mardi, 25 septembre 2012
Naissance d'un Monstre [Fanfic Far Cry 3]
Froids. Les barreaux étaient froids. Malgré la chaleur humide omniprésente, ces longs cylindres de métal restaient glacés au contact. Il n’aimait pas les toucher : ils lui rappelaient le piège. Ce même piège dans lequel il était bêtement tombé, ou plutôt dans lequel sa faim l’avait poussé. Son bras l’élançait encore, et la longue strie aux contours boursouflés lui zébrant l’avant-bras continuait de le faire souffrir. Tentant d’apaiser la douleur, il passa sa langue râpeuse contre les bords gonflés de la plaie, arrachant quelques poils au passage. Alors qu’il ravalait sa salive, il vit que le monstre était revenu. Il se dandinait, là, devant lui, à l’observer de son regard angoissant.
C’était lui qui fixait les règles ici. Il l’avait appris à ses dépends. La bête agita alors quelque chose devant les barreaux de la cage. C’était une mangue. Juteuse et charnue. Bien mûre. Instantanément, le prisonnier sentit son estomac se mettre à gronder. Il avait faim. Mais c’était encore un piège. Cependant, pas plus que la fois précédente il n’avait le choix. Résigné, le macaque tendit la main, se livrant à toute la cruauté de son bourreau.
« Bien… C’est bien… ». Calmement, Earnhardt approcha le fruit, alors que le singe le suppliait de le lui remettre. Il était en confiance : cela allait bien se passer. Il laissa les petits doigts terreux du primate tâter la chair molle de la mangue avant de lui permettre de s’en saisir. Alors que l’animal ramenait lentement son butin à l’intérieur de sa prison de fer blanc, Alec attrapa le poignet du macaque et, d’un geste vif, y planta sa seringue. Alors qu’il en vidait le contenu dans les veines de son cobaye, il se concentra sur son objectif et ses résultats futurs, sourd aux hurlements sonores de celui qu’il était en train de torturer. Une fois la seringue vidée, le docteur lâcha le bras du primate qui se plaqua à l’autre bout de sa cage sans cesser de le fixer de ses yeux furieux. « Ca va t’aider… murmura Earnhardt d’un ton se voulant rassurant ; Ca va t’aider à cicatriser. Tu vas aller mieux… ».
Pendant une petite minute, il observa son sujet de test sans qu’il ne se passe quoi que ce soit. Pas de réactions allergiques, pas d’effets secondaires notables. Le singe se contentait de se frictionner le bras à l’emplacement de la piqûre, apparemment agacé par le léger chatouillis de l’injection. Puis tout changea très vite. Les grattements se firent plus rapides. Plus violents. Tétanisé, Earnhardt vit son cobaye ouvrir grand la gueule et enfoncer ses canines pointues dans sa propre chair, la déchirant à grand renforts de morsures jusqu’à en faire couler le sang. « Non ! Non ! Arrête ! ». Mais l’animal ne l’écoutait pas. Ne le comprenait pas. Tout ce qui comptait, c’était cette douleur, cette brûlure intense qui parcourait à présent chaque centimètre de son corps. Un poison intérieur, dont il ne pouvait plus se débarrasser autrement qu’en le laissant agir encore quelques minutes. Jusqu’à ce qu’il ait raison de son système nerveux.
Paniqué, Alec attrapa son trousseau de clés, s’affairant sur le cadenas qui maintenait la cage fermée. Il n’allait pas mourir. Il ne fallait pas qu’il meure ! Une giclée d’hémoglobine chaude lui fouetta le visage, maculant sa blouse de laboratoire jusque là uniquement tâchée de peinture et de chlorophylle. Quant enfin le cadenas s’ouvrit, la porte de la prison improvisée claqua brutalement alors que le singe bondissait hors de sa geôle, filant à travers sa serre. « Non ! Non ! ».
Mais c’était trop tard : le prisonnier escaladait la façade de la petite maison horticole, barbouillant de son sang les planches de bois d’un blanc immaculé. Perché sur le toit de verre, il continua à s’arracher la peau, mettant finalement l’os à nu. Sa vision se mit à se brouiller alors qu’il succombait à l’hémorragie qu’il avait lui-même provoquée. Perdant le contrôle de ses membres, le singe bascula tête la première et s’écrasa au beau milieu d’une série de pots en terre cuite, servant à la plantation. Dès lors que son crâne eut heurté l’un des récipients, il s’immobilisa immédiatement. Observant la longue rigole rougeâtre qui balafrait à présent le mur est de sa demeure, Earnhardt se mordit cruellement les lèvres. Il l’avait refait. Encore une fois.
Balayant d’un revers de la main son microscope, le docteur s’assit en soupirant bruyamment, les larmes lui montant presque aux yeux. Il n’avait pas voulu sa mort. Au contraire. Et pourtant… sa malédiction l’avait donc poursuivie jusqu’ici. Jusqu’à ce refuge où il pensait pourtant les avoir semés. Eux, ceux qui avaient osé le qualifier ainsi. Le traiter de monstre. Rien n’avait jamais marché comme cela aurait du. Rien à part ce rat. Ce fichu rat récupéré alors qu’il n’était qu’un vulgaire boy-scout. Un animal que les autres avaient voulu glisser dans la marmite du rata prévu pour le soir de veillée, acte auquel il n’avait pu se résoudre. Au lieu de cela, il avait construit méticuleusement une attelle sur mesure pour la bestiole et l’avait laissée repartir vivante, avant de subir les brimades de ses camarades. Les coups et les moqueries n’avaient rien changé : son destin lui était brutalement apparu à travers cet acte des plus simplistes. C’était écrit : il serait médecin.
Dans un premier temps, il ya avait eu les animaux. Les chats errants, les chiens abandonnés par leur maîtres. Autant de tombes qu’il avait fallu creuser à la va-vite à l’arrière du jardin, de nuit, afin que ses parents ne s’en rendent pas compte. A chaque fois, alors que tout allait pour le mieux, un détail changeait la donne. Définitivement. Une couture qui craque, une blessure qui refuse de cesser de saigner… Pas moyen d’en sauver un seul. Mais les résultats aux examens étaient là, et il décrocha une bourse pour suivre ses études de médecine. Pendant un temps, il n’avait plus eu à s’occuper de cadavres autres que ceux qu’on lui demandait de disséquer. En parallèle, il s’était trouvé comme autre passion la botanique, persuadé que les deux disciplines n’étaient en fait que les deux faces d’une seule et même pièce. Les plantes cachaient en elle des trésors pour l’humanité. La pénicilline, la capucine… Autant de découvertes de valeur inestimable, toutes liées au monde végétal. Planchant nuit et jour sur différents mélanges, Earnhardt était persuadé qu’il parviendrait une bonne fois pour toutes à vaincre la douleur. Et cette découverte là ferait sa richesse et sa gloire.
Cela avait marché. Pendant un temps du moins. Après venaient les effets secondaires, plus ou moins catastrophiques. Lorsqu’il eut son premier cobaye humain, Alec échappa de peu à la prison pour meurtre et la communauté scientifique l’aurait probablement radié de son ordre si les militaires ne s’étaient pas interposés. Car stopper la douleur, ne serais-ce que pour un temps, s’avérait crucial à leurs yeux. Alors Earnhardt s’était mis à travailler pour l’armée, produisant diverses substances annihilant les réactions nerveuses à court terme. Sous leurs effets, les soldats continuaient à courir même avec une balle dans la jambe ou un moignon à la place du bras. Ils vivaient assez longtemps pour gagner la bataille et décéder ensuite, de crises cardiaques qu’on imputait au stress trop élevé généré par les combats. Pendant des années, le docteur avait poursuivit ses travaux, observant les hommes pour lesquels il travaillait causer la mort et la destruction sous ses formes les plus cataclysmiques. Eux ne posaient pas de questions et il faisait de même, persuadé de toucher au but. Les plantes étaient intéressantes, certes, mais elles étaient trop éloignées des humains et animaux en général. Il fallait donc chercher ailleurs. Dans un groupe biologique plus proche. Mais avant qu’il n’en ait le temps, ses détracteurs l’avaient retrouvé.
Il lui avait fallu fuir. Très loin. Quitter le pays sous une fausse identité, vivre comme un fugitif dont le visage était dans tous les journaux. Masquer ses traits afin d’éviter d’être reconnu. Il était finalement parti pour l’Asie, avec une destination toute particulière en tête. Une île, ou plutôt un archipel, sur lequel poussait la fameuse plante qui avait servi de base à ses recherches, et qu’il se procurait à prix d’or auprès d’un marchand javanais des Keys. Une fois sur place, il avait cru pouvoir démarrer une nouvelle vie, loin de son passé et de ses démons. Mais, de toute évidence, il s’était trompé.
Le pinceau lui collait entre les doigts, alors qu’il passait une énième couche de peinture blanche sur sa façade, de sorte à cacher le sang en train de coaguler. Enterrer le macaque lui avait rappelé douloureusement son enfance, au point qu’il n’avait pu s’empêcher de déposer une petite gerbes de fougères sur la terre qu’il venait de retourner, comme pour tenter de se faire pardonner. Le pardon. C’était la clé. Il fallait qu’il évacue ce qu’il avait fait, les horreurs dont il était jusque là inconscient. Il fallait qu’il vienne en aide à quelqu’un. Alors il serait enfin libéré de sa malédiction. Mais qui ? Qui pourrait-il bien aider ? Les rakiats, ceux mêmes qui l’avaient aidé à bâtir sa demeure ? Ils étaient amicaux, certes, mais qu’aurait-il pu leur apprendre ? Ils connaissaient mieux la jungle que lui, et ne ferait que les gêner. Non, il lui fallait quelqu’un d’autre. Mais pas un animal cette fois : un autre ami. Un autre cobaye. Le pinceau gluant lui glissa des mains pour tomber par terre. Alors qu’il descendait de son escabeau en pestant, Earnhardt aperçut soudain quelque chose, au sol, jouxtant son outil destiné à la peinture.
Le capuchon élancé était d’un violet éclatant, presque aussi chatoyant que le plumage des oiseaux tropicaux venant faire leur nid dans les arbres longeant sa serre. Le pied robuste, s’avérait droit et charnu mais d’une plus pâle. Le soulevant, Earnhardt l’observa avec attention, alors qu’un sourire se dessinait sur ses traits fatigués par l’âge. Il l’avait enfin. Sa réponse. Son trésor. Son fameux chaînon manquant entre la plante et l’homme. Il l’avaiit eu si longtemps sous le nez qu’il se mit à pleurer. Cette chose, qui décrivait également les tests de l’arme la plus terrible qu’avaient utilisé les militaires en sa présence. Cet engin de mort, dont la seule utilisation suffisait à plonger le monde dans le chaos et la folie la plus totale. C’était la clé. C’était un champignon.
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