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mardi, 14 mars 2017

Le Mystère de la Chambre Jaune [Livres]

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Edgar Poe rencontre Conan Doyle

Découvert, dévoré devrais-je dire, durant mes années collège où je lisais comme je respirais, Le Mystère de la Chambre Jaune de Gaston Leroux a représenté pour moi l'un de mes meilleurs souvenirs littéraires.

Lisant peu voire pas de policier à l'époque, j'ai été pourtant complètement passionné par cette enquête en forme de véritable casse-tête digne de Sherlock Holmes. On retrouve d'ailleurs à intervalles réguliers une ambiance proche de celle de l'oeuvre de Conan Doyle notamment du côté du Chien des Baskerville : la campagne pour cadre, un animal nocturne inquiétant (ici la Bête à Bon Dieu), un rapport entre le héros/enquêteur Rouletabille et son complice/narrateur rappelant beaucoup la relation Holmes/Watson et une forme de thriller glaçant parfois à la lisière du fantastique.

Ayant redécouvert depuis peu le plaisir de la lecture, je me faisais une joie de replonger dans ce mystère où le célèbre reporter tente d'expliquer l'inexplicable plus d'une fois par la seule force de la raison à commencer par la disparition de l'agresseur de Mlle Stangerson, fille d'un illustre scientifique, juste après les faits alors que toutes les issues de la fameuse chambre étaient closes.

Si la lecture en elle-même a été loin d'être désagréable, tous les ingrédients sont là pour nous happer jusqu'au bout, j'avoue avoir été quand même déçu de l'effet qu'elle a eu sur moi ou plus exactement de l'absence d'effet.

Je me souvenais de pas mal de choses, de l'identité de l'assassin, certes, mais malgré cela j'étais convaincu que le livre allait me réserver des surprises oubliées ou me redonner le frisson pour une raison ou pour une autre.

Il faut croire que l'histoire m'avait vraiment plu car moi qui n'ai pas beaucoup de mémoire j'ai quasiment tout retenu. La première lecture est parfois la meilleure surtout lorsqu'il s'agit d'une énigme dont on découvre progressivement toute l'originalité et les subtilités. Et dans ce mystère-là il y en a et pas qu'un peu.

Mais ceci étant, ce n'est pas vraiment cela qui m'a gêné. Car me faisant naturellement un film dans ma tête - la dernière adaptation ne m'ayant guère comblé notamment à cause du casting et du ton trop léger - j'ai fini par prendre plus de plaisir à imaginer les personnages prendre une nouvelle fois vie sur grand écran en un mélange réussi de blockbuster américain et de drame français.

Premier constat qui m'a chiffonné, il ne se passe réellement pas grand-chose si on excepte les épisodes presque successifs de la galerie inexplicable et du cadavre incroyable, les cinquante dernières pages servant de réponse et de conclusion (ouverte). Mais encore une fois, ces deux évènements étant suffisamment bien appuyés par leur caractère sensationnel voire surnaturel, ils pourront sans nul doute contenter la soif de sensations d'une première lecture.

Et j'ai eu beau connaître les coulisses et les révélations de cet imbroglio, trop de choses à la lumière de cette nouvelle lecture m'ont paru un tantinet tirées par les cheveux, voire inexpliquées comme le premier coup de feu qui n'a été entendu par personne alors que le Professeur Stangerson n'est pas  si loin de sa fille de surcroît. Gaston Leroux détaille tout, mais oublie complètement ce détail. C'est peut-être ça le plus incroyable dans l'histoire !

J'ai aussi beaucoup regretté que Ballmeyer qui soi-disant est un grand criminel digne d'Arsène Lupin (en moins gentleman) ne soit pas évoqué plus tôt dans le roman, voire dès le début par le biais d'un prologue ce qui aurait pu provoquer un impact émotionnel beaucoup plus considérable sur le lecteur quant à sa véritable identité.

Puisque les films ne se déclinent plus qu'en trilogie (au minimum) on pourrait même envisager un premier film autour d'une première confrontation entre Rouletabille et Ballmeyer, Le mystère de la Chambre Jaune pour le second opus et Le parfum de la Dame en Noir pour clore le tout.

Et de choisir enfin un jeune acteur pour incarner Rouletabille serait une riche idée puisqu'il est censé avoir dix-huit ans et que son âge, loin d'être anecdotique, est une donnée essentielle étant donné les révélations qui seront faites plus tard sur les origines du reporter et ses liens avec d'autres personnages. Et de choisir une actrice américaine pour donner corps à Mathilde Stangerson, capable de s'exprimer en français et capable d'émouvoir autant par sa beauté que par la tragédie dont elle est le jouet serait également profitable à une future adaptation.

Oui malgré le génie de l'auteur et son formidable concept (à découvrir de toute urgence en dépit de cette critique bien trop assassine, je le déplore) je suis resté sur ma faim. Mais comme d'habitude mon imagination elle s'est envolée, nourrie comme de coutume par mes frustrations. De là à dire que mon imagination sabote délibérément le plaisir inhérent à chaque oeuvre pour mieux en tirer parti, il n'y a qu'un pas...

 

 

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