pareil. Il n'avait pas non plus pensé que son geste le mettrait, lui, dans un état pareil. Les médecins avaient été unanimes. Nathan était paralysé, des pieds à la tête. Le choc avait été suffisamment fort pour toucher la moelle épinière.
Comme son fils ne répondait pas et commençait à pleurer à son tour, elle devina facilement la vérité.
- Pourquoi tu ne m'as pas cru ? Je ne peux pas t'acheter ces jambes. Je dois rembourser des tonnes de dettes à cause de ton père ! J'ai tout juste de quoi nous faire vivre et te payer tes frais scolaires. Ton accident ne va rien changer, je suis désolée. Ce sera même pire qu'avant.
Quelques jours plus tard, une annonce des médias fit grand bruit. Une vidéo fut diffusée au grand public qui devait changer le destin de Nike Thompson à jamais. On le voyait debout contre un mur se faire broyer les jambes par une voiture conduite par son manager. Une heure plus tard, le champion perdait sa cote de sympathie, ses sponsors et son avenir professionnel. Il dut même rendre ses jambes pour entorse au contrat.
Le lendemain matin, personne ne s'étonna de voir son suicide faire les gros titres des journaux. Il y eut bien des procédures pour l'innocenter et réhabiliter sa mémoire, mais elles furent bien vite oubliées dans le flot continuel de rumeurs dont s'abreuvaient le public. Demain, d'autres verraient le jour. L'ennui était proscrit.
Bienvenue dans un monde où la Technologie et l'Homme ne font plus qu'un.
Ce monde existe déjà. C'est le nôtre :
Lire Beyond Humanity 2 : Un Cadeau Empoisonné
T’as aimé…ou pas
T’as tout lu, tout vu, tout entendu…ou pas
Peu importe, post un com et like la page pour dire que tu existes car ton avis est important pour moi, mais aussi pour le futur de ce blog, un gros merci d’avance !
15:40 | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : anticipation, futur, nouvelle, cybernétique
Un Monde sans Humains ? [Documentaire]
Après avoir vu cet instructif mais ô combien terrifiant documentaire diffusé sur Arte j'ai eu l'idée de créer une série de nouvelles d'anticipation basé sur le futur de la technologie, de ses applications au quotidien et surtout de son emprise au détriment de notre libre-arbitre et de notre humanité. Chaque histoire sera donc dédiée à une invention en particulier :
Beyond Humanity 1 : Des Jambes en or
Beyond Humanity 2 : Un Cadeau Empoisonné
Mais si vous cherchez de l'optimisme ou de l'espoir, passez votre chemin...Le futur de l'humanité s'annonce sans humanité et cela a déjà commencé. Ou comment créer la Matrice du film Matrix de l'intérieur.
T’as aimé…ou pas
T’as tout lu, tout vu, tout entendu…ou pas
Peu importe, post un com et like la page pour dire que tu existes car ton avis est important pour moi, mais aussi pour le futur de ce blog, un gros merci d’avance !
15:35 | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : futur, technologie, transhumanité, sciences, cybernétique
mardi, 23 octobre 2012
L'Ame de Gotham
Le Joker n'était plus. Si sa mort ne lui avait pas autant coûté, à lui et aux autres, Bruce Wayne aurait pu dire que c'était le plus beau jour de sa vie. Loin s'en fallait.
Gotham devrait fêter l'évènement sans lui.
Un matin, de bonne heure, l'équipe du projet Innocence fut sur le pied de guerre à sa demande. Elle tenta bien de le dissuader d'expérimenter la machine si tôt alors que le projet n'était pas encore totalement finalisé. Mais c'était comme d'essayer de faire fondre un iceberg avec une allumette. Bruce avait décidé de se passer de la phase de tests préliminaires. Le test ce serait lui. Si Gotham voulait qu'il vive alors il vivrait. Si elle voulait le faire payer pour sa trahison envers elle, pour sa lâcheté, alors ce serait simple pour elle.
Il entra dans la machine. L'équipe mit les appareils en marche. De la buée couvrit l'intérieur du cylindre. Bruce colla son index sur la paroi. Il y dessina la silhouette d'une chauve-souris avant de l'effacer avec un plaisir indicible. Il ferma ensuite les yeux. Tout ce qu'il voulait c'était oublier. Etre quelqu'un d'autre. Le meilleur de lui, mais autrement.
- 30 ans plus tôt -
Le jeune Bruce a 10 ans.
Il sort du cinéma accompagné de ses parents.
Il fait nuit.
La petite famille est heureuse. Elle a passé un bon moment.
Elle s'est construite un beau souvenir.
Elle parle du film avec animation. Ce faisant, ils traversent tous les trois la rue et prennent la direction d'une ruelle moins fréquentée, moins éclairée. Bruce persuade son père de ne pas rentrer à pied et de prendre un taxi. Il sent un grand danger planer sur eux. En fait il l'a senti pendant presque toute la projection au point qu'il a dû faire beaucoup d'efforts pour ne pas y penser et profiter du spectacle. Maintenant, qu'ils sont sortis, il se sent investi d'une mission. Le danger est plus proche que jamais. Il veut l'éviter à tout prix. Thomas Wayne ne comprend pas sa réaction, mais finit par céder devant son insistance. Ils montent dans un taxi.
Dans la voiture, le jeune Bruce, apaisé, rejoue les meilleures scènes du film. Interprétant le héros, il mime une scène de bagarre avec la complicité de son père singeant un féroce criminel. Ils se lancent tous deux dans véritable concours de poses et de grimaces. Martha Wayne est hilare et admirative. Le trio se construit un nouveau merveilleux souvenir.
A travers la vitre du taxi, le jeune Bruce contemple les rues animées. La ville est magnifique. Parée de toutes ses lumières, elle exerce sur lui une fascination grandissante, comme s'il tissait avec elle un lien privilégié. Elle semble se confier, ne s'adresser qu'à lui. Il se sent comme à Noël. Il y a une ambiance de fête. Les gens dehors sont joyeux. Comme si son propre bonheur était communicatif. Il se sent bien, à sa place. Il est incapable de dire pourquoi. C'est ancré en lui. Il ne peut qu'en profiter et ça lui suffit.
Ils sont à mi-chemin du manoir lorsque la voiture s'arrête à un feu. L'attente est longue, mais personne ne s'impatiente. Le jeune Bruce a totalement oublié ce sentiment d'insécurité qui l'étreignait un peu plus tôt. Lorsqu'il voit un un homme masqué s'approcher du taxi, il ne perçoit aucune menace. L'homme crie quelque chose et pointe une arme sur le chauffeur. Ce dernier hésite un instant. Il prend le temps d'adresser un regard rassurant à la famille avant de se baisser pour vider sa caisse. A l'arrière Thomas Wayne serre très fort sa femme et son fils contre lui. Il leur murmure des paroles réconfortantes. Ce n'est qu'un mauvais moment à passer. Bientôt ils seront chez eux, sains et saufs. Il suffit d'attendre, sans rien faire, sans rien tenter, afin de ne pas attirer l'attention sur eux. Martha pousse un cri. Le chauffeur vient de se ruer sur son agresseur pour le désarmer. Ils luttent âprement sous le regard terrorisé de la famille Wayne. Voyant le chauffeur faiblir, Thomas Wayne se mord la lèvre. Brusquement, il quitte le véhicule pour lui prêter main forte, s'arrachant à l'étreinte de sa femme. Martha prend peur et se précipite pour l'arrêter. Un coup de feu éclate. Thomas s'écroule. Le chauffeur se fige. Le gangster en profite pour lui arracher l'arme des mains. Dans la précipitation, son doigt appuie sur la détente. Martha tombe à son tour. Le braqueur assomme son adversaire d'un coup de crosse avant de prendre la fuite.
Bruce Wayne, assis dans le taxi est paralysé, mais ses yeux parlent. Il se sait intuitivement orphelin, sans en percevoir toutes les implications. Lorsque la police arrive, il comprend qu'il doit sortir de la voiture. Il fait quelques pas, ses jambes comme gainées de plomb. Et la réalité de fondre sur lui telle un oiseau de proie. Il observe le corps sans vie de ses parents liés jusqu'à la mort. Il ne réalise pas encore ce qui vient de se passer. Tandis qu'un policier du nom de Gordon l'emmène dans un endroit sûr, il regarde la flaque de leur sang mêlé s'agrandir sur la chaussée. Elle forme la silhouette caractéristique d'un animal. Un symbole qui s'imprime directement dans son esprit. Bruce Wayne la regarde, comme hypnotisé. Son destin est désormais tout tracé.
Gotham peut s'endormir en toute quiétude. Elle a regagné son héros. Elle a retrouvé son âme...
T’as aimé…ou pas
T’as tout lu, tout vu, tout entendu…ou pas
Peu importe, post un com et like la page pour dire que tu existes car ton avis est important pour moi, mais aussi pour le futur de ce blog, un gros merci d’avance !
02:37 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : batman, gotham city, le joker, bruce wayne
lundi, 22 octobre 2012
Echec au Fou
- Sale petit égoïste ! Tu n'as pas le droit !
Bruce Wayne revint à lui. Il était ligoté sur son fauteuil. Le Joker lui faisait face. Il avait l'air furieux.
- Tu ne peux pas te débarrasser de Batman. Tu es Batman. Le seul dont tu dois te débarrasser c'est Wayne. C'est lui ton véritable masque. C'est lui qui t'empêche d'être vraiment toi-même. Tu n'as connu et vécu que pour faire régner l'ordre et la justice. Tu ne connais rien d'autre. C'est le sens de ta vie. Tout comme générer le chaos est le sens de la mienne. Nous sommes les deux côtés d'une même pièce. Nous ne sommes rien l'un sans l'autre.
Bruce secoua la tête.
- Justement, je suis fatigué de ce petit jeu. J'ai été privé d'une vie qui me manque plus que jamais. J'ai enfin l'occasion de la vivre et de tirer un trait sur tout ça. Je ne vais pas m'en priver. Encore moins pour te faire plaisir. Tu ne t'es jamais demandé quelle aurait été ta vie si tu avais pu vivre heureux avec tes parents ?
- Non. Mais c'est la différence entre toi et moi. Moi j'ai toujours accepté mon destin. Et en l'acceptant, j'ai appris à l'aimer. Je suis doué dans ce que je fais. Pourquoi voudrais-je une autre vie ? Des tas de gens passent la leur à chercher un sens à leur existence. Nous, nous avons la chance de l'avoir trouvé très tôt.
- Ca ne me suffit plus. Je suis peut-être doué, mais j'ai payé trop cher pour l'être et au final je ne suis pas heureux.
- Le bonheur c'est la quintessence de l'illusion. Toi qui es un détective hors pair, tu devrais le savoir. Au mieux c'est une cage dorée. Et nous sommes tous deux trop épris de liberté pour nous laisser enfermer dans de telles conventions. Dans le cas contraire, tu aurais raccroché ta cape depuis longtemps et tu aurais épousé une gentille veuve éplorée.
- C'est justement ce que je compte faire.
- Si tu crois que je vais te laisser faire.
- Tu n'as jamais voulu me tuer.
- Je préfère te tuer de mes mains plutôt que ne jamais t'avoir connu. Tu es indispensable à mon esprit.
- C'est la différence entre toi et moi.
Bruce se libéra de ses liens et frappa violemment le Joker à la figure. Du sang gicla. Harley se jeta sur le justicier, une lame à la main.
- Tu as tué mes parents, ça ne te suffit pas !
Le poignard déchira la chemise et le torse de Bruce. Harley voulut lui taillader le visage. Le justicier esquiva avec l'agilité d'un boxeur aguerri avant de lui tordre le poignet et de la bloquer face contre un mur.
- Je n'ai rien à voir avec la mort de tes parents et tu le sais. Tu l'as seulement oublié !
- Tu as tué mon père ! Tu l'as tué sous la pression, tu l'as exploité jusqu'à ce qu'il devienne fou et qu'il s'en prenne à nous !
- Le Joker te manipule depuis le début. Tu étais fragile, il n'a eu qu'à te brosser dans le bon sens du poil. Mais ça aussi tu le sais. Tu es une fille intelligente, Harleen.
- Ne m'appelle pas comme ça, je déteste ce prénom autant que je te déteste.
- Déteste-moi si tu veux, mais accepte la vérité. Le poids du mensonge est une douleur sans nom. Je ne le sais que trop bien. Je parie qu'il t'a dit qu'en tuant tes parents, tu serais libre comme jamais. Tu t'es salie les mains pour lui. Tu as sacrifié ta vie. Mais, lui, que t'a-t-il donné en échange ?
Harley dévisagea le Joker encore inconscient.
Batman le connaissait mieux qu'elle, c'était un fait. Il avait passé une bonne partie de sa vie à le combattre. Même si cela ne lui faisait pas plaisir, elle sentait que le Chevalier Noir était sincère. Mieux que cela. Il était prévenant. Mais pas comme le Joker. Son ton était différent. Plus paternel, plus amical. Plus désintéressé.
- Laisse-moi me retourner.
Batman obtempéra, espérant l'avoir convaincue. Harley plongea ses yeux dans les siens. Elle ne vit rien qui put lui mettre le doute. Bien au contraire.
Voyant qu'il parvenait à ses fins, le regard du justicier s'éclaira :
- Moi, je ne te demande pas de me rejoindre. De devenir ma chose. Je voudrais simplement que tu puisses être à nouveau toi-même.Tu peux encore reprendre les rênes de ton existence. Il n'est pas trop tard !
- J'ai bien peur que si !
Le Joker s'était relevé. Il braquait un pistolet sur eux.
- L'innocence fauchée en plein vol. Je sais que tu détestes ça !
Batman se retourna vers lui, bouillant de rage. Le clown était hilare.
- C'est la différence entre toi et moi !
Il éclata de rire. Un rire aussi légendaire que lui. Il se mit à glousser lorsque le poignard se planta dans sa poitrine. Harley s'était jetée sur lui :
- Sale porc ! Tu m'as volée ma vie ! Tu m'as salie ! Tu m'as violée !
Le clown ricana.
- Je n'y peux rien, le violet, c'est ma couleur préférée !
Le poignard le frappa une deuxième fois, une troisième, puis une quatrième. Le Joker ne voulait pas mourir. Il continuait de rire, comme si son rire pouvait le préserver de la mort. Profitant d'un répit, il dévisagea Harley, son visage éclaboussé de rouge :
- Je ne t'ai jamais promis que tu serais heureuse, ma petite reine. Je t'ai promis que tu serais libre. Tu te souviens ? Je te l'ai toujours dit : tu peux douter de tout en ce monde, sauf de mon honnêteté envers toi.
Harley eut un instant d'hésitation que le sourire victorieux du clown fit avorter.
Une pluie de coups s'abattit sur lui. Harley déversa toute sa haine.
Le corps du Joker ne fut bientôt plus qu'une bouillie sanguinolente et le visage de Harleen Quinzel un tableau de larmes et de sang confondus.
Bruce lui retira son arme. La jeune fille le regarda. Son regard vide était terrifiant.
- Je sais ce que j'ai fait. Et je ne peux pas vivre avec ça. Je ne peux pas.
Bruce ne fut pas assez rapide. Harleen colla le pistolet du Joker sur sa tempe et pressa la détente sous ses yeux.
T’as aimé…ou pas
T’as tout lu, tout vu, tout entendu…ou pas
Peu importe, post un com et like la page pour dire que tu existes car ton avis est important pour moi, mais aussi pour le futur de ce blog, un gros merci d’avance !
11:32 | Lien permanent | Commentaires (2)
samedi, 20 octobre 2012
Entretien avec une Chauve-Souris
Harley pointait son fusil en direction du Manoir Wayne. Elle actionna la vision thermique. Elle repéra plusieurs corps inconscients à l'extérieur de l'édifice. Quelqu'un d'autre était déjà à l'oeuvre, marchant sur ses plates-bandes.
Elle déclencha le micro. Le salon était occupé par deux hommes en grande discussion. Dans le conduit de la cheminée, une troisième silhouette se tenait immobile, défiant le silence et la gravité. Harley jura. Le Joker l'avait laissée finalement partir seule en mission. Mais elle en avait payé le prix. Pas assez apparemment, puisque sa rivale se dressait à nouveau sur sa route. Une belle occasion de lui régler son compte.
Bruce et Alfred étaient assis chacun dans un fauteuil, face à l'âtre inactif en raison d'un automne clément.
Le majordome regardait son maître comme si c'était la dernière fois. A raison.
- J'imagine que je ne pourrai pas vous faire revenir sur votre décision.
Bruce noyait ses derniers relents de doutes et de regrets dans un verre de Whisky. Il avait rarement été aussi sombre. Du moins, sans son costume.
- S'il y a une personne sur cette terre qui a réussi à me faire changer d'avis sur bien des choses, c'est bien vous. Mais, non, cette fois, vous ne pourrez pas. Ma décision est définitive. Et j'ai tellement hâte, si vous saviez.
- Vous pourriez simplement prendre votre retraite.
- Non. C'est trop tard pour cela. Ce serait comme mettre un pansement sur une jambe de bois. La violence continuerait de me hanter, quoique je puisse faire. Elle fait partie de moi depuis bien trop longtemps. Je dois remonter à la source pour tout effacer.
- Je ne suis pas un expert du voyage dans le temps, mais si vous accomplissez le projet Innocence, Batman n'existera plus. Ni dans ce monde, ni dans l'autre. C'est une perspective plutôt effrayante.
Wayne but une rasade d'alcool.
- Moins effrayante que celle de me savoir condamné à l'incarner.
- Batman ! firent les deux espionnes en choeur.
-Bruce Wayne est Batman, fit Catwoman en s'humectant sensuellement les lèvres. Ca valait vraiment le déplacement !
Harley était beaucoup moins amusée par cette révélation. Et son expression en dit long sur son état d'âme. Elle tenait Wayne pour responsable de la mort de ses parents. Elle n'avait pas encore trouvé le courage de la reprocher au Joker, ni à elle-même. Alors Wayne l'esclavagiste, celui qui avait tué son père à la tâche, était tout désigné pour endosser ce crime innommable que sa consciente niait en bloc pour sa seule survie.
- Cette ville n'a aucun avenir sans le Chevalier Noir, poursuivit Alfred, ignorant que deux superbes créatures étaient suspendues à ses lèvres. Il est l'âme de Gotham.
Bruce avait dépassé le stade de la culpabilité. Toute tentative de ce côté-là était vaine, même venant de son plus fidèle ami.
- Je le pense aussi, Alfred. C'est pourquoi elle trouvera un autre Batman. Mais ce ne sera plus moi.
Harley avait tout enregistré. Le Joker serait aux anges. Maintenant, il était temps pour elle de se venger.
Elle plaça Catwoman dans sa lunette.
- D'abord la catin !
Les griffes de Catwoman lâchèrent prise. Elle sut intuitivement que le moment était venu pour elle de se faire connaître d'un tel homme. A moins que la perspective d'une crampe l'ait convaincue de quitter prématurément sa cachette. Elle tomba dans l'âtre, roula au sol et d'une brusque détente se projeta sur le milliardaire, renversant son fauteuil au sol. Le poids de la jeune femme sur lui n'était pas pour déplaire à Wayne. Ses courbes encore moins. C'est peut-être pour cela qu'il conserva autant de flegme et d'humour :
- Vous êtes en avance, Mère-Noël. Mais permettez-moi de vous dire que vous êtes très séduisante, cette année.
Jenna le dévisagea. Le mystère qui entourait cet homme était délectable. Cela faisait longtemps qu'elle n'avait pas ressenti une telle attraction. Elle posa une griffe sur les lèvres du playboy.
- Tu n'as pas été très sage, Bruce. Ce n'est pas bien de mentir à autant de personnes. Tu mérites une bonne punition.
Bien que la situation ait de quoi le surprendre, Wayne ne se sentait pas en danger. C'est pourquoi il conserva un ton léger en se tournant vers Alfred, perplexe :
- Otez-moi d'un doute, Alfred. Aucun bal masqué n'était prévu cette nuit ?
Le majordome demeurait lui aussi remarquablement stoïque.
- Je m'en souviendrais, Maître Bruce.
- Très bien.
L'instant d'après Wayne donnait des genoux dans le postérieur de la femme-chat. Celle ci plongea en avant et accompagnant le mouvement, effectua un joli salto avant de retomber sur ses pattes. Wayne redressa son siège, roula au sol et se saisissant d'un tisonnier, menaça la voleuse d'un ton moins enjôleur :
- Violation de domicile, agression...
- J'appelle la sécurité ? s'enquit Alfred.
Catwoman fit glisser ses doigts sur un miroir, ignorant le son déchirant du métal sur le verre.
- Inutile, je m'en suis occupé. Ils dorment tous comme des bébés, tombés sous le charme de...
Wayne se détendit.
-...Catwoman, la cambrioleuse de génie, la Reine de la Nuit, la femme-chat !
Elle sourit.
- Nous cultivons tous notre animalité, non ?
Wayne soupira.
- Vous avez tout entendu. Je n'ai donc plus aucun secret pour vous. Qu'est-ce que vous voulez ? De l'argent ?
- Oh, comme vous manquez d'imagination. Vous me décevez. Le Joker aussi a eu cette réaction.
Cette fois, Wayne ne put masquer son trouble :
- Le Joker ? Vous êtes de mèche avec le clown ?
- C'est un bien grand mot. Disons que nous sommes tous les deux très curieux à votre sujet. J'aimerais bien voir sa tête quand il saura que vous êtes Batman.
Wayne s'approcha et se fit à nouveau menaçant :
- Vous allez lui dire ?
Catwoman minaudait avec délectation.
- Je n'aurais pas besoin. Harley s'en chargera. Elle est sans doute là, quelque part, à nous observer.
- Ma parole, c'est un complot !
Catwoman se jeta contre lui.
- Mais pour tout te dire, ma chère chauve-souris, moi aussi j'ai été très vilaine. Je t'ai volé un autre de tes secrets. C'est la raison de ma présence. Je voulais éclaircir cet autre mystère que tu gardes précieusement dans ta tour.
Wayne saisit la jeune femme à la gorge sans la moindre délicatesse :
- Alors je n'ai plus aucune raison de me comporter en gentleman avec toi ! Que sais-tu au juste ? Et à part toi, qui le sait ?
Alfred se déplaça sur le côté dans l'espoir de s'emparer discrètement de l'autre tisonnier. Ce faisant, il se plaça dans la ligne de mire de Harley. La balle lui transperça mortellement le coeur et il s'écroula sur la table basse.
- Alfred, non !
Bruce se jeta vers son ami. Catwoman se jeta sur Bruce. La seconde balle fut pour elle. Bruce se mit à l'abri, traînant le corps de la jeune femme avec lui.
Elle retira son masque en grimaçant et lui caressa la joue :
- On dirait que j'ai consumé ma dernière vie. Je crois que moi aussi, je n'ai plus de secrets pour toi, beau justicier. Moi aussi je suis orpheline. Dans une autre vie, on aurait pu passer de bons moments ensemble.
Bastet la rappela auprès d'elle. Jenna n'avait pas beaucoup oeuvré en faveur du bien, mais un tel sacrifice lui vaudrait à coup sûr les faveurs de la déesse.
Wayne caressa les cheveux de la jeune femme tout en contemplant le corps inerte d'Alfred. Les larmes vinrent naturellement.
- Une autre vie. Oui. Et le plus tôt sera le mieux. Plus rien ne me retient, désormais.
Un coup de tisonnier interrompit ses pensées. Le Joker le dominait.
- Pas tout de suite, mon mignon. J'en ai pas encore fini avec toi.
Il se tourna vers la fenêtre.
- Harley, je sais que tu m'entends. Rejoins-moi immédiatement. Avant de faire plus de dégâts.
T’as aimé…ou pas
T’as tout lu, tout vu, tout entendu…ou pas
Peu importe, post un com et like la page pour dire que tu existes car ton avis est important pour moi, mais aussi pour le futur de ce blog, un gros merci d’avance !
21:41 | Lien permanent | Commentaires (0)
Violet Light-Love Story par Edward Maya
T’as aimé…ou pas
T’as tout lu, tout vu, tout entendu…ou pas
Peu importe, post un com et like la page pour dire que tu existes car ton avis est important pour moi, mais aussi pour le futur de ce blog, un gros merci d’avance !
21:19 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : violet light, love story, edward maya, féminité, félins, nature, animaux sauvages
vendredi, 19 octobre 2012
Al Pacino diablement convaincant !
Extrait du film L'Associé du Diable avec Al Pacino et Keanu Reeves
T’as aimé…ou pas
T’as tout lu, tout vu, tout entendu…ou pas
Peu importe, post un com et like la page pour dire que tu existes car ton avis est important pour moi, mais aussi pour le futur de ce blog, un gros merci d’avance !
11:39 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : l'associé du diable, al pacino, keanu reeves, dieu, le diable, satan, religion, spiritualité