samedi, 24 juin 2017
GUNNM [Livres/Critiques]
Gally est régulièrement représentée de manière contemplative comme ci-dessus pour annoncer un changement de chapitre, une manière de montrer qu'au-delà de son goût pour le combat, c'est aussi une héroïne émotive et cérébrale, qui prend du recul sur sa vie, qui se pose des questions, qui cherche sa place et le sens à bien des choses qu'elle ne saisit pas à commencer par de fugitifs souvenirs de son passé, invisibles au lecteur, ce qui accrut d'autant plus son mystère.
GUNNM
A l'heure où l'on connait déjà le casting et la date de sortie de l'adaptation ciné (20 juillet 2018), l'occasion m'est donnée de redécouvrir cette perle venue du Japon.
Comme beaucoup de gens de ma génération j'ai absorbé du Dragon Ball que ce soit à la télé via le Club Dorothée (le RDV du matin !) ou bien par la longue série de mangas.
Si j'ai découvert d'autres mangas par la suite ce fut essentiellement par les Anime, j'en ai lu pour ainsi dire aucun autre après l'oeuvre d'Akira Toriyama, sans doute parce qu'elle m'avait largement contenté à tous points de vue (c'est super épique, inventif, il y a de l'humour et des rebondissements).
A 20 ans, j'ai découvert GUNNM de Yukito Kishiro et ça été le coup de foudre ! J'ai littéralement dévoré les 9 volumes comme j'aurais regardé une putain de bonne série télé. J'ai totalement accroché au personnage, cette cyborg femme-enfant qui se découvre des aptitudes guerrières insoupçonnées dans un monde futuriste impitoyable où humains et cyborgs survivent comme ils peuvent. Au long des 9 volumes, elle croisera beaucoup de personnages en qui il lui sera de plus en plus difficile d'investir sa confiance et elle vivra plusieurs vies très riches d'aventures et de révélations. De mercenaire, elle sera championne de Motorball, puis musicienne avant de jouer les soldats hyper-équipés dans un désert post-apo lorgnant du côté de Mad Max 2.
L'héroïne prénommée Gally par son créateur et mentor, Ido, devient vite une machine à tuer, hyper badass, mais elle demeure touchante car elle se pose perpétuellement des questions sur ses vraies origines (Ido a retrouvé son buste dans une décharge) et revendique une sensibilité comme si sa puissance l'effrayait et l'obligeait à trouver un équilibre émotionnel pour mieux l'accepter.
Si le premier volume peut sembler très classique, il reste efficace et passionnant grâce à Gally évidemment dont on se plait à suivre l'évolution et à l'univers dépeint, particulièrement sombre, mais qui va trouver grâce à Gally une forme de lumière, d'espoir inattendu.
En français l'héroïne s'appelle Gally, aux USA elle se prénomme Alita et le manga : Battle Angel Alita.
Le combat final tire en longueur (il s'achève au volume 2) même si cela permet à Gally d'expérimenter plusieurs techniques dévastatrices, mais dans le même temps le méchant Makaku fait des monologues de méchant, frime et ricane comme un méchant.
Hormis cela pas grand-chose à lui reprocher dans ce premier volume.
La rencontre entre Gally et Yugo commence de manière très naïve, mais cela ne va pas durer...
Le volume 2 imbrique intelligemment plusieurs axes narratifs avec l'arrivée de plusieurs nouveaux personnages dont l'attachant Yugo, mais aussi le trouble Vector et le retour d'un adversaire de Gally qui va prendre plus d'ampleur. L'occasion d'ajouter beaucoup de profondeur et de nuances au tempérament de Gally et de définir un peu plus sa perception de l'existence. On sent que l'auteur veut s'éloigner d'un facile manichéisme en nous révélant les origines et ambitions de ses protagonistes qu'ils apparaissent bons ou méchants, et on apprécie.
Mais on demeure sur du drame, de la tragédie, de la noirceur. Et Gally de devoir trouver un moyen de rebondir.
Il est facile de voir dans le Motorball une déclinaison du Rollerball, dans les deux cas un sport violent destiné à libérer la colère et l'agressivité du peuple pour réduire voir supprimer les conflits.
L'introduction du Motorball dans le Volume 3, activité emblématique de la série, est à ce titre très judicieuse, puisqu'on découvre ce violent sport d'une manière indirecte par les yeux de Ido. Un sport qui va permettre à Gally d'exploiter encore plus son potentiel martial et à l'auteur de nous surprendre par sa capacité à multiplier les rebondissements et les scènes épiques.
Jashugan, un personnage ô combien charismatique doublé d'un adversaire à la hauteur de Gally.
Le volume 4 enfonce le clou (du spectacle) avec moult défis pour une Gally plus fière et déterminée que jamais à prouver sa valeur (et par-là même à se connaître).
Dans chaque volume, l'auteur utilise de temps à autre des termes plus techniques expliqués en bas de page, caractéristique qui s'amplifiera au long des volumes pour donner plus de crédibilité à son univers et témoigner d'un réel effort de recherche ou de connaissances tout simplement, mais cela a tendance à alourdir le récit par la suite et à casser le rythme.
Gally et Ido vivent dans la décharge comme la plupart des habitants, au milieu des ordures déversées par la cité inaccessible de Zalem au-dessus d'eux. Un concept repris à sa manière par Neil Blomkamp (District 9, Chappie) dans son Elysium, hélas de triste mémoire.
Le style de Kishiro a été une vraie claque pour moi à l'époque et je l'apprécie toujours. Je suis très exigeant au niveau du dessin et c'est sans doute ce qui m'a tenu longtemps éloigné de la plupart des autres mangas.
L'artiste, grâce à un style fin et très détaillé, capte immédiatement l'attention et fait la différence. Même s'il se permet quelques fois quelques postures et expressions typiquement manga, son oeuvre sort du lot avec une incroyable mise en scène alternant entre ralentis et impressions de vitesse très bien rendues au sein de chorégraphies complexes pour les combats (et ils sont nombreux !), conférant à Gunnm un aspect cinématographique évident.
Tellement évident qu'il était inévitable qu'Hollywood s'y intéresse (Ghost in The Shell y a eu droit récemment et Akira est en attente). James Cameron ayant acheté les droits (il s'en était déjà bien inspiré avec sa série Dark Angel), il devait en réaliser l'adaptation (ce qui constituait la perfection à mes yeux !), mais son agenda bloqué pour un paquet d'années à cause (ou grâce, on verra) d'Avatar, c'est finalement Robert Rodriguez qui va s'en charger, Cameron officiant en tant que producteur.
Une nouvelle à la fois rassurante et inquiétante, le réal ayant d'excellentes références à son actif (Desperado, Une Nuit en Enfer, et surtout Sin City), et d'autres beaucoup moins (Planète Terreur, Machete 1&2, Predators en tant que producteur); un homme capable donc du meilleur comme du pire, mais qui de base, peut sembler un bon choix s'il parvient à retrouver ce qui fait de lui un cinéaste de génie. Avec Cameron à ses côtés j'espère qu'on aura droit à quelque chose de respectueux et d'innovant à la fois, je n'ai aucune envie de voir un truc à la Transformers (Spielberg est producteur de cette série, donc ma crainte est légitime).
Cela dit le manga existe, c'est déjà très bien comme ça et je vais le savourer une seconde fois. Si l'adaptation est mauvaise, et bien cela ne changera rien à l'oeuvre originale, bien au contraire, et si elle est réussie, j'en serai très heureux, ce sera un bon complément et l'occasion d'attirer positivement un nouveau public sur cette oeuvre.
Un film d'animation reprenant les deux premiers volumes a vu le jour, hélas peu convaincant. Si le design général est très fidèle - quoique les personnages ont un aspect un peu trop noueux à mon goût - l'animation est paradoxalement très limité, certains changements dans le scénario sont trop importants et le tout manque clairement d'intensité.
Kishiro a poursuivi Gunnm au-delà de ces neuf premiers volumes sous le nom de Last Order, série à laquelle j'ai été incapable de vraiment m'intéresser la faute à un design modifié de Gally et parce qu'aussi et surtout j'avais été contenté par ce qui avait été fait, même si j'ai largement préféré le développement de l'histoire à sa finalité. Plus récemment, l'auteur a dévoilé les origines et l'enfance de son héroïne à travers une nouvelle série intitulée GUNNM : Mars Chronicles qui ne m'attire pas non plus malgré l'intérêt. Peut-être un jour...
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Commentaires
Comme toi, j'ai adoré Gunnm et je n'ai jamais vraiment ressenti le besoin de m'intéresser à Last Order ou Mars Chronicles. L'oeuvre originale se suffit à elle-même.
J'ai vu que le manga avait été réédité récemment. Une bonne chose pour ceux qui voudraient le découvrir aujourd'hui (de mon côté de conserve jalousement mon édition originale de 1995).
Écrit par : Lure | mercredi, 13 juin 2018
oui, les couvertures de l'originale sont très belles, les couleurs rendent bien.
Écrit par : Greg Armatory | mercredi, 13 juin 2018
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