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vendredi, 27 juin 2014

Ubisoft : du Prestige au Préjudice [Jeux Vidéo]

Ubisoft : du Prestige au Préjudice

(Remplacez Ubisoft par l'éditeur de votre choix)

Le logo d'Ubisoft de 1990 à 1995 : un zoli arc-en-ciel allant de paire avec l'insouciance

Il y a quelques années encore, quand je voyais le nom d'Ubisoft, quand j'entendais le nom d'Ubisoft, je ressentais instinctivement un certain plaisir que j'associais naturellement à son origine française, à la qualité de ses jeux, à son savoir-faire au service de l'imagination, au service du divertissement dans ce qu'il a de plus respectable et bien sûr à son respect des joueurs eux-mêmes. Véhiculant un modèle d'honnêteté et d'intégrité artistique, l'air de rien. Un rapport simple avec le public, sans tricherie, sans mensonge, ni manipulation. Une relation saine et simple.

Et peu importait à cette époque ma connaissance et mon expérience pratique des jeux estampillés Ubisoft. Si je n'y jouais pas c'était purement une question de goût et/ou un manque de curiosité. Des raisons qui ne remettaient nullement en cause les intentions de l'éditeur.

Et puis est arrivé Assassin's Creed II. Alors le "simple" intérêt s'est d'un seul coup transformé en véritable cri du coeur. Pourquoi ? Parce qu' Assassin's Creed II a réussi l'exploit d'atteindre mes espérances, mais aussi et surtout de les dépasser.

Chose qui deviendra par la suite rarissime voire inexistante (exception faite de Far Cry 3), la faute à un marketing assommant et à une fâcheuse tendance du joueur (mea culpa) à en devenir l'instrument. Heureusement grâce à l'effet Watchdogs et l'édition de l'E3 qui lui a été associée, j'ai été grandement vacciné, je suis sur la voie de la guérison. Le virus se changeant en remède.  Belle ironie du sort, non ?

Mais paradoxalement à la sortie triomphale de Assassin's Creed II (et à son entrée directe et incontestée depuis dans mon top 10) il est important de constater que c'est à partir de ce moment même que certains symptômes, devenus depuis la marque de fabrique de l'éditeur, vont apparaître en filigrane. Une certaine politique, une stratégie commerciale dont le fer de lance sera rien moins que la vente systématique de contenu additionnel, ces fameux DLC censés prolonger l'intérêt du jeu. Sauf que déjà dans le cas d' Assassin's Creed II, les DLC en question sont rien moins que des missions retirées du déroulement initial et avec elles rien moins qu'une partie de Venise, l'une des villes principales du jeu. Ca fait mal au porte-monnaie, et ça fait mal tout court. Malgré ma passion indéfectible pour cet opus, j'ai toujours réussi à résister à la tentation d'acquérir les dites extensions. Je n'y arrive pas toujours malgré mes convictions, mais j'apprécie d'autant plus quand cela se produit.

Alors que je m'extasiais sur le jeu (qui allait avoir la primeur de me donner mes premiers 50 succès),  le ver était déjà dans le fruit sans que j'en prenne conscience. Vous pensez. A cette époque, je voyais encore cette industrie avec des yeux d'enfant, convaincu qu'elle oeuvrait avant tout pour me contenter, sans aucune arrière pensée. Et j'étais évidemment loin d'être le seul dans ce cas. Et la soif de pouvoir et d'argent d'Ubisoft sous l'apparence fallacieuse de la générosité et de la bienveillance, tel un élixir, que dis-je, un baume, un nectar, commença à se répandre dans le coeur et les esprits des joueurs aveuglés, attirés comme des papillons sur la flamme d'une bougie dans la nuit, avec les effets d'un poison insidieux, d'une drogue maligne.

A partir de là donc s'est mise en branle une machinerie impitoyable, de moins en moins subtile dans sa manière de faire, mais d'une invariable efficacité malheureusement. Pourtant des signes avant-coureurs, il y en a eu, et ce, à tous les niveaux. Il fallait juste lire entre les lignes, se pencher davantage sur les rouages et ceux qui les constituaient. Car il n'y a pas que nous, les joueurs, qui avons été victimes des pratiques pour le moins condamnables d'Ubisoft et de sa logique mercantile. Il y a eu d'autres victimes collatérales dans son aveuglante ascension.

Le logo depuis 2003 : une spirale infernale, un beau cercle vicieux !

Quand on commence à enquêter, deux noms reviennent alors plus que les autres. Deux hommes broyés de l'intérieur par cette machine et qui ont eu le bon réflexe de s'indigner, d'interpeller l'opinion publique chacun à sa façon.

En tant que directeur artistique chez Ubisoft, Patrick Désilets a incarné Assassin's Creed durant la jeunesse de la série. C'est même son créateur. J'ai donc une certaine admiration pour le bonhomme. Son départ en 2010 (le fameux désaccord artistique) qui s'est - comble du comble - suivi d'un licenciement après le rachat par Ubisoft de THQ Montréal, studio au sein duquel oeuvrait Patrice. Ledit licenciement qui a été médiatisé étant donné les conditions dans lesquelles il a eu lieu et le démenti du studio quant à ses responsabilités.

Jérémie Lefebvre, lui, est l'un des co-créateurs d'Ubi Free. Contrairement à ce qu'on pourrait penser, Ubi Free n'est pas un réseau social destiné à la communauté des joueurs. Non. Ca été le premier syndicat virtuel, à destination des employés mêmes d'Ubisoft. Une sonnette d'alarme pour témoigner des méthodes d'administration de l'entreprise. C'était en 98-99.  Par la suite, Jérémie a publié un livre reflétant cette expérience : "La Société de Consolation - Chronique d'une génération ensorcelée.

Pourquoi taper sur Ubisoft alors que ce n'est pas un cas unique, dans l'industrie du jeu vidéo comme dans l'industrie tout court ? C'est personnel, forcément. Parce que la désillusion est toujours à la base d'un tel processus. J'avais un rapport sain et simple moi aussi avec Ubi. C'est un très bon exemple en soi.

La stratégie de Ubisoft peut donc se résumer ainsi :

- Créer l'envie et le besoin par un marketing savamment orchestré, arme de destruction massive de toute objectivité

- Frustrer le joueur par différents procédés :

- Non réalisation des promesses :

- Technique défaillante

- Contenu bridé

- De cette frustration, il est donc facile de recrée de l'envie et du besoin en proposant du nouveau contenu qui amènera fatalement de nouvelles dépenses qui paraîtrons justifiées aux yeux des joueurs, qui consciemment ou non, ne feront par là même qu'encourager et valider la stratégie. 

Ce n'est pas une nouveauté, on retrouve ça partout. C'est le commerce. Mais comme dans tout commerce, le consommateur a sa part de responsabilité.

Ce n'est pas notre faute si Ubisoft a changé d'esprit. C'est notre faute si Ubisoft a poursuivi sur la même voie. La parade ? Le boycott, afin que la frustration et les illusions cessent d'être la principale source de profits des gros éditeurs.

L'E3 n'est là que pour faire le plein de précommandes. Watchdogs l'a prouvé magistralement. Les teasers léchés et les interviews saturées de superlatifs et d'auto-suffisance ne me font plus rêver. Je vois tout en transparence. Je vois les tonnes de DLC qui sont préparés en amont de la sortie du jeu et qu'on nous vendra avant même la sortie du jeu lui-même, je vois les bugs inexcusables qui ne seront jamais corrigés au profit de l'exploitation de ces mêmes DLC, je vois les obligations déguisées en invitations à se connecter ici et là, à partager, à réseauter faut de quoi on accèdera pas à tel contenu solo intégré pourtant de base.

Je vois la dictature derrière l'apparente démocratie.

Une belle métaphore de notre politique nationale, au final.

 

MAJ : comme pour venir enrichir mon propos, deux constats : sachez que si vous avez installé les DLC de l'édition Game Of The Year de Batman Arkham City et que vous vous êtes séparé du jeu, ils ne fonctionneront pas avec l'édition de base, bien sûr cela n'est indiqué nulle part donc on se retrouve devant le fait accompli. 

Et puis GTA V, dont le multi est devenu la priorité de Rockstar, accumule les DLC gratuits (utiles ?), mais aussi les bugs dans le solo ! Les MAJ ça rajoute des trucs ou ça en enlève ? Parce qu'entre les distributeurs de boissons qui ne fonctionnent plus, les bateaux que l'on ne peut pas sauvegarder et les évènements aléatoires aux abonnés absents, on peut se poser la question. Et on doit être enthousiaste à l'idée de passer sur la dernière génération de consoles ???

 

En complément :

Le Syndrome Watch Dogs

Bilan du Jeu Vidéo Janvier 2014

Facebook, Oculus Rift, Kickstarter et Internet

 

 

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